S.A.R.L. SADDE HÔTEL DES VENTES
C/
Gisèle X...
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 23 octobre 2007
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2007
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 06/02076
Décision déférée à la Cour : AU FOND du 23 OCTOBRE 2006, rendue par le TRIBUNAL D'INSTANCE DE DIJONRG 1re instance : 11/05/1001
APPELANTE :
S.A.R.L. SADDE HÔTEL DES VENTESdont le siège social est :13 rue Paul Cabet21000 DIJON
représentée par Me Philippe GERBAY, avoué à la Courassistée de la SCP LANCELIN ET ASSOCIES, avocats au barreau de DIJON
INTIMEE :
Madame Gisèle X...domiciliée :...75018 PARIS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2123100220067952 du 19/12/2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DIJON)
représentée par la SCP AVRIL et HANSSEN, avoués à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 septembre 2007 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur RICHARD, Conseiller, Président,
Madame VAUTRAIN, Conseiller, assesseur,
Monsieur LECUYER, Conseiller, assesseur, ayant fait le rapport sur désignation du Président,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame GARNAVAULT,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCE publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,
SIGNE par Monsieur RICHARD, Conseiller, et par Madame GARNAVAULT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties
Madame Gisèle X..., antiquaire, s'est, dans le cadre d'une vente aux enchères publiques organisée par la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon, le 22 mai 2005, portée adjudicataire du lot numéro 65, soit "une coupe ovale en cristal monture en bronze argenté de Christofle à décor d'enfants jouant avec des oiseaux sur un socle de branchages" pour le prix de 2.300 euros, soit 2.698,87 euros, frais de vente inclus.
Cette vente a été officialisée selon le bordereau numéro 995578, PV numéro 200566 en date du 22 mai 2005.
Le 7 juin 2005, Madame Gisèle X... a refusé de prendre possession de la coupe et de s'acquitter du prix de vente alléguant son mauvais état.
La SARL Sadde a réglé le prix de la coupe à son ancien propriétaire par deux chèques CDC Fonds clients en date du 16 juin 2005.
Par lettre simple en date du 20 juin 2005, la SARL Sadde a mis en demeure Madame Gisèle X... de régler la somme de 2.698,87 euros.
Se déclarant subrogée dans les droits et actions du vendeur, la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon a, par acte du 22 juillet 2005, assigné Madame Gisèle X... devant le tribunal d'instance aux fins de la voir condamnée à lui verser 2.698,87 euros, outre intérêts au taux légal sur 2.300 euros à compter du 22 mai 2005 jusqu'au jour du règlement définitif, ainsi que 600 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par jugement du 19 juin 2006, le tribunal d'instance de Dijon a ordonné la réouverture des débats afin de permettre à la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon de justifier d'une subrogation expresse concomitante au paiement et de donner éventuellement ses observations sur la recevabilité de son action.
Par jugement du 23 octobre 2006, le tribunal d'instance de Dijon a :
- déclaré recevable l'action engagée par la SARL Sadde Hotel des ventes contre Madame Gisèle X...,- annulé la vente de la coupe Christofle conclue le 22 mai 2005,- débouté la SARL Sadde Hôtel des ventes de toutes ses demandes,- condamné la SARL Sadde Hôtel des ventes à payer à Madame Gisèle X... 600 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,- condamné la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon aux dépens.
La SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon a relevé appel de ce jugement par déclaration effectuée le 29 novembre 2006.
Aux termes de ses conclusions déposées le 19 juillet 2007, la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré son action recevable et de l'infirmer pour le surplus,- dire et juger que Madame Gisèle X... ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle aurait commis une erreur lors de la vente du 22 mai 2005,- débouter en conséquence de sa demande de nullité pour erreur,- dire et juger la vente parfaite,- condamner Madame Gisèle X... à lui verser 2.698,87 euros outre intérêts au taux légal sur 2.300 euros à compter du 22 mai 2005 jusqu'au jour du règlement définitif ainsi que 1.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,- subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour ferait application de l'article L. 321-14 du code de commerce, condamner Madame Gisèle X... à lui verser 3.000 euros à titre de dommages-intérêts.
Au soutien de son appel, la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon fait observer qu'il y a absence d'erreur de Madame Gisèle X... :
- tant sur l'existence des vices allégués par Madame Gisèle X... que la coupe ne comporte pas dès lors que l'attestation établie par un préposé de la maison Christofle n'est pas pertinente dans la mesure où elle n'a été rédigée que sur les seules indications de Madame Gisèle X... sans que la coupe lui ait été présentée et que cette maison ne vend que des objets neufs et non d'occasion. - que sur les qualités substantielles de la coupe, étant précisé que Madame Gisèle X... est une professionnelle dans le domaine de l'achat et de la vente d'objets d'art et d'antiquités, qu'elle ne rapporte pas la preuve de ce que la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon lui aurait notifié avant la vente que la coupe était en bon état, qu'aux termes des conditions de vente les acquéreurs doivent prendre les objets vendus dans leur état actuel, avec leurs imperfections, défauts ou usures et aucune réclamation n'est retenue après l'adjudication.- en ce qui concerne l'éventuelle application de l'article L. 321-14 du code de commerce relative à la procédure de folle enchère, la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon fait valoir que Madame Gisèle X... n'a jamais fait état d'une quelconque impossibilité de s'acquitter du montant du lot adjugé et fait observer que l'option n'étant conférée par cet article qu'au seul vendeur, l'adjudicataire défaillant ne saurait se prévaloir de la résolution de plein droit.
Dans ses conclusions déposées le 17 août 2007, Madame Gisèle X... sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon de ses prétentions et l'a condamnée à lui verser 600 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle demande en outre à la cour de condamner la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon à lui verser 1.500 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et 3.500 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral aggravé.
Au soutien de ses prétentions, Madame Gisèle X... fait valoir que :
- la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon lui a communiqué, avant la vente de la coupe, trois désinformations :
* description laissant supposer l'absence de vices,* photo dissimulant l'opacité du cristal,* réponses rassurantes aux demandes d'informations téléphoniques.
- les vices sont effectifs : malgré son nettoyage en vue de sa présentation à la cour la coupe conserve des traces de dégradation effective, l'attestation de la responsable de la maison Christofle fait état d'une désargenture partielle et d'un cristal rayé et opaque non transparent,
- la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon s'est exonérée de sa responsabilité à l'égard de l'acheteur et aussi à l'égard du vendeur en le payant prématurément et en opérant un détournement du sens de l'article L. 321-14 du code de commerce dont elle estime qu'il ne confère pas au vendeur le droit de solliciter ou non la résolution de la vente mais lui impose cette résolution si son recours de folle enchère n'est pas formulé sous le délai d'un mois après l'adjudication.
- la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon lui a causé un préjudice moral aggravé en émettant un message diffamatoire sur Internet diffusé aux 350 sociétés de ventes nationales.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance en date du 5 septembre 2007.
La cour d'appel se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, à la décision déférée ainsi qu'aux écritures d'appel évoquées ci-dessus.
Motifs de l'arrêt
- Sur la demande en paiement de la coupe et sur la demande reconventionnelle en résolution de la vente
Il ressort des débats que Madame Gisèle X... s'est portée acquéreur de la coupe litigieuse en portant les enchères par téléphone dans des conditions qui sont conformes aux usages en vigueur dans les sociétés de vente.
De par l'activité d'antiquaire qu'elle exerçait à l'époque de la vente aux enchères litigieuses, Madame Gisèle X... est une professionnelle au regard de l'achat et de la vente d'objets d'art anciens. Elle connaissait donc parfaitement les précautions à prendre avant de se porter acquéreur d'un objet dont la vente est mise aux enchères. Elle ne peut ainsi sérieusement soutenir qu'elle a été victime d'une erreur.
Madame Gisèle X... ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article L. 321-14 du code de commerce pour soutenir que la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon n'avait pas le droit de régler le vendeur de l'objet et d'être subrogée dans les droits de celui-ci.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon et de l'infirmer pour le surplus.
La vente sera jugée parfaite. Madame Gisèle X... sera en conséquence condamnée à verser à la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon 2.698,87 euros outre intérêts au taux légal sur la somme de 2.300 euros à compter du 22 mai 2005 jusqu'au jour du règlement définitif.
Madame Gisèle X... sera déboutée de ses demandes de condamnation de la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon à des dommages-intérêts dès lors qu'elle ne justifie pas des préjudices allégués.
- Sur les demandes présentées en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile
Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties la totalité des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. La SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon et Madame Gisèle X... seront déboutées de leurs demandes présentées à leur verser 1.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
- Sur les dépens
Il convient de condamner Madame Gisèle X... aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement de ceux d'appel en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile en faveur de Maître Philippe Gerbay.
Par ces motifs
La COUR D'APPEL, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement rendu le 23 octobre 2006 par le tribunal d'instance de Dijon en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon,
L'INFIRME pour le surplus,
et statuant à nouveau,
DIT et JUGE la vente parfaite,
CONDAMNE Madame Gisèle X... à verser à la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon 2.698,87 euros outre intérêts au taux légal sur la somme de 2.300 euros à compter du 22 mai 2005 jusqu'au jour du règlement définitif,
DEBOUTE Madame Gisèle X... de ses demandes reconventionnelles,
DEBOUTE la SARL Sadde Hôtel des ventes de Dijon et Madame Gisèle X... de leurs demandes présentées en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
CONDAMNE Madame Gisèle X... aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement de ceux d'appel en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile en faveur de Maître Philippe Gerbay.