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05/05/2022 | FRANCE | N°21/01567

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 05 mai 2022, 21/01567


FV/LL















[C] [T]



C/



SELARL MJ & ASSOCIES

































































































Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPE

L DE DIJON



2ème Chambre Civile



ARRÊT DU 05 MAI 2022



N° RG 21/01567 - N° Portalis DBVF-V-B7F-F2V4



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 29 novembre 2021,

rendue par le tribunal de commerce de Dijon - RG : 2020/3562







APPELANTE :



Madame [C] [T]

née le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 7] (87)

domiciliée :

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Eric SEUTET, avocat au barre...

FV/LL

[C] [T]

C/

SELARL MJ & ASSOCIES

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 05 MAI 2022

N° RG 21/01567 - N° Portalis DBVF-V-B7F-F2V4

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 29 novembre 2021,

rendue par le tribunal de commerce de Dijon - RG : 2020/3562

APPELANTE :

Madame [C] [T]

née le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 7] (87)

domiciliée :

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Eric SEUTET, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 108

INTIMÉE :

SELARL MJ & ASSOCIES, prise en la personne de Maître [U] [N] ès qualités de liquidateur de la SARL [A] [M] ET COMPAGNIE

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 mars 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, Président, ayant fait le rapport,

Michel WACHTER, Conseiller,

Sophie BAILLY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

MINISTERE PUBLIC : l'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur Christophe Aubertin, Substitut Général

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 05 Mai 2022,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant jugement du 4 décembre 2012, le tribunal de commerce de Dijon ouvre une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la Sarl Entreprise [A] [M] et Compagnie qui exerce une activité de travaux public et particuliers à Meursault et dont la dirigeante de droit est Madame [C] [E] épouse [T].

Un plan de redressement est adopté le 18 février 2014.

Par jugement du 5 septembre 2017, le tribunal de commerce de Dijon convertit le redressement judiciaire en liquidation judiciaire. La Selarl MJ & Associés est désignée en qualité de liquidateur, et la date de cessation des paiements est provisoirement fixée au 28 février 2017. Cette date devient définitive faute de demande de report.

Par acte d'huissier du 20 août 2020, le liquidateur assigne Madame [C] [D] devant le tribunal de commerce de Dijon aux fins d'obtenir à son encontre à titre principal le prononcé d'une mesure de faillite personnelle pour une durée de 15 ans, et à titre subsidiaire une interdiction de gérer pour la même durée.

Il reproche à Madame [T] une abstention volontaire de coopérer avec les organes de la procédure faisant obstacle à son bon déroulement et une absence de comptabilité.

Il expose que Madame [T] n'a jamais répondu à ses demandes de communication du nom de l'assureur des locaux et des véhicules de la société ; qu'elle n'a répondu que deux mois après une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 26 octobre 2017 sollicitant son accord pour qu'il soit procédé à la vente aux enchères publiques des actifs mobiliers dépendant de la liquidation judiciaire ; qu'enfin, malgré plusieurs demandes en ce sens, elle n'a jamais remis les archives comptables de la société ni indiqué où elles de trouvaient.

Suivant rapport déposé le 25 février 2021, le juge-commissaire estime que les manquements de Madame [T] justifient le prononcé d'une sanction.

Madame [T] conclut au débouté du liquidateur.

Elle souligne que pendant 17 ans elle a géré la société sans difficulté, et que ce sont à la fois une chute d'activité en 2010 et le décès brutal de son associé en 2017 qui ont conduit au redressement judiciaire.

Elle conteste l'absence de réponse aux sollicitations du liquidateur, relevant que les courriers ont été adressés pour celui du 7 septembre 2017 au siège social de la société en liquidation judiciaire alors que son adresse personnelle figure au Kbis de la société, puis celui du 26 octobre 2017 à une adresse qui n'est pas la sienne ; que ce n'est que lorsque le liquidateur l'a contactée par e-mail cette fois à la bonne adresse qu'elle a immédiatement répondu.

Elle relève, concernant l'accord pour vendre les actifs dépendant de la liquidation judiciaire, que c'est le juge-commissaire qui a seul compétence pour délivrer une telle autorisation ; qu'au surplus, le liquidateur lui a écrit le 26 octobre 2017, puis le 1er février 2018 pour obtenir cet accord alors qu'il s'avère qu'il avait entre-temps le 5 décembre 2017 saisi le juge-commissaire, lequel a statué le 2 février 2018 en visant son accord écrit. Elle souligne qu'elle était par ailleurs présente lors de la vente aux enchères publiques.

Sur l'absence de remise des archives comptables malgré un courrier du 27 avril 2018, elle expose qu'elle suivait alors une formation en région parisienne (du 12 février au 24 mai 2018) et qu'elle au même moment rencontré des problèmes de santé entraînant son hospitalisation du 13 au 15 mai 2018. Elle conteste par ailleurs l'indication du commissaire priseur selon laquelle, lors de son passage dans l'entreprise, il n'a constaté la présence d'aucune archive, soutenant que pour accéder au dépôt couvert on passe nécessairement par le local des archives ; que d'ailleurs c'est le commissaire-priseur qui a lui-même vidé les placards contenant les archives pour permettre la bonne tenue de la vente aux enchères, et que c'est dans ces conditions qu'elle les a entreposées dans un bungalow de l'entreprise ; qu'enfin le mandataire judiciaire disposait de toutes les clés des bâtiments de la société jusqu'au 27 avril 2018, date à laquelle il lui a retourné ces clés encore une fois à une adresse erronée.

Elle conteste l'absence de tenue de comptabilité reprochée, relevant que le liquidateur ne justifie d'aucune demande en ce sens.

Elle verse aux débats sa comptabilité pour l'exercice 2016/2017 (le grand livre comptable) et une attestation de son expert-comptable pour les exercices 2015, 2016 et 2017.

Elle souligne que la comptabilité de l'exercice clos le 31 mars 2017 n'a pas pu être établie compte-tenu de la liquidation judiciaire survenue le 5 septembre 2017 qui n'a pas permis une approbation de ces comptes.

Concernant enfin le défaut de déclaration de la cessation des paiements dans le délai de 45 jours, elle relève qu'il faut démontrer une volonté délibérée ; que s'il est exact qu'elle n'a pas déposé cette déclaration dans les 45 jours suivant le 28 février 2017, elle a néanmoins écrit le 23 août 2017 au mandataire judiciaire pour lui indique qu'à son sens il fallait que la société soit placée en liquidation judiciaire.

Elle indique que si les indemnités dues à un de ses salariés, Monsieur [J], du fait de son arrêt maladie, ont été versées à la société plutôt qu'à ce salarié directement, c'est suite à une erreur du cabinet comptable lors du renouvellement de l'arrêt de travail qui a mal renseigné sa déclaration, et que dès qu'elle s'est aperçue de cette erreur, elle a demandé au liquidateur l'autorisation de verser ces sommes à l'intéressé, ce qui démontre sa bonne foi.

Elle conteste également que le retard de déclaration de la cessation des paiements soit en lien avec des pré-comptes non réglés à l'Urssaf , pré-comptes dont elle conteste l'importance, et expose qu'en réalité elle espérait pouvoir vendre le fonds de commerce à un repreneur et procéder à un plan de cession, ce qu'elle a d'ailleurs indiqué au liquidateur dans son e-mail du 23 août 2017.

Par jugement du 29 novembre 2021, le tribunal de commerce de Dijon condamne Madame [C] [E] épouse [T] à une mesure de faillite personnelle de 8 ans, avec exécution provisoire.

Après avoir relevé que le passif arrêté au 14 août 2020 s'élève à 450 688,29 euros dont 36 391,21 euros à titre super-privilégié, 148 658,32 euros à titre privilégié, et 265 638,76 euros à titre chirographaire, le tribunal retient :

- que Madame [T] n'a pas répondu aux courriels du liquidateur lui demandant le nom de l'assureur des locaux et véhicules de la société qu'elle avait bien reçus, ni à ceux concernant le lieu de stockage des archives comptables, et qu'elle n'a répondu à la demande d'autorisation de vendre aux enchères publiques les actifs dépendant de la liquidation judiciaire que le 1er février 2018 ; que son absence de coopération avec les organes de la procédure est manifeste, la formation à laquelle elle a assisté et les problèmes de santé qu'elle invoque ne justifiant pas suffisamment ce comportement ;

- que la non remise de la comptabilité doit être analysée comme valant présomption de l'absence de comptabilité, et que si la Sarl a transmis au liquidateur le bilan clos au 31 décembre 2014, et si Mme [T] verse aux débats le grand livre comptable pour la période du 1er avril 2015 au 31 décembre 2016, les attestations de l'expert-comptable ne justifient pas de l'existence des éléments manquants, notamment les bilans des années 2015 et 2016 ; que par ailleurs depuis 2012, la société s'est abstenue de déposer les documents comptables au greffe du tribunal de commerce malgré deux relances ; qu'il est donc incontestable que Mme [T] n'a remis au liquidateur que des éléments comptables incomplets ;

- qu'il est établi que Madame [T] n'a pas déposé la déclaration de cessation de paiement dans le délai de 45 jours, et que si ce manquement ne peut pas justifier une mesure de faillite personnelle, il permet par contre au tribunal d'apprécier la durée de la sanction à appliquer.

* * * * *

Madame [C] [T] fait appel par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel le 10 décembre 2021.

Par conclusions d'appelant n°3 déposées le 1er mars 2022, elle demande à la cour d'appel de :

' Vu les faits de la cause,

Vu les articles L 653-1 et suivants du code de commerce,

Vu les articles 562, 901 et 954 du code de procédure civile,

Vu la jurisprudence précitée,

- Juger Madame [C] [T] recevable et fondée en son appel,

- Débouter purement et simplement la Selarl MJ & Associés es qualité de liquidateur de la Sarl [A] [M] et Compagnie de sa demande tendant à juger que la cour n'est saisie d'aucune demande,

- Réformer intégralement le jugement rendu le 29 novembre 2021 par le tribunal de commerce de Dijon dans l'instance RG n°2020 003562,

Et statuant à nouveau,

- Débouter Me [N], es qualité de liquidateur de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de Madame [T],

- Condamner Me [N] es qualité de liquidateur à 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens'.

Concernant l'absence de saisine de la cour invoquée par la Selarl MJ & Associés es qualité, elle fait état des modifications apportées à l'article 901 du code de procédure civile par le décret n°2022-245 du 25 février 2022 et de l'article 8 de l'arrêté du 20 mai 2020.

Sur le fond, elle réitère ses contestations telles que déjà formées en première instance, en soulignant qu'elle a bien reçu le courrier du 26 octobre 2017 le 3 novembre suivant, et qu'elle y a répondu le 1er février 2018 après avoir été relancée par courriel du même jour en donnant une explication à son retard ('des professionnels Chalonnais ont tardé à se décider dans leur décision de s'implanter à [Localité 6] à la place de la Sarl [M] et j'attendais qu'ils vous fasse la demande' (sic) ).

Elle maintient qu'une comptabilité a été tenue et qu'elle produit pour en justifier le grand livre comptable pour l'exercice 2016, l'attestation de son expert-comptable pour les exercices 2015, 2016 et 2017, les déclarations de TVA du 1er janvier au 31 juillet 2017, et le bilan et les comptes de résultat de la Sarl pour l'exercice du 1er avril 2013 au 31 mars 2014.

Elle fait ensuite état du déroulement de sa carrière professionnelle, des conditions dans lesquelles elle a repris la Sarl au cours de l'année 2000 en ajoutant qu'elle gère une SCI familiale et a des projets plein la tête.

Par conclusions déposées le 16 février 2022, la Selarl MJ & Associés es qualité demande à la cour de :

'A titre principal,

Juger qu'en l'absence d'effet dévolutif, la cour n'est saisie d'aucune demande,

A titre subsidiaire,

Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Dijon du 29 novembre 2021 en toutes ses dispositions,

A titre infiniment subsidiaire, si la cour réforme le jugement,

Prononcer à l'encontre de Madame [C] [T] une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale ayant une activité économique pour une durée de 15 ans,

En tout état de cause,

Condamner Madame [C] [T] à payer à Maître [U] [N] es qualité de liquidateur de la Sarl [A] [M] et Compagnie la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.'

Elle relève qu'au mépris des dispositions de l'article 901 4° du code de procédure civile, la déclaration d'appel ne comporte pas les chefs du jugement critiqués ; que si elle comporte une annexe, celle-ci, sauf empêchement technique, ne peut pas suppléer les insuffisances de la déclaration, et que Madame [T] ne justifie pas avoir rencontré un empêchement la contraignant à fournir une annexe.

Elle en déduit qu'à défaut de critique du jugement, l'effet dévolutif ne joue pas, ajoutant qu'à tort Madame [T] invoque l'indivisibilité de l'objet du litige, laquelle suppose une pluralité de parties alors qu'en l'espèce il n'y a qu'une seule défenderesse.

Subsidiairement, elle réitère ses reproches à l'encontre de Madame [T].

Elle souligne que celle-ci s'est bien présentée au premier rendez-vous ce qui démontre qu'elle était bien destinataire des courriers qui lui étaient envoyés.

Elle ajoute que, lors de ce premier entretien, il lui a été demandé la communication des coordonnées de l'assureur des locaux et des véhicules, en vain malgré plusieurs courriers de rappel doublés de courriels ; que de même Mme [T] n'a pas plus répondu aux courriers et courriels concernant sa position sur la vente des actifs mobiliers de la liquidation ; qu'à tort elle invoque un problème de réception de ces courriers alors d'une part qu'ils étaient doublés de courriels sur son adresse mail et qu'elle a signé l'accusé de réception du courrier du 26 octobre 2017 ; qu'il ressort en réalité de la réponse qu'elle a finalement faite à la veille de l'audience de vente aux enchères que c'est volontairement qu'elle est restée taisante.

Le liquidateur maintient que les documents comptables ne lui ont jamais été remis, ce qui permet de considérer soit qu'ils sont toujours en la possession de Mme [T] et qu'elle ne veut pas les communiquer, soit qu'ils sont inexistants.

Plus subsidiairement, dans l'hypothèse du prononcé d'une interdiction de gérer, le liquidateur invoque également l'absence de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours. Il relève que Madame [T] invoque un courrier du 23 août 2017 dans lequel elle sollicitait l'ouverture d'une liquidation judiciaire alors qu'elle était déjà assignée en résolution du plan depuis le 28 juillet précédent par deux créanciers, le commissaire à l'exécution du plan ayant pour sa part sollicité cette résolution par requête du 12 mai 2017.

Le liquidateur ajoute que la jurisprudence de la cour de cassation est claire: dès lors qu'à la date de cessation des paiements il était impossible de payer notamment la part patronale des cotisations sociales ou encore les salaires, c'est à bon droit que la cour la retenu que c'est sciemment que le gérant avait omis de déclarer cette cessation; que tel est le cas en l'espèce au vu de la déclaration de créance de l'Urssaf et du courrier de l'un des salariés de la Sarl.

Le Ministère Public estime pour sa part que l'appel doit être regardé comme recevable dès lors que le prononcé d'une mesure de faillite personnelle est indivisible.

Sur le fond, il considère les manquements établis et la sanction prononcée adaptée.

En application des articles 455 et 634 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIVATION

- Sur l'effet dévolutif de l'appel

Le décret n° 2022-245 du 25 février 2022 publié au Journal Officiel du 26 février 2022 a, en son article 1er 16°, complété l'article 901 du code de procédure civile en ajoutant que la déclaration d'appel est faite par un acte 'comportant le cas échéant une annexe'.Cette modification est applicable aux instances en cours et dès le lendemain de la publication du décret .

Il s'en déduit que la déclaration d'appel de Madame [T] en ce qu'elle comporte une annexe dans laquelle sont mentionnés les chefs du jugement critiqués est régulière en la forme et que son appel a un effet dévolutif concernant les-dits chefs.

- Sur le fond

Aux termes de l'article L 653-3 du code de commerce,

I - le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée au 1° du I de l'article L 653-1, sous réserve des exceptions prévues au dernier alinéa du I du même article, contre laquelle a été relevé d'un des faits ci-après :

- 1° avoir poursuivi abusivement une exploitation déficitaire qui ne pouvait que conduite à la cessation des paiements,

- 3° avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de son actif ou frauduleusement augmenté son passif.

II - peuvent en outre, sous la même réserve, être retenus à l'encontre d'un entrepreneur individuel à responsabilité limitée les faits ci-après :

- 2° sous couvert de l'activité visée par la procédure masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un inérêt autre que celui de cette société,

- 3° avoir fait des biens ou du crédit de l'entreprise visée par la procédure un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement.

L'article L 653-4 du code de commerce dispose :

Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant, de droit ou de fait, d'une personne morale contre lequel a été relevé l'un des faits ci-après :

- 1° avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres ;

- 2° sous couvert de la personne morale masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ;

- 3° avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ;

- 4° avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduite qu'à la cessation des paiements de la personne morale ;

- 5° avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmené le passif de la personne morale.

Aux termes de l'article L 653-5 du code de commerce :

Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l'article L 653-1 contre laquelle a été relevé l'un des faits suivants :

- 1° avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction ou d'administration d'une personne morale contrairement à une interdiction prévue par la loi ;

- 2° avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, fait des achats en vue de revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;

- 3° avoir souscrit, pour le compte d'autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l'entreprise ou de la personne morale ;

- 4° avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers ;

- 5° avoir, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement ;

- 6° avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables ;

- 7° avoir déclaré sciemment, au nom d'un créancier, une créance supposée.

Aux termes de l'article L 653-8 du code de commerce :

Dans les cas prévus aux articles L 653-3 à L 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci.

L'interdiction mentionnée au premier alinéa peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L 653-1 qui, de mauvaise foi, n'aura pas remis au mandataire judiciaire, à l'administrateur ou au liquidateur les renseignements qu'il est tenu de lui communiquer en application de l'article L 622-6 dans le mois suivant le jugement d'ouverture ou qui aura, sciemment, manqué à l'obligation d'information prévue par le second alinéa de l'article L 622-22.

Elle peut également être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L 653-1 qui a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.

Si pour expliquer des retards dans les réponses apportées aux demandes du liquidateur Madame [T] soutient ne pas toutes les avoir reçues en raison de problèmes d'adresse, force est de constater que la Selarl MJ & Associés justifie avoir systématiquement doublé les courriers par des courriels adressés sur l'adresse mail que l'appelante utilise elle même ainsi que les pièces produites aux débats l'établissent.

En l'espèce, force est de constater que malgré ses obligations légales et les demandes réitérées du mandataire liquidateur, Madame [T] ne lui a toujours pas remis les bilans pour les années 2015 et 2016.

Quant aux archives comptables elles aussi demandées à plusieurs reprises par le liquidateur, Madame [T] ne peut pas se contenter de dire qu'elles sont dans un bungalow sur le site de la société sans autre précision, et son affirmation selon laquelle c'est le commissaire-priseur qui aurait vidé les placards dans lesquels ces archives se trouvaient auparavant pour permettre la bonne tenue de la vente aux enchères est contredite par le courrier du-dit commissaire priseur du 10 avril 2018 qui indique qu'il n'a pas constaté la présence de telles archives dans les locaux et que 'Madame [T] nous a indiqué avoir fait le nécessaire !'.

Les seuls éléments comptables produits par l'appelante ne constituent pas une comptabilité régulière.

Il n'est pas contesté par Madame [T] qu'elle n'a répondu que tardivement à la demande du liquidateur concernant sa position sur la vente aux enchères publiques des actifs mobiliers dépendant de la liquidation judiciaire alors qu'il ressort de l'ordonnance du juge-commissaire que ce dernier a attendu d'être en possession de cette réponse pour statuer sur la requête présentée par le liquidateur. Au surplus il ressort des propres explications de Madame [T] que c'est volontairement qu'elle s'est abstenue de répondre, souhaitant attendre la position d'investisseurs dont elle espérait une proposition de reprise, attente dont elle s'était bien gardée de parler au liquidateur.

Il est également établi que, malgré là aussi les demandes réitérées du liquidateur, Madame [T] n'a jamais répondu aux interrogations concernant l'identité de l'assureur tant des locaux que des véhicules de la société, et aucune explication sérieuse n'est donnée sur ce point.

Ainsi le manque de coopération de l'appelante avec le liquidateur est suffisamment avéré.

Quant à l'absence de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours, Madame [T] ne peut pas soutenir sérieusement qu'elle ignorait cet état alors qu'il ressort de la déclaration de créance de l'Urssaf que la société était dans l'impossibilité de régler la part patronale des cotisations sociales et les salaires.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les manquements reprochés par le liquidateur à Madame [T] sont établis, et qu'ils justifient le prononcé à son encontre d'une sanction.

C'est par une exacte appréciation de leur gravité et de la situation de l'appelante que les premiers juges ont prononcé à son encontre une interdiction de gérer pendant une durée de 8 années.

PAR CES MOTIFS

Déboute la Selarl MJ & Associés es qualité de sa demande tendant à voir constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel formé par Madame [C] [T],

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Dijon du 29 novembre 2021 en toutes ses dispositions,

Condamne Madame [C] [T] aux dépens de l'appel,

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Madame [C] [T] à verser à la Selarl MJ & Associés es qualité 1 500 euros pour ses frais liés à l'appel,

Déboute Madame [T] de sa demande à ce titre.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/01567
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;21.01567 ?
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