RUL/CH
SA CRÉDIT FONCIER DE FRANCE
C/
[S] [U]
Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 05 MAI 2022
MINUTE N°
N° RG 20/00219 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FPGZ
Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DIJON, section COMMERCE, décision attaquée en date du 14 Mai 2020, enregistrée sous le n° F18/00380
APPELANTE :
SA CRÉDIT FONCIER DE FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Brigitte RUELLE-WEBER, avocat au barreau de DIJON, et Me Caroline PIERREPONT, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
[S] [U]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Elsa GOULLERET de la SELARL ESTEVE GOULLERET NICOLLE & ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mars 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :
Olivier MANSION, Président de chambre,
Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,
Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE :
Mme [S] [U] a été embauchée par la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE (ci-après désignée CCF) à compter du 1er novembre 1984.
En dernier lieu, elle occupait les fonctions de conseillère relation clientèle particuliers au sein de la "direction de la mise en place de la région Sud-Est", statut non-cadre.
La convention collective de la banque ainsi que le socle social du CCF s'appliquent à la relation contractuelle.
Du fait d'une réorganisation interne engagée courant 2016, le site de la direction de la mise en place de [Localité 5] a été fermé à compter du 1er janvier 2018 et les salariés concernés réaffectés sur le site de [Localité 6].
Le 22 juin 2017, l'employeur a proposé à Mme [U] un avenant à régulariser concernant sa mobilité au sein de la direction lyonnaise à compter du 1er janvier 2018.
Le 1er janvier 2018, Mme [U] informait son employeur de son placement en arrêt de travail.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 5 février 2018, Mme [U] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement initialement fixé au 20 février suivant puis reporté au 6 mars 2018 moyennant une nouvelle convocation par courrier recommandé avec accusé réception du 21 février 2018, assorti d'une mise à pied conservatoire.
Par courrier recommandé du 15 mars 2018, Mme [U] a été licenciée pour faute grave.
Par requête du 18 juin 2018, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Dijon aux fins de juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et faire condamner son employeur à diverses indemnités.
Par jugement du 14 mai 2020, le conseil de prud'hommes a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné l'employeur à lui payer diverses sommes à titre notamment d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents.
Par déclaration formée le 12 juin 2020 la société CCF a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions du 9 mars 2021, l'appelante demande de :
à titre principal,
- réformer le jugement déféré,
- débouter Mme [U] de l'ensemble de ses demandes,
à titre subsidiaire,
- réformer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que le licenciement pour faute était dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- reconnaître la cause réelle et sérieuse du licenciement,
- débouter Mme [U] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- ramener le montant de l'indemnité compensatrice de préavis à 6 707,02 euros, outre les congés payés afférents à hauteur de 670,70 euros,
- ramener le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à la somme de 54 345,93 euros,
à titre infiniment subsidiaire,
- réduire le montant des dommages et intérêts à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
en tout etat de cause :
- condamner Mme [U] à lui verser 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions du 10 décembre 2020, l'intimée demande de :
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
- le rectifier en ce qu'il a omis dans son dispositif les sommes correspondant aux
dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 20 mois de salaire,
- condamner l'employeur à lui verser les sommes suivantes :
- 7 754,93 euros au titre de la différence de l'indemnisation chômage en raison de licenciement pour motif personnel déguisé,
- 6 932,80 euros à titre d'indemnité de préavis, outre 693,28 euros au titre des congés payés incidents,
- 92 379,56 euros à titre d'indemnité de licenciement ou subsidiairement 55 940,52 euros,
- 69 328 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 23 500 euros pour exécution déloyale du contrat de travail,
- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter l'employeur de l'ensemble de ses demandes,
- le condamner aux entiers dépens,
- ordonner l'exécution provisoire sur la moitié des condamnations qui seront prononcées.
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I - Sur le bien fondé du licenciement :
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
Il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave commise par le salarié.
Il est constant que lorsque les juges considèrent que les faits invoqués par l'employeur ne caractérisent pas une faute grave, ils doivent rechercher si ces faits n'en constituent pas moins une cause réelle et sérieuse de licenciement.
La lettre de licenciement du 15 mars 2018 (pièce n° 17) est formulée en ces termes :
"[...] vous vous êtes délibérément présentée le 1er février 2018 dans les anciens bureaux de la DIFI de [Localité 5], à l'insu de votre employeur et de votre hiérarchie, tout en sachant pertinemment qu'aucun salarié n'y travaillait.
Vous avez informé par mail votre manager, basé à [Localité 6], de votre présence seulement vers 15h (soit plusieurs heures après votre arrivée).Outre le fait que votre présence dans les anciens bureaux de la DIFI de [Localité 5] a constitué un risque en termes de sécurité, elle constitue une faute en l'absence d'autorisation de votre hiérarchie.
Cette situation aurait pu avoir des conséquences dommageables puisque vous étiez seule dans ces bureaux et qu'aucun de vos responsables n'était physiquement présent.
Vous vous êtes connectée sur le système d'information de l'entreprise, vous avez pris en charge des dossiers et répondu à des clients sans aucune communication préalable avec votre hiérarchie, laissant cette dernière sans possibilité d'intervention et de contrôle.
Cette situation a de fait créée des troubles organisationnels évidents.
Dès que nous avons eu connaissance de la situation, nous avons cherché à vous contacter sur le site de [Localité 5] et ce à plusieurs reprises entre le jeudi 1er février et le lundi 5 février 2018, malheureusement sans succès. Vous avez catégoriquement refusé de communiquer avec votre employeur.
Aussi, nous vous reprochons d'avoir délibérément refusé de répondre aux sollicitations, sommes toutes légitimes, de votre hiérarchie et de la DRH pour comprendre votre attitude et prendre les mesures notamment en termes de sécurité.
Ce comportement constitue un manquement grave à votre obligation de loyauté vis-à-vis de votre employeur et un acte d'insubordination caractérisé et délibéré, nous contraignant compte tenu de ce qui précède à engager la présente procédure disciplinaire avec une mise à pied à titre conservatoire. [...]"
- Sur le fait de s'être présentée dans les locaux de [Localité 5] :
La société CFF soutient que Mme [U] s'est présentée le 1er février 2018 dans les locaux de [Localité 5], pourtant transférés à [Localité 6], alors qu'elle avait indiqué que son arrêt de travail serait prolongé.
Il convient toutefois de relever que l'arrêt de travail produit fixe au 31 janvier 2018 inclus la durée de l'absence de la salariée. Or aucun élément ne confirme l'affirmation selon laquelle cet arrêt de travail était ou devait être prolongé au-delà de cette date (pièce n° 19) et le fait que Mme [U] se soit rendue à un rendez-vous avec sa hiérarchie le 23 janvier 2018 n'est pas de nature à rapporter cette preuve.
Il y a donc lieu de considérer que la date de reprise d'activité de Mme [U] était le 1er février 2018.
Par ailleurs, il est constant qu'en l'absence de clause de mobilité ou si le contrat de travail ne fixe pas précisément le lieu de travail, l'employeur ne peut imposer au salarié un changement de son lieu de travail que s'il se situe dans le même secteur géographique. À défaut, il doit recueillir l'accord exprès de celui-ci.
En l'espèce, Mme [U] admet dans ses écritures avoir refusé la modification de son lieu de travail et il n'est pas non plus contesté par les parties qu'aucune clause de mobilité n'a été prévue initialement par elles, le recrutement initial ayant été effectué sur la base d'une lettre d'embauche du 8 octobre 1984 sans que soit formalisé de contrat de travail.
Dès lors, et peu important que des discussions aient été menées sur la question de la réaffectation de la salariée, il convient de considérer que le transfert du lieu de travail initial de [Localité 5], lieu mentionné dans la lettre d'embauche précitée comme sur ses bulletins de paye (pièces n° 1 et 3), à [Localité 6] constitue un changement en dehors du secteur géographique d'origine dont la mise en oeuvre nécessite l'accord du salarié concerné.
De fait, en l'absence d'avenant régularisé entre les parties à la date du 1er février 2018 au plus tard, le lieu de travail de Mme [U] était à cette date la direction de la mise en place du Grand-Est à [Localité 5] tel que mentionné dans la lettre d'embauche.
Il ne saurait donc lui être reproché de s'y être présentée à l'issue de son arrêt de travail. Ce premier grief n'est donc pas fondé.
- Sur le fait de s'être connectée sur le système d'information de l'entreprise, d'avoir pris en charge des dossiers et répondu à des clients sans communication préalable avec sa hiérarchie :
L'employeur reproche à la salariée d'avoir repris son activité le 1er février 2018 sans l'en informer avant 15 heures, soit plusieurs heures après son arrivée (pièces n° 12 et 19).
S'agissant de la reprise d'activité elle-même, l'arrêt de travail de Mme [U] étant parvenu à son terme le 1er février 2018, il ne saurait lui être reproché d'avoir repris son activité.
S'agissant du fait d'avoir informé sa hiérarchie, en la personne de Mme [M], par courrier électronique envoyé à 15h01:29, il ressort des pièces produites que l'initiative en incombe à Mme [U]. Or il n'est justifié ni même allégué d'aucune obligation pensant sur la salariée de se manifester auprès de son employeur dès son arrivée sur place, notamment sous la forme d'un pointage.
A cet égard, si l'employeur allègue d'un comportement inacceptable dans la mesure où sa présence constituerait un risque en termes de sécurité du fait d'être seule dans les locaux et de conséquences dommageables possibles faute de manager présent susceptible d'intervenir ou de contrôler son travail, il convient de relever que Mme [U] produit deux attestations de collègues de travail ayant eu à exercer leurs fonctions dans les mêmes conditions (seuls dans les locaux), ce qui démontrent que l'argument d'un risque en termes de sécurité n'est pas pertinent, sauf à considérer qu'il dépend de la personne présente (attestation de M. [O] - pièce n° 25 : "Sachant que depuis la fermeture du service DIFI à [Localité 5], je me suis retrouvé tout seul depuis janvier 2018 au deuxième étage, sur un plateau de 200 m2, sans voir personne des journées entières" et attestation de Mme [D] - pièce n° 26 : "Mon bureau était situé au 1 er étage, faute de place au RDC avec les autres membres de l'équipe. Je me trouvais seule à cet étage, sauf présence très ponctuelle du responsable régional dont le bureau se trouvait à côté du mien" [...].
Au surplus, il peut en outre être observé que l'isolement de la salariée invoqué est relatif car limité à l'étage occupé par elle, le reste du bâtiment conservant une activité, notamment du fait de la présence d'une agence commerciale au rez-de-chaussée.
Par ailleurs, s'agissant des tâches effectuées lors de sa reprise, il ressort d'un courrier électronique interne du 2 février 2018 à 14h54 (pièce n° 24) que Mme [U] "a la possibilité d'effectuer des versements jusqu'à 200 000 euros et de contacter nos clients dans le cadre du suivi de leur dossier", et que l'employeur pouvait suivre son activité "pour nous assurer que tout est en ordre", tout en admettant ne pas être "à l'abri d'une erreur intentionnelle ou non", ce dernier point n'étant pas propre à Mme [U]. Il y est enfin précisé que "la DA est informée et va essayer de faire en sorte que quelqu'un aille la voir de temps en temps".
Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que ce grief n'est pas fondé.
- Sur le fait d'avoir délibérément refusé de répondre aux sollicitations de sa hiérarchie et de la DRH :
L'employeur reproche à Mme [U] d'avoir tenté à plusieurs reprises le 1er février et les jours suivants de la joindre par téléphone ou par le biais du directeur de l'agence commerciale, sans succès, Mme [U] ayant selon lui obstinément et délibérément refusé toute communication (pièce n° 21).
A cet égard, Mme [U] admet dans ses écritures avoir effectivement refusé volontairement de prendre les appels de Mme [H], pour se préserver car elle se sentait harcelée. Néanmoins, les pressions invoquées ne sont pas établies.
Dès lors, et considérant qu'il ressort d'un courrier électronique qui lui a été adressé le 2 février 2018 à 8h32 que M. [J], directeur d'agence, est venu l'informer de l'appel téléphonique de Mme [H], ce qui confirme qu'elle n'ignorait pas la demande de prise de contact formulée par sa hiérarchie, il y a lieu de considérer qu'un tel refus de la part de la salariée constitue une faute qui lui est imputable, quand bien même elle n'est pas de nature à caractériser une faute grave.
Néanmoins, le licenciement constitue une sanction disproportionnée par rapport à la faute commise, alors que le salarié n'a fait l'objet d'aucune sanction ni même du moindre rappel à l'ordre verbal ou écrit pendant l'ensemble de sa carrière au sein de l'entreprise, soit 34 ans, avant son licenciement.
Dès lors, il y a lieu de qualifier le licenciement comme étant sans cause réelle et sérieuse, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.
II - Sur les demandes pécuniaires :
a) sur la différence avec l'indemnisation chômage en raison de licenciement pour motif personnel déguisé :
Mme [U] soutient que le recours à un licenciement pour faute grave n'a été qu'une man'uvre de l'employeur afin d'éviter le recours à un licenciement économique qui lui aurait été bien plus favorable.
Considérant que dans le cadre du CSP le maintien du salaire se fait dans des conditions favorables (75% du salaire brut) alors que dans le cadre de l'aide au retour à l'emploi (ARE), l'indemnisation ne se fait qu'à hauteur de 57%, elle estime qu'elle aurait pu bénéficier de l'équivalent 18% de salaire brut supplémentaire chaque mois si elle l'avait licenciée pour motif économique. Elle sollicite en conséquence la somme de 7 754,93 euros au titre de la perte de salaire subi.
L'employeur conclut au rejet de la demande et ajoute que le calcul retenu est erroné.
Il ressort des développements qui précèdent que l'affirmation de Mme [U] selon laquelle son licenciement dissimulerait une volonté de l'employeur de s'exonérer d'une procédure de licenciement pour motif économique n'est corroborée par aucun élément. En effet, si le tract syndical produit (pièce n° 30) atteste d'une volonté des représentants des salariés de bénéficier d'un accompagnement pour éviter les "licenciements secs", il s'agit d'une revendication d'ordre général sans lien avec la situation particulière de Mme [U].
En outre, nonobstant le fait que le licenciement pour faute grave soit requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse, les offres faites à Mme [U] afin de lui faire accepter une nouvelle affectation à [Localité 6] témoignent d'une volonté initiale de la conserver dans les effectifs de la société.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande formulée à ce titre.
b) Sur l'indemnité compensatrice de préavis :
Sur la base d'un salaire de référence s'établissant à 3 466,40 euros et au visa de l'article 46.1.2 de l'accord relatif aux statuts collectifs du travail des salariés du Crédit Foncier de France du 20 février 2017, Mme [U] sollicite une indemnité compensatrice de préavis égale à deux mois de salaire, 6 932,80 euros à titre d'indemnité de préavis, outre 693,28 euros au titre des congés payés incidents.
L'employeur oppose que le salaire devant être pris en compte est le salaire et les avantages qui auraient été perçus durant le préavis s'il avait été effectué, soit une somme totale de 6 707,02 euros, outre 670,70 euros au titre des congés payés afférents afférents.
Au regard des pièces produites par les parties, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a accueilli la demande à hauteur de 6 707,02 euros, outre 670,70 euros au titre des congés payés afférents.
c) Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement :
Considérant "qu'il est clairement établi que le licenciement notifié à Mme [U] a pour origine des difficultés économiques et qu'il s'agit en fait d'un licenciement pour motif personnel déguisé", Mme [U] sollicite la somme de 92 379,56 euros à ce titre correspondant à ¿ mois par semestre complet d'ancienneté dans la limite de 24 mois et ¿ de mois de salaire par semestre d'ancienneté au-delà de 24 ans d'ancienneté, conformément à l'article 47 de la convention collective du Crédit Foncier de France.
A titre subsidiaire, elle sollicite la somme de 55 940,52 euros à ce titre.
L'employeur conclut au rejet de la demande, la salariée n'ayant pas été licenciée pour motif économique mais pour faute grave. A titre subsidiaire, il fixe le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à laquelle peut prétendre la salariée à la somme de 54 345,93 euros.
En l'espèce, il ressort des développements qui précèdent que le licenciement de Mme [U] est intervenu sans cause réelle et sérieuse. Les stipulations conventionnelles relatives au licenciement économique (article 47 précité) ne trouvent donc pas à s'appliquer.
Dès lors, au regard des pièces produites par les parties et en application des articles 46.1.3 de l'accord collectif applicable en cas de licenciement pour motif non disciplinaire et 26-2 de la convention collective de la banque fixant un plafond d'indemnisation pour les salariés embauchés au plus tard le 31 décembre 1999, et sur la base d'un salaire moyen mensuel brut de 3 367,59 euros (moyenne sur les 12 derniers mois), il sera alloué la somme de 54 345,93 euros, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.
d) sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Arguant d'une ancienneté de plus de 34 ans, du fait qu'en dehors de quelques contrats de mission d'une durée d'environ 3 mois elle n'a pas retrouvé d'emploi, et d'un suivi médical et psychologique, Mme [U] sollicite la somme de 69.328 euros à titre de dommages-intérêts correspondant à 20 mois de salaire.
A l'appui de sa demande, elle justifie :
- des contrats de mission signés (pièce n° 28).
- d'un suivi psychologique (pièce n° 14).
L'employeur oppose que les pièces communiquées par la salariée ne justifient nullement le versement du montant maximal prévu par l'article L1235-3 du code du travail et conclut à l'octroi du montant minimal prévu ce texte.
Au regard des circonstances de l'espèce et des justificatifs produits, il sera alloué à Mme [U] la somme de 30 000 euros à ce titre.
Les premiers juges ayant omis de faire mention dans leur dispositif de la condamnation de la société CCF au paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts pour l'ensemble des préjudices subis par la salariée retenue dans leurs motifs, la cour, réparant cette omission de statuer, condamnera la société CCF à payer à Mme [U] la dite somme à hauteur de 30 000 euros.
e) Sur les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :
Mme [U] sollicite la somme de 23 500 euros, correspondant à 6 mois de salaire, à titre de dommages-intérêts en raison des conditions particulièrement déloyales de la rupture du contrat de travail et de la période qui l'a précédée.
Elle allègue à cette fin que l'employeur a eu recours à des man'uvres traumatisantes à son endroit alors qu'elle a fait toute sa carrière dans l'entreprise et n'a jamais suscité de reproches sur son travail ou son comportement, lui infligeant ainsi une fin de carrière douloureuse.
L'employeur conclut au rejet de la demande et oppose que Mme [U] ne justifie d'aucun préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi ni ne démontre en quoi la rupture serait intervenue dans des conditions prétendument vexatoires.
Il ne peut y avoir de réparation sans preuve du préjudice subi, l'existence et l'évaluation de celui-ci relevant de l'appréciation souveraine des juges du fond sur la base des justificatifs produits aux débats.
En l'espèce, Mme [U] n'apporte aucun élément permettant de justifier de la réalité d'un préjudice distinct non indemnisé au titre de la rupture du contrat de travail. La demande à ce titre sera donc rejetée, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.
III - Sur les demandes accessoires :
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Le CCF sera condamné à payer à Mme [U] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande du CCF à ce titre sera rejetée.
Sur les dépens :
Le CCF succombant pour l'essentiel, il sera condamné aux dépens d'appel.
Sur l'exécution provisoire :
L'article R.1454-28 du code du travail relatif à l'exécution provisoire n'étant pas applicable devant la cour d'appel, la demande ainsi formulée est donc sans objet et sera rejetée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement rendu le 14 mai 2020 par le conseil de prud'hommes de DIJON en toutes ses dispositions,
Réparant l'omission de statuer et y ajoutant,
CONDAMNE la société Crédit Foncier de France à payer à Mme [S] [U] les sommes suivantes :
- 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE la demande au titre de l'exécution provisoire,
REJETTE la demande de la société Crédit Foncier de France au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Crédit Foncier de France aux dépens d'appel.
Le greffierLe président
Frédérique FLORENTINOlivier MANSION