La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/05/2022 | FRANCE | N°20/01213

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 05 mai 2022, 20/01213


FV/LL













SA GAN ASSURANCES



SAS [R] [C]



SCP BTSG



SELARL

ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES PARTENAIRES



C/



SA AXA FRANCE IARD



SAS LDC BOURGOGNE



























































expédition et copie exécutoire

délivrées aux avocats le

>








COUR D'APPEL DE DIJON



2ème Chambre Civile



ARRÊT DU 05 MAI 2022



N° RG 20/01213 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FRMM



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 14 septembre 2020,

rendue par le tribunal de commerce de Chalon sur Saône - RG : 20-18/2493









APPELANTES :



SA GAN ASSURANCES, prise en la personne de son directeur général...

FV/LL

SA GAN ASSURANCES

SAS [R] [C]

SCP BTSG

SELARL

ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES PARTENAIRES

C/

SA AXA FRANCE IARD

SAS LDC BOURGOGNE

expédition et copie exécutoire

délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 05 MAI 2022

N° RG 20/01213 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FRMM

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 14 septembre 2020,

rendue par le tribunal de commerce de Chalon sur Saône - RG : 20-18/2493

APPELANTES :

SA GAN ASSURANCES, prise en la personne de son directeur général, domicilié de droit au siège :

[Adresse 7]

[Localité 6]

SAS [R] [C], prise en la personne de son président domicilié ès qualité au siège :

Lieudit [Localité 10]

[Localité 5]

SCP BTSG, prise en la personne de son gérant, domicilié de droit au siège, agissant par Maître [M] [J], ès qualité de mandataire judiciaire de la SAS [R] [C]

[Adresse 1]

[Localité 9]

SELARL ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES PARTENAIRES, prise en la personne de son gérant, domicilié de droit au siège, agissant par Maître [E] [P], ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SAS [R] [C]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentées par Me Franck PETIT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 101

assistées de Me Valérie COHEN VAN HERPEN, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES :

SA AXA FRANCE IARD, représentée par ses représentants légaux en exercice domiciliés au siège :

[Adresse 3]

[Localité 8]

SAS LDC BOURGOGNE, représentée par ses représentants légaux en exercice domiciliés au siège :

Zone Industrielle

[Localité 5]

représentées par Me Nathalie MINEL-PERNEL, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 80

assistées de Me Nicolas FANGET, membre de la SELARL VEBER AVOCATS, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 mars 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, chargé du rapport et Sophie DUMURGIER, Conseiller. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre,

Michel WACHTER, Conseiller,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 05 Mai 2022,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société LDC Bourgogne a pour activité la transformation et la commercialisation de produits de volaille. Elle est assurée auprès de la compagnie AXA France.

En mars 2017, la société LDC vend à la société Scapalssace des produits alimentaires pour un montant total de 36 246,29 euros TTC. Elle confie le transport de sa marchandise réfrigérée sous température dirigée à la société Transport [C] agissant en qualité de voiturier.

Le 30 mars 2017, la société Transports [C] prend en charge sur quatre sites successifs la marchandise représentant au total 1667 colis représentant 20 palettes pour un poids brut de 8 450 kg dans un semi-remorque frigorifique avec une température indexée à + 1,0°C sous couvert des récépissés n°257014, 28911877 et 42313.

A l'arrivée, selon la société LDC, la marchandise est refusée par le destinataire en raison de températures non conformes allant de + 5,1°C à 9,6°C.

Une expertise amiable est organisée par l'assureur de la société LDC, et la cause des dommages est identifiée comme résultant d'un problème d'étanchéité du rideau coulissant de porte (volet supérieur et joint bas) de la remorque utilisée. Le montant des dommages est évalué par l'expert à 12 001,20 euros HT.

La compagnie AXA France Iard indemnise son assurée à hauteur de 11 251,20 euros selon quittance subrogative, compte-tenu de la franchise de 750 euros.

Par lettre recommandée du 13 février 2018, les sociétés AXA France et LDC mettent en demeure la société Transports [C] de prendre en charge leur préjudice par l'intermédiaire de leur mandataire AM Recours.

La société Transports [C], par l'intermédiaire de son assureur le GAN, refuse toute prise en charge.

Par acte d'huissier du 30 mars 2018, la société AXA France Iard et la SAS LDC Bourgogne assignent la SAS [R] [C] devant le tribunal de commerce de Chalon sur Saône aux fins d'obtenir sa condamnation à payer la somme de 11 251,20 euros à AXA France et celle de 750 euros à la société LDC, ce avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2018 et capitalisation des intérêts.

Elles demandent également l'allocation de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et que l'exécution provisoire soit ordonnée.

Les demanderesses invoquent l'obligation de résultat du transporteur dont celui-ci ne peut s'exonérer qu'en démontrant soit un vice propre de la chose, soit une force majeure, soit la faute du co-contractant.

Elles ajoutent qu'en présence d'un transport sous température dirigée, la vérification de l'état apparent de la marchandise implique un contrôle de température par le transporteur, et que le transporteur qui ne procède à aucun contrôle est, faute de réserves motivées de sa part, censé avoir pris la marchandise en charge à la température réglementaire ou adéquate.

Elles soutiennent qu'en l'espèce la SA Transports [C] a pris en charge la marchandise sans aucune réserve à l'enlèvement concernant la température des produits alimentaires, et que sa responsabilité est engagée sur le seul constat des avaries.

La société Transports [C] ayant été placée en redressement judiciaire par jugement du 25 avril 2018, les sociétés AXA France et LDC Bourgogne assignent la SCP BTSG représentée par Maître [M] [J] es qualité de mandataire judiciaire et la Selarl AJ Partenaires es qualité d'administrateur judiciaire par actes d'huissier du 16 novembre 2018.

Le GAN Assurances intervient volontairement dans la procédure.

Les sociétés AXA France Iard et LDC Bourgogne demandent alors au tribunal de :

- fixer leur créance au passif de la société [R] [C] SAS à 11 251,20 euros pour la société AXA France et 750 euros pour la société LDC Bourgogne outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2018 et en ordonnant la capitalisation des intérêts,

- condamner la compagne Le Gan à payer :

à la société AXA France 11 251,20 euros outre intérêts au taux légal à compter du 13 février 2018 avec capitalisation des intérêts,

à la société LDC Bourgogne 750 euros outre intérêts au taux légal à compter du 13 février 2018 avec capitalisation des intérêts,

aux deux sociétés 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

- ordonner l'exécution provisoire du jugement.

La société [R] [C] et le Gan demandent au tribunal :

- A titre préalable de :

Surseoir à statuer dans l'attente de la communication des pièces contractuelles relatives au transport (ordre de transport, facture d'achat des marchandises, justificatifs du préjudice subi)

Juger la société LDC Bourgogne et AXA France irrecevables en leur demande de condamnation suite au jugement de redressement judiciaire du 25 avril 2018,

Juger la société LDC Bourgogne et AXA France irrecevables faute de preuve d'un intérêt à agir (en l'absence de preuve de l'indemnisation et de la réalité du préjudice)

A titre principal :

Déclarer l'action malfondée en l'absence de responsabilité du transporteur,

A titre subsidiaire :

Faire application du contrat type 'marchandises périssables sous température dirigée' et constater que le plafond doit être réduit au titre de l'absence de sauvetage,

Condamner les sociétés demanderesses aux dépens.

Elles soutiennent que la société LDC Bourgogne n'a pas mis d'instruction particulière concernant la température sur les lettres de voiture et qu'il est vain en conséquence d'invoquer une présomption de responsabilité qui péserait sur la société [R] [C].

Elles ajoutent que la société LDC Bourgogne a invoqué le nécessité de détruire la marchandise sans aucun sauvetage possible sans justificatif.

Elles soulignent que conformément aux dispositions de la LOTI, et en l'absence de dispositions contractuelles, le contrat type 'marchandises périssables sous température dirigée' s'applique de plein droit, et que le donneur d'ordre doit fournir au transporteur diverses informations.

Elles invoquent enfin l'article 20 de ce contrat type selon lequel l'indemnisation est limitée à 14 euros par kg avec un maximum de 4 000 euros par tonne, et que l'indemnité est réduite d'un tiers lorsque le donneur d'ordre impose une destruction.

Par jugement du 14 septembre 2020, le tribunal de commerce de Chalon sur Saône :

- condamne la société [R] [C] à payer à la Compagnie AXA France subrogée la somme de 11 251,20 euros et la somme de 750 euros à la société LDC au titre de la franchise restée à charge,

- fixe ces créances au passif de la société [R] [C] outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2018 avec capitalisation des intérêts,

- condamne la compagnie Gan Assurances à payer au titre de (sic) :

11 251,20 euros à la société AXA France subrogée,

750 euros à la société LDC au titre de la franchise restée à charge,

outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2018 avec capitalisation des intérêts,

- ordonne l'exécution provisoire du jugement,

- condamne la compagnie Gan Assurances au paiement de la somme totale de 500 euros aux sociétés AXA France et ldc Bourgogne sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la compagnie Gan Assurances aux entiers dépens de l'instance dont frais de greffe auxquels devront être ajoutés le coût de l'assignation et les frais de mise à exécution du jugement.

Pour statuer ainsi, le tribunal retient :

- que les pièces versées au dossier lui permettent de statuer sans qu'il y ait lieu à sursis à statuer,

- que les organes de la procédure on été régulièrement appelés dans la procédure qui est donc régulière,

- que la compagnie AXA France produit la quittance subrogative établie suite à l'indemnisation de son assurée la société LDC et a donc qualité à agir,

- qu'en application de l'article L 133-1 du code de commerce le voiturier est garant de la perte des objets à transporter, hors les cas de force majeure, et qu'en l'espèce la société [R] [C] a pris en charge la marchandise sans réserve alors que les lettres de voiture portent la mention 'transport de produits frais' et 'transport de volaille'.

- que l'expertise amiable a déterminé les causes du sinistre ainsi que le montant des dommages et conclu à la responsabilité du transporteur, et qu'aucune des parties ne la conteste,

- que le contrat type ' marchandises périssables sous température dirigée' s'applique de plein droit,

- que le litige porte sur une livraison de 811 colis pour 5 463,60 kg, ce qui pour une indemnisation à 14 euros le kg aboutit à 76 490,40 euros, mais qu'il est plafonné à 4 000 euros la tonne soit (4 000 x 5,46360 =) 21 854,40 euros,

- que les défendeurs ne rapportent pas la preuve que le donneur d'ordre aurait imposé la destruction de la marchandise laissée pour compte d'autant plus que la date de destruction est postérieure aux DLC des produits.

* * * * *

La SA GAN Assurances, la SAS [R] [C], la SCP BTSG représentée par Maître [M] [J] es qualité de mandataire judiciaire de la SAS [R] [C] et la Selarl MJH Partenaires es qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SAS [R] [C] font appel par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel le 15 octobre 2020.

Par conclusions récapitulatives et en réponse déposées le 29 décembre 2021, elles demandent à la cour d'appel de :

'Vu les dispositions de l'article L 133 du code de Commerce,

Vu les dispositions des article 31 et 369 du CPC,

Vu les dispositions de la LOTI,

Vu les dispositions du contrat type 'marchandises périssables sous température dirigée' (Décret du 12 février 2001 modifié par Décrets des 28 décembre 2001 et 20 août 2007),

A titre principal,

- Juger la Cie GAN et la société [C] recevables et fondées en leur appel,

- Réformer le jugement,

- Juger la demande des Cie AXA et la société LDC Bourgogne irrecevable faute de preuve d'un intérêt à agir (en l'absence de preuve de l'indemnisation et de la réalité du préjudice) et de la subrogation légale ou même conventionnelle dans les droits et actions des destinataires,

- Juger la société LDC Bourgogne et AXA France irrecevables en leur demande de condamnation dirigée contre la société [C] suite au jugement de redressement judiciaire en date du 25 avril 2018,

A titre subsidiaire,

- Juger la demande mal fondée en l'absence de présomption de responsabilité du transporteur,

- Débouter la société LDC Bourgogne et AXA de leurs demandes,

A titre très subsidiaire,

- Juger qu'en application du contrat type 'marchandises périssables sous température dirigée' le plafond d'indemnisation doit en toute hypothèse être réduit d'un tiers au titre de l'absence de mesure de sauvetage des marchandises,

- Condamner les sociétés AXA et LDC Bourgogne à payer à la société [C] et à GAN une indemnité de 1.500,00 euros en vertu de l'article 700 du CPC,

- Condamner les sociétés AXA et LDC Bourgogne aux dépens de l'instance'.

Par conclusions d'intimés déposées le 9 avril 2021, la SA AXA France Iard et la SAS LDC Bourgogne demandent à la cour de :

'Vu notamment les articles L 133-1 et suivants du code de commerce,

(...)

- Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a : (sic)

- Fixer leur créance au passif de la société Transports [C] à la somme de :

11 251,20 euros pour la société AXA France subrogée,

750 euros pour la société LDC au titre de la franchise restée à charge,

outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2018, en ordonnant la capitalisation des intérêts ;

- Condamner la compagnie GAN Assurances à payer les sommes de :

11 251,20 euros à la société AXA France subrogée,

750 euros à la société LDC au titre de la franchise restée à charge

outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2018, en ordonnant la capitalisation des intérêts ;

Y ajoutant :

- Condamner la compagnie GAN Assurances à leur payer la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil (sic) ;

- Condamner la compagnie GAN Assurances aux entiers dépens de première instance et d'appel'.

L'ordonnance de clôture est rendue le 15 février 2022.

En application des articles 455 et 634 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIVATION

- Sur la recevabilité

La société LDC, donneur d'ordre au transport, a qualité et intérêt à agir sur le fondement du contrat de transport dès lors qu'elle prétend avoir été victime d'un sinistre lors de l'exécution de ce contrat.

Quant à la société AXA France elle produit une quittance subrogative établie à son profit par la société LDC et a au surplus justifié au cours de la procédure du fait qu'elle a bien réglée à son assurée la somme visée par ladite quittance.

Par ailleurs aucune demande de condamnation n'est formée à l'encontre de la société [C]. La fin de non-recevoir soulevée au motif qu'elle est en procédure collective est manifestement injustifiée.

C'est donc à tort que les appelants concluent à l'irrecevabilité de leurs actions.

- Sur le fond

Par application de l'article L 133-1 du code de commerce le transporteur est tenu d'une obligation de résultat dont il ne peut s'affranchir qu'en rapportant la preuve d'une cause étrangère qui ne lui est pas imputable ( vice propre de la chose, force majeure ou faute du co-contactant).

Par ailleurs l'article 8.2 du contrat type applicable aux transports de marchandises périssables sous température dirigée, annexé à l'article D 3222-5 du code des transports, et qui concerne le maintien de la température en cours de transport, dispose que : 'Le transporteur est responsable du maintien de la température ambiante à l'intérieur du véhicule réfrigérant, frigorifique ou calorifique, selon les indications portées sur le document de transport ou selon les instructions écrites du donneur d'ordre ou, à défaut, selon la nature de la marchandise conformément à la réglementation en vigueur'.

L'arrêté ministériel du 20 décembre 2009 (NOR AGRG0927709A) qui renvoie au règlement CE n°853/2004 fixe les températures maximales des denrées réfrigérées lors du transport, soit en l'espèce au maximum 2°C pour les viandes hachées et au maximum 4°C pour les préparations à base de viande (annexe III section V chapitre III - 2 c du règlement CE).

En l'espèce il est établi que les marchandises transportées étaient constituées de différents produits à base de chair de volaille, ce que les transports [C] n'ignoraient pas. Il est au demeurant établi par les deux expertises réalisées par les compagnies d'assurance respectives que la remorque était indexée sur une température à 1°C.

Il est également établi qu'aucune instruction particulière écrite n'a été donnée par le donneur d'ordre et qu'aucune indication ne figure sur les documents de transport. En conséquence ce sont les dispositions réglementaires qui s'appliquaient.

Il ressort des explications des parties et des pièces produites que deux expertises ont été réalisées à l'effet de rechercher la cause du sinistre et le préjudice en résultant.

La première expertise a été réalisée dès le 31 mars 2017 par l'expert commis par la SA AXA France, et les transports [C] et leur assureur le Gan ont été dûment convoqués pour y assister. Les transports [C] y étaient représentés de même que la société LDC, seul le Gan étant absent et ne s'étant pas fait représenter. Les appelants sont dans ces conditions mal fondés à soutenir que ces opérations leur sont inopposables.

La cour ne peut que relever que ce rapport renvoie à des annexes listées en pages 14 et 15 du rapport, mais que les documents que la société LDC et la SA AXA France produisent en les présentant comme étant les-dites annexes ne comportent aucune numérotation, ce qui rend pour le moins complexe la lecture de ce document.

Si en page 5 du rapport il est fait mention d'un récépissé de ramassage n°257014 sur lequel le conducteur des Transports [C] aurait 'fait valoir en observations une température relevée sur un filet poulet à + 5°C', force est de constater que le seul document produit par les intimées qui comporte la mention d'une température de marchandise à 5,0 ° C pour une température du véhicule à 1,0 ° C avec une signature attribuée au chauffeur [V] porte sur 2 159 colis chargés pour un poids de 9 653, 930 kg et 63 palettes, donc sans rapport avéré avec le transport litigieux, et aucune précision quant aux conditions de relevé de la température de 5,0 ° C n'y figure. Il est ainsi impossible de déterminer à partir de quel élément l'expert s'est appuyé pour noter que 'seule une température a été sondée entre deux colis (et non au coeur) pour cette expédition couverte de plusieurs centaines de colis'.

Par contre, il est établi par les documents de transport produits que plusieurs comportent la mention 'température non conforme des produits - températures attendues + 4° C, températures réelles mesurées entre + 5,1 ° C et 9,6 ° C.', l'expert commis par le Gan ayant lui aussi constaté ce point.

L'expert commis par la SA AXA France après analyse des documents conclut en page 7 de son rapport que 811 colis pour un poids de 5 463 kg ont été refusés par le réceptionnaire.

L'expert commis par le Gan qui s'est rendu le 3 avril 2017 dans les entrepôts frigorifiques de la société [C] où les marchandises litigieuses avaient été entreposées suite à leur déchargement lors de l'exécution de l'expertise AXA a constaté la présence de 12 palettes sur les 20 objet du transport, correspondant aux 12 palettes refusées selon ses propres indications. Aucune indication de poids n'apparaît dans ce second rapport.

Il ressort du rapport de l'expert commis par la SAS AXA qu'en présence des représentants des deux sociétés co-contractantes, les marchandises refusées qui se trouvaient encore dans la remorque du camion réfrigéré ont été déchargées, et que non seulement un pointage contradictoire a été réalisé, mais également des sondages à coeur des marchandises en superficie haute, basse et mi-hauteur des palettes présentées, et que des prélèvements de température ont aussi été réalisés en coeur de charge afin de vérifier le gradient 'périphérique/ coeur' ; qu'il a été alors contradictoirement constaté que les températures à coeur de charge étaient toutes conformes et plus basses que celles relevées en périphérie ce qui, selon cet expert, démontre que les marchandises ont toutes été remises au transporteur sous bonne température et que l'on peut exclure un chargement à chaud des marchandises pour les 4 fournisseurs sondés.

Par contre l'expert a procédé à des relevés de températures en périphérie des palettes et constaté des oscillations importantes entre le bas et le haut des palettes (+ 1,9 ° C en bas de palette allant jusqu'à + 6,8 ° C en superficie haute) ce qui caractérisait une rupture de la chaîne du froid principalement pour les marchandises placées au plus près des portes de la remorque. Il a également pu constater contradictoirement des défaillances au niveau de la fermeture des portes arrières, et que la courbe des températures relevées dans la remorque lors du transport litigieux attestait que l'air chaud inspiré par le système de réfrigération était rejeté avec une médiane de + 5 ° C dans la remorque.

Les appelants échouent ainsi à démontrer que le sinistre serait imputable à une faute du donneur d'ordre qui aurait remis pour le transport des marchandises à une température supérieure à la température de consigne.

Il s'en déduit que la responsabilité de la société [C] est engagée.

Il n'est pas contesté qu'en application du contrat-type, l'indemnisation est plafonnée à 4 000 euros la tonne, soit pour les 5 463,60 kg refusés, un plafond de 21 854,40 euros.

Il est par ailleurs établi par les intimées que cette marchandise a été détruite, une facture de Bourgogne Recyclage ayant été produite dès l'expertise réalisée par l'expert désigné par AXA France, et les appelants entendent voir appliquer la réduction d'un tiers du plafond d'indemnisation prévue au contrat type dans l'hypothèse d'une absence de mesure de sauvetage des marchandises.

Or l'article 20 du contrat-type prévoit une réduction du tiers de l'indemnisation 'lorsque le donneur d'ordre impose la destruction de la marchandise laissée pour compte, pour autant consommable, ou en interdit le sauvetage'. Dès lors que des normes phytosanitaires imposent la destruction des marchandises, cette réduction n'a pas lieu de s'appliquer.

En l'espèce, s'agissant de découpes de volailles pour lesquelles la chaîne du froid a été rompue, et qui au surplus avaient une date limite de consommation très proche, ainsi que le démontrent certaines des photographies réalisées par l'expert commis par le Gan, le sauvetage des marchandises n'était pas envisageable, et la destruction s'imposait. C'est donc à tort que les appelants entendent réduire l'indemnisation due aux intimées.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevables la SAS AXA France Iard et la SAS LDC Bourgogne en leurs actions,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Chalon sur Saône en toutes ses dispositions,

Condamne la compagnie Le Gan aux entiers dépens de la procédure d'appel,

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la compagnie Le Gan à verser à la SA AXA France Iard et la SAS LDC Bourgogne 2 000 euros pour leurs frais irrépétibles liés à l'appel,

Déboute les appelants de leurs demande de ce chef.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/01213
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;20.01213 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award