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30/06/2022 | FRANCE | N°22/00101

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 30 juin 2022, 22/00101


SD/LL









[V] [B]



[W] [I] épouse [B]



[R] [U]



[Z] [T] épouse [U]



[P] [N]



[G] [K] épouse [N]



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SAS DOMUSVI



SAS LES VERGERS DE LA COUPEE



SAS GDP VENDOME IMMOBILIER

































































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Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON



2ème Chambre Civile



ARRÊT DU 30 JUIN 2022



N° RG 22/00101 - N° Portalis DBVF-V-B7G-F3V3



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge de la mise en état du 13 décembre 2021,

rendue par le tribunal judiciaire de Mâcon - RG : 20/00509









APPELAN...

SD/LL

[V] [B]

[W] [I] épouse [B]

[R] [U]

[Z] [T] épouse [U]

[P] [N]

[G] [K] épouse [N]

C/

SAS DOMUSVI

SAS LES VERGERS DE LA COUPEE

SAS GDP VENDOME IMMOBILIER

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

N° RG 22/00101 - N° Portalis DBVF-V-B7G-F3V3

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Juge de la mise en état du 13 décembre 2021,

rendue par le tribunal judiciaire de Mâcon - RG : 20/00509

APPELANTS :

Monsieur [V] [B]

né le 25 Octobre 1950 à [Localité 13] (01)

domicilié :

[Adresse 8]

[Localité 1]

Madame [W] [I] épouse [B]

née le 24 Mai 1948 à [Localité 17] (94)

domiciliée :

[Adresse 8]

[Localité 1]

Monsieur [R] [U]

né le 04 Février 1950 à [Localité 15] (21)

domicilié :

[Adresse 4]

[Localité 5]

Madame [Z] [T] épouse [U]

née le 28 Septembre 1954 à EL BIAR (ALGERIE)

domiciliée :

[Adresse 4]

[Localité 5]

Monsieur [P] [N]

né le 22 Février 1950 à [Localité 12] (25)

domicilié :

[Adresse 2]

[Localité 6]

Madame [G] [K] épouse [N]

née le 12 Août 1950 à [Localité 16] (59)

domiciliée :

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentés par Me Cécile RENEVEY, membre de la SELARL ANDRE DUCREUX RENEVEY BERNARDOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 2

assistés de Me Mickaël COHEN, membre de la SELARLU CABINET COHEN, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES :

SAS DOMUSVI, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 7]

[Localité 11]

SAS LES VERGERS DE LA COUPEE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 3]

[Localité 14]

représentées par Me Christophe CHATRIOT, membre de la SCP MAJNONI D'INTIGNANO-BUHAGIAR-JEANNIARD-PIZZOLATO-CHATRIOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 73

assistées de Me Marine PARMENTIER, membre de la SELARL WOOG & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

SAS GDP VENDOME IMMOBILIER, prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité au siège :

[Adresse 9]

[Localité 10]

représentée par Me Clémence MATHIEU, membre de la SELAS ADIDA & ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 38

assistée de Me Florence DUBOSCQ, membre de la SELARL PARETO AVOCATS avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 avril 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, Président,

Sophie DUMURGIER, Conseiller, ayant fait le rapport sur désignation du Président,

Sophie BAILLY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 30 Juin 2022,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 22 décembre 2006, la société GDP Vendôme a, par l'intermédiaire de la société GDP Vendôme Promotion, sa filiale, acquis un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de 75 lits, implanté à [Localité 14], édifié en 1988.

A partir de la fin décembre 2006, la société GDP Vendôme Promotion, dont l'objectif était de revendre l'établissement par lots à des investisseurs privés ou des particuliers à des fins de défiscalisation, a régularisé avec divers acquéreurs des contrats de réservation de lots.

C'est ainsi que, par actes des 27 mars, 6 avril et 5 septembre 2007, M. et Mme [P] [N], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [V] [B] ont acquis des lots de l'ensemble immobilier et, concomitamment aux actes de vente, chacun des acquéreurs a donné les biens qu'il a achetés à bail commercial à la société Les Vergers de la Coupée, pour une durée de neuf ans.

Un nouvel EHPAD a été construit sur la commune de [Localité 14] et l'intégralité des lits pour lesquels la société Les Vergers de la Coupée bénéficiait d'une autorisation d'exploitation a été transférée vers ce nouvel établissement à compter du mois de décembre 2017.

Ayant découvert l'existence d'une convention tripartite pluriannuelle signée en 2005 entre le gérant de la société Les Vergers de la Coupée, le Préfet de Saône et Loire et le Président du Conseil Général de Saône et Loire, prévoyant, d'une part, l'engagement du preneur à restructurer et adapter les locaux en aménageant toutes les chambres pour qu'elles comportent un équipement sanitaire complet et une accessibilité aux personnes à mobilité réduite et en créant des espaces d'animation, la mise en conformité des locaux techniques et des locaux destinés au personnel, et, d'autre part, en raison de l'ampleur des travaux à réaliser, l'engagement du promoteur à solliciter l'autorisation de transférer une capacité de 80 lits sur le site de la Teppe à Charnay les Mâcon, et exposant n'avoir jamais été alertés sur la nécessité de réaliser de tels travaux au sein de la résidence, les consorts [N], [U] et [B] ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Mâcon d'une demande d'expertise à laquelle il a été fait droit par ordonnance du 11 octobre 2016, désignant M. [E] en qualité d'expert.

L'expert a déposé son rapport le 17 avril 2019 évaluant à 6 375 000 euros le coût des travaux de restructuration.

Entre temps, la société Les Vergers de la coupée a donné congé à l'ensemble de ses bailleurs dans la perspective du transfert de son activité vers les nouveaux locaux.

Elle a ainsi délivré congé à M. et Mme [P] [N] pour le 26 mars 2016, à M. et Mme [R] [U] pour le 5 avril 2016, et à M. et Mme [V] [B] pour le 4 septembre 2016.

Reprochant à la société GDP Vendôme, à la société DOMUSVI et à la société Les Vergers de la Coupée d'avoir gravement manqué à leur obligation d'information en s'abstenant, d'une part, de les informer sur la nécessité de réaliser des travaux de mise aux normes et, d'autre part, de la possibilité pour l'exploitant seul, sans nécessité d'en informer les bailleurs ou d'obtenir leur accord préalable, de demander à l'ARS le transfert des autorisations d'exploiter vers une autre résidence, M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] les ont fait assigner devant le Tribunal judiciaire de Mâcon, par actes des 2 juillet 2020 et 19 janvier 2021, afin d'engager leur responsabilité et de les voir condamner à les indemniser de leur perte de chance de ne pas signer le contrat de vente, évaluée à 70 % de leur investissement.

Par conclusions d'incident notifiées le 30 juin 2021, les sociétés Les Vergers de la Coupée et Domusvi, à laquelle la SAS GDP Vendôme a apporté ses titres, ont demandé au juge de la mise en état de :

- se déclarer incompétent au profit du Tribunal administratif de Dijon concernant l'appréciation de l'inexécution alléguée de travaux répertoriés dans la convention tripartite de 2005 et la perte de chance dont M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] se prévalent,

- juger prescrites les demandes formulées au titre de la perte de chance par M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N], ainsi que toutes les demandes accessoires en découlant et par conséquent les rejeter,

- juger irrecevables M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] pour défaut de qualité à agir à leur encontre concernant l'existence et l'inexécution alléguée de travaux répertoriés dans la convention tripartite de 2005 et de la perte de chance dont ils se prévalent, par conséquent rejeter toutes les demandes en découlant,

- juger irrecevables M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] pour défaut d'intérêt à agir à leur encontre au titre de (i) l'existence et l'inexécution alléguée de travaux répertoriés dans la convention tripartite de 2005 et (ii) de l'absence d'information concernant le transfert d'autorisation par l'ARS d'exploitation d'un EHPAD ainsi que (iii) de la perte de chance dont ils se prévalent, par conséquent rejeter toutes les demandes en découlant,

En tout état de cause,

- rejeter l'ensemble des demandes fins et prétentions de M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N],

- condamner in solidum M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] à payer à la société Les Vergers de la Coupée la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamner M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] aux entiers dépens.

Par conclusions d'incident notifiées le 23 septembre 2021, la société GDP Vendôme Immobilier a demandé au juge de la mise en état de :

- juger que les demandeurs ne justifient pas d'un intérêt à agir à son encontre,

- juger que les demandeurs sont prescrits en leur action,

En conséquence,

- les déclarer irrecevables en l'ensemble de leurs demandes, fins, moyens et conclusions,

En tout état de cause,

- condamner chacun des investisseurs à lui régler la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre la charge des dépens.

Par conclusions notifiées le 20 septembre 2021, M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] ont demandé à la juridiction de :

- dire et juger que les sociétés GDP Vendôme Immobilier, DOMUSVI et Les Vergers de la Coupée engagent leur responsabilité à leur égard,

- en conséquence, condamner in solidum les sociétés GDP Vendôme Immobilier, DOMUSVI et Les Vergers de la Coupée à leur payer les sommes suivantes :

' pour M. et Mme [U] : 565 288,00 euros HT X 70 % = 395 701,60 euros,

' pour M. et Mme [B] : 552 761,48 euros HT X 70 % = 386 935.13 euros,

' pour M. et Mme [N] : 556 157,11 euros HT X 70 % = 389 519,97 euros,

avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,

- débouter les sociétés GDP Vendôme Immobilier, DOMUSVI et Les Vergers de la Coupée de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel et sans caution,

- condamner in solidum les sociétés GDP Vendôme Immobilier, DOMUSVI et Les Vergers de la Coupée à leur payer à chacun une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens d'instance.

Par ordonnance rendue le 13 décembre 2021, le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mâcon a :

- rejeté l'exception d'incompétence au profit du tribunal administratif,

- dit irrecevables comme prescrites l'intégralité des demandes de M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] au titre d'un manquement au devoir d'information,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum M. et Mme [V] [B], M. et Mme [R] [U] et M. et Mme [P] [N] aux entiers dépens de l'instance.

M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] ont relevé appel de cette ordonnance par déclaration reçue au greffe le 24 janvier 2022, limité aux chefs de dispositif de la décision ayant déclaré irrecevables comme prescrites l'intégralité de leurs demandes au titre d'un manquement au devoir d'information et les ayant condamnés aux entiers dépens.

Au terme de conclusions notifiées le 5 avril 2022, les appelants demandent à la Cour de :

Vu l'article 552 du code de procédure civile,

Vu les articles 2224 et 2241 du code civil,

Vu les dispositions des articles 1134 et 1147 du code civil (articles 1231 et suivants nouveaux du code civil),

- juger recevables les appels formés qu'ils ont formés à l'encontre de l'ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mâcon en date du 13 décembre 2021,

- confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mâcon rendue le 13 décembre 2021 en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence au profit du Tribunal administratif,

- infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mâcon rendue le 13 décembre 2021 pour le surplus,

Statuant à nouveau,

- juger recevables et bien fondées leurs demandes,

- condamner in solidum les sociétés GDP Vendôme Immobilier, DOMUSVI et Les Vergers de la Coupée à leur payer les sommes suivantes :

' pour M. et Mme [U] : 565 288,00 euros HT X 70 % = 395 701,60 euros,

' pour M. et Mme [B] : 552 761,48 euros HT X 70 % = 386 935,13 euros,

' pour M. et Mme [N] : 556 157,11 euros HT X 70 % = 389 519,97 euros,

avec intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,

- débouter les sociétés GDP Vendôme Immobilier, DOMUSVI et Les Vergers de la Coupée de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner in solidum les sociétés GDP Vendôme Immobilier, DOMUSVI et Les Vergers de la Coupée à payer à chacun des appelants une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens d'instance.

Par conclusions n°2 notifiées le 15 avril 2022, la SAS Les Vergers de la coupée et la société DOMUSVI demandent à la Cour de :

Vu les dispositions des articles 31, 74, 75,122, 123,125, 561, 640, 641, 789, 795, 905 et 905-2 du code de procédure civile,

Vu l'article 2224 du code civil,

I. constater que l'appel interjeté par M. et Mme [B] et M. et Mme [N] contre l'ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mâcon en date du 13 décembre 2021 est irrecevable, car trop tardif, et par suite rejeter l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

II. confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a jugé M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] irrecevables en leurs demandes pour cause de prescription de leur action à leur encontre au titre d'un manquement au devoir d'information,

III. confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné les consorts [B], [U] et [N] à prendre en charge les dépens de première instance,

Y ajoutant,

IV. juger prescrites les demandes formulées au titre de la perte de chance par M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N], ainsi que toutes les demandes accessoires en découlant et, par conséquent, les rejeter,

V. juger irrecevables M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] pour défaut de qualité à agir à leur encontre concernant l'existence et l'inexécution alléguée de travaux répertoriés dans la convention tripartite de 2005 et de la perte de chance dont ils se prévalent, par conséquent rejeter toutes les demandes en découlant,

VI. juger irrecevables M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] pour défaut d'intérêt à agir à leur encontre au titre de (i) l'existence et l'inexécution alléguée de travaux répertoriés dans la convention tripartite de 2005 et (ii) de l'absence d'information concernant le transfert d'autorisation par l'ARS d'exploitation d'un EHPAD ainsi que (iii) de la perte de chance dont ils se prévalent, par conséquent rejeter toutes les demandes en découlant,

Statuant à nouveau,

VII. se déclarer incompétente pour apprécier les demandes au fond de M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] concernant la responsabilité des concluantes et par suite leurs demandes indemnitaires à leur encontre,

VIII. juger irrecevables au stade de l'appel les demandes au fond de M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] concernant la responsabilité des concluantes et par suite leurs demandes indemnitaires à leur encontre et les rejeter,

IX. infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] à leur payer la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ainsi qu'aux entiers dépens de première instance,

En tout état de cause,

XI. rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N],

XII. condamner in solidum M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] à leur payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de la présente instance,

XIII. condamner in solidum M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées le 19 avril 2022, la SAS GDP Vendôme Immobilier demande à la cour de :

Vu les articles 31 et 122 du code de procédure civile,

Vu l'article 2270 alinéa 1 er ancien du code civil,

- la juger recevable et bien fondée en l'ensemble de ses prétentions,

- lui donner acte de ce qu'elle s'en remet à la sagesse de la Cour s'agissant de l'irrecevabilité des consorts [N] et [B] en leurs demandes pour cause d'appel tardif et ce sous les observations exposées dans le corps des présentes écritures,

- juger l'appel adverse mal fondé et débouter les consorts [B], [U] et [N] de l'ensemble de leurs demandes, fins, moyens et conclusions,

- confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a jugé les consorts [B], [U] et [N] irrecevables en leurs demandes pour cause de prescription de leur action à son encontre,

- confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné les consorts [B], [U] et [N] à prendre en charge les dépens,

Y ajoutant,

- juger les consorts [B], [U] et [N] irrecevables en leurs demandes pour cause de prescription de leur action au titre d'une supposée perte de chance et au titre de toutes les demandes accessoires en découlant, et par conséquent les rejeter intégralement,

- juger les consorts [B], [U] et [N] irrecevables en leurs demandes pour défaut d'intérêt à agir à son encontre, et par conséquent les rejeter intégralement,

Statuant à nouveau,

- se déclarer incompétente pour statuer sur les demandes au fond formées par les consorts [B], [U] et [N],

- en conséquence, juger irrecevables, au stade de l'appel, l'ensemble des demandes au fond présentées par les consorts [B], [U] et [N] et les en débouter intégralement,

- infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- en conséquence, condamner chacun des consorts [B], [U] et [N] à lui régler la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,

En tout état de cause,

- condamner chacun des consorts [B], [U] et [N] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, et à prendre en charge les dépens d'appel.

La procédure a été clôturée par ordonnance rendue le 21 avril 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est référé, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs dernières conclusions visées ci-dessus.

SUR QUOI

- Sur la recevabilité de l'appel formé par M. et Mme [N] et M. et Mme [B]

La SAS Les Vergers de la coupée et la société DOMUSVI concluent à l'irrecevabilité de l'appel formé hors délai par les consorts [N] et [B].

En application de l'article 795 du code de procédure civile, l'ordonnance déférée était susceptible d'appel dans le délai de quinze jours suivant sa signification.

L'article 905 du code de procédure civile prévoit que le président de la chambre saisie, d'office ou à la demande d'une partie, fixe les jours et heures auxquels l'affaire sera appelée à bref délai ou au jour indiqué lorsque l'appel est relatif à une des ordonnances du juge de la mise en état énumérées aux 1° à 4 ° de l'article 795.

Si l'article 905-2 alinéa 6 donne compétence au président de la chambre pour statuer sur la fin de non recevoir tirée de la tardiveté de l'appel, il ne s'agit pas d'une compétence exclusive à la différence de celle reconnue par l'article 914 au conseiller de la mise en état et cette fin de non recevoir opposée par les sociétés intimées est donc recevable devant la cour.

L'ordonnance critiquée a été signifiée le 30 décembre 2021 aux époux [N], le 6 janvier 2022 aux époux [B] et le 13 janvier 2022 aux époux [U] et leur déclaration d'appel a été reçue au greffe le 24 janvier 2022, plus de quinze jours après la signification de la décision aux deux premiers.

Les appelants concluent à la recevabilité de l'appel des consorts [N] et [B] en se fondant sur les dispositions de l'article 552 du code de procédure civile et soutiennent qu'il suffit, en application de ce texte, que l'une des parties ait formé appel dans le délai imparti pour que les autres puissent se joindre à l'instance d'appel, même hors délai.

Ils ajoutent que les époux [U] ont relevé appel dans le délai de 15 jours prévu par l'article 795 du code de procédure civile et prétendent que le litige est indivisible à l'égard des autres demandeurs de première instance dès lors que les demandes sont formées à l'encontre des mêmes parties intimées, sur les mêmes fondements juridiques, et qu'ils ont été condamnés in solidum aux dépens d'instance.

L'article 552 alinéa 1er du code de procédure civile prévoit qu'en cas de solidarité ou d'indivisibilité, à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé par l'une conserve le droit d'appel des autres, sauf à ces dernières à se joindre à l'instance.

Or, comme l'objectent à bon droit les sociétés intimées, les demandes formées par les appelants contre les sociétés Les Vergers de la coupée, DOMUSVI et GDP Vendôme Promotion ne sont ni solidaire ni indivisible, chacun des couples de bailleurs sollicitant l'indemnisation d'un préjudice individuel, sur le fondement de contrats de bail distincts et indépendants dans leur exécution, et la procédure ne concernant pas l'ensemble des copropriétaires ayant consenti un bail à la société Les Vergers de la coupée, mais seulement trois d'entre eux.

La seule condamnation in solidum des appelants aux dépens de l'incident, par le juge de la mise en état, ne peut suffire à rendre le litige indivisible.

L'appel tardif des époux [N] et des époux [B] sera ainsi déclaré irrecevable.

- Sur la recevabilité des demandes formées par les époux [U] devant le Tribunal judiciaire de Mâcon

Il n'y a pas lieu de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence au profit du tribunal administratif, la déclaration d'appel des époux [U] ne portant pas sur ce chef de dispositif de la décision et les sociétés intimées n'ayant pas formé d'appel incident sur ce point.

Pour déclarer irrecevable pour cause de prescription l'action des époux [U], le juge de la mise en état, se fondant sur l'article 2224 du code civil en retenant que les demandeurs engageaient la responsabilité contractuelle du vendeur au titre d'un manquement à son obligation d'information sur la nécessité de réaliser de lourds travaux de mise aux normes pour conserver l'agrément d'EHPAD, prévue par la convention pluriannuelle tripartite de 2005, et sur la possibilité pour le preneur de transférer son exploitation, qui leur avaient été dissimulées, a considéré que la nécessité de respecter des normes sanitaires strictes au vu de l'activité d'accueil de personnes âgées était connue des bailleurs, sinon évidente, en relevant que l'obligation de maintenir les locaux aux normes était d'ailleurs prévue dans les baux conclus avec l'exploitant, ce qui avait conduit les bailleurs à solliciter une expertise judiciaire des locaux pour faire analyser le respect de cette obligation par le preneur.

Il a ensuite relevé que les baux conclus avec l'exploitant étaient d'une durée de 9 ans et que la distorsion entre cette durée et la durée de location de 20 ans, exigée pour conserver le bénéfice des avantages fiscaux, était évidente.

Il en a déduit que le point de départ du délai de prescription se situait à la date de conclusion des contrats de vente, date à laquelle les demandeurs avaient la possibilité de se procurer les informations qui leur ont été prétendument dissimulées et qui leur auraient permis d'évaluer les risques inhérents à leur investissement.

Les appelants soutiennent à bon droit que, les contrats de vente et les baux ayant été conclus en 2007, leur action était soumise à la prescription trentenaire qui s'appliquait jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 réformant la prescription, et, à compter de cette date, à la prescription quinquennale de l'article 2224, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, en application de l'article 26 de la dite loi.

Il est constant que la prescription d'une action en responsabilité fondée sur un manquement aux obligations nées d'un contrat ne court qu''à compter de la date de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

Les appelants soutiennent, qu'en l'espèce, ils ne reprochent pas seulement aux défenderesses de ne pas les avoir informés de la nécessité de réaliser les travaux de restructuration nécessaires prévus dès avant la vente des lots et précisés dans la convention tripartite pluriannuelle signée le 27 octobre 2005 entre la société exploitante, l'ARS et le département, dont il n'ont appris l'existence qu'en 2016, comme l'a retenu le premier juge, mais qu'ils reprochent également aux sociétés intimées de ne pas les avoir informés du risque de voir les lots qu'ils ont acquis perdre la possibilité d'être exploités en EHPAD, au bon vouloir du preneur à bail qui, seul, peut obtenir auprès de l'Agence Régionale de Santé, sans même devoir en informer les copropriétaires bailleurs, un transfert des autorisations d'exploitation en EHPAD vers une autre résidence, ce que le juge de la mise en état n'a pas pris en considération pour fixer le point de départ du délai de prescription.

Ils affirment que, contrairement à ce qu'a retenu le juge de la mise en état, ils n'avaient pas la possibilité de se procurer les informations contenues dans cette convention tripartite pluriannuelle à laquelle ils n'ont pas été parties.

Ils ajoutent, qu'en ce qui concerne la nécessité de réaliser des travaux de mise aux normes EHPAD, ils n'avaient aucune connaissance en cette matière et n'avaient donc pas les compétences nécessaires pour contrôler ou se rendre compte de la nécessité de remettre aux normes la résidence, laquelle avait été exploitée sans difficulté sous le contrôle de l'ARS jusqu'en 2017, ignorant tant la nature que l'ampleur des travaux à réaliser au sein de la résidence jusqu'au dépôt du rapport d'expertise.

Ils prétendent que c'est à cette date qu'ils ont pu avoir connaissance de leur dommage et arguent de l'interruption de la prescription par l'assignation en référé du 2 août 2016.

Ils affirment enfin que leur action en responsabilité n'est pas exclusivement fondée sur le manquement des sociétés intimées à leur devoir d'information mais également sur le non respect par ces sociétés de leur obligation de réaliser les travaux préconisés par l'expert dans son rapport du 17 avril 2019.

Les sociétés intimées répliquent que la jurisprudence considère que le point de départ du délai quinquennal de prescription de l'article 2224 du code civil est le jour de la conclusion de la vente.

Elles font valoir, qu'à la date d'acquisition de leurs lots par les appelants, la convention tripartite avait déjà été régularisée entre le preneur et les autorités de tutelle, que la réglementation régissant l'activité du locataire était accessible à tous et que les appelants étaient en mesure d'apprécier l'état des locaux et les éventuels travaux qui devaient être réalisés dans leurs lots respectifs, notamment au regard de la convention tripartite et de leur obligation de délivrance, mais également le risque induit par le droit du locataire de cesser l'exploitation des locaux au terme du bail et les risques induits par le fait que l'autorisation d'exploitation est attachée à l'exploitant et non aux locaux, la société d'exploitation pouvant librement solliciter auprès de l'ARS l'autorisation de transférer son activité vers un autre établissement, sans autorisation préalable des bailleurs.

Elles considèrent ainsi que les bailleurs disposaient de l'ensemble des éléments leur permettant d'apprécier les risques et garanties de leur investissement à la date de signature de l'acte d'acquisition et qu'ils étaient en mesure à cette date de prendre connaissance des prétendus manquements à leurs obligations de vendeur et exploitant puisqu'ils étaient censés visiter les biens qu'ils ont acquis et qu'ils disposaient d'un droit de visite annuelle de la résidence, dont ils n'ont jamais usé.

Contrairement à ce qu'ils affirment, l'action en responsabilité contractuelle engagée par les époux [U] devant le Tribunal judiciaire de Mâcon n'est pas fondée sur le manquement des sociétés venderesse et exploitante à leur obligation de réaliser les travaux préconisés par l'expert, le contrat de vente ne contenant manifestement pas une telle obligation.

Au terme de leur exploit introductif d'instance, les demandeurs reprochent uniquement aux sociétés intimées d'avoir gravement manqué à leur obligation d'information et ils sollicitent d'ailleurs l'indemnisation d'une perte de chance.

Or, s'agissant de l'information des acquéreurs sur la nécessité de réaliser des travaux de restructuration et de mise aux normes pour conserver l'agrément d'EHPAD, il résulte des baux que le preneur était tenu de faire son affaire personnelle et exclusive de tous travaux, installations, mises aux normes, quelle qu'en soit la nature, qui seraient imposés par les autorités administratives, la loi ou les règlements, en raison de ses activités présentes ou futures, et les normes imposées pour les EHPAD étaient accessibles aux acquéreurs puisqu'elles résultent d'un arrêté du 26 avril 1999.

Les époux [U] ne peuvent donc sérieusement prétendre, qu'à la date de signature de leur bail, le 6 avril 2007, ils n'avaient pas connaissance de la nécessité de réaliser des travaux de mise aux normes dans les locaux exploités en EHPAD, alors qu'ils avaient par ailleurs pu constater l'état de la résidence lors de visites précédant leur achat.

S'agissant de l'information des bailleurs sur la possibilité donnée au preneur de transférer son exploitation sans leur accord, avec transfert de l'agrément, aucune disposition du bail ne prévoyait un droit du bailleur au maintien du preneur à l'expiration des neuf ans et rien ne pouvait leur laisser penser qu'ils conserveraient l'agrément d'EHPAD qui est attaché à l'exploitant.

Par ailleurs, la distorsion entre la durée de neuf ans du bail et la durée de location de 20 ans, exigée pour conserver le bénéfice des avantages fiscaux, était connue des époux [U] dès la signature du contrat.

C'est donc à bon droit que le premier juge a considéré que le point de départ du délai quinquennal de prescription se situait à la date de conclusion bail avec la SAS Les Vergers de la coupée et que l'action des époux [U] était donc prescrite depuis le 19 juin 2013, l'assignation délivrée le 2 août 2016 aux sociétés intimées, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Mâcon, n'ayant pas pu interrompre une prescription déjà acquise.

L'ordonnance déférée sera ainsi confirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes des époux [U].

Les sociétés intimées ne concluant pas à l'infirmation de l'ordonnance déférée, l'effet dévolutif est limité par les énonciations de la déclaration d'appel des appelants qui a déféré la décision à la cour, laquelle n'est donc pas saisie des demandes formées par les sociétés Les Vergers de la coupée, DOMUSVI et GDP Vendôme Promotion aux fins d'ajouter à la décision.

Les appelants qui succombent supporteront la charge des dépens de première instance et d'appel. Il n'est par ailleurs pas inéquitable de mettre à leur charge une partie des frais de procédure exposés par les sociétés intimées et non compris dans les dépens.

Ils seront ainsi condamnés in solidum à payer à la SAS Les Vergers de la coupée et la société DOMUSVI, d'une part, et à la société GDP Vendôme Promotion, d'autre part, chacune la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare irrecevable comme tardif l'appel formé par M. et Mme [B] et M. et Mme [N] contre l'ordonnance rendue le 13 décembre 2021 par le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mâcon,

Confirme l'ordonnance rendue le 13 décembre 2021 par le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mâcon en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Condamne in solidum M. et Mme [B], M. et Mme [U] et M. et Mme [N] à payer à la SAS Les Vergers de la coupée et la société DOMUSVI, d'une part, et à la société GDP Vendôme Promotion, d'autre part, chacune la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum les appelants aux dépens d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/00101
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;22.00101 ?
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