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16/06/2022 | FRANCE | N°20/00327

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 16 juin 2022, 20/00327


DLP/CH













S.A. PRÉVOIR VIE Prise en la personne de son Représentant légal en exercice domicilié de droit au siège social.







C/



[S] [C]













































Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 16 JUIN 2022



MINUTE N°



N° RG 20/00327 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FQ7P



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHALON SUR SAONE, section ENCADREMENT, décision attaquée en ...

DLP/CH

S.A. PRÉVOIR VIE Prise en la personne de son Représentant légal en exercice domicilié de droit au siège social.

C/

[S] [C]

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 16 JUIN 2022

MINUTE N°

N° RG 20/00327 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FQ7P

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHALON SUR SAONE, section ENCADREMENT, décision attaquée en date du 07 Septembre 2020, enregistrée sous le n° F 18/00303

APPELANTE :

S.A. PRÉVOIR VIE Prise en la personne de son Représentant légal en exercice domicilié de droit au siège social.

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Fabien KOVAC de la SCP DGK AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON substitué par Me Alexandre BARBA, avocat au barreau de DIJON, et Me Assunta SAPONE de la SELARL SAPONE - BLAESI, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

[S] [C]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Brigitte DEMONT-HOPGOOD de la SELARL HOPGOOD ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mai 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Mme [C] a été engagée par la SA Prévoir-Vie groupe Prévoir, le 10 janvier 2000, en qualité de conseiller commercial non cadre, rémunérée selon un barème de commissionnement.

La société Prévoir-Vie emploie près de 1 600 salariés, dont 260 à l'international, et propose des solutions de prévoyance, santé, retraite, épargne et assurance emprunteur aux foyers (actifs et retraités) et aux petits entrepreneurs.

Mme [C] a connu, au sein de la société, la progression suivante :

- conseiller commercial à partir de janvier 2000,

- expert commercial à partir de septembre 2006 et passage cadre, classe V de la convention collective nationale des sociétés d'assurances du 27 juillet 1992,

- responsable recrutement et formation à partir de janvier 2011, promue cadre classe VI,  

- responsable service ressources humaines réseau à partir de juin 2016 avec le statut d'inspecteur.

Le 16 avril 2018, elle a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 27 avril 2018 auquel elle s'est rendue.

Le 30 avril 2018, l'employeur lui a indiqué étudier une solution alternative au licenciement.

Le 18 mai 2018, la salariée a de nouveau été convoquée à un entretien préalable de licenciement fixé au 1er juin 2018, auquel elle ne s'est pas présentée.

Le 26 juin 2018, Mme [C] a été licenciée pour insuffisance professionnelle.

Par requête reçue au greffe le 11 décembre 2018, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir le paiement de diverses indemnités, y compris pour exécution déloyale du contrat de travail.

Par jugement du 7 septembre 2020, le conseil de prud'hommes :

- dit et juge le licenciement de Mme [C] pour insuffisance professionnelle comme étant sans cause réelle et sérieuse,

- condamne la SA Prévoir-Vie à régler à Mme [C] les sommes suivantes :

* 77 456 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute Mme [C] de l'ensemble de ses autres demandes,

- déboute la SA Prévoir-Vie de sa demande reconventionnelle et la condamne aux entiers dépens.

Par déclaration enregistrée le 28 septembre 2020, la SA Prévoir-Vie a relevé appel de cette décision.

Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 mai 2021, elle demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris du chef du licenciement de Mme [C],

Statuant à nouveau :

- dire que le licenciement de Mme [C] pour insuffisance professionnelle est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- réformer le jugement du chef de l'indemnité de licenciement allouée à Mme [C],

- confirmer le jugement entrepris du chef de rejet de la demande de Mme [C] au titre d'un supposé manquement à l'exécution loyale de son contrat de travail,

En conséquence,

- débouter Mme [C] de toutes demandes de ce chef,

Plus généralement,

- la débouter de toutes ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire,

- réduire l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en tenant compte des indemnités de licenciement perçues (29 486,53 euros) à ce titre, lesquelles devront être déduites,

Faisant droit à sa demande reconventionnelle,

- condamner Mme [C] à lui payer, à titre d'indemnité pour procédure abusive, la somme de 2 500 euros de ce chef,

- la condamner à lui payer une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux dépens.

Par ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 26 mars 2021, Mme [C] demande à la cour de :

- infirmer partiellement le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Et statuant à nouveau,

- condamner la SA Prévoir-Vie à lui verser la somme de 32 050 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- le confirmer pour le surplus,

- condamner la SA Prévoir-Vie au versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

- condamner la SA Prévoir-Vie aux dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera liminairement relevé que l'appelante critique le jugement déféré en indiquant que sa motivation succincte équivaut à une absence de motivation. Elle n'en tire cependant aucune conséquence juridique quant à la nullité éventuelle de la décision déférée dont elle sollicite uniquement l'infirmation.

SUR LA RÉGULARITÉ DU LICENCIEMENT

Mme [C] prétend que son licenciement a été prononcé en violation d'une des garanties conventionnelles, à savoir l'absence d'entretien spécifique dédié à l'insuffisance du salarié et aux moyens d'y remédier. Elle ajoute n'avoir jamais reçu de courrier de mise en garde. Elle considère que l'employeur a, ainsi, violé une garantie de fond en sorte que son licenciement serait dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En réponse, la société Prévoir-Vie fait valoir que la procédure de licenciement a été régulièrement suivie, conformément aux dispositions de la convention collective. Elle précise que l'entretien préalable s'est tenu le 10 janvier 2018 et qu'un nouvel entretien a été fixé au mois de mars pour finalement être reporté, à la demande de la salariée, au 5 avril 2018. Elle ajoute que les dispositions des articles 57 et suivants de la convention collective ne sont pas des garanties de fond en application de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 de sorte que leur non-respect ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Il ressort de l'article L. 1235-2 alinéa 5 du code du travail que lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

Ces dispositions légales s'appliquent au licenciement de Mme [C], notifié postérieurement à leur entrée en vigueur.

En l'espèce, l'article 57 de la convention collective nationale de l'inspection d'assurance encadre le licenciement pour insuffisance professionnelle comme suit :

« Insuffisance :

Le constat par l'entreprise d'une insuffisance dans les résultats obtenus au plan quantitatif et/ou qualitatif donne lieu à un entretien avec l'inspecteur concerné.

Cet entretien permet à l'intéressé de s'expliquer sur cette insuffisance et ses motifs. L'appréciation de l'entreprise s'effectue à la lumière de cet entretien par référence aux objectifs, tant quantitatifs que qualitatifs, et aux critères visés à l'article 55 b de la présente convention.

Si ces difficultés trouvent leur origine dans une mauvaise adaptation de l'inspecteur à ses missions, ou dans un mauvais état de santé invoqué par l'intéressé, l'employeur recherche les moyens d'y remédier tels que l'ajustement des missions, une formation complémentaire ou l'affectation à de nouvelles fonctions.

L'entretien est confirmé par un écrit de l'employeur exprimant ses mises en garde en cas de persistance de cette situation et précisant s'il y a lieu les mesures prises pour y porter remède. La poursuite de cette situation peut conduire l'employeur à prendre une décision de licenciement dans les conditions prévues à l'article 66 ».

La question est donc de savoir si l'absence d'entretien est établie et si, dans cette hypothèse, il s'agit ou non de la violation d'une règle de fond.

La société Prévoir-Vie ne peut se prévaloir de l'entretien du 10 janvier 2018 qui était un simple entretien d'évaluation. Quant à celui du 5 avril 2018, il ressortit d'un mail adressé à la salariée le 27 mars 2018 (pièce 24 de l'employeur) dans lequel l'appelante indique vouloir rencontrer la salariée pour faire « un point » avec elle. Or, ce courriel ne saurait valoir convocation à entretien préalable au sens de l'article 57 de la convention collective précité, étant de surcroît observé qu'il n'a pas été confirmé par un courrier de mise en garde.

Or, même à la supposer établie, l'irrégularité de procédure dont se prévaut la salariée dans l'absence d'entretien préalable, et non la violation de la procédure conventionnelle de consultation, ne lui permet, pas plus que cette dernière, que de prétendre à des dommages-intérêts en réparation du préjudice en résultant. Il ne s'agit pas d'une garantie de fond visant à préserver le salarié d'une atteinte à une liberté fondamentale.

Mme [C] ne sollicite aucune indemnité de ce chef, étant en tout état de cause rappelé que l'indemnité pour irrégularité de la procédure ne se cumule pas avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

SUR LE BIEN-FONDÉ DU LICENCIEMENT

La société Prévoir-vie soutient que le licenciement de Mme [C] est fondé sur son incompétence professionnelle masquée par un autoritarisme interdisant tout échange. Elle précise que les fonctions qu'elle a exercées n'ont excédé ni les termes de son contrat de travail, ni le cadre de ses missions. Elle prétend justifier de ses allégations par les pièces qu'elle verse aux débats dont le conseil de prud'hommes n'aurait pas tenu compte.

En réponse, Mme [C] conteste les motifs de son licenciement. Elle fait valoir que l'insuffisance professionnelle qui lui est reprochée n'est étayée par aucun élément précis et objectif qui lui serait, de surcroît, imputable.

Il est constant que l'insuffisance professionnelle du salarié, dès lors qu'elle est établie, peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement alors même qu'aucune faute personnelle n'est établie à son encontre. Elle se définit comme l'incapacité objective et durable d'un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification. Elle se caractérise par une mauvaise qualité du travail due soit à une incompétence professionnelle, soit à une inadaptation à l'emploi.

Le motif inhérent à la personne du salarié, dont celui de l'insuffisance professionnelle, doit reposer sur des faits objectifs, matériellement vérifiables et qui lui sont imputables.

L'article L. 1235-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ici, Mme [C] encadrait, au dernier état de la relation contractuelle, une équipe de 13 personnes exerçant dans 6 régions commerciales.

il ressort, en substance, de la lettre de licenciement qu'il est reproché à Mme [C] :

- de ne pas faire preuve de diplomatie avec les IRH,

- de ne pas s'être adaptée au fonctionnement de l'entreprise et de ne pas avoir réussi à asseoir sa légitimité,

- de présenter des carences en matière managériale,

- de ne pas avoir pris en compte les recommandations du DRH et de la PDG,

- de manquer d'anticipation dans la gestion de la politique RH.

Or, force est de constater, avec la salariée, qu'elle a bénéficié d'une augmentation salariale au mois de janvier 2018, soit 3 mois avant l'enclenchement de la procédure de licenciement.

De plus, le fait qu'elle ait reçu une prime d'objectifs en 2017 et 2018 est, contrairement à ce que soutient l'employeur, en partie lié à son activité propre et pas uniquement aux résultats des membres de l'équipe régionale, étant à cet égard précisé que la réalisation des objectifs de la salariée dépend aussi de celles des inspecteurs qu'elle encadre.

En outre, le rapport de restitution de l'atelier de développement auquel Mme [C] a participé en décembre 2017 loue ses qualités, notamment relationnelles, et son influence positive sur ses collègues, son sens de l'organisation et sa posture managériale de leader de proximité. S'il fait état de difficultés rencontrées par l'intimée vis-à-vis d'homologues car ne trouvant que peu d'appui et une difficulté pour gérer au mieux ses missions, l'appelante n'établit pas lui avoir fourni l'accompagnement nécessaire à leur bonne mise en 'uvre. Les formations suivies par la salariée dont se prévaut l'employeur et pour lesquelles il produit un tableau récapitulatif (pièce 16) montrent au contraire que Mme [C] n'a suivi aucune formation pendant près de 5 ans, soit entre le 21 décembre 2012 et le 11 décembre 2017, la première formation de management étant intervenue en décembre 2017, soit 18 mois après sa prise de fonction, puis les 6 février 2018 et 13 mars 2018. Cette formation n'était toutefois pas spécifique au poste de responsable ressources humaines mais offerte aux managers, tous services confondus. Le licenciement est par ailleurs intervenu quelques mois après sans que, finalement, l'employeur ait tout le recul nécessaire pour en apprécier les effets. Il sera là encore rappelé que le rapport de restitution de décembre 2017 n'a révélé aucune carence de la salariée mais a vanté, notamment, son esprit d'analyse et de synthèse ainsi que ses qualités relationnelles et sa posture managériale de leader de proximité.

Par ailleurs, la salariée n'a jamais été mise en garde sur son travail et a bénéficié d'un entretien annuel d'évaluation positif le 10 janvier 2018, soit 6 mois avant son licenciement. Il importe peu, comme le prétend l'employeur, que cet entretien ne lui ait pas été restitué. De même, il ne ressort de l'entretien d'évaluation du 7 juin 2017, dont se prévaut l'employeur pour alléguer des « graves carences » relevées à cette occasion, aucun axe à travailler, ni aucun moyen pour y parvenir, le cas échéant. Au surplus, l'intimée a rempli 113,9% de ses objectif en novembre 2017 (pièce 27 de l'intimée) et l'entretien d'évaluation du 10 janvier 2018 conclut en ces termes : « le plan de recrutement a été tenu, bonne maîtrise du service (...)». La société Prévoir-Vie n'explique pas comment les « carences » de Mme [C] se seraient aggravées en 2018 alors, par ailleurs, qu'elle a amélioré 33% de ses critères d'évaluation.

Ensuite, les attestations produites par l'employeur sont insuffisantes à démontrer la prétendue carence managériale de la salariée, sa fuite des responsabilités alors que sa gestion managériale a été approuvée par l'appelante dans les entretiens annuels d'évaluation, notamment dans le dernier. Parmi les personnes attestant en défaveur de la salariée, M. [P] qui précise exprimer un point de vue très personnel se contredit en indiquant avoir mal vécu de travailler avec elle tout en précisant n'avoir que peu échangé avec l'intéressée (relations professionnelles très limitées). L'attestation de Mme [J], responsable RH, est à considérer avec prudence dès lors qu'elle indique n'avoir aucun lien de subordination avec l'appelante alors qu'elle fait toujours partie de l'effectif, ce qu'elle ne pouvait ignorer. En tout état de cause, elle ne fait état que d'un seul incident, face auquel l'employeur n'a manifestement pas réagi.

De surcroît, la société Prévoir-Vie ne démontre pas la réalité de ses affirmations selon lesquelles Mme [C] aurait été dans l'incompréhension des directives claires aboutissant à des erreurs sur la politique de recrutement de l'entreprise. Il sera à cet égard rappelé que la salariée avait alerté sa hiérarchie sur les problèmes de communication auxquels elle devait faire face « liées à la rétention des informations nécessaires à l'exercice de ma fonction et pour un travail en perspective ». Au demeurant la société Prévoir-vie n'établit pas avoir répondu à cette difficultés et offert à sa salariée les moyens pour y remédier.

L'employeur n'établit pas davantage la réalité du grief tenant à l'absence de mise en 'uvre des recommandations sur le comportement de l'intimée à l'égard de sa hiérarchie. Il se contente d'invoquer une remarque que lui aurait adressée la présidente lors de deux comité de direction, sans offre de preuve à l'appui.

Il sera, au surplus, relevé que Mme [C] avait plus de 18 ans d'ancienneté dans l'entreprise sans qu'aucune insuffisance professionnelle n'ait, jusque-là, été décelée puisque, bien au contraire, elle s'est trouvée en constante progression depuis son embauche.

Il s'infère des énonciations susvisées que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Le licenciement étant injustifié, Mme [C] est fondée à solliciter des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La barémisation des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, instituée par l'article 2 de l'ordonnance nº 2017-1387 du 22 septembre 2017, est applicable en la présente espèce, le licenciement de la salariée étant postérieur au 23 septembre 2017.

Compte tenu de son ancienneté ( 18 ans) dans une entreprise employant plus de onze salariés, des circonstances de la rupture, du montant de sa rémunération (5 341,83 euros bruts), de son âge (55 ans au moment du licenciement), de ses difficultés à trouver un nouvel emploi eu égard à son âge, à la spécificité de son poste et l'absence de visibilité pour les entreprises en suite de la crise sanitaire, et compte tenu enfin des conséquences du licenciement, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies (toujours sans emploi et inscrite à Pôle Emploi malgré les démarches effectuées), il y a lieu, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, de confirmer l'indemnité allouée à l'intimée par le premier juge à hauteur de 77 456 euros en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement abusif.

SUR L'EXÉCUTION DÉLOYALE DU CONTRAT DE TRAVAIL

Mme [C] soutient que l'employeur n'a pas exécuté le contrat de travail de bonne foi mais de manière totalement déloyale. Elle excipe du manque de considération du travail accompli pendant 18 ans, de l'absence de soutien de son N+1, des insinuations sur ses prétendues carences qu'elle indique avoir vécues comme une profonde humiliation ayant entrainé une dépression réactionnelle, toujours de cours de traitement.

La société Prévoir-Vie répond que le contrat a été exécuté loyalement et que la salariée ne rapporte pas la preuve contraire.

Il est constant que l'employeur, au même titre que le salarié, a l'obligation d'exécuter le contrat de bonne foi. Il se doit ainsi de respecter les règles légales, conventionnelles, contractuelles ou simplement d'usage dont il a connaissance.

La preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur doit être rapportée par le salarié qui l'allègue

Ici, à supposer même que l'intimée rapporte la preuve de ce manquement de la part de l'employeur, elle ne justifie d'aucun préjudice en lien direct avec la déloyauté alléguée, la prescription de somnifères et d'anxiolitiques n'étant pas probante à cet égard.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette prétention de Mme [C].

SUR LA PROCÉDURE ABUSIVE

La société Prévoir-Vie se borne à solliciter des dommages et intérêts sans préciser en quoi Mme [C] aurait fait dégénérer en abus son droit d'agir. Sa demande ne peut, dès lors, être accueillie. Le jugement critiqué est confirmé à ce titre.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

La décision sera également confirmée en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société Prévoir-Vie, qui est à l'origine d'un appel non fondé, doit prendre en charge les entiers dépens d'appel et supporter, à hauteur de cour, une indemnité au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Prévoir-Vie et la condamne à payer complémentairement en cause d'appel à Mme [C] la somme de 2 000 euros,

Condamne la société Prévoir-Vie aux dépens d'appel.

Le greffierLe président

Frédérique FLORENTINOlivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00327
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;20.00327 ?
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