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05/05/2022 | FRANCE | N°20/00216

France | France, Cour d'appel de Dijon, Chambre sociale, 05 mai 2022, 20/00216


OM/CH













S.A.S. RAVE GRAND [Localité 4] (anciennement RAVE DISTRIBUTION)





C/



[J] [U]































































Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée



le :



à :



















































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE DIJON



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 05 MAI 2022



MINUTE N°



N° RG 20/00216 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FPF3



Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MACON, section COMMERCE, décision attaquée en date du 29 Mai 2020, enregistrée...

OM/CH

S.A.S. RAVE GRAND [Localité 4] (anciennement RAVE DISTRIBUTION)

C/

[J] [U]

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 05 MAI 2022

MINUTE N°

N° RG 20/00216 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FPF3

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MACON, section COMMERCE, décision attaquée en date du 29 Mai 2020, enregistrée sous le n° 19/00006

APPELANTE :

S.A.S. RAVE GRAND [Localité 4] (anciennement RAVE DISTRIBUTION)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Patrick AUDARD de la SCP AUDARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON, avocat postulant, et Me Eric ANDRES de la SELARL ANDRES & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

INTIMÉ :

[J] [U]

[Adresse 5]

[Localité 1]

représenté par Me Jean-Philippe BELVILLE de la SELARL PREMIUM AVOCATS, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant, et Me Arthur GAUTHERIN, avocat au barreau de MACON/CHAROLLES, avocat postulant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Mars 2022 en audience publique devant la Cour composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre, Président,

Delphine LAVERGNE-PILLOT, Conseiller,

Rodolphe UGUEN-LAITHIER, Conseiller,

qui en ont délibéré,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Frédérique FLORENTIN,

ARRÊT rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Frédérique FLORENTIN, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [U] (le salarié) a été engagé le 29 juin 2015 par contrat à durée indéterminée en qualité de conducteur routier statut ouvrier, par la société Rave grand [Localité 4] (l'employeur).

Il a été licencié le 10 décembre 2018, pour faute grave.

Estimant ce licenciement nul, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 29 mai 2020, a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur au paiement de diverses sommes.

L'employeur a interjeté appel le 11 juin 2020.

Il conclut à l'infirmation du jugement sauf en ce qu'il rejette une partie des demandes du salarié et sollicite le paiement de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le salarié demande, au regard, selon lui, d'un licenciement nul ou, à titre subsidiaire, sans cause réelle et sérieuse, la confirmation du jugement sur les condamnations prononcées sauf à obtenir le paiement des sommes de :

- 16 600 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul, ou à titre subsidiaire, 8 300 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties échangées par RPVA les 17 février et 19 avril 2021.

MOTIFS :

Sur le licenciement :

Le salarié soutient que son licenciement est nul dès lors que le véritable motif en serait sa participation supposée au mouvement dit des gilets jaunes.

1°) L'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 dispose : "Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de sa grossesse, de son apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son patronyme, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, de son état de santé, de sa perte d'autonomie, de son handicap, de ses caractéristiques génétiques, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable".

En application des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail, pour se prononcer sur l'existence d'une discrimination, il appartient au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une telle discrimination et à l'employeur de prouver, au vu de ces éléments, que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Ici, le salarié admet qu'il a participé à ce mouvement en dehors de son temps de travail et ailleurs que sur son lieu de travail mais que tel n'a pas été le cas dans la nuit du 16 au 17 novembre 2018.

Il précise qu'il s'est rendu sur un rond-point occupé par les gilets jaunes pour se renseigner sur la situation pour savoir si : "ça allait être débloqué" et que, selon l'attestation de M. [H], il n'a pas participé au blocage.

La lettre de licenciement reproche au salarié une faute grave.

Elle rappelle que le 17 novembre 2018 à une heure trente, le salarié a pris son poste sur le site de chargement et a procédé au chargement du véhicule confié.

Alors qu'il attendait un ordre de mission du référent de nuit, il s'est mêlé à un groupe de personnes qui entravait la libre circulation des véhicules entrant et sortant du site.

La lettre ajoute que le salarié s'est opposé à la sortie du site d'un véhicule de la société ATR qui s'apprêtait à partir.

Le responsable d'exploitation de la société ATR présent sur le site a tenté de faire entendre raison au salarié qui a fait preuve d'un comportement fort virulent, provoquant ainsi une vive altercation et en indiquant que le véhicule n'avait pas à avancer et qu'il devait faire comme les autres, attendre.

Le responsable d'exploitation pour éviter que la situation ne dégénère a dit au chauffeur de patienter et le camion a pu partir environ un quart d'heure après.

Il est donc reproché au salarié une : "entrave personnelle à la liberté de circuler sur un site privé", une altercation avec un confrère dont il est à l'initiative ainsi qu'un comportement et une agressivité inadmissibles sur le lieu de travail alors qu'aucun élément ne le justifiait, ce qui est incompatible avec le professionnalisme et la courtoisie dont il doit faire preuve auprès des clients et des confrères.

Il est également reproché une manipulation frauduleuse du chronotachygraphe pour créer, de façon artificielle, un temps de service.

Il en résulte qu'il est seulement reproché au salarié un comportement sans relation avec l'exercice d'un droit de grève, d'une activité syndicale ou encore en relation avec des opinions politiques, ni même la participation à une occupation illégale de lieux ouverts à la circulation publique.

En conséquence, les textes précités ne s'appliquent pas et la nullité du licenciement pour discrimination sera rejetée.

2°) Il appartient à l'employeur qui s'en prévaut à l'appui du licenciement de démontrer la faute grave alléguée.

Il importe peu que la lettre de licenciement précitée rappelle un avertissement du 17 octobre 2018 pour absences injustifiées, dès lors que cette sanction est de nature distincte de celle des faits reprochés et ne sera pas prise en considération.

Il en va de même en présence ou non d'un préjudice financier subi par l'employeur.

De même, la situation concernant d'autres salariés est indifférente et la cour n'a à connaître que la situation de l'intimé.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, ne reproche pas au salarié une insubordination consistant à quitter son véhicule pour se rendre sur le rond-point occupé par diverses personnes mais d'avoir modifié le dispositif de contrôle du véhicule en sélectionnant un temps de travail d'une heure trente à quatre heures cinquante-six puis en conduite quelques minutes aux alentours de cinq heures.

Par ailleurs, M. [W], responsable d'exploitation de la société ATR atteste que le salarié était présent toute cette nuit et qu'il a été présent sur le blocus durant cette période.

Le chronotachygraphe a été placé en position de travail au moment du chargement du véhicule jusqu'à l'horaire précité.

Cependant, le salarié était bien sur son lieu de travail et en horaire de travail pendant toute cette période, à disposition de l'employeur, sans que celui-ci ne démontre une possibilité d'exécuter le travail, pendant cette durée, en raison du blocage, fût-il filtrant, ou qu'il ait refusé de le faire ou encore qu'il ait refusé de se conformer aux directives données.

La manipulation reprochée n'est donc pas fautive.

Sur le comportement agressif, M. [W], tiers à l'entreprise, retrace ainsi les faits : "j'ai essayé de lui [le salarié] expliquer que le véhicule devait sortir et qu'il ne devait pas s'opposer et de porter atteinte à la liberté de circuler de nos conducteurs. Il a eu un comportement fort virulent et une vive altercation a eu lieu, il m'a dit que mon véhicule ne devait pas avancer et que je devais attendre comme tous les autres, face à un tel comportement agressif, j'ai demandé à mon conducteur de patienter et ce dernier a quitté le site 30 minutes après l'altercation".

Le contrat de travail prévoit au titre des conditions d'activité que le salarié s'engage à observer la plus grande courtoisie dans les relations avec les clients et les confrères.

Le salarié indique qu'il ne participait pas à l'occupation du rond-point et qu'il est seulement allé se renseigner sur la situation de blocage.

Les attestations produites par le salarié ne contredisent pas les faits précis tels que relatés par le témoin direct du comportement du salarié et le fait, selon ces témoins, de tenter de "pacifier la situation" implique bien qu'elle était conflictuelle.

L'employeur démontre ainsi que le salarié a eu un comportement agressif sur le lieu de travail, pendant les horaires de travail et à l'encontre du salarié d'une autre entreprise qui se trouvait sur les lieux dans le cadre de son exercice professionnel.

Ce comportement s'analyse en une faute qui caractérise non pas une faute grave, au regard des circonstances de fait entourant cette attitude, mais une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné l'employeur à payer des dommages et intérêts à ce titre.

Le jugement sera confirmé sur les condamnations portant sur les indemnités légale de licenciement et compensatrice de préavis et les congés payés afférents.

Sur les autres demandes :

Les demandes formées au visa de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

Le salarié supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :

- Confirme le jugement du 29 mai 2020 sauf en ce qu'il requalifie le licenciement pour faute grave de M. [U] en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il condamne la société Rave grand [Localité 4] à lui payer la somme de 7 262 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau sur ces chefs :

- Dit que le licenciement de M. [U] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- Rejette la demande de M. [U] en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

- Condamne M. [U] aux dépens d'appel.

Le greffierLe président

Frédérique FLORENTINOlivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00216
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;20.00216 ?
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