OM/CH
[H] [X]
C/
ASSOCIATION DES PARALYSÉS DE FRANCE
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 MAI 2022
MINUTE N°
N° RG 20/00261 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FP3V
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de DIJON, section ACTIVITÉS DIVERSES, décision attaquée en date du 26 Juin 2020, enregistrée sous le n° 18/00421
APPELANTE :
[H] [X]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Jean-Baptiste JACQUENET-POILLOT de la SELARL DE JURE AVOCATS, avocat au barreau de DIJON
INTIMÉE :
ASSOCIATION DES PARALYSÉS DE FRANCE
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Antoine CONVERSET de la SELAS AGIS, avocat au barreau de DIJON substitué par Me BRICE, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Mars 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Olilvier MANSION, Président de chambre chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Olivier MANSION, Président de chambre,
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,
Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Mme [X] (la salariée) a été engagée le 26 mars 2018 par contrat à durée déterminée, à temps partiel, en qualité d'ouvrière professionnelle par l'association des paralysés de France (l'employeur).
Le contrat a été rompu pendant la période d'essai.
Contestant cette rupture et demandant la requalification du contrat en contrat à temps plein, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 26 juin 2020, a rejeté toutes ses demandes.
La salariée a interjeté appel le 23 juillet 2020.
Elle demande, au regard d'une rupture nulle et d'une requalification du contrat à temps plein, le paiement des sommes de :
- 9 198 euros de dommages et intérêts pour rupture anticipée du contrat,
- 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- les intérêts au taux légal,
et réclame la délivrance sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de l'attestation Pôle emploi, d'un certificat de travail et des bulletins de paie d'avril à septembre 2018.
L'employeur conclut à la confirmation du jugement et sollicite le paiement de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties échangées par RPVA les 19 octobre 2020 et 19 janvier 2021.
MOTIFS :
Sur la requalification du contrat à durée déterminée :
L'article L. 3123-6 du code du travail dispose que le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit mentionnant notamment la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile, les modalités selon lesquelles les horaires, pour chaque journée travaillée, sont communiquées par écrit au salarié et les limites dans lesquelles peuvent être effectuées des heures complémentaires.
A défaut d'écrit ou de ces mentions, le contrat peut être requalifié en contrat à temps complet.
Il en va de même lorsque le salarié est dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail et reste constamment à la disposition de l'employeur.
En cas de violation des dispositions légales, le contrat de travail à temps partiel est présumé être un contrat de travail à temps complet, la présomption précitée ne peut être reversée que dans l'hypothèse où l'employeur rapporte la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition.
En l'espèce, la salariée ne demande pas dans le dispositif de ses conclusions la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée mais seulement la requalification du temps partiel à temps complet.
Elle ajoute que le contrat prévoit un temps de travail de 34,30 heures par semaine et qu'il ne comporte aucune des mentions prévues par la loi pour ce type de contrat.
L'employeur répond que la durée de travail de 34,30 heures correspond à l'horaire de travail collectif et selon la convention régularisée entre Cap emploi, l'employeur et la salariée.
Il ajoute que les bulletins de paie portent sur paiement de 35 heures par semaine, de sorte qu'aucun rappel n'est dû.
Il est justifié par la convention de mise en oeuvre d'une période de mise en situation en milieu professionnel et par les bulletins de paie produit que le temps de travail, au sein de l'entreprise, est de 34,30 heures par semaine, payées 35 heures.
En conséquence, le contrat de travail n'est pas un contrat à temps partiel et la requalification demandée ne peut prospérer.
Sur le rupture de la période d'essai :
1°) L'article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 dispose : "Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de sa grossesse, de son apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son patronyme, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, de son état de santé, de sa perte d'autonomie, de son handicap, de ses caractéristiques génétiques, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable".
En application des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail, pour se prononcer sur l'existence d'une discrimination, il appartient au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une telle discrimination et à l'employeur de prouver, au vu de ces éléments, que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
La salariée invoque la nullité de la rupture de la période d'essai car elle serait fondée sur son état de santé et donc : "d'un comportement de discrimination cardinale".
La période d'essai a pour but de permettre à l'employeur d'évaluer les compétences de la salariée dans son travail et le seul fait de constater que la salariée avait des difficultés à se tenir debout ne constitue pas un élément de nature à faire présumer la discrimination dès lors que l'état de handicap et de santé était connu par l'association et que le contrat a été conclu dans le cadre d'une convention avec Cap emploi, afin de permettre à la salariée une mise en situation en milieu professionnel.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité.
2°) L'article L. 1242-10 du code du travail prévoit la possibilité, pour le contrat à durée déterminée, de comporter une période d'essai.
La salariée indique que la visite médicale d'embauche n'a pas été organisée alors qu'elle bénéficie du statut de travailleur handicapée et perçoit une pension à ce titre depuis le 1er juillet 2016 et que le contrat a été rompu de façon abusive, par anticipation, et sans respect du délai de prévenance de 48 heures.
L'employeur répond que la période d'essai a été rompue le 4 avril au soir avec effet au 6 avril.
Le contrat a pris effet au 26 mars 2018 et, selon l'attestation de M. [F], chef d'équipe de l'atelier de découpe, la période d'essai a pris fin le 4 avril suivant à 16 heures 15 pour un effet au 6 avril 2018 à 12 heures 15.
La rupture n'est donc pas intervenue avant la prise de fonction, peu important l'absence de visite médicale d'embauche.
Par ailleurs, le délai de prévenance pour la rupture de la période d'essai est de 24 heures lorsque le salarié a été présent moins de 8 jours dans l'entreprise et de 48 heures, entre 8 jours et un mois de présence.
Ici, la salariée était présente dans l'entreprise depuis plus de 8 jours, le délai de prévenance est donc de 48 heures.
Elle a été prévenue le 4 avril à 16 heures 15 pour le 6 avril suivant à 12 heures 15, de sorte que le délai de 48 heures qui devait expirer le 6 avril à 16 heures 15, n'a pas été respecté.
Il n'en résulte pas rupture abusive du contrat mais seulement, en application des dispositions de l'article L. 1221-25 du code du travail, paiement du salaire que la salariée aurait perçu si elle avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du délai de prévenance, soit quatre heures de travail, outre les congés payés afférents.
Sur les autres demandes :
1°) La somme due à la salariée produira intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation, s'agissant d'une somme de nature salariale.
2°) L'employeur remettra, sans astreinte laquelle ne se justifie pas faute de risque avéré de retard ou de refus, un bulletin de salaire correspond au rappel de salaire dû, le surplus de la demande étant rejetée.
3°) L'exécution provisoire étant sans intérêt devant la cour d'appel, cette demande sera rejetée.
4°) Les demandes formées au visa de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
L'employeur supportera les dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :
- Confirme le jugement du 26 juin 2020 sauf en ce qu'il rejette la demande de Mme [X] en paiement du préjudice subi pour le non-respect du délai de prévenance et en ce qu'il statue sur les dépens ;
Statuant à nouveau sur ce chef :
- Condamne l'association des paralysés de France à payer à Mme [X], la somme équivalente à quatre heures de travail, outre les congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'association des paralysés de France devant le bureau de conciliation ;
- Dit que l'association des paralysés de France remettra à Mme [X], sans astreinte, un bulletin de paie correspondant à ce paiement de salaire ;
Y ajoutant :
- Rejette les autres demandes ;
- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
- Condamne l'association des paralysés de France aux dépens de première instance et d'appel.
Le greffierLe président
Frédérique FLORENTINOlivier MANSION