DLP/CH
[L] [P]
C/
SAS SETEO Prise en la personne de son représentant légal domicilié -ès-qualités audit siège.
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 02 JUIN 2022
MINUTE N°
N° RG 20/00299 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FQPL
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DIJON, section COMMERCE, décision attaquée en date du 28 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 18/00704
APPELANT :
[L] [P]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Jean-François MERIENNE de la SCP MERIENNE ET ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON substitué par Me Nathalie RIGNAULT, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE :
SAS SETEO Prise en la personne de son représentant légal domicilié -ès-qualités audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Romain CLUZEAU de la SELAS LEGI CONSEILS BOURGOGNE, avocat au barreau de DIJON substitué par Me Pauline AUGE, avocat au barreau de DIJON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Avril 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Olivier MANSION, Président de chambre,
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,
Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS CONSTANTS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [P] a été engagé, par contrat de travail à durée indéterminée du 6 février 2006, par la société Seteo, spécialisée dans le transport de déchets, en qualité de conducteur, niveau II, position III, coefficient 110 de la convention collective des activités du déchet.
Le 9 mars 2017, il s'est vu notifier un avertissement pour avoir gravement endommagé du matériel de collecte par inattention.
Le 15 novembre 2017, un second avertissement lui a été notifié pour avoir omis de déclarer trois non-conformités.
M. [P] a été placé en arrêt maladie du 28 novembre au 31 décembre 2017.
Le 16 janvier 2018, il a été convoqué à un entretien préalable avec mise à pied conservatoire.
Suite à l'entretien du 25 janvier 2018, il a été licencié pour faute grave par courrier du 30 janvier 2018.
Par requête du 9 novembre 2018, M. [P] a saisi le conseil de prud'hommes aux fins, notamment, de contester son licenciement et revendiquer une classification niveau III, position II, coefficient 118 de la convention collective des activités de déchets.
Par une nouvelle requête enregistrée le 5 juillet 2019, il a sollicité de voir :
- condamner la SAS Seteo à lui verser les sommes suivantes :
* 4 808,02 euros au titre d'arriérés de salaires, dont la prime d'ancienneté,
* 480,80 euros de congés payés afférents,
* 4 088,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
* 408,85 euros de congés payés afférents,
* 8 272,31 euros d'indemnité de licenciement,
* 2 500 euros de dommages et intérêts pour non évaluation professionnelle,
* 2 523,77 euros de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur,
* 778,58 euros de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire,
* 77,85 euros de congés payés afférents,
* 22 486,53 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,
* 2 500 euros de dommages et intérêt pour rupture vexatoire,
- ordonner l'exécution provisoire de la décision,
- condamner la SAS SETEO à lui remettre les documents légaux rectifiés suivants : bulletins de paie, documents de fin de contrat, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 10ème jour de la notification de la décision,
- condamner la société aux dépens de l'instance.
Par jugement du 28 juillet 2020, le conseil de prud'hommes a rejeté l'ensemble des demandes du salarié.
Par déclaration enregistrée le 24 août 2020, M. [P] a relevé appel de cette décision.
Dans le dernier état de ses conclusions notifiées par voie électronique le 23 novembre 2020, il demande à la cour de :
Infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau :
- dire qu'il doit bénéficier de la classification niveau III, position 2, coefficient 118 de la convention collective,
- dire que le licenciement intervenu est dénué de cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
- condamner l'intimée à lui verser les sommes suivantes :
* arriérés de salaire : 4 808,02 euros, dont la prime d'ancienneté, outre 480,80 euros au titre des congés payés incidents,
* dommages et intérêts pour non-évaluation professionnelle : 2 500 euros,
* arriérés de salaire pour non-prise des repos compensateurs : 2 523,77 euros bruts
* à titre subsidiaire : dommages et intérêts pour absence de repos compensateurs : 2 523,77 euros,
* salaire de la mise à pied conservatoire : 778,58 euros et 77,85 euros de congés afférents,
* indemnité de préavis : 4 088,46 euros et 408,84 euros de congés afférents,
* indemnité de licenciement : 8 272,31 euros,
* dommages et intérêts pour rupture vexatoire : 2 500 euros,
* dommages et intérêts pour rupture abusive : 22 486,53 euros
- ordonner la remise des documents rectificatifs (bulletins de salaire et documents de fin de contrat),
- condamner l'intimée aux entiers dépens de l'instance.
Par ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 17 février 2021, la SAS Seteo demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré,
- débouter M. [P] de l'intégralité de ses demandes,
- dire et juger que la demande de rappel de salaire pour non-prise du repos compensateur formulée par M. [P] à hauteur de 2 523,77 euros bruts est une demande nouvelle ; la juger irrecevable,
- le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LE LICENCIEMENT
I - M. [P] soulève, à titre principal, la prescription des faits fautifs retenus à son encontre dans le cadre du licenciement. Il expose que son employeur a eu connaissance des faits dès le 2 novembre 2017 et qu'il l'a convoqué à un entretien préalable le 16 janvier 2018, soit au-delà du délai légal de deux mois.
En réponse, la société Seteo prétend n'avoir été informée des fautes commises par le salarié que le 12 janvier 2018, en sorte qu'aucune prescription ne saurait lui être opposée.
L'article 1332-4 du code du travail dispose qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.
Le point de départ du délai de deux mois est le jour où l'employeur ou encore le supérieur hiérarchique direct du salarié a eu connaissance des faits fautifs. Cette notion s'entend d'une information précise et complète des événements. Ainsi, lorsque des vérifications et investigations sont nécessaires pour établir avec certitude les faits, le point de départ du délai de deux mois peut se trouver reporté jusqu'au jour où l'employeur disposera de l'ensemble des informations.
En l'espèce, M. [P] a été licencié pour avoir, le 2 novembre 2017, sciemment fait preuve d'insubordination en ignorant les instructions de sa responsable hiérarchique, Mme [M], qui lui avait demandé de s'arrêter sur le chemin du retour afin de ne pas dépasser le temps de conduite journalière autorisée par la législation du transport routier. Il lui est également reproché de s'être ainsi mis en infraction vis-à-vis de la réglementation sociale européenne (RSE), ce qui a eu pour effet d'engager la responsabilité civile et pénale de l'entreprise.
Il est acquis aux débats que, le 2 novembre 2017, l'appelant devait effectuer un aller-retour à [Localité 5] (69) pour y emmener et vider une benne à ordures. Il a cependant dû faire des déplacements supplémentaires de sorte que son temps de travail a été augmenté rendant impossible un retour en Bourgogne le jour-même.
Mme [M] atteste (pièce 9) avoir prévenu sa hiérarchie le 12 janvier 2018 des infractions prétendument commises par M. [P], ne s'en étant pas aperçu auparavant. Elle ajoute n'avoir pu étudier le disque du salarié avant cette même date puisque ce dernier était de repos le 3 novembre suivant les faits et elle-même en congés la semaine d'après. De plus, le salarié a été en arrêt maladie du 28 novembre 2017 au 31 décembre 2017. Les déclarations de Mme [M] sont corroborées par le mail qu'elle a adressé le 12 janvier 2018 à M. [N] dans lequel elle lui communique l'analyse du disque de M. [P] pour le mois de novembre 2017 (pièce 6 de l'employeur).
Au vu des éléments précités et en l'absence de preuve contraire, force est d'admettre que l'employeur n'a eu connaissance de l'infraction à la RSE que le 12 janvier 2018 de sorte qu'ayant convoqué le salarié à un entretien préalable le 16 janvier 2018, les faits fautifs ne sont pas prescrits.
II - M. [P] conteste, à titre subsidiaire, le bien-fondé de son licenciement.
Or, l'employeur justifie des motifs du licenciement par ses pièces 6, 9 et 14. De plus, le salarié reconnaît ne pas avoir suivi les consignes données en raison de l'absence de moyen de paiement pour loger en hôtel et du traitement médicamenteux qu'il doit suivre scrupuleusement pour son diabète (pièce 9), qu'il n'avait pas sur lui. Il s'en déduit qu'il se prévaut de circonstances impératives lui ayant imposé ce choix du retour.
Pour autant, les faits visés dans la lettre de licenciement sont établis et aucun fait justificatif ne peut exonérer le salarié de ses fautes lesquelles traduisent un non-respect volontaire des consignes de sécurité et un acte d'insubordination montrant l'impossibilité de maintenir une relation avec M. [P].
En conséquence, le licenciement présente une cause réelle et sérieuse. Il doit cependant être requalifié en licenciement pour faute simple, au vu des circonstances de l'espèce, du fait que le salarié avait 11 ans d'ancienneté et que les avertissements précédemment prononcés à son encontre, les 9 mars et 15 novembre 2017, concernent des faits de nature différente (matériel de collecte endommagé et omission de déclarer 3 non-conformités).
La décision dont appel sera donc réformée en ce qu'elle a admis le bien-fondé du licenciement pour faute grave qui sera considéré comme reposant sur une cause réelle et sérieuse.
La mise à pied à titre conservatoire est quant à elle justifiée par la nature des faits reprochés.
III - M. [P] sera subséquemment débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, en l'absence de preuve, pour rupture abusive et vexatoire, le jugement étant sur ce point confirmé.
Le salarié peut, néanmoins, prétendre au bénéfice de l'indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 4 088,46 euros, outre les congés payés afférents (408,84 euros), ainsi qu''à l'indemnité de licenciement. Sur ce point, l'employeur fait justement observer que le code du travail est plus favorable au salarié que la convention collective applicable qui prévoit que les taux s'appliquent successivement à chaque tranche d'ancienneté (1/5ème de mois durant les 10 premières années puis 1/3 de mois par année d'ancienneté après 10 ans, et non pas à hauteur d'1/3 de mois par année d'ancienneté dès la première année, comme l'a retenu l'appelant). Ainsi, il sera alloué à M. [P], de ce chef, la somme de 6 826,90 euros sur la base d'un salaire mensuel moyen, au cours des 12 derniers mois, de 2 137,19 euros.
SUR LA DEMANDE DE RECLASSIFICATION ET L'ABSENCE D'ÉVALUATION PROFESSIONNELLE
M. [P] prétend qu'il était sous-classifié et réclame à ce titre le versement d'un arriéré de salaire, outre des dommages et intérêts pour non-évaluation professionnelle. Eu égard à son niveau de technicité et son expérience, il estime relever du niveau III position 2 coefficient 118 et sollicite les arriérés de salaire correspondants à hauteur de 4 808,02 euros, dont la prime d'ancienneté, outre 480,80 euros au titre des congés payés afférents.
La société Seteo réplique que l'emploi de conducteur de matériel de collecte correspond bien au niveau II, coefficient 110, position 3 de la convention collective des déchets. Elle ajoute qu'elle s'oppose à la demande indemnitaire pour non-respect des droits à évaluation, cette prétention lui paraissant injustifiée.
I - Il est constant que, saisi d'une contestation sur la classification attribuée à un salarié, le juge doit se prononcer sans autre considération que l'examen des fonctions réellement exercées.
La charge de la preuve repose sur le salarié qui invoque l'application d'une qualification supérieure. Il doit démontrer la classification correspondant à la réalité de ses fonctions, avec éventuellement un rappel de salaires conforme au minimum conventionnel en vigueur.
En l'espèce, la convention collective des activités du déchet fixe les critères de classification des salariés (avenant n° 20 du 11 mai 2007) .
L'article 3.2.4 impose ainsi un examen particulier de l'évolution de carrière des salariés au plus tard 5 ans après leur entrée dans l'entreprise et, par la suite, selon une périodicité biennale. Les conclusions motivées de cet examen par référence aux critères de classification des emplois sont communiquées individuellement au salarié concerné.
M. [P], qui disposait d'une ancienneté de plus de 11 ans, était classé depuis son embauche au niveau II, coefficient 110 position 3. Or, aucune pièce en permet de considérer qu'il exerçait ses fonctions dans des conditions relevant de la qualification qu'il revendique alors même, par ailleurs, qu'il n'explicite pas son prétendu « niveau de technicité ». La société Seteo produit quant à elle le bulletin de salaire d'un autre salarié, M. [O], disposant d'une ancienneté identique, qui est classé au même niveau que l'appelant.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de reclassification de M. [P].
II - L'employeur ne conteste pas n'avoir jamais procédé à l'évaluation de l'évolution professionnelle de M. [P], requise au bout de 5 ans puis tous les 2 ans.
Or, il ressort de l'article L. 6315-1 du code du travail que les salariés doivent bénéficier d'un entretien professionnel de manière régulière même s'ils n'en font pas la demande, soit tous les deux ans.
Pour autant, le salarié ne justifie d'aucun préjudice en lien avec ce manquement.
La demande indemnitaire de M. [P] sera donc, par confirmation du jugement querellé, également rejetée.
SUR LA DEMANDE AU TITRE DES REPOS COMPENSATEURS
Sur la recevabilité de la demande
La société Seteo soulève l'irrecevabilité de cette demande comme étant nouvelle à hauteur de cour, ainsi qu'en raison de sa prescription.
1) L'article 564 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
L'article 565 du même code ajoute que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
Ici, l'employeur explique que, dans le cadre de ses conclusions d'appelant, le salarié a modifié sa demande additionnelle de dommages et intérêts en une demande de rappel de salaire. Or, cette demande tend strictement aux mêmes fins puisqu'elle vise à obtenir le paiement d'une somme d'argent au titre de la contrepartie obligatoire en repos et présente un lien suffisant avec la demande initiale.
Il convient donc de déclarer la prétention de M. [P] recevable comme n'étant pas une demande nouvelle.
De plus, la demande de rappel de salaire de M. [P] au titre du repos compensateur concernant la période de 2015 à 2017, telle que formalisée dans ses écritures communiquées le 23 novembre 2020, est soumise à un délai de prescription de 3 ans depuis l'entrée en vigueur de la loi du 14 juin 2013, le délai étant de 5 ans antérieurement à cette loi.
2) Vu l'article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, l'article 21 V de la loi du 14 juin 2013 et les articles L. 3242-1 et L. 3141-22 du code du travail :
Aux termes du premier de ces textes, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.
Selon le deuxième de ces textes, les dispositions du nouvel article L. 3245-1 du code du travail s'appliquent aux prescriptions en cours à compter du 16 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, soit cinq ans.
Il résulte des deux derniers textes que le délai de prescription des salaires court à compter de la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible, que pour les salariés payés au mois, la date d'exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l'entreprise et concerne l'intégralité du salaire afférent au mois considéré.
Ici, l'appelant sollicite le paiement de la contre-partie obligatoire en repos de ses heures supplémentaires effectuées de 2015 à 2017 inclus, étant précisé qu'il percevait son salaire le dernier jour du mois et que les bulletins de paie mentionnaient le nombre des heures supplémentaires effectuées. Le salarié a donc eu connaissance du non-paiement de la contrepartie obligatoire en repos les 30 ou 31 de chaque mois.
Quoique sa demande en paiement d'un arriéré de salaire ne soit pas nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile, elle ne saurait bénéficier du délai de prescription propre à sa demande initiale de dommages et intérêts.
Ainsi, M. [P] ayant formé sa demande au titre du rappel de salaire le 23 novembre 2020, son action est prescrite pour la période antérieure au 31 octobre 2017 et recevable pour les mois de novembre 2017 (exigibilité de la créance au 30/11) et décembre 2017 (exigibilité au 31/12).
Sur le bien-fondé de la demande
Il est constant que le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur, a droit à l'indemnisation du préjudice subi. Celle-ci comporte le montant d'une indemnité calculée comme si le salarié avait pris son repos, auquel s' ajoute le montant de l'indemnité de congés payés afférents.
Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de ce que le salarié a été mis en mesure de prendre le repos compensateur auquel lui ouvraient droit les heures supplémentaires accomplies.
En l'espèce, la société Seteo n'en justifie aucunement, ni n'argumente, du reste, sur cette prétention.
M. [P] produit, pour sa part, des éléments suffisamment précis permettant à l'employeur de répondre à sa demande en lien avec les heures supplémentaires qu'il indique avoir accomplies.
Ainsi, en tenant compte de la prescription acquise, il s'évince des bulletins de salaire de novembre et décembre 2017 qu'il a effectué au total sur ces deux mois 26,63 heures supplémentaires.
N'étant pas loisible de considérer qu'il a dépassé le contingent conventionnel d'heures supplémentaires fixé à 130 heures, sa demande en paiement de rappel de salaire au titre de la contrepartie obligatoire en repos doit être rejetée.
SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTÉRÊTS AU TITRE DE L'ABSENCE DE REPOS COMPENSATEUR
M. [P] sollicite, à titre subsidiaire, le paiement de la somme de 2 523,77 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur.
Or, sa demande indemnitaire dérive de l'action de rappel de salaire pour partie prescrite et il est constant qu'une demande qui ne tend sous couvert de dommages et intérêts qu'à obtenir le paiement des salaires prescrits doit être rejetée. De plus, pour la période non prescrite, il a été jugé que M. [P] ne pouvait sollciiter une contrepartie en repos au titre des heures supplémentaires qu'il avait effectuées. Sa demande sera donc rejetée, le jugement étant, par substitution de motifs, confirmé sur ce point.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
La société Seteo sera tenue de remettre au salarié les documents rectificatifs réclamés (bulletins de salaire et documents de fin de contrat), conformément aux dispositions du présent arrêt.
La décision sera confirmée en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
La société Seteo, qui succombe pour l'essentiel, doit prendre en charge les entiers dépens d'appel et être déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Déclare recevable la demande de M. [P] en paiement d'un arriéré de salaire au titre de l'absence de contrepartie obligatoire en repos pour la période postérieure au 23 novembre 2017 ; la déclare irrecevable pour la période antérieure,
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a jugé que le licenciement de M. [P] était fondé sur une faute grave et en ce qu'il a rejeté ses demandes au titre de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité compensatrice de préavis,
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,
Dit que le licenciement de M. [P] repose sur une cause réelle et sérieuse,
Condamne la société Seteo à payer à M. [P] les sommes suivantes :
- 6 826,90 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
- 4 088,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 408,84 euros de congés payés afférents,
Rejette la demande de M. [P] en paiement d'arriérés de salaires pour absence de contrepartie obligatoire en repos pour la période postérieure au 23 novembre 2017,
Ordonne à la société Seteo de remettre à M. [P] les documents légaux rectifiés (bulletins de salaire et documents de fin de contrat), conformément aux dispositions du présent arrêt,
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Seteo,
Condamne la société Seteo aux dépens d'appel.
Le greffierLe président
Frédérique FLORENTINOlivier MANSION