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30/06/2022 | FRANCE | N°19/01132

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 30 juin 2022, 19/01132


MW/IC















[L] [N] épouse [D]



C/



S.A.S. DELLYS AUTO

































































































Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

C

OUR D'APPEL DE DIJON



2ème chambre civile



ARRÊT DU 30 JUIN 2022



N° RG 19/01132 - N° Portalis DBVF-V-B7D-FJQ6



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 25 juin 2019,

rendue par le tribunal d'instance du Creusot

RG : 1119000217











APPELANTE :



Madame [L] [N] épouse [D]

née le 21 Février 1946 à ST VALLIER (88)

domiciliée :

[Adresse 2]

[Localité 3]



représentée par Me Laurent DELMAS,...

MW/IC

[L] [N] épouse [D]

C/

S.A.S. DELLYS AUTO

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème chambre civile

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

N° RG 19/01132 - N° Portalis DBVF-V-B7D-FJQ6

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 25 juin 2019,

rendue par le tribunal d'instance du Creusot

RG : 1119000217

APPELANTE :

Madame [L] [N] épouse [D]

née le 21 Février 1946 à ST VALLIER (88)

domiciliée :

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Laurent DELMAS, membre de la SCP LAURENT DELMAS, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE

INTIMÉE :

S.A.S. DELLYS AUTO dont le siège social est sis :

[Adresse 1]

[Localité 3]

non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 avril 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Michel WACHTER, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre,

Michel WACHTER, Conseiller,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 30 Juin 2022,

ARRÊT : rendu par défaut,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par exploit du 4 avril 2019, Mme [L] [D] a fait assigner la SAS Dellys Auto

devant le tribunal d'instance du Creusot, sur le fondement des articles 1130 et suivants du code civil, aux fins de résolution de la vente d'un véhicule Renault Clio d'occasion, et paiement de la somme de 2 150 euros au titre de la restitution du prix de vente, et de celle de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts. A titre subsidiaire, elle a sollicité la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise judiciaire.

La demanderesse a fait valoir que son consentement avait été vicié par le dol, et qu'elle n'aurait pas acquis le véhicule si elle avait connu la réalité de sa situation administrative, qui lui avait été cachée par la société Dellys Auto au moyen d'un subterfuge. Elle a exposé que le vendeur lui avait présenté pour essai un véhicule Renault Clio immatriculé [Immatriculation 4], dont il lui avait remis le certificat d'immatriculation aux fins de le faire assurer, mais qu'il lui avait ensuite été livré, en lieu et place de ce véhicule, une autre Renault Clio, immatriculée [Immatriculation 5], qu'elle n'avait pas pu faire immatriculer à son nom, l'intermédiaire qu'elle avait chargé de cette démarche lui ayant signalé que le véhicule qui lui avait été remis faisait l'objet d'une saisie.

Par jugement rendu le 25 juin 2019 en l'absence de comparution de la société Dellys Auto, le tribunal, après avoir relevé que les vices du consentement étaient sanctionnés par la nullité du contrat, et non par leur résolution, a retenu qu'il n'était pas suffisamment démontré la réalité de manoeuvres dolosives de la part du vendeur. Il a en conséquence débouté Mme [D] de l'ensemble de ses demandes, et l'a condamnée aux dépens.

Mme [D] a relevé appel de cette décision le 12 juillet 2019.

Elle a fait signifier sa déclaration d'appel à la société Dellys Auto par acte du 27 août 2019 remis à l'étude de l'huissier de justice.

Elle lui a fait signifier par acte du 7 octobre 2019 remis à l'étude de l'huissier de justice ses conclusions, par lesquelles elle demande à la cour :

Vu les articles 1130 et suivants du code civil,

A titre principal :

- d'infirmer le jugement déféré ;

- de prononcer la résolution de la vente du véhicule Renault Clio 3, immatriculé [Immatriculation 5], intervenue le 28 juillet 2018 entre la société Dellys Auto et Mme [L] [D] ;

- de condamner la société Dellys Auto à rembourser à Mme [L] [D] la somme de 2 150 euros correspondant au prix d'acquisition du véhicule ;

- de donner acte à Mme [L] [D] de ce qu'elle s'engage, après réception du remboursement du prix d'acquisition, à remettre à la société Dellys Auto le véhicule accompagné de ses clés et de tout document y afférent ;

- de condamner la société Dellys Auto à payer à Mme [L] [D] la somme de 1  500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

- de condamner la société Dellys Auto à payer à Mme [L] [D] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner la société Dellys Auto aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Laurent Delmas, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire :

- avant-dire droit, d'ordonner une mesure d'expertise judiciaire et de désigner tel expert qu'il plaira au tribunal (sic) de désigner avec mission habituelle en pareille matière et notamment :

' recueillir les explications des parties,

' se faire remettre tous documents utiles au besoin même détenus par un tiers,

' examiner le véhicule litigieux et en décrire l'état,

' établir la chronologie des faits depuis la vente et la prise de possession du véhicule par la demanderesse,

' vérifier et constater l'existence des désordres allégués par la demanderesse et déterminer la cause et l'origine des désordres,

' décrire ces désordres et donner un avis sur leur nature, leur importance et leur gravité en précisant :

- s'ils étaient consécutifs à l'état initial du véhicule

- s'ils constituent une non-conformité du véhicule ou un vice-caché

- s'ils étaient consécutifs à des modifications mécaniques, des réparations défectueuses ou un défaut d'entretien,

' donner le mode opératoire de réparation ou de remplacement et préconiser en chiffrant leur coût, poste par poste, les réparations susceptibles de remédier aux désordres dur le véhicule,

' fournir tous éléments techniques permettant au Tribunal de déterminer les responsabilités encourues en recherchant notamment si le véhicule était affecté d'un vice de fabrication ou de montage d'origine ou si les réparations intervenues ont été réalisées dans les normes en vigueur et dans les règles de l'art,

' donner tous les éléments d'évaluation permettant de chiffrer les préjudices subis par le demandeur, notamment préjudice de jouissance,

- de surseoir à statuer sur les autres demandes.

La société Dellys Auto n'a pas constitué avocat.

Il sera statué par arrêt de défaut.

La clôture de la procédure a été prononcée le 29 mars 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

A titre liminaire, il sera constaté qu'alors pourtant que le premier juge avait avec pertinence souligné que les vices du consentement étaient sanctionnés, non par la résolution du contrat, mais par sa nullité, l'appelante, par la voix de son conseil, persiste dans son erreur en continuant à hauteur d'appel de conclure à la résolution du contrat pour cause de dol.

Il sera néanmoins considéré qu'au travers de cette formulation inadaptée, c'est bien la nullité du contrat de vente qui est poursuivie au nom de Mme [D].

L'article 1130 du code civil dispose que l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.

L'article 1137 du même code énonce que le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des manoeuvres ou des mensonges, et que constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un de contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

En l'espèce, Mme [D] établit par les pièces versées aux débats, particulièrement la facture établie par la société Dellys Auto le 8 septembre 2016 que la vente concernait un véhicule d'occasion Renault Clio immatriculé [Immatriculation 4]. Il est par ailleurs produit la copie du certificat d'immatriculation de ce même véhicule, qui lui avait été remise par le vendeur en vue de faire réaliser les démarches administratives relatives à son assurance et son immatriculation au nom de Mme [D]. Il est encore versé un certificat de situation administrative du 6 septembre 2018 relatif à ce véhicule [Immatriculation 4], dont il ne ressort ni gage, ni saisie, ni aucun élément susceptible de faire obstacle au transfert du certificat d'immatriculation au nom de l'acheteur.

Pourtant, il est constant que le véhicule qui a été effectivement livré à Mme [D] par la société Dellys Auto, bien que de la même marque et du même modèle que celui qu'elle pensait acquérir, et qui a été mis en circulation la même année, est quant à lui immatriculé [Immatriculation 5]. L'appelante produit la copie de la carte grise de ce véhicule, qui lui a été remise par la société Dellys Auto à l'occasion de sa livraison, ainsi qu'un certificat de situation administrative en date du 6 novembre 2018 dont il résulte l'inscription d'une déclaration valant saisie effectuée le 12 juillet 2018.

Aucun élément ne permet de mettre en doute la bonne foi de Mme [D] lorsqu'elle indique que ce n'est qu'à l'occasion des démarches effectuées à sa demande par un intermédiaire professionnel en vue de la mutation à son nom de la carte grise du véhicule livré qu'il a été découvert que ce dernier n'était pas celui sur lequel s'était porté son consentement, et qu'il lui était impossible d'obtenir la délivrance d'une carte grise à son nom.

Il ne peut être sérieusement retenu que la société Dellys Auto, professionnelle du négoce automobile, ait pu ignorer la réalité de la situation administrative de la voiture immatriculée [Immatriculation 5], et l'obstacle qu'elle constituait pour sa cession. Il ne peut pas plus être admis qu'elle ait raisonnablement pu confondre les véhicules qu'elle offrait à la vente, ainsi que leurs documents administratifs respectifs.

Ainsi, en remettant de manière consciente à Mme [D], dans l'optique de la réalisation des démarches administratives consécutives à la vente, la copie d'une carte grise relative à un véhicule déterminé, et en libellant une facture concernant celui-ci, puis en procédant à la livraison d'un véhicule différent, bien qu'en apparence identique, la société Dellys Auto s'est rendue responsable d'une manoeuvre dolosive manifestement destinée à amener Mme [D] à acquérir une voiture qu'elle n'aurait à l'évidence pas accepté d'acheter si la réalité de sa situation administrative, laquelle lui interdisait d'en obtenir l'immatriculation à son nom, ne lui avait pas été cachée.

La mauvaise foi patente du vendeur est en tant que de besoin corroborée par son comportement pour le moins fuyant face aux légitimes réclamations de Mme [D], étant rappelé qu'il n'a, sans la moindre justification, estimé devoir se présenter, ni à la convocation du conciliateur de justice, ni devant aucune des juridictions appelées à statuer sur l'action introduite par l'appelante.

Il y a dans ces conditions lieu de prononcer la nullité de la vente litigieuse, le jugement déféré devant en conséquence être infirmé en toutes ses dispositions.

L'intimée sera donc condamnée à restituer à Mme [D] le prix de vente de la voiture, dont la cour constatera cependant à l'examen de la facture du 8 septembre 2018 qu'il s'élève à 2 000 euros, et non à 2 150 euros comme sollicité par l'appelante.

La vente d'un véhicule en situation administrative irrégulière est à l'évidence de nature à avoir causé un préjudice à Mme [D], qui n'a, depuis plusieurs années, pu procéder à la régularisation d'une carte grise à son nom. Ce préjudice sera réparé par l'allocation d'une somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts.

L'issue réservée à la demande principale rend sans objet la demande subsidiaire d'expertise.

La société Dellys Auto sera enfin condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à Mme [D] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du même code.

Par ces motifs

Statuant en audience publique et par arrêt de défaut,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 juin 2019 par le tribunal d'instance du Creusot ;

Statuant à nouveau, et ajoutant :

Annule le contrat de vente du véhicule Renault Clio immatriculé [Immatriculation 5], intervenue le 28 juillet 2018 entre la société Dellys Auto, d'une part, et Mme [L] [D], d'autre part ;

Condamne la société Dellys Auto à payer à Mme [L] [D] la somme de 2 000 euros au titre du remboursement du prix du véhicule ;

Donne acte à Mme [L] [D] de ce qu'elle remettra à la société Dellys Auto, dès réception du remboursement du prix d'acquisition, le véhicule accompagné de ses clés et de tout document y afférent ;

Condamne la société Dellys Auto à payer à Mme [L] [D] la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts ;

Dit sans objet la demande subsidiaire d'expertise ;

Condamne la société Dellys Auto à payer à Mme [L] [D] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Dellys Auto aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/01132
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.01132 ?
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