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09/06/2022 | FRANCE | N°20/00328

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 09 juin 2022, 20/00328


OM/CH













[B] [P]





C/



S.A.S. BOA CONCEPT immatriculée au RCS de [Localité 4] sous le

N° 752 025 908 prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés audit siège





































Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 09 JUIN 2022



MINUTE N°



N° RG 20/00328 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FQ7S



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DIJON, section ENC...

OM/CH

[B] [P]

C/

S.A.S. BOA CONCEPT immatriculée au RCS de [Localité 4] sous le

N° 752 025 908 prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés audit siège

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 09 JUIN 2022

MINUTE N°

N° RG 20/00328 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FQ7S

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DIJON, section ENCADREMENT, décision attaquée en date du 31 Août 2020, enregistrée sous le n° F 18/00793

APPELANT :

[B] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Fabien KOVAC de la SCP DGK AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON, et Me Vincent BRAILLARD de la SELARL JURIDIL, avocat au barreau de BESANCON substitué par Me Léa HUMILIER, avocat au barreau de BESANÇON

INTIMÉE :

S.A.S. BOA CONCEPT immatriculée au RCS de [Localité 4] sous le N° 752 025 908 prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Jean-Vianney GUIGUE de la SELAS ADIDA ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE substitué par Me Véronique PARENTY-BAUT, avocat au barreau de DIJON, et Me Anthony SCARFOGLIERO de la SELARL SVMH AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mai 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Olivier MANSION, Président de chambre chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

Marie-Françoise ROUX, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Kheira BOURAGBA,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Kheira BOURAGBA, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [P] (le salarié) a été engagé le 10 juin 2014 par contrat à durée indéterminée en qualité de dessinateur bureau d'études par la société Boa concept (l'employeur).

Il a été licencié le 14 juin 2018 pour cause réelle et sérieuse.

Estimant ce licenciement infondé, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 31 août 2020, a rejeté toutes ses demandes.

Le salarié a interjeté appel le 28 septembre 2020.

Il demande le paiement des sommes de :

- 15 684 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10 000 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement à l'obligation de sécurité,

- 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'employeur conclut à la confirmation du jugement et sollicite le paiement de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties échangées par RPVA les 15 mars et 13 juillet 2021.

MOTIFS :

Sur le licenciement :

La lettre de licenciement reproche au salarié des actes d'insubordination à l'encontre de son supérieur hiérarchique M. [O], en septembre et novembre 2017 et les 5, 6 et 7 décembre 2017, un manque d'implication dans le suivi des dossiers clients ce qui a entraîné des plaintes des équipes, la divulgation des taux horaires des collaborateurs devant intervenir en Suisse et des plaintes de la part des clients s'étonnant de ne pas voir le chef de projet lors de ses passages sur les sites, ces reproches caractérisent un motif disciplinaire.

Sur le premier grief, le salarié invoque la prescription et le conteste au fond en indiquant que les échanges avec son supérieur hiérarchique, même non chaleureux, restent courtois et professionnels.

L'employeur se reporte aux mails des 27 septembre, 21 novembre ainsi que les 5, 6 et 7 décembre.

L'article L. 1332-4 du code du travail dispose que : "Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales".

Ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération d'un fait antérieur à 2 mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai.

Ici, l'employeur a engagé la procédure de licenciement le 18 mai 2018 par convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Le dernier fait reproché date du 7 décembre 2017, de sorte que l'employeur pouvait engager une procédure concernant ces faits jusqu'au 7 février 2018.

En initiant une procédure disciplinaire en mai 2018, l'employeur a tardé à agir, de sorte qu'il ne peut faire état de ce grief.

Sur le manque d'implication, l'employeur se réfère à des mails des 22, 28 février 2018 et 11 avril 2018.

Au regard du dernier mail, l'engagement des poursuites disciplinaires n'est pas prescrit.

Les mails portent sur le projet Viastore Claas mais l'employeur ne démontre pas par des faits précis, objectifs et matériellement vérifiables le manque d'implication alléguée.

Sur la divulgation, le 23 mars 2018, des taux horaires des salariés intervenant en Suisse, le salarié l'admet mais précise qu'il a ainsi opéré à titre informatif et dans le cadre des informations juridiques et pratiques dont ces collaborateurs avaient besoin pour leur détachement en Suisse, le mail étant adressé à M. [O] et M. [T], président de la société.

M. [O] lui a reproché cette divulgation le jour même.

Si cette divulgation porte sur un élément de la rémunération d'autres salariés, la bonne foi du salarié doit être retenue dès lors que cette divulgation a été faite afin de préparer un détachement en Suisse.

Elle ne constitue pas, à elle seule, une cause de licenciement.

Sur le dernier grief, l'employeur produit des échanges de mails avec les sociétés Logsytech, groupe Frasteya et le projet Viastrore Claas ou encore celui d'Ekosport.

La lettre de licenciement vise les plaintes de clients sans les nommer et le salarié soutient que l'employeur n'a pas apporté de précisions dans le délai de 15 jours suivant la date à laquelle le salarié a reçu la lettre de licenciement.

Il sera relevé que l'employeur n'a pas fait usage de la possibilité offerte par les dispositions de l'article R. 1232-13 du code du travail et la lettre de licenciement énonce sur ce point : "En outre, nous avons reçu de nombreuses plaintes de clients s'étonnant de ne pas voir le chef de projet lors de ses passages sur les sites en installation, de plaintes des équipes de la société Boa concept qui s'étonnaient aussi de votre manque d'implication".

Le grief de la lettre de licenciement est vague et non décrit pas des exemples ou par des références aux noms des clients ou des projets concernés, de sorte que le salarié ne connaît pas les éléments constitutifs de la faute reprochée.

Il résulte de l'analyse des griefs, que la cause réelle et sérieuse de licenciement n'est pas établie.

Le jugement sera donc infirmé.

Au regard d'une ancienneté de quatre ans (en année complète) et d'un salaire mensuel moyen de 3 136,80 euros, le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera évalué à 12 600 euros.

Sur les autres demandes :

1°) L'article L. 4121-1 du code du travail dispose que : "L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes".

L'article L4121-2 dispose que : " L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l'article L. 1142-2-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs".

Il incombe à l'employeur d'établir qu'il a exécuté cette obligation.

Par ailleurs, il lui incombe également d'exécuter le contrat de travail de façon loyale.

Ici, le salarié demande une indemnisation en rappelant que par mail du 21 novembre 2017, il a alerté M. [T] de la situation difficile dans laquelle il se trouvait à la suite de son acceptation de passer chef de projet alors qu'il faisait l'objet de remarques injustifiées et répétées de la part de deux autres personnes, de sa charge de travail et de la volonté exprimée de le licencier à deux reprises.

Il fait état d'une situation de souffrance ayant entraîné une suspension de son contrat de travail pour cause de maladie.

L'employeur répond qu'il a financé la formation du salarié lorsqu'il est devenu chef de projet et que le salarié n'apporte aucun élément dans le sens d'une indemnisation.

Il sera relevé que le salarié ne démontre pas que l'employeur a exécuté de façon déloyale le contrat de travail.

Sur l'exécution de l'obligation de sécurité, il n'est pas établi que l'arrêt de travail résulte d'une surcharge de travail ou d'un manquement à l'obligation de sécurité.

Par ailleurs, si l'employeur ne démontre pas avoir réagi au mail du 21 novembre précité, le salarié ne prouve pas plus avoir subi un préjudice direct et certain permettant une indemnisation.

La demande de dommages et intérêts sera rejetée.

2°) Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'employeur et le condamne à payer au salarié la somme de 1 500 euros.

L'employeur supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :

- Infirme le jugement du 31 août 2020 uniquement en ce qu'il rejette la demande de M. [P] en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il statue sur les dépens ;

- Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

- Condamne la société Boa concept à payer à M. [P] la somme de 12 600 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Boa concept et la condamne à payer à M. [P] la somme de 1 500 euros ;

- Condamne la société Boa concept aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffierLe président

Kheira BOURAGBAOlivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00328
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;20.00328 ?
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