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12/05/2022 | FRANCE | N°21/00042

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 12 mai 2022, 21/00042


MW/IC















[D] [P]



C/



[X] [G]

































































































Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON>


2ème chambre civile



ARRÊT DU 12 MAI 2022



N° RG 21/00042 - N° Portalis DBVF-V-B7F-FTH5



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 13 novembre 2020,

rendue par le tribunal judiciaire de Chalon sur Saône - RG : 1119000619











APPELANTE :



Madame [D] [P]

née le 14 juillet 1966 à [Localité 5] (26)

domiciliée :

Lieudit '[Adresse 4]'

[Localité 2]



représentée par Me Claire GERBAY, avocat au...

MW/IC

[D] [P]

C/

[X] [G]

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème chambre civile

ARRÊT DU 12 MAI 2022

N° RG 21/00042 - N° Portalis DBVF-V-B7F-FTH5

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 13 novembre 2020,

rendue par le tribunal judiciaire de Chalon sur Saône - RG : 1119000619

APPELANTE :

Madame [D] [P]

née le 14 juillet 1966 à [Localité 5] (26)

domiciliée :

Lieudit '[Adresse 4]'

[Localité 2]

représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126

assistée de Me Nathalie CARRERE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Madame [X] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Cécile RENEVEY - LAISSUS, membrede la SELARL ANDRE DUCREUX RENEVEY BERNARDOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 2

assistée de Me Leslie BORDIGNON, avocat au barreau de Mâcon

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 mars 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, Président,

Michel WACHTER, Conseiller, qui a fait le rapport sur désignation du Président,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 12 Mai 2022,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 13 septembre 2018, Mme [D] [P] a remis à Mme [X] [G] un cheval mâle de race Shire, né le 14 mai 2012, nommé Alderley Mastermind et surnommé 'Dandy'.

Aucun contrat n'a été établi par les parties, mais une déclaration de vente a été régularisée le jour-même, et la remise de l'équidé s'est accompagnée de la transmission du livret ainsi que du certificat d'immatriculation du cheval.

Par exploit du 3 juin 2019, Mme [P] a fait assigner Mme [G] devant le tribunal d'instance de Chalon sur Saône aux fins de restitution du cheval sous astreinte, au visa de l'article 544 du code civil.

La demanderesse a exposé :

- que, dans le cadre de leurs relations amicales, les parties avaient convenu d'un arrangement au terme duquel le cheval était mis à l'essai chez Mme [G] pendant une période d'un mois, à l'issue de laquelle il devait être vendu à celle-ci pour la somme de 5 000 euros, payable en une première échéance de 1 000 euros suivie de deux échéances de 2 000 euros ;

- qu'ayant constaté que le cheval ne bénéficiait pas de soins suffisants chez Mme [G], elle avait mis fin à la période d'essai par SMS adressé le 6 octobre 2018 ; que Mme [G] avait dans un premier temps acquiescé à cette solution, sous réserve du remboursement immédiat et en espèce des frais engagés, avant finalement de s'y opposer ;

- que la facture remise à Mme [G] mentionnait la période d'essai ainsi que le prix de vente du cheval ; que la déclaration de vente au verso de la carte d'immatriculation avait bien été renseignée, et qu'en tout état de cause, aucun écrit n'était exigé pour la vente ;

- qu'en aucun cas elle n'avait fait donation du cheval à Mme [G], laquelle ne démontrait pas d'intention libérale ; que le certificat d'immatriculation ne constituait qu'une préseomption de propriété, et que ce document avait été remis à la défenderesse comme étant nécessaire à la prise en charge de l'animal ; que le transfert de propriété et le changement d'immatriculation devaient être effectués dans les 30 jours de la vente, et que Mme [G] ne s'en était préoccupée qu'à partir du moment où la rupture de la période d'essai lui avait été notifiée ;

- que l'article 2276 du code civil relatif à la propriété des biens meubles n'était pas applicable, dans la mesure où les conditions posées par les articles 2261 et 2262 du même code n'étaient pas remplies, le cheval ayant été retenu contre sa volonté et la possession n'ayant pas duré plus d'un an.

Mme [G] a sollicité le rejet des demandes formées à son encontre, et a fait valoir :

- que Mme [P] ne lui a jamais remis la facture produite aux débats, qui ne portait d'ailleurs pas sa signature ;

- que la remise du livret et de la carte d'immatriculation du cheval officialisait le transfert de propriété ; que le formulaire de déclaration de vente devait être rempli à chaque changement de propriétaire, y compris en cas de cession à titre gratuit ; que le transfert de propriété avait été enregistré le 12 octobre 2018 dans le délai réglementaire imparti ;

- qu'en vertu de l'article 2276 du code civil, en matière de meubles, la possession valait titre, et qu'elle justifiait d'une possession continue, ininterrompue, paisible, publique et non-équivoque puisqu'elle avait hébergé et entretenu l'animal aux yeux de tous et en avait pris soin en qualité de propriétaire ;

- que la demanderesse, à laquelle incombait la charge de la preuve, ne démontrait nullement l'existence d'un contrat de vente après période d'essai.

Par jugement du 13 novembre 2020, le tribunal a :

- débouté Mme [D] [P] de sa demande en restitution du cheval mâle de race Shire, né le 14 mai 2012, nommé Alderley Mastermind et surnommé 'Dandy' immatriculé SIRE 6003 l372H ;

- débouté Mme [D] [P] de sa demande d'indemnisation au titre des frais irrépétibles ;

- débouté Mme [X] [G] de sa demande d'indemnisation au titre des frais irrépétibles ;

- condamné Mme [D] [P] aux entiers dépens de l'instance.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

- qu'il revenait à Mme [P] de prouver non seulement l'acte de vente dont elle se prévalait mais également l'existence d'une période d'essai qui aurait été convenue entre les parties, alors qu'il n'était pas contesté que le cheval avait été remis spontanément par la demanderesse à la défenderesse avec son certificat d'immatriculation le 13 septembre 2018 ;

- que si, eu égard à la valeur du cheval, supérieure à 1 500 euros, la preuve d'un acte de cession à titre onéreux ou gratuit aurait dû être rapportée par écrit, la liaison amicale attestée entre les parties caractérisait une impossibilité morale de constituer un écrit ; que la signature des parties apposée sur le verso du certificat d'immatriculation constituait un commencement de preuve par écrit de la conclusion d'un contrat portant transfert de propriété du cheval litigieux, qui était corroboré par la remise spontanée du cheval, et les échanges de SMS entre les parties qui confirmaient que le cheval avait été volontairement remis à Mme [G] ;

- que, cependant, la preuve de l'existence d'un contrat portant transfert de propriété ne présumait en rien de l'existence d'une période d'essai ou d'une quelconque faculté de rétractation au bénéfice u cédant, l'affirmation du caractère habituel d'une telle stipulation n'étant pas corroborée par les pièces produites, alors qu'elle était même contredite par la littérature scientifique versée par Mme [G] ; que la facture mentionnant la période d'essai n'était ni visée, ni approuvée, ni signée par Mme [G], ce qui lui ôtait tout caractère probant ;

- que la proposition initialement formulée par Mme [G] et tendant à ce que la demanderesse récupère le cheval à condition de l'indemniser des frais engagés ne constituait en rien un aveu judiciaire portant reconnaissance d'une quelconque période d'essai ; qu'enfin, il ressortait expressément d'un SMS adressé par la demanderesse à Mme [G] le 5 octobre 2018 que Mme [P] reconnaissait expressément ne pas avoir formalisé de contrat incluant une période d'essai.

Mme [P] a relevé appel de cette décision le 12 janvier 2021.

Par conclusions notifiées le 7 septembre 2021, l'appelante demande à la cour :

Vu les articles 893, 894 et 1582 et suivants du code civil,

- d'infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,

A titre principal,

- de juger que le contrat de cession du cheval Alderley Mastermind a été conclu à titre onéreux et avec une période d'essai de 30 jours à laquelle il a été mis un terme par Mme [P] selon courrier recommandé en date du 8 octobre 2018 ;

En conséquence,

- d'ordonner à Mme [G] d'avoir à restituer le cheval Alderley Mastermind, né le 14 mai 2012, immatriculé sous le numéro SIRE 60 031 372 H, avec astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;

- d'ordonner à Mme [G] d'avoir à restituer la carte de propriété du cheval dûment remplie et signée ;

A titre subsidiaire,

- de juger que la vente conclue sans accord sur le prix de celle-ci est nulle ;

- d'ordonner en conséquence à Mme [G] d'avoir à restituer le cheval Alderley Mastermind, né le 14 mai 2012, immatriculé sous le numéro SIRE 60 031 372 H, avec astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;

- d'ordonner à Mme [G] d'avoir à restituer la carte de propriété du cheval dûment remplie et signée ;

En tout état de cause,

- de condamner Mme [G] au paiement, à Mme [P], d'une somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions notifiées le 30 juillet 2021, Mme [G] demande à la cour :

Vu les articles 894, 1359, 1361, 2261, 2262 et 2276 du code civil,

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [P] de sa demande de restitution du cheval prénommé Alderley Mastremind n° SIRE 60031372 H ;

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [P] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

- de condamner Mme [P] à payer à Mme [G] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

La clôture de la procédure a été prononcée le 15 février 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

La réalité de la cession du cheval Alderley Mastermind par Mme [P] à Mme [G] n'est pas contestée.

Les parties sont cependant en désaccord, d'une part sur le caractère gratuit ou onéreux de cette cession, d'autre part sur la stipulation d'une période d'essai.

Il appartient à Mme [G], qui soutient avoir bénéficié d'un don, de démontrer l'intention libérale de l'appelante. Cette preuve n'est pas suffisamment rapportée par la production d'une attestation établie par M. [M] [G], eu égard au lien familial étroit l'unissant à l'intimée, qui incite à prendre ses déclarations avec circonspection, alors en outre que l'intéressé, qui déclare avoir été présent lors de la remise du cheval, n'a en tout état de cause pas assisté aux échanges antérieurs au cours desquels ont été déterminées les modalités de la cession. Une telle preuve ne peut par ailleurs pas résulter de l'emploi par Mme [P], dans un SMS adressé à Mme [G], du terme 'adopter', qui est communément et indifféremment employé pour désigner l'accueil d'un animal acquis à titre gratuit ou onéreux.

Dès lors que la cession ne s'est pas faite à titre gratuit, elle l'a été à titre onéreux.

Mme [P] reprend son argumentation de première instance, en faisant valoir que la vente avait été conclue moyennant la stipulation d'une période d'essai, et que celle-ci ne lui ayant pas donné satisfaction quant aux soins dispensés au cheval, il a été mis fin à la vente.

L'attestation de M. [S], outre qu'elle émane d'un ami de Mme [P], ne rapporte que les propos qui lui ont été rapportés par l'appelante elle-même, et ne saurait dès lors avoir de valeur probante particulière à cet égard.

Il en est de même de la copie de facture dont se prévaut Mme [P], s'agissant d'une pièce qu'elle a elle-même établie. C'est vainement qu'elle produit, pour établir l'authenticité de ce document, un procès-verbal de constat d'huissier qui démontre uniquement la cohérence entre la date portée sur ce document et celles des factures qui, dans le facturier examiné, et au regard de leur numérotation, lui sont immédiatement antérieure et postérieure. En l'absence de l'exemplaire original de cette facture, ce constat d'huissier ne permet en revanche en aucune façon de démontrer l'authenticité des mentions figurant au duplicata.

Par ailleurs, la stipulation d'une période d'essai n'est pas cohérente avec le fait, pour l'appelante, d'avoir signé dès le 13 septembre 2018 le certificat de vente, et accompagné celui-ci de la carte d'immatriculation de l'animal.

Au demeurant, ainsi que le confirment les modèles d'actes de cession de chevaux produits par Mme [G], la stipulation d'une période d'essai ne constitue pas la norme, et, dans les cas où elle est prévue, elle est toujours stipulée au bénéfice exclusif de l'acquéreur, ce qui s'explique aisément par le souci de s'assurer de l'état sanitaire de l'animal, de son aptitude à l'usage en vue duquel il a été acquis, et de son adaptation à son nouvel environnement. Ainsi, et même en retenant qu'il ait été convenu d'une période d'essai, Mme [P] ne démontre pas, à défaut de précision particulière à cet égard sur la facture litigieuse, que cette stipulation aurait été faite à son profit.

C'est donc à bon droit que le tribunal a écarté l'argumentation tirée de la période d'essai pour rejeter les demandes de Mme [P].

A hauteur d'appel, celle-ci conclut subsidiairement à la nullité de la vente pour indétermination du prix. Elle considère que s'il n'est pas accordé de valeur probante à la facture dont elle se prévaut s'agissant de la stipulation d'une période d'essai, ce document ne peut avoir plus de valeur probante s'agissant du prix qui y est mentionné, ce qui rendrait celui-ci indéterminé.

Toutefois, Mme [P] ne peut, sans se contredire, soutenir que cette facture serait dépourvue de valeur probante après s'en être prévalue au soutien de ses demandes principales.

Au demeurant, la cour, comme le tribunal, a retenu l'existence d'une vente, étant observé que le prix de 5 000 euros, d'ailleurs cohérent avec les pièces produites, notamment celle attestant qu'elle avait elle-même acquis le cheval pour 4 500 euros en avril 2015, n'est en lui-même pas remis en cause.

Cette demande subsidiaire ne pourra donc qu'être écartée.

Le jugement entrepris sera en définitive confirmé en toutes ses dispositions.

Mme [P] sera condamnée aux dépens d'appel, et à payer à Mme [G] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Chalon sur Saône ;

Rejette la demande subsidiaire formée par Mme [D] [P] aux fins de résolution de la vente ;

Condamne Mme [D] [P] à payer à Mme [X] [G] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [D] [P] aux dépens d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00042
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.00042 ?
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