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19/05/2022 | FRANCE | N°20/00130

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 19 mai 2022, 20/00130


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[W], [L] [U] épouse [B]



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LA CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VAL DE SAONE SUD









































































































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Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON



2ème Chambre Civile



ARRÊT DU 19 MAI 2022



N° RG 20/00130 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FNHV



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 05 décembre 2019,

rendue par le tribunal de commerce de Dijon - RG : 2018/001482











APPELANTE :



Madame [W], [L] [U] épouse [B]

née le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 4] (70)

domiciliée :

[A...

SD/LL

[W], [L] [U] épouse [B]

C/

LA CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VAL DE SAONE SUD

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 19 MAI 2022

N° RG 20/00130 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FNHV

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 05 décembre 2019,

rendue par le tribunal de commerce de Dijon - RG : 2018/001482

APPELANTE :

Madame [W], [L] [U] épouse [B]

née le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 4] (70)

domiciliée :

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Eric RUTHER, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 106

INTIMÉE :

LA CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU VAL DE SAONE SUD, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés de droit au siège :

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Simon LAMBERT, membre de la SCP LANCELIN & LAMBERT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 62

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 mars 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Sophie DUMURGIER, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre,

Michel WACHTER, Conseiller,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 19 Mai 2022,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte sous-seing privé du 22 juillet 2014, la Caisse de Crédit Mutuel du Val de Saône Sud a consenti à la SARL Jean Bart un prêt de 131 500 euros amortissable en 84 mensualités de

1 601,87 euros incluant les intérêts au taux de 3,30 %.

Au terme de ce contrat, la banque a obtenu que M. [H] [B], gérant de la société, se porte caution solidaire de l'emprunteur, dans une limite de 30 000 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts, et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard, pour une durée de 108 mois, et que Mme [W] [B], se porte caution solidaire de la société, dans les mêmes conditions.

La banque disposait également d'un nantissement sur le fonds de commerce.

La SARL Jean Bart a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ouverte par jugement rendu le 12 janvier 2016 par le Tribunal de commerce de Dijon, convertie en liquidation judiciaire le 18 octobre 2016.

La banque a déclaré sa créance le 16 février 2016, pour un montant total de 106 522,46 euros à titre privilégié.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 août 2017, elle a mis les cautions en demeure de satisfaire à leurs engagements.

Par acte du 15 février 2018, la Caisse de Crédit Mutuel du Val de Saône Sud a fait assigner M. et Mme [H] [B] devant le Tribunal de commerce de Dijon aux fins d'obtenir, sous le

bénéfice de l'exécution provisoire :

- la condamnation de M. [H] [B] à lui verser une somme de 30 000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 23 août 2017,

- la condamnation de Mme [W] [B] à lui verser une somme de 30 000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 23 août 2017,

- la condamnation solidaire des époux [B] à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions développées à l'audience du 6 septembre 2018, la banque a demandé au tribunal de :

Vu les articles 1134, 1147, 2288 et suivants du code civil,

- la dire et juger recevable et fondée en ses demandes,

- condamner M. [H] [B] à lui verser une somme de 30 000 euros, outre intérêts au taux

légal à compter du 23 août 2017,

- condamner Mme [W] [B] à lui verser une somme de 30 000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 23 août 2017,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- débouter les époux [B] de l'intégralité de leurs demandes,

- condamner solidairement M. et Mme [H] [B] à lui verser une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers

dépens de l'instance.

Les époux [B] ont demandé au tribunal de :

A titre principal,

- surseoir à statuer dans l'attente de la cession du fonds de commerce et de la mise en cause de la societé BPI France Financement par le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud,

A titre subsidiaire,

Vu l'ancien article L 313-22 du code monétaire et financier,

- dire et juger que le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud ne démontre pas avoir exécuté son

obligation d'information à l'égard des cautions,

En conséquence,

- débouter le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud de sa demande de remboursement de paiement de la caution (sic),

A titre infiniment subsidiaire,

Vu l'article 1343-5 du code civil,

- dire et juger recevable et bien fondée la demande d'échelonnement sur une période de deux ans, du paiement des sommes dues au Crédit Mutuel du Val de Saône Sud,

Statuant sur leur demande reconventionnelle et y faisant droit,

Vu les articles 1231-1 et suivants du code civil,

Vu l'ancien article L 341-4 du code de la consommation,

- dire et juger que le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud a manqué à ses obligations pour les

causes dites,

- dire et juger que leurs cautionnements étaient manifestement disproportionnés par rapport à leurs ressources,

En conséquence,

- condamner le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud à leur verser la somme de 60 000 euros outre intérêts légaux à compter de la signification de la décision à intervenir,

- condamner le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud à leur verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud aux entiers dépens.

Par jugement rendu le 5 décembre 2019, le tribunal de commerce a :

Rejetant toutes autres demandes des parties,

- condamné Mme [W] [B] au titre de son engagement de caution à payer la somme de

30 000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 23 août 2017,

- débouté le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud de sa demande de paiement au titre de l'engagement de caution de M. [H] [B],

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

- fait masse des dépens qui devront être supportés pour moitié par chacune des parties.

Mme [W] [B] a régulièrement relevé appel de ce jugement, par déclaration reçue au greffe le 21 janvier 2020, portant sur les chefs de dispositif l'ayant condamnée à payer au titre de son engagement de caution la somme de 30 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 août 2017, ayant ordonné la capitalisation des intérêts et ayant rejeté sa demande reconventionnelle.

Au terme de conclusions n°3 notifiées le 7 janvier 2022, l'appelante demande à la Cour de :

Statuant sur l'appel qu'elle a interjeté à l'encontre du jugement rendu le 5 décembre 2019 par le Tribunal de commerce de Dijon,

- dire qu'il a été bien appelé et mal jugé,

En conséquence,

- réformer le jugement entrepris sur les chefs de jugement suivants :

condamne Mme [W] [U] épouse [B] au titre de son engagement de caution à payer la somme de 30 000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 23 août 2017,

ordonne la capitalisation des intérêts,

rejette la demande reconventionnelle de Mme [W] [U] épouse [B],

A titre principal, sur le sursis à statuer dans l'attente de la vente du fonds de commerce,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de sursis à statuer,

- surseoir à statuer dans l'attente de la cession du fonds de commerce de la SARL Jean Bart,

A titre subsidiaire, sur l'information annuelle de la caution,

Vu l'ancien article L313-22 du code monétaire et financier,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que le Crédit Mutuel du Val de Saône

Sud a respecté son obligation d'information annuelle à l'égard de la caution,

- juger que le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud ne démontre pas avoir exécuté son obligation d'information annuelle à son égard,

En conséquence,

- débouter le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud de sa demande de remboursement de paiement de la caution (sic),

A titre infiniment subsidiaire, sur la demande d'échelonnement de paiement,

Vu l'article 1343-5 du code civil,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de d'échelonnement de paiement,

- juger recevable et bien fondée sa demande d'échelonnement sur une période de deux ans du paiement des sommes dues au Crédit Mutuel du Val de Saône Sud,

En tout état de cause, sur sa demande reconventionnelle,

Vu les articles 1231-1 et suivants du code civil,

Vu l'ancien article L 341-4 du code de la consommation,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes,

- juger que le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud a manqué à ses obligations pour les causes ci avant dites,

- juger que le cautionnement qu'elle a consenti était manifestement disproportionné par rapport à ses ressources,

En conséquence,

- condamner le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre les intérêts légaux à compter de l'arrêt à intervenir,

- condamner le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le Crédit Mutuel du Val de Saône Sud aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions n°3 notifiées le 17 janvier 2022, la Caisse de Crédit Mutuel du Val de Saône Sud demande à la Cour de :

Vu les articles 1134, 1147, 2288 et suivants du code civil,

- juger n'y avoir lieu à sursis à statuer,

- juger que le défaut d'information annuelle de la caution ne peut avoir pour conséquence l'allocation de dommages et intérêts et, en tout état de cause, à supposer qu'une déchéance du droit aux intérêts soit sollicitée et prononcée, que celle-ci n'a aucune conséquence sur l'engagement limité de caution de Mme [W] [U] épouse [B],

- juger n'y avoir lieu à délai de paiement,

- juger que la disproportion de l'article L 341-4 du code de la consommation ne peut avoir pour conséquence l'allocation de dommages et intérêts et, qu'en tout état de cause, la banque n'a commis aucune faute, le cautionnement n'étant pas manifestement disproportionné,

- juger qu'elle n'a pas engagé sa responsabilité à l'égard de Mme [W] [U] épouse [B],

En conséquence,

- confirmer intégralement le jugement dont appel, sauf à laisser à la charge de Mme [W]

[U] épouse [B] les dépens de première instance,

Y ajoutant,

- condamner Mme [W] [U] épouse [B] à lui verser une somme de 2 000 euros en

application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers

dépens d'appel qui comprendront les frais d'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire.

La clôture de la procédure a été prononcée le 22 février 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est référé, pour

l'exposé des moyens des parties, aux écritures évoquées ci-dessus.

SUR QUOI

- Sur la demande de sursis à statuer

L'appelante reproche aux premiers juges de n'avoir pas répondu à son argumentation relative au nantissement du fonds de commerce.

Elle rappelle que le prêteur disposait d'un nantissement à hauteur de 120 000 euros sur le fonds de commerce de la société Jean Bart, en garantie du prêt consenti à cette dernière.

Elle indique ignorer si le fonds de commerce a été cédé et si des fonds ont été versés par le

mandataire judiciaire au Crédit Mutuel, sur le produit de cette vente.

Or, ainsi que l'a retenu le tribunal, la caution ayant renoncé au bénéfice de discussion, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la vente du fonds de commerce, étant ajouté que la liquidation judiciaire de la société emprunteur a été prononcée le 16 octobre 2016 et clôturée pour insuffisance d'actifs le 16 octobre 2018, de sorte que le fonds de commerce n'existe plus.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer.

- Sur le respect par la banque de l'obligation d'information annuelle de la caution

Se prévalant des dispositions de l'article L 313-22 du code monétaire et financier, Mme [B]

prétend ne pas avoir reçu le courrier d'information de l'année 2015 en affirmant que la copie des courriers d'information produits par la banque ne suffit pas pour apporter la preuve du respect de l'obligation d'information annuelle de la caution.

Elle sollicite en conséquence le rejet des demandes formées à son encontre par le Crédit Mutuel.

Or, ainsi que le relève à bon droit l'intimée, l'article L 313-22 du code monétaire et financier qui prévoit que les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement, sanctionne le non respect de cette obligation par la déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information, qui n'est pas sollicitée par Mme [B], et ne prive pas le prêteur de son droit de se prévaloir de l'engagement de caution.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a rejeté ce moyen de défense de l'appelante.

La créance de la Caisse de Crédit Mutuel du Val de Saône Sud a été déclarée au mandataire

liquidateur de la société Jean Bart le 23 août 2017 pour un montant exigible de 119 734,04 euros.

Le jugement mérite ainsi confirmation en ce qu'il a condamné Mme [B] au paiement de la

somme de 30 000 euros, au titre de son engagement de caution, avec intérêts au taux légal à compter de cette date.

- Sur la responsabilité de la banque

Se prévalant des dispositions de l'article L 341-4 du code de la consommation, l'appelante reproche à la banque d'avoir manqué à son devoir de mise en garde et de lui avoir fait souscrire un engagement de caution manifestement disproportionné à ses revenus et patrimoine.

Elle explique que, lors de la souscription de son engagement, elle a cru s'être portée caution

solidaire avec son époux d'une somme maximale de 30 000 euros et s'être ainsi engagée personnellement à hauteur de 15 000 euros, faisant grief à la banque d'avoir manqué à son

obligation d'information.

Elle ajoute que, lors de la signature du cautionnement, le Crédit Mutuel n'a pas pris en compte l'ensemble de ses charges, alors, qu'à l'époque, elle était commerçante depuis le mois d'août 2013, qu'elle percevait un revenu de 858 euros et que ce revenu a fortement diminué par la suite, ayant dû fermer son commerce à la suite de sa liquidation judiciaire.

Elle affirme avoir été contrainte de vendre son bien immobilier au prix de 175 000 euros en 2017, sur lequel elle n'a perçu que 29 707,21 euros.

Elle sollicite en conséquence l'allocation d'une somme de 30 000 euros à titre de dommages-

intérêts.

Selon l'article L 341-4, devenu L332-1, du code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où elle est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Ces dispositions légales ne sont donc pas sanctionnées par l'allocation de dommages-intérêts

ainsi que l'objecte à bon droit la société intimée.

Il ne ressort d'aucune des pièces produites que l'engagement de caution de Mme [B] devait être solidaire de celui de son époux, le contrat de prêt signé par cette dernière prévoyant expressément deux engagements de caution garantissant chacun le prêt à hauteur de 30 000 euros et la mention manuscrite apposée par l'appelante sur son acte de caution indiquant que l'engagement était souscrit dans la limite de 30 000 euros.

Aucun manquement de la banque à son obligation d'information n'est donc caractérisé.

Lors de la souscription d'un cautionnement, les établissements de crédit ne peuvent se voir

imposer un devoir de mise en garde, consistant à vérifier les capacités financières de la caution et à attirer son attention sur les risques liés à l'endettement résultant de l'engagement, qu'à la double condition que la caution soit non avertie et que le crédit consenti entraîne un endettement excessif au regard de ses capacités financières.

La banque ne soutient pas que l'appelante était une caution avertie.

Lors de la souscription de son engagement, Mme [B] a renseigné une fiche patrimoniale à l'attention du prêteur qui mentionne qu'elle disposait alors d'un revenu mensuel de 1 500 euros, auquel s'ajoutait une pension alimentaire de 3 500 euros, et d'un patrimoine immobilier valorisé à 220 000 euros, financé à l'aide d'un prêt constituant un passif de 120 000 euros.

Elle ne saurait soutenir désormais que sa situation financière était en réalité moins favorable que celle résultant des déclarations faites au créancier lors de la souscription du contrat de

cautionnement, l'exigence de bonne foi au stade de la formation du contrat lui imposant de

déclarer spontanément l'ensemble des charges qui obèraient son patrimoine.

Il ressort de ces éléments que l'appelante échoue à rapporter la preuve que son engagement de caution était inadapté à ses capacités financières.

Elle ne démontre pas davantage qu'il existait un risque d'endettement né de l'octroi du prêt

garanti, résultant de l'inadaptation de ce prêt aux capacités financières de l'emprunteur.

La banque n'était donc tenue d'aucun devoir de mise en garde à son égard et, ajoutant au

jugement entrepris, Mme [B] sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

- Sur la demande de délais de paiement

A titre subsidiaire, Mme [B] se prévaut des dispositions de l'article 1343-5 du code civil pour

solliciter les plus larges délais pour s'acquitter de sa dette, en invoquant sa situation financière

précaire.

Elle fait valoir qu'elle est à la recherche d'un emploi, qu'elle doit faire face aux demandes de ses autres créanciers et qu'elle souffre d'un cancer des poumons, ce qui a une incidence sur ses revenus qui ne sont constitués que d'indemnités journalières inférieures à 700 euros mensuels.

L'intimée s'oppose à la demande de délais de paiement.

Selon l'article 1244-1 devenu l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la

situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Le pouvoir d'accorder ou de refuser un délai de grâce est considéré comme un pouvoir souverain qui doit être motivé par les circonstances de l'espèce et notamment, s'agissant de la situation du débiteur, par ses difficultés passagères, ses offres de paiement sérieuses, et par la perspective d'un échéancier raisonnable, qui doit demeurer pertinent au regard des sommes dues, de leur ancienneté, des éventuels délais amiables déjà alloués, et plus généralement de la foi due aux contrats.

Si Mme [B] justifie des difficultés financières qu'elle invoque, elle n'explique pas comment,

au regard de ses faibles revenus, elle pourrait faire face aux échéances mensuelles de 1 250 euros qu'elle devrait régler dans le cadre du rééchelonnement de sa dette sur deux ans, alors qu'elle a déjà, de fait, bénéficié d'un délai de plus de quatre ans pour s'en acquitter.

Le jugement sera ainsi également confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de délai de grâce.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a partagé les dépens par moitié entre les parties, la banque étant déboutée de l'ensemble de ses demandes formées contre M. [B].

L'appelante qui succombe supportera la charge des dépens de la procédure d'appel.

En revanche, il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'intimée, au regard de la disparité économique existant entre les parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement rendu le 5 décembre 2019 par le Tribunal de commerce de Dijon en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Déboute Mme [W] [U] épouse [B] de sa demande de dommages-intérêts,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à

hauteur d'appel,

Condamne Mme [W] [U] épouse [B] aux dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00130
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;20.00130 ?
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