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21/04/2022 | FRANCE | N°20/00793

France | France, Cour d'appel de Dijon, 2 e chambre civile, 21 avril 2022, 20/00793


SB/LL















SARL HAREL



C/



[L] [G]













































































































expédition et copie exécutoire

délivrées aux avocats le











COUR D'APPEL DE DIJON



2ème Chambre Civile



ARRÊT DU 21 AVRIL 2022



N° RG 20/00793 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FPX6



MINUTE N°



Décision déférée à la Cour : au fond du 16 juin 2020,

rendue par le tribunal judiciaire de Dijon - RG : 18/448









APPELANTE :



SARL HAREL

[Adresse 5]

[Localité 2]



représentée par Me François-Xavier MIGNOT, membre de la SARL CANNET - MIGNOT, avocat au barreau de DIJON, ve...

SB/LL

SARL HAREL

C/

[L] [G]

expédition et copie exécutoire

délivrées aux avocats le

COUR D'APPEL DE DIJON

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 21 AVRIL 2022

N° RG 20/00793 - N° Portalis DBVF-V-B7E-FPX6

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : au fond du 16 juin 2020,

rendue par le tribunal judiciaire de Dijon - RG : 18/448

APPELANTE :

SARL HAREL

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me François-Xavier MIGNOT, membre de la SARL CANNET - MIGNOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 81

INTIMÉE :

Madame [L] [G], en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [I] [M], en sa qualité d'ayant droit de feu [R] [M], décédé le [Date décès 4] 2016

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Delphine SAILLARD, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 17

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 janvier 2022 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, et Michel WACHTER, Conseiller. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la cour étant alors composée de :

Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre,

Michel WACHTER, Conseiller,

Sophie BAILLY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 17 Mars 2022 pour être prorogée au 21 Avril 2022,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Président de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [R] [M], embauché par la SARL Harel en qualité de chef de dépôt, suivant contrat du 7 mars 2016, est décédé le [Date décès 4] 2016, laissant pour lui succéder sa fille mineure [I] [M].

Par acte délivré le 22 décembre 2017, la SARL Harel a saisi le tribunal judiciaire de DIJON aux fins d'obtenir, aux termes de ses dernières écritures, la condamnation de Mme [L] [G], es-qualité de représentante légale de sa fille mineure, au paiement de la somme de 21 991,09 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2017, outre 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens comprenant le coût de la sommation de payer du 27 novembre 2017.

La SARL Harel soutenait avoir consenti un prêt de 25 000 euros à son salarié.

En réplique, Mme [L] [G], en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [I] [M], demandait au tribunal de :

- déclarer la société Harel mal fondée en ses demandes et en conséquence la débouter de l'intégralité de ses demandes,

- la dire recevable et fondée en sa demande reconventionnelle,

- condamner la société Harel à payer à [I] [M], en sa qualité d'ayant droits de son père feu [R] [M], la somme de 3 008,91 euros au titre du paiement du dernier bulletin de salaire établi par la société Harel à la suite de la rupture du contrat de travail de M. [M],

- condamner la société Harel à lui payer la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 16 juin 2020, le tribunal judiciaire de DIJON a :

- Débouté la SARL Harel de toutes ses demandes,

- Déclaré Mme [L] [G], prise en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [I] [M] es-qualité d'ayant droits de feu [R] [M] recevable en sa demande reconventionnelle,

- Condamné la SARL Harel à payer à Mme [L] [G] prise en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [I] [M] es-qualité d'ayants droits de feu [R] [M] la somme de 3 008,91 euros,

- Condamné la SARL Harel à payer à Madame [L] [G] prise en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure [I] [M] la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la SARL Harel aux entiers dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que :

- la reconnaissance de dette de 25 000 euros du 1er juillet 2016 émanant de feu [R] [M] ne mentionnait pas l'identité de la personne au bénéfice de laquelle avait été souscrit l'engagement,

- le décalage chronologique entre la date de la reconnaissance de dette et le virement opéré le 16 mars 2016 du compte de la société vers le compte de [R] [M] ne permettait d'en tirer aucune conséquence, pas plus que l'acceptation alléguée du solde de tout compte valant compensation, solde de tout compte qui n'a aucun effet libératoire,

- l'action fondée sur l'enrichissement sans cause n'est pas fondée, la société Harel ne rapportant pas la preuve de l'absence de cause du versement, alors que la gérante de la société était la compagne de M. [M] et a financé plusieurs biens au bénéfice de M. [M].

Le tribunal a fait droit à la demande reconventionnelle en paiement du dernier salaire dû, non prescrit (prescription de cinq ans applicable et non la prescription instituée par l'article L.1471-1 du code du travail) et a rejeté la demande de compensation en l'absence de créance certaine et exigible au bénéfice de la société Harel.

Appel a été interjeté le 10 juillet 2020 enregistré le 17 juillet 2021 par le conseil de la SARL Harel.

Dans des conclusions signifiées par RPVA le 9 octobre 2020, la SARL Harel demande à ce qu'il plaise à la cour d'appel :

« Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Vu l'article 1832 du Code Civil,

Vu les articles 1359 et 1895 du Code Civil,

Subsidiairement,

Vu l'article 1303 du Code Civil,

Constater l'enrichissement injustifié au préjudice de la SARL Harel.

Condamner Madame [G], es-qualité d'administratrice légale de Mademoiselle [I] [M], à verser à la SARL Harel la somme de 21 991,09 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2017.

Vu l'article L. 1471-1 du Code du travail,

Déclarer Madame [G] prescrite en sa demande reconventionnelle.

La condamner aux entiers dépens qui comprendront le coût de la sommation de payer en date du 27 novembre 2017.

La condamner au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du CPC »

La société Harel expose :

- sur la preuve du virement, que l'inscription dans ses écritures comptables du prêt allégué constitue la trace comptable obligatoire d'un mouvement de fonds entre un créancier et son débiteur,

- contrairement aux affirmations de la défenderesse, l'obligation de restitution est parfaitement caractérisée en l'état, la donation n'étant pas admise d'une société à une personne physique,

- l'intimée ne prétend pas que M. [M] aurait d'autres dettes de ce montant et n'identifie aucun autre créancier permettant d'expliquer pourquoi M. [M] aurait établi cette reconnaissance de dettes de 25 000 euros sans que cela soit destiné à la société Harel alors que c'était la seule à qui il devait des fonds et précisément cette somme.

- l'intimée se garde bien de produire la déclaration de succession susceptible de démontrer que M. [M] disposait d'autres créanciers permettant d'avoir un doute sur l'identité de celui-ci.

- le débat sur la nature des relations entre M. [M] et Mme [W] est totalement inopérant dans le cadre du présent litige. Mme [W] est étrangère au litige et n'est d'ailleurs pas partie à la procédure.

- ce n'est pas Mme [W] qui a prêté 25 000 euros à M. [M] mais la société Harel.

- il n'existe ni fondement contractuel ni fondement légal ni fondement judiciaire au paiement par la SARL Harel de 25 000 euros au bénéfice d'un de ses salariés dès lors que le montant réglé ne correspond à aucune créance de nature salariale, ce qui n'est pas contesté,

- dans la mesure où la dette est caractérisée, c'est à bon droit que la société Harel a opéré compensation dans le cadre du reçu de solde de tout compte,

- l'absence de procédure prud'homale et de toute contestation au titre du reçu pour solde de tout compte est la manifestation directe de la part de Mme [G] de ce qu'elle reconnaissait que M. [M] devait les fonds empruntés à la société.

- Mme [G] ne pourra qu'être déboutée de cette demande par ailleurs prescrite en application de l'article L. 1471-1 du Code du travail.

Par conclusions notifiées par RPVA le 7 janvier 2021, Mme [L] [G] es-qualité d'administratrice légale de sa fille mineure [I] [M] conclut à ce qu'il plaise :

« Confirmer dans toutes ses dispositions le jugement en date du 16 juin 2020,

Condamner la SARL Harel à verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du CPC,

Condamner la même aux entiers dépens. »

Elle soutient que :

- c'est volontairement que Mme [W] a accepté d'appauvrir la Société Harel dont elle est la gérante et ce, eu égard à la relation qu'elle entretenait avec M. [M],

- la société Harel ne peut en effet se prévaloir de sa propre turpitude en vertu de l'adage nemo auditur propriam suam turpitudinem allegans,

- Mme [W] est précisément, dans le cadre de la présente instance, la représentante de la société Harel en sa qualité de gérante,

- la société ne démontre pas que l'enrichissement serait sans cause,

- tout au long, de la relation qu'elle a entretenue avec M. [M], Mme [W] a fait la preuve de cette même intention libérale puisqu'elle a en effet offert deux canapés, une cuisine équipée complète, une centrale vapeur, un ordinateur.

- sur la demande reconventionnelle :

Le notaire en charge de la succession de Monsieur [M] a sollicité de la société Harel qu'elle veuille bien s'acquitter de son dernier bulletin de salaire établi à la suite de la rupture du contrat de travail, pour un montant de 3 008,91 euros.

Toutefois la société n'a jamais procédé au règlement alors même qu'elle reconnaît pourtant devoir cette somme puisqu'elle verse elle-même aux débats le bulletin de salaire qu'elle a établi et qui fait apparaître un solde net à payer de 3 008,91 euros.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 30 novembre 2021.

Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.

SUR CE

- Sur la question du prêt consenti par la SARL HAREL à M. [M]

Le premier juge a rappelé exactement les dispositions légales pertinentes applicables au présent litige. Ainsi, aux termes des dispositions de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction applicable au litige au regard de la date du contrat invoqué, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

L'article 1341 du code précité, dans sa rédaction applicable au litige, dispose qu'il doit être passé acte devant notaire ou sous signature privée de toute chose excédant une somme ou une valeur fixée par décret ; en l'état, 1 500 euros.

S'agissant d'un prêt consenti par un employeur à un salarié, la preuve du contrat de prêt ne peut être apportée que par écrit et la charge de la preuve du contrat de prêt pèse sur celui qui agit en restitution de la somme prêtée l'absence d'intention libérale de ce dernier n'est pas

susceptible d'établir à elle seule l'obligation de restitution de ladite somme.

Ainsi que Mme [G] le soutenait en première instance et l'invoque à nouveau en cause d'appel, « la société Harel n'est pas en mesure de produire un écrit qui conformément aux dispositions de l'article 1359 du code civil ferait la preuve de l'existence d'un prêt à son profit. »

Le seul écrit produit est un document daté du 1er juillet 2017 et intitulé « reconnaissance de

dette » se présentant selon les termes suivants :

« Le 01/07/16

RECONNAISSANCE DE DETTES

JE SOUSSIGNE M. [M] [R] RECONNAIS AVOIR EMPRUNTE LA SOMME DE 25 000 EUROS EN LUI PROMETTANT DE LUI REMBOURSE (sic) LA TOTALITE DE CETTE SOMME. »

Suit la signature »

En l'espèce, il est démontré que la somme de 25 000 euros a été virée du compte de la SARL HAREL vers le compte de M. [M], le 16 mars 2016, versement confirmé par l'attestation de BNP PARIBAS du 3 septembre 2018, signée par M. [T] [J], chargé d'affaires entrepreneurs, certifiant qu'un virement de 25 000 euros a été effectué depuis le compte de la SARL HAREL au bénéfice du compte de M. [R] [M]. Cette attestation dûment renseignée comporte, en outre, les numéros de comptes en cause, soit celui de la société HAREL et celui du bénéficiaire, M. [R] [M].

Cependant ce document produit, établi plusieurs mois après la remise de fonds, et dans le mois précédant le décès de M. [M] survenu le [Date décès 4] 2016 ne mentionne un montant qu'en chiffres et non en lettres. Il ne vaut que comme commencement de preuve par écrit et est insuffisant à établir l'existence d'un prêt consenti spécifiquement par la société HAREL,

l'idendité du prêteur, de même que les modalités de remboursement et taux d'intérêt éventuellement applicables n'étant pas précisées dans l'acte précité.

L'extrait du grand livre des comptes de ladite société, sous la rubrique « PRET A UN SALARIE », dont le nom « [R] [M] », est une pièce émanant de la société HAREL

qui s'avère insuffisante à pallier l'absence d'écrit contemporain de la remise des fonds et démontrant l'existence du prêt allégué.

Il ya donc lieu de considérer comme l'a fait le premier juge que la SARL HAREL ne rapporte pas la preuve de l'existence du prêt consenti à son salarié [R] [M], portant sur la somme de 25 000 euros.

Ainsi que l'a décidé le premier juge, la société HAREL ne démontre pas l'absence de cause du virement, du seul fait que consentir une libéralité est contraire à son objet social et donc illicite.

Il convient en conséquence de confirmer le tribunal en ce qu'il a constaté que la société ne

démontrait pas l'absence de cause du virement opéré en mars 2016 et l'a déboutée de sa demande en paiement.

- Sur la demande reconventionnelle

L'existence du prêt n'étant pas établie et l'obligation pour M. [M] de rembourser la somme également non démontrée, il n'était pas justifié par la SARL HAREL de la compensation entre sa prétendue créance et le montant du salaire dû au titre de la fiche de paye du 31 juillet 2016, soit la somme de 3 008,91euros, net à payer.

Le premier juge a considéré, à bon droit que la créance de la société HAREL n'était ni certaine, ni liquide, ni exigible.

La cour trouve dans les motifs du premier juge, complets et justifiés en droit comme en fait, la raison suffisante pour confirmer la décision querellée, en ce qu'elle a précisé : « (') Que la demande formée par Madame [G] concerne le dernier salaire dû par la société à feu [R] [M] de sorte que les délais de prescription instituée à l'article L.147-1 du code du travail ne sont pas applicables. Que s'agissant d'une action personnelle la prescription de cinq ans doit recevoir application.

Que le litige ne concerne pas, à proprement parlé, l'éxecution du contrat de travail dans la mesure où le montant porté sur la fiche de paie ne fait l'objet d'aucune contestation, pas plus que la réalité du contrat de travail.

Pour s'opposer au paiement, la société invoque la compensation, il s'en déduit qu'elle se reconnaît redevable de la somme figurant au bulletin de salaire produit.

Ainsi qu'il a été jugé ci-dessus, la société HAREL ne peut se prévaloir d'aucune créance certaine liquide et exigible à l'encontre de son ancien salarié de sorte qu'elle ne peut invoquer la compensation.

Il sera constaté qu'elle n'invoque aucun autre motif que cette compensation pour contester cette créance. »

Le jugement mérite confirmation en ce qu'il a fait droit à la demande reconventionnelle.

- Sur les mesures accessoires

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ni en première instance, ni à hauteur d'appel.

La société HAREL sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ni en première instance, ni à hauteur d'appel ;

Condamne la société HAREL aux dépens.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 2 e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00793
Date de la décision : 21/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-21;20.00793 ?
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