RUL/CH
S.A.S. EN'GO BOURGOGNE
C/
[A] [M]
Etablissement POLE EMPLOI BOURGOGNE FRANCHE COMTE
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 12 MAI 2022
MINUTE N°
N° RG 20/00276 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FQCJ
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHALON SUR SAÔNE, section INDUSTRIE, décision attaquée en date du 01 Juillet 2020, enregistrée sous le n° F 18/00313
APPELANTE :
S.A.S. EN'GO BOURGOGNE
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Me Christophe BALLORIN de la SELARL BALLORIN-BAUDRY, avocat au barreau de DIJON substitué par Me Emilie BAUDRY, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉS :
[A] [M]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Brigitte DEMONT-HOPGOOD de la SELARL HOPGOOD ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE substituée par Me Pierre NDONG NDONG, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
Etablissement PÔLE EMPLOI BOURGOGNE FRANCHE COMTE
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 3]
représenté par Me Anne GESLAIN de la SCP du PARC - CURTIL - HUGUENIN - DECAUX - GESLAIN - CUNIN - CUISINIER - BECHE - GARINOT, avocat au barreau de DIJON substituée par Me Diane MARQUE, avocat au barreau de DIJON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mars 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Olivier MANSION, Président de chambre,
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,
Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Kheira BOURAGBA,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Kheira BOURAGBA, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
M. [A] [M] a été embauché par la société MANGEMATIN, cédée par la suite à la société EN'GO BOURGOGNE, le 31 juillet 2001 en qualité d'ouvrier-plombier.
Lors de la rupture de la relation de travail, il occupait le poste de chef d'équipe, niveau IV, coefficient 250 de la convention collective des ouvriers du bâtiment.
Par courrier du 19 novembre 2018, il a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 26 novembre suivant.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 29 novembre 2018, il a été licencié pour faute grave.
Par requête du 24 décembre 2018, il a saisi le conseil de prud'hommes de CHÂLON-SUR-SAÔNE aux fins de voir son licenciement comme abusif et faire condamner l'employeur à lui payer diverses indemnités.
Par jugement du 1er juillet 2020, les premiers juges ont jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société EN'GO BOURGOGNE à lui verser diverses sommes à titre, notamment, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, outre 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration formée le 31 juillet 2020, la société EN'GO BOURGOGNE a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières écritures du 29 avril 2021, l'appelante demande de :
- infirmer le jugement déféré,
- juger que le licenciement repose sur une faute grave,
- débouter M. [M] de l'intégralité de ses demandes,
- le condamner à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'instance et d'appel.
Aux termes de ses dernières écritures du 11 mai 2021, M. [M] demande de :
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a limité à 20 000 euros le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la société EN'GO BOURGOGNE à lui verser les sommes suivantes :
* 35 849,10 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en appel,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Aux termes de ses dernières écritures du 15 mars 2021, Pôle Emploi, partie intervenante, demande de :
- lui donner acte de son intervention,
- dans le cas où la cour confirmerait le jugement déféré sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement :
* ordonner à la société EN'GO BOURGOGNE de lui rembourser la somme de 3 013,80 euros avec intérêts au taux légal de la date du jugement jusqu'au parfait paiement,
* condamner la société EN'GO BOURGOGNE à lui payer la somme de 450 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I - Sur le bien fondé du licenciement :
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave commise par le salarié.
Il est constant que lorsque les juges considèrent que les faits invoqués par l'employeur ne caractérisent pas une faute grave, ils doivent rechercher si ces faits n'en constituent pas moins une cause réelle et sérieuse de licenciement.
La lettre de licenciement du 29 novembre 2018 (pièce n° 2) ainsi que le courrier d'explications complémentaires du 7 décembre suivant (pièce n° 3) formulent plusieurs griefs dans les termes suivants :
- «En juin 2018, [E] [B], responsable du chantier de [Localité 6], vous a donné l'ordre de travailler sur un poste. N'appréciant pas votre responsable, vous lui avez signifié « rien à foutre, pas mon chantier, je n'aime pas l'entreprise ». Vous êtes donc resté assis, sur une caisse à outil, et avez refusé de travailler ».
- « En juillet 2018, après l'annonce du changement de Direction, Monsieur [G] [D] (Responsable Travaux EN'GO BOURGOGNE) a fait le tour des chantiers afin d'expliquer les nouvelles directives, vous lui avez répondu : « Je me fous de l'entreprise, rien ne changera, on attend de se faire virer ! Je veux travailler que sur [Localité 4], le reste je m'en fous' »
- « Le 05/09/2018, bien que [H] [N], Conducteur de Travaux, ait fait suivre un fichier récapitulatif TMA (Travaux Modificatif Apportés), vous n'avez aucunement
respecté les directives, et vous avez posé des meubles alors que le client n'en voulait pas. Vous avez ainsi refusé, volontairement, de suivre les exécutions. »
- « Le lundi 10/09/2018, sur le chantier de Montmuzard Tranche 4, [H] [N] vous a signifié, conjointement avec [S] [W], de réaliser des tuyauteries en PER. Vous avez répondu : « Je ne sais pas faire, je fais en cuivre. » Vous avez ainsi, refusé des directives et fait preuve de mauvaise volonté, face à une exigence de la Direction qui était à votre portée, techniquement, en tant que chef d'équipe. »
- « Le 19/09/2018, lors d'une réunion qui s'est tenue à [Localité 4], dans un cadre explicatif de la nouvelle Direction, vous avez ouvertement émis des propos blessants envers un salarié présent, [E] [B] : « Je t'aime pas, ne parle pas, t'es pas bon ! ». Vous avez tenu ces propos en présence de [G] [D] et [P] [V]. Par la suite, durant la même réunion, vous avez énoncé devant vos collègues et devant le délégué du personnel, Monsieur [Y] [U] : « Vous n'avez qu'à nous licencier, on retrouvera du boulot dans la minute. »
- « Le 19/10/2018, vous avez demandé à [C] [Z] l'emprunt du véhicule de la société pour un usage personnel durant le week-end. [G] [D] a refusé votre demande car contraire aux pratiques de l'entreprise. De ce fait, vous avez répondu à [C] [Z] par SMS : « OK ne plus rien me demander ».
- « Le 16 novembre 2018, [H] [N] s'est plaint à la suite de travaux délibérément mal effectués dans 3 logements du chantier de Montmuzard tranche 4 ».
M. [M] soutient que les quatre premiers griefs sont prescrits car plus de deux mois se sont écoulés entre leur survenance et sa convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 19 novembre 2018 sans que l'employeur ne démontre ne pas avoir eu connaissance de ce grief moins de 2 mois avant cette date.
S'agissant du cinquième grief, il soutient qu'il est également prescrit car l'employeur ne justifie pas que la lettre de convocation à l'entretien préalable a été envoyée le 19 novembre 2018 et non pas postérieurement, le formulaire d'envoi n'étant pas daté et aucun avis de réception n'est produit. (pièce n° 1)
Pour sa part, l'employeur oppose que l'attitude négative, agressive et insubordonnée de M. [M] au sein de la société depuis plusieurs mois a trouvé son paroxysme le 19 octobre 2018 quand il a déclaré à son employeur "de ne plus rien lui demander". C'est un mois plus tard, le 19 novembre 2018, qu'elle a décidé de le convoquer à un entretien préalable à son éventuel licenciement, soit moins de deux mois après les faits dénoncés par M. [B]. Dans ces conditions, elle estime que les faits reprochés ne sont pas prescrits.
En application des dispositions de l'article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.
Par ailleurs, l'employeur est fondé à se prévaloir au soutien d'un licenciement pour motif disciplinaire de griefs, même prescrits à la date de l'engagement de la procédure disciplinaire s'ils procèdent du même comportement fautif que les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ou s'ils sont de même nature.
Il convient donc d'examiner les griefs récents constatés dans les deux mois précédant l'engagement de la procédure, de sorte que si au moins l'un d'entre eux est vérifié, pourront, le cas échéant, être invoqués utilement les griefs plus anciens :
- « Le 19/09/2018, lors d'une réunion qui s'est tenue à [Localité 4], dans un cadre explicatif de la nouvelle Direction, vous avez ouvertement émis des propos blessants envers un salarié présent, [E] [B] : « Je t'aime pas, ne parle pas, t'es pas bon ! ». Vous avez tenu ces propos en présence de [G] [D] et [P] [V]. Par la suite, durant la même réunion, vous avez énoncé devant vos collègues et devant le délégué du personnel, Monsieur [Y] [U] : « Vous n'avez qu'à nous licencier, on retrouvera du boulot dans la minute. »
M. [M] conteste avoir tenu les propos rapportés.
Au-delà du fait qu'il convient de relever que si la phrase "Vous n'avez qu'à nous licencier, on retrouvera du boulot dans la minute" témoigne du caractère tendu de la réunion et de l'instauration d'un rapport de force, les termes employés ne présentent aucun caractère injurieux ou même déplacé.
S'agissant de la phrase « Je t'aime pas, ne parle pas, t'es pas bon ! » adressée à M. [B], il convient de relever que celui-ci, pourtant premier concerné, n'atteste pas de sa réalité.
Enfin, s'agissant de l'attestation de M. [D] (pièce n° 11), il ressort des écritures des parties que celui-ci a rectifié son attestation initiale en réponse à une demande de l'employeur sur un des autres griefs énoncés (pièce n° 16). Il en résulte que les conditions dans lesquelles celui-ci atteste pour le compte de la société EN'GO BOURGOGNE, dont il reste par ailleurs un salarié (responsable de travaux), créent une suspicion quant à l'authenticité de ses déclarations. Elle n'emporte donc pas conviction et ne sera pas prise en considération
Au surplus, il peut être observé qu'aucun autre participant à la réunion, notamment M. [V], n'atteste des propos qui y ont été tenus.
Dans ces conditions, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la fin de non recevoir tiré de la prescription du fait qu'il n'est pas justifié de l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable au plus tard le 19 novembre 2018, il y a lieu de considérer que le grief n'est pas fondé.
- « Le 19/10/2018, vous avez demandé à [C] [Z] l'emprunt du véhicule de la société pour un usage personnel durant le week-end. [G] [D] a refusé votre demande car contraire aux pratiques de l'entreprise. De ce fait, vous avez répondu à [C] [Z] par SMS : « OK ne plus rien me demander ».
M. [M] soutient qu'en contrepartie des heures supplémentaires non rémunérées et non récupérées effectuées, il pouvait bénéficier d'un camion de l'entreprise pour ses besoins personnels. Il ajoute que lorsqu'il en a fait la demande le 19 octobre 2018, son employeur a refusé de sorte qu'il a signifié que dorénavant, il ne fallait plus compter sur lui pour réaliser des heures de travail au-delà de ses horaires contractuels sans rémunération.
Au-delà du fait qu'il convient de relever que la phrase "OK ne plus rien me demander" n'a aucun sens si elle n'est pas replacée dans son contexte et que les termes employés ne présentent aucun caractère injurieux ou même déplacé, M. [M] produit à l'appui de ses dires une attestation de M. [U] qui l'assistait le jour de l'entretien préalable en qualité de délégué du personnel.
Cette attestation, dont les termes comme les conditions de rédaction ne sont pas de nature à créer un quelconque soupçon quant à l'authenticité des propos rapportés, et donc d'anéantir sa force probante, confirme la teneur des explications fournies par le salarié à son employeur. (pièce n° 6)
Dans ces conditions, il ne saurait être reproché à M. [M] d'avoir signifié à son employeur de façon directe mais non discourtoise qu'en l'absence de contrepartie, il n'accepterait plus de faire des heures supplémentaires non rémunérées et non récupérées.
Le grief n'est donc pas fondé.
- « Le 16 novembre 2018, [H] [N] s'est plaint à la suite de travaux délibérément mal effectués dans 3 logements du chantier de Montmuzard tranche 4 ».
M. [M] conteste également ce grief et affirme que les travaux qu'il a effectués l'ont été dans les règles de l'art. Il ajoute qu'une vingtaine de salariés de l'entreprise est intervenue sur ce chantier et les problèmes constatés concernaient des travaux de tuyauterie qu'il n'a pas réalisé.
Pour sa part, l'employeur produit un courrier électronique de M. [N], conducteur de travaux, du 16 novembre 2018 désignant M. [M] comme étant l'auteur des malfaçons (pièce n° 13 et 15)
Néanmoins, ce seul élément ne permet pas de corroborer la mise en cause de M. [M].
En effet, celui-ci écrit : "[G], Je te fais un constat du travail de [A] [M] sur chantier de Montmuzard, je pense que nous allons recevoir des factures de tierce entreprise car il a percé des faïences pour pose évier et lavabo alors que le tableau communiqué ne présente pas de pose d'appareillage dans ces logements. Le problème s'est répercuté sur 3 logements environ. Ceci n'est pas acceptable pour un chef d'équipe". Or il n'est fait aucune mention des circonstances ni même de la date à laquelle il a eu ou pu avoir connaissance des faits qu'il rapporte. En outre, faire le "constat du travail de [A] [M]" est insuffisant pour pouvoir utilement affirmer que les malfaçons prétendument constatées, mais dont il n'est pas justifié qu'elles ont été vérifiées et le cas échéant expliquées, sont de son fait.
En outre, l'attestation de M. [J] fait référence à un autre chantier non mentionné dans la lettre de licenciement, de sorte qu'elle est dépourvue de valeur probante. (pièce n° 12)
Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le grief n'est pas fondé.
Au regard des développements qui précèdent, il y a lieu de relever que les quatre autres griefs énoncés, respectivement datés de juin, juillet et septembre 2018, se situent plus de deux mois avant la date de convocation de M. [M] à l'entretien préalable le 19 novembre 2018.
Dès lors, l'employeur ne démontrant pas ni même allègue en avoir eu connaissance moins de 2 mois avant ladite convocation, les quatre premiers griefs reprochés à M. [M] datés de juin, juillet et septembre 2018 sont prescrits.
Dans ces conditions, en l'absence d'une part de grief de nature à justifier une faute grave ou à défaut une cause réelle et sérieuse de licenciement, et d'autre part de grief non prescrit, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
II - Sur les demandes pécuniaires :
a) Sur l'indemnité compensatrice de préavis :
M. [M] sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il lui a alloué la somme de 5 121,30 euros bruts à ce titre, outre 512,13 euros au titre des congés payés afférents.
L'employeur conclut au rejet de la demande au motif que le licenciement repose sur une faute grave.
Sur la base d'un salaire de référence sur les trois derniers mois de salaire s'établissant à 2 560,65 euros, somme non discutée par les parties et justifiée par la production des bulletins de salaire (pièce n° 5), il sera alloué à M. [M] la somme de 5 121,30 euros outre 512,13 euros au titre des congés payés afférents, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.
b) Sur l'indemnité de licenciement :
Sur la base d'une ancienneté de 17 ans et 6 mois au jour du licenciement, incluant la durée de son préavis, M. [M] sollicite confirmation du jugement déféré en ce qu'il lui a alloué la somme de 12 803,25 euros.
La société EN'GO BOURGOGNE oppose que le licenciement reposant sur une faute grave privative d'indemnité de licenciement, il y a lieu de rejeter la demande.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il sera alloué à M. [M] la somme de 12 803,25 euros à ce titre, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.
c) Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
En application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'instance, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par le texte.
Pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant, des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture. Cette indemnité est cumulable, le cas échéant, avec les indemnités prévues aux articles L. 1235-12, L. 1235-13 et L. 1235-15, dans la limite des montants maximaux prévus au présent article.
Sur la base d'un salaire brut mensuel moyen 2 560,65 euros, M. [M] sollicite la somme de 35 849,10 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, somme correspondant à 14 mois de salaire.
Il allègue à l'appui de sa demande d'une ancienneté de 17 ans et 6 mois, et d'un préjudice financier résultant du fait qu'il n'a pas retrouvé d'emploi stable avant le 1er janvier 2021 et pour un salaire de 1 715 euros inférieur à celui dont il bénéficiait au sein de la société EN'GO.
Il ajoute que dans l'intervalle, il a travaillé en intérim et que sa rémunération était également moindre qu'auparavant.
Il produit à l'appui de ses affirmations des attestations Pôle emploi, ses bulletins de paye et contrat de travail (pièces n° 7 à 12)
La société EN'GO BOURGOGNE conclut au rejet de la demande et oppose que M. [M] ne justifie d'aucun préjudice et qu'il a rapidement retrouvé un travail.
Compte tenu de ces circonstances, le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera fixé à 20 000 euros, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.
III - Sur le remboursement des indemnités chômage :
Selon l'article L.1235-4 du code du travail, "dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé".
En l'espèce, Pôle Emploi justifie avoir versé à M. [M] des allocations de chômage au titre de 70 allocations journalières (6 jours à 42,78 euros et 64 jours à 43,08 euros) pour la période du 26 janvier 2019 au 31 janvier 2019, du 1er avril 2020 au 31 mai 2020, et du 29 juin 2020 au 30 juin 2020 (pièce n° 1), et réclame en conséquence le remboursement de la somme de 3 013,80 euros avec intérêts au taux légal de la date du jugement jusqu'au parfait paiement.
La société EN'GO BOURGOGNE conclut au rejet de la demande au motif que le licenciement est fondé sur une faute grave.
En conséquence la demande sera accueillie, le jugement déféré étant confirmé sur ce point et précisé s'agissant du montant alloué.
IV - Sur les demandes accessoires :
- Sur l'envoi d'une copie de la décision à Pôle Emploi :
M. [M] sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit qu'une copie certifiée conforme [du présent jugement] sera adressée à la Direction Générale de Pôle Emploi par le secrétariat-greffe dans les conditions prévues par l'article R 1235-2 du code du travail.
Ce texte n'étant applicable que lorsque le remboursement des allocations de chômage a été ordonné d'office par le conseil de prud'hommes ou la cour d'appel, la demande formulée à ce titre est donc sans objet et sera rejetée, le jugement déféré étant infirmé sur ce point.
- Sur la remise des documents légaux de fin de contrat :
M. [M] sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a ordonné à la société EN'GO BOURGOGNE de lui remette "les documents légaux de fin de contrat prenant en compte le présent jugement", et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement.
La demande telle que formulée ne permettant pas à la cour de déterminer la nature des documents concernés, celle-ci sera rejetée, le jugement déféré étant infirmé sur ce point.
- Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
La société EN'GO BOURGOGNE sera condamnée à verser à M. [M] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande de la société EN'GO BOURGOGNE à ce titre sera rejetée.
La société EN'GO BOURGOGNE succombant au principal, elle supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Chalon-sur-Saone du 1er juillet 2020 sauf en ce qu'il a :
- ordonné à la société EN'GO BOURGOGNE de remettre à M. [A] [M] les documents légaux de fin de contrat sous astreinte,
- dit qu'une copie certifiée conforme de la décision rendue sera adressée à la direction générale de Pôle Emploi,
Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant
REJETTE les demandes au titre de :
- la remise des documents légaux de fin de contrat sous astreinte,
- la transmission à Pôle Emploi d'une copie certifiée conforme de la présente décision,
PRÉCISE que la somme allouée à Pôle Emploi au titre du remboursement des indemnités chômage s'élève à 3 013,80 euros,
CONDAMNE la société EN'GO BOURGOGNE à verser à M. [A] [M] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE la demande de la société EN'GO BOURGOGNE au titre de l'article 700 code de procédure civile,
CONDAMNE la société EN'GO BOURGOGNE aux dépens d'appel.
Le greffierLe président
Kheira BOURAGBAOlivier MANSION