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02/05/2007 | FRANCE | N°06/786

France | France, Cour d'appel de Dijon, Ct0358, 02 mai 2007, 06/786


Patrice X...

C /
SOCIÉTÉ DES EDITIONS ROBERT LAFFONT
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 02 Mai 2007 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE-AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 02 MAI 2007
No
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 06 / 00786
Décision déférée à la Cour : AU FOND du 06 MARS 2006, rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DIJON RG 1ère instance : 04 / 03172

APPELANT :
Monsieur Patrice X... né le 18 Décembre 1954 à TOULON (83)...

représenté par Me Philippe GERBAY, avouÃ

© à la Cour assisté de Me PIERI, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :
SOCIÉTÉ DES EDITIONS ROBERT LAFFONT dont le sièg...

Patrice X...

C /
SOCIÉTÉ DES EDITIONS ROBERT LAFFONT
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 02 Mai 2007 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE-AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 02 MAI 2007
No
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 06 / 00786
Décision déférée à la Cour : AU FOND du 06 MARS 2006, rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DIJON RG 1ère instance : 04 / 03172

APPELANT :
Monsieur Patrice X... né le 18 Décembre 1954 à TOULON (83)...

représenté par Me Philippe GERBAY, avoué à la Cour assisté de Me PIERI, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :
SOCIÉTÉ DES EDITIONS ROBERT LAFFONT dont le siège social est : 24 Avenue Marceau 75381 PARIS CEDEX 08

représentée par la SCP FONTAINE-TRANCHAND et SOULARD, avoués à la Cour assisté de Me BOISSARD, membre de la SCP ZYLBERSTEIN et Associés, avocats au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Mars 2007 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur LITTNER, Conseiller le plus ancien, présidant la chambre, désigné à ces fonctions par ordonnance de Monsieur le Premier Président, en date du 22 Décembre 2006, Président,

Madame VAUTRAIN, Conseiller, assesseur, ayant fait le rapport sur désignation du Président,
Madame RIX-GEAY, Conseiller, assesseur,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame GARNAVAULT,

ARRÊT : rendu contradictoirement

PRONONCE publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,

SIGNE par Monsieur LITTNER, Conseiller, et par Madame BRION, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE
Le 20 Décembre 1999 Monsieur Patrice X... conclut avec la société des Editions Robert Laffont un contrat d'édition au terme duquel il s'engage à remettre un récit des aventures du navire " La Boudeuse " au moins trois mois avant le passage sur les antennes de télévision d'une série d'émissions consacrées à l'expédition qu'il va mener à bord de ce bateau dans plusieurs régions du monde. Un à valoir de 150. 000 francs lui est versé. Il doit recevoir la même somme lors de l'acceptation du manuscrit.
Par courrier du 22 avril 2002, Monsieur X... reconnait ne pas avoir adressé de manuscrit aux éditeurs LAFFONT mais affirme que la sortie du livre est possible au début de l'année suivante.
Malgré deux courriers de la société Laffont des 17 avril et 22 mai 2003, l'ouvrage n'est toujours pas remis à l'éditeur.
Le 9 juillet 2003, un avenant est établi par les parties au terme duquel Monsieur X... s'engage à remettre aux éditions Laffont un manuscrit de 150 à 200 pages au plus tard le 31 décembre 2003, les 80 à 100 pages suivantes devant être remises en février 2004.
Le 26 août 2003 la chaîne de télévision TV5 Europe programme une émission intitulée " les aventures des îles oubliées " et sous-titrée " le dernier voyage de la Boudeuse " dont Patrice X... est le producteur.
Le 3 janvier 2004, un manuscrit de 30 pages est adressé à l'éditeur, Monsieur X... admettant dans un courrier joint " qu'il n'y a pas vraiment les 150 pages " prévues.
Par acte d'huissier du 16 août 2004, la société des Editions Robert Laffont, qui n'a toujours pas reçu le manuscrit objet du contrat, malgré une mise en demeure du 12 janvier 2004, assigne Patrice X... aux fins d'obtenir la résiliation du contrat, et la condamnation du défendeur à lui rembourser la somme de 22. 867,35 euros et à lui verser 34. 000 euros de dommages-intérêts et 6. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Le Tribunal de Grande Instance de Dijon, par jugement du 6 mars 2006, fait droit à la demande de résolution judiciaire du contrat et à celle tendant au remboursement de l'à valoir. Monsieur X... est condamné en outre au versement de 30. 000 euros de dommages-intérêts et 2. 000 euros au titre des frais irrépétibles. La demande d'exécution provisoire est rejetée, de même que la demande de délai formulée à titre subsidiaire par le défendeur.
Patrice X... fait appel par déclaration reçue au greffe le 26 avril 2006. Par conclusions déposées le 8 février 2007, il demande à la Cour :
-d'enjoindre la société Editions Robert Laffont de lui communiquer la reddition des comptes sur les droits d'auteur concernant les ventes à l'étranger clubs et poches depuis l'édition de ces livres et également pour les droits dus en France pour les années 2004 et 2005,
-dès à présent et vu les articles 1147,1148 et 1184 du Code Civil,
-en raison de l'impossibilité d'exécution, et sans faute de sa part, de constater la résolution du contrat,
-de lui donner acte de ce qu'il accepte en conséquence que la somme perçue à titre d'à valoir soit restituée mais ce sans intérêt,
Au regard de sa situation matérielle délicate, de lui accorder les plus larges délais de paiement, tant pour la restitution de l'à valoir, que à titre subsidiaire pour toute condamnation, au profit de la SA Robert Laffont,
-de débouter la SA Robert Laffont de toutes autres demandes,
-de la condamner à lui payer la somme de 1. 000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
-de la condamner enfin aux entiers dépens en réservant à Me GERBAY le bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Suivant écritures du 4 décembre 2006, la société des Editions Robert Laffont demande à la Cour de :

-constater que Monsieur Patrice X... a gravement et-à de nombreuse reprises-contrevenu aux obligations qu'il avait souscrites à l'égard des Editions Robert Laffont par contrat d'édition du 20 décembre 1999,
-prendre acte néanmoins de ce que Monsieur Patrice X... accepte désormais de restituer la somme qu'il a reçue à titre d'à valoir en exécution de ce contrat mais le débouter de ses demandes pour le surplus,
En conséquence :
-confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Dijon en date du 6 mars 2006 en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat d'édition du 20 décembre 1999 aux torts exclusifs de Monsieur Patrice X... et en ce qu'il a condamné ce dernier à rembourser à la société des Editions Robert Laffont la somme de 22. 867,35 euros correspondant à l'à valoir payé par l'éditeur lors de la signature du contrat,
-réformer ce même jugement en ce qu'il a condamné Monsieur Patrice X... à rembourser cette somme avec intérêts au taux contractuel à compter du 16 août 2004 et, statuant à nouveau de ce chef, condamner Monsieur Patrice X... à rembourser à la société des Editions Robert Laffont la somme de 22. 867,35 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 août 2004,
-confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Dijon en date du 6 mars 2006 en ce qu'il a condamné Monsieur Patrice X... à payer à la société des Editions Robert Laffont la somme de 30. 000 euros à titre de dommages-intérêts mais porter ce montant à la somme de 34. 000 euros,
-débouter Monsieur Patrice X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
-condamner en outre Monsieur Patrice X... à payer aux Editions Robert Laffont la somme de 6. 000 euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
-le condamner enfin en tous dépens dont distraction au profit de la SCP FONTAINE TRANCHAND et SOULARD conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture est rendue le 12 mars 2007.
SUR QUOI, LA COUR
Il est constant que les relations contractuelles dont l'inexécution est invoquée par les Editions Robert Laffont sont constituées, d'une part, par le contrat du 20 décembre 1999, et d'autre part par l'avenant du 9 juillet 2003.
Monsieur X... ne conteste pas ne pas avoir adressé à son éditeur les " 150 à 200 pages du premier jet de son récit " avant le 31 décembre 2003, ni les 80 à 100 pages suivantes qui devaient être livrées au plus tard le 28 février 2004 selon l'avenant. Il soutient cependant que, dans la mesure où ledit avenant prévoyait que l'ouvrage traiterait à la fois des aventures de la Boudeuse 1 et du début de la Boudeuse 2, il était nécessaire que l'expédition de ce second navire soit commencée pour que son récit puisse en être fait, et que cette expédition n'a " réellement commencé " qu'en octobre 2004 lorsqu'il a retrouvé les indiens Macujé en Amazonie Colombienne.
En réalité, il ressort des propos de Monsieur X... dans un courrier adressé aux Editions Robert Laffont le 22 avril 2002 que si, effectivement, il a proposé que son récit intègre " le début " de la Boudeuse 2, il s'agissait uniquement de faire le lien entre les deux expéditions afin de bénéficier du battage médiatique organisé autour du départ du second navire pour assurer la production du livre.L'appelant indiquant clairement dans ce courrier " je vous assure à tout le moins que je ferai en sorte que le livre paraisse au moment du départ de " la boudeuse ". Sa position était la même en janvier 2004 lorsque, par un courrier du 3 janvier accompagnant les 30 premières pages du récit, il propose d'envoyer chaque mois les feuilles suivantes en précisant : " comptes tenu des retards accumulés encore pour le départ du nouveau navire, nous serons de toute façon dans les temps pour la publication du livre ".
Il est établi par les pièces du dossier que la Boudeuse 2 a été baptisée le 24 juin 2004 et a quitté le port de Bastia le 27 juillet 2004.L'avenant signé le 9 juillet 2003 prenait tout à fait en compte ce calendrier puisque si le " premier jet " du récit devait être remis en deux étapes les 31 décembre 2003 et 28 février 2004, il était précisé " de façon à ce que la version définitive et complète du manuscrit, conforme aux prescriptions de l'article 2 A de notre contrat, soit entre les mains des Editions Robert Laffont dans le courant du mois de mai 2004 ", l'objectif étant de donner à l'éditeur le temps de faire imprimer l'ouvrage et d'assurer sa diffusion au moment du départ du second navire.
Monsieur X... soutient ensuite ne pas avoir pu respecter ses engagements dans la mesure où il se serait retrouvé confronté à des aléas constituant un cas de force majeure.
Les cas de force majeure s'entend des événements qui rendent l'exécution de l'obligation impossible du fait de leur caractère insurmontable et imprévisible.
Lors de l'établissement de l'avenant du 9 juillet 2003, le naufrage de la Boudeuse 1 était intervenu plus de deux ans auparavant. Il s'agissait donc d'un élément parfaitement connu des parties. Il en est de même de la perte du journal de bord lors de ce naufrage dont Monsieur X... fait état pour la première fois dans le cadre de la présente instance.
Le 22 avril 2002, l'appelant expliquait son retard par " les difficultés rencontrées pour rebâtir une nouvelle campagne autour du monde de " la Boudeuse " et par l'impossibilité de trouver un moment de sérénité nécessaire à l'écriture compte-tenu de la pression subie. Il soutient aujourd'hui que les réparations à effectuer sur le nouveau navire ont été plus importantes que prévues et ont nécessité le recours à de nouveaux financements.
Or, ainsi qu'il vient d'être vu plus haut, le calendrier prévu lors de l'établissement de l'avenant du 9 juillet 2003 a parfaitement été respecté, la Boudeuse 2 ayant levé l'ancre à l'été 2004 comme prévu. Il est ainsi établi qu'entre la signature de cet avenant et les mois de décembre 2003 et février 2004 aucun événement nouveau n'est survenu qui puisse expliquer la non exécution des obligations contractuelles de Monsieur X....
D'autre part, le contrat signé le 20 décembre 1999 comporte la disposition suivante : " dès la signature du présent contrat et pour toute la durée d'exploitation de l'ouvrage, l'auteur s'interdit toute participation chez un autre éditeur à un ouvrage ou une partie d'ouvrage qui, traitant du même sujet, à un même niveau, pourrait faire concurrence à celui qui est cédé en exclusivité à l'Editeur par la présente convention ".
Monsieur X... ne conteste pas avoir préfacé quatre ouvrages publiés par les éditions Lattès dans le cadre d'une collection intitulée " l'odyssée de la Boudeuse " qui portent chacun sur une expédition de la Boudeuse no1, ces livres étant parus le 16 mai 2001 pour trois d'entre eux et le 30 juin 2001 pour le quatrième. Le fait de préfacer un ouvrage portant sur le même sujet que celui du livre promis aux Editions Robert Laffont, et d'apparaître sur la couverture de l'ouvrage avec la mention " Patrice X... présente " constitue à l'évidence un manquement à l'interdiction prévue au contrat.
Monsieur X... ne s'oppose plus à la résolution judiciaire du contrat, ni à la restitution de la somme de 22. 867,35 euros perçue à titre d'avance. Le jugement sera confirmé sur ce point sauf à modifier le taux d'intérêt applicable ainsi que le relèvent à juste titre les Editions Robert Laffont.

La rupture des relations étant imputable à Monsieur X..., l'éditeur est fondé à demander l'indemnisation de son préjudice qui consiste notamment dans le manque à gagner lié à l'absence de publication de l'ouvrage et de la perte de chance de céder les droits d'adaptation de l'oeuvre.L'importance de l'avance consentie par les Editions laffont démontre qu'elles entendaient réaliser un chiffre d'affaire conséquent, espoir tout à fait justifié par le couplage de la publication du livre avec la diffusion de sept documentaires à la télévision. La demande de l'éditeur est tout à fait justifiée, et le jugement doit être modifié sur ce point.

Monsieur X..., arguant d'une situation financière difficile, demande des délais de paiement sans formuler aucune proposition sérieuse d'apurement de sa dette, alors même que depuis 1999 il bénéficie de l'avance de fonds qui lui a été faite sans aucune contrepartie. Il ne peut pas être fait droit à cette demande.
La demande de reddition des comptes sur les droits d'auteur présentée pour la première fois en cause d'appel par Monsieur X... est irrecevable tant sur le fondement de l'article 564 du Nouveau Code de Procédure Civile que de celui de l'article 70 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de Dijon du 6 mars 2006 en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat d'édition du 20 décembre 1999 aux torts exclusifs de Monsieur Patrice X... et condamné ce dernier à rembourser à la société des Editions Robert Laffont la somme de 22. 867,35 euros et à lui verser 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Condamne Monsieur Patrice X... à verser à la société des Editions Robert Laffont :
-les intérêts calculés au taux légal sur le principal de 22. 867,35 euros à compter du 16 août 2004,
-34. 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Déboute Monsieur Patrice X... de sa demande de délais de paiement,

Vu l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Condamne Monsieur Patrice X... à verser à la société des Editions Robert Laffont 2. 000 euros au titre des frais irrépétibles liés à l'appel,

Déclare irrecevable la demande de reddition des comptes sur les droits d'auteur,
Condamne Monsieur Patrice X... aux dépens dont distraction au profit de la SCP FONTAINE-TRANCHAND et SOULARD conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Ct0358
Numéro d'arrêt : 06/786
Date de la décision : 02/05/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Dijon, 06 mars 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.dijon;arret;2007-05-02;06.786 ?
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