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17/04/2007 | FRANCE | N°06/1205

France | France, Cour d'appel de Dijon, Ct0349, 17 avril 2007, 06/1205


Cie d'assurances GROUPAMA GRAND EST

C / GAEC DES GOUTTES BASSES Martine X... veuve Y... Rémy Y...

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 17 Avril 2007
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE CIVILE A
ARRÊT DU 17 AVRIL 2007
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 06 / 01205
Décision déférée à la Cour : AU FOND du 31 MAI 2006, rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CHAUMONT RG 1ère instance : 04 / 01071

APPELANTE :

Cie d'assurances GROUPAMA GRAND EST dont le siège social est 30 Bd de Champagne BP 97830 21078 DIJON CEDEX

reprÃ

©sentée par Me Philippe GERBAY, avoué à la Cour assistée de la SCP FLORIOT-TRIBOLET, avocats au barreau de HAU...

Cie d'assurances GROUPAMA GRAND EST

C / GAEC DES GOUTTES BASSES Martine X... veuve Y... Rémy Y...

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 17 Avril 2007
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE CIVILE A
ARRÊT DU 17 AVRIL 2007
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 06 / 01205
Décision déférée à la Cour : AU FOND du 31 MAI 2006, rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CHAUMONT RG 1ère instance : 04 / 01071

APPELANTE :

Cie d'assurances GROUPAMA GRAND EST dont le siège social est 30 Bd de Champagne BP 97830 21078 DIJON CEDEX

représentée par Me Philippe GERBAY, avoué à la Cour assistée de la SCP FLORIOT-TRIBOLET, avocats au barreau de HAUTE MARNE

INTIMES :
GAEC DES GOUTTES BASSES dont le siège social est 52240 BREUVANNES

représentée par la SCP BOURGEON et KAWALA et BOUDY, avoués à la Cour assistée de Me Gérard BOCQUILLON, avocat au barreau de HAUTE-MARNE

Madame Martine X... veuve Y... née le 04 Mars 1954 à NEUFCHATEAU (88300) demeurant... 52240 BREUVANNES

représentée par la SCP BOURGEON et KAWALA et BOUDY, avoués à la Cour assistée de Me Gérard BOCQUILLON, avocat au barreau de HAUTE-MARNE

Monsieur Rémy Y... né le 31 Janvier 1977 à CHAUMONT (52000) demeurant... 52240 BREUVANNES

représenté par la SCP BOURGEON et KAWALA et BOUDY, avoués à la Cour assisté de Me Gérard BOCQUILLON, avocat au barreau de HAUTE-MARNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Mars 2007 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame DUFRENNE, Président de Chambre, Président, Madame VIGNES, Conseiller, assesseur, Monsieur BESSON, Conseiller, assesseur, ayant fait le rapport sur désignation du président, qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DEBATS : Madame CREMASCHI, greffier
ARRET rendu contradictoirement,
PRONONCE publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,
SIGNE par Madame DUFRENNE, Président de Chambre, et par Madame CREMASCHI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties :
Le G. a. e. c. des Gouttes basses a souscrit auprès de la société Groupama Grand Est (la société Groupama) un contrat d'assurance le garantissant, notamment, en cas de sinistre affectant ses bâtiments d'exploitation sis à Breuvannes (52) ;
Le 14 août 2003, un incendie s'est déclaré dans l'un des bâtiments agricoles appartenant au G. a. e. c., entraînant sa destruction et la perte de son contenu ;
Mme Martine Y..., gérante du G. a. e. c. des Gouttes basses, a déclaré le sinistre à l'assureur qui lui a fait connaître, par lettre du 22 août 2003, qu'il commettait le cabinet Vionnet en qualité d'expert ;
Après la désignation par le G. a. e. c. de son propre expert, le Cabinet Demoyen, une réunion des deux experts a été organisée le 8 octobre 2003 sur les lieux du sinistre, en vue notamment d'évaluer les dommages subis ;
Le 3 novembre 2003, la compagnie Groupama a adressé un courrier au G. a. e. c. des Gouttes basses dans lequel elle indiquait opposer à l'assuré une déchéance de garantie pour ce sinistre, en raison d'une déclaration exagérée par M. Rémy Y..., co-gérant, des pertes subies ;
Se heurtant ainsi au refus d'indemnisation de l'assureur, Mme Y..., faisant état de sa qualité de gérante du G. a. e. c., et M. Rémy Y..., ont fait citer la société Groupama Grand Est devant le tribunal de grande instance de Chaumont, par acte d'huissier du 9 juillet 2004, afin :
-de le voir condamner à payer au G. a. e. c. :
. la somme de 206 141 € sous exécution provisoire, correspondant à l'estimation à dires d'experts de la valeur, vétusté déduite, du bâtiment incendié, outre intérêts de droit à compter du 16 janvier 2004 ;
. ainsi que celle de 30 000 € de dommages-intérêts pour résistance abusive et vexatoire ;
-de voir ordonner la poursuite des opérations d'expertise aux fins d'évaluer les préjudices liés à la perte des contenus du bâtiment détruit, et débouter l'assureur de toutes demandes, en raison du dol et des violences commis à l'égard de M. Rémy Y... ;
-et de bénéficier d'une indemnité de 3 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Par un premier jugement du 7 avril 2005, le tribunal de grande instance de Chaumont a ordonné avant dire droit la réouverture des débats et le renvoi de l'affaire à la mise en état, afin d'inviter le G. a. e. c. des Gouttes basses à intervenir à la procédure et produire ses statuts ;
Par un second jugement prononcé au fond le 31 mai 2006, le tribunal a notamment :
-écarté la fin de non recevoir tirée de la prescription biennale opposée par la société Groupama Grand Est au G. a. e. c. des Gouttes basses ;
-déclaré l'assureur non fondé en sa demande de déchéance de garantie ;
-condamné celui-ci, sous exécution provisoire, à payer au G. a. e. c. la somme de 206 141 € en indemnisation du bâtiment incendié, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;
-et ordonné, avant dire droit sur l'indemnisation du contenu du bâtiment, une expertise judiciaire confiée à M. B..., chargé de dresser la liste de matériels endommagés ou détruits et d'en faire l'évaluation ;
La société Groupama Grand Est a interjeté appel de ce jugement, par déclaration du 26 juin 2006 ;
Au terme de ses écritures présentées le 23 octobre 2006, l'assureur conclut :
-à titre principal, à la prescription, sur le fondement de l'article L. 114-1 du code des assurances, de l'action engagée par le G. a. e. c. des Gouttes basses ;
-à titre subsidiaire, à son droit d'opposer une déchéance de garantie à l'assuré, partant, au rejet de l'ensemble de ses prétentions ;
-dans tous les cas, à la restitution subséquente de toutes sommes perçues, avec intérêts de droit, et à l'allocation d'une indemnité de 2 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
La société Groupama Grand Est fait en premier lieu valoir que le G. a. e. c. des Gouttes basses n'est intervenu que le 5 octobre 2005 à la procédure, soit plus de deux ans après la date du sinistre, en observant que l'assignation introductive d'instance en date du 9 juillet 2004 a été lancée par M. et Mme Y..., personnes physiques n'ayant pas qualité à agir et ne se confondant pas avec la personne morale du G. a. e. c. ;
L'appelante soutient en second lieu que M. Rémy Y..., qui avait initialement déclaré la perte de 1100 à 1200 bottes de foin et de paille et de six pneumatiques neufs pour tracteur, a ensuite admis devant un huissier de justice commis par ses soins-et sans que soit démontrée l'existence de quelconques manoeuvres dolosives de l'assureur-la seule perte d'une trentaine de bottes de foin, de 250 bottes de paille et de pneumatiques datant de quatre ou cinq ans, révélant une fausse déclaration intentionnelle exposant l'assuré à la déchéance de garantie stipulée au contrat d'assurance ;
Dans leurs écritures présentées le 21 décembre 2006, le G. a. e. c. des Gouttes basses et M. et Mme Y... sollicitent la confirmation de la décision entreprise qui a condamné la société Groupama Grand Est à payer au G. a. e. c. la somme de 206 141 € en indemnisation du bâtiment incendié, et concluent tant au rejet des prétentions de l'assureur qu'à sa condamnation à payer :
-la somme de 30 000 € de dommages-intérêts au G. a. e. c., pour résistance abusive et vexatoire ;
-celle de 10 000 € de dommages-intérêts à M. Y... en réparation du préjudice moral subi à raison du dol commis à son égard ;

-ainsi qu'une indemnité de 2 000 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Les intimés répliquent en effet à la société Groupama Grand Est :
-d'une part, que l'assignation du 9 juillet 2004 a été délivrée par Mme Y... ès-qualités de gérante du G. a. e. c. des Gouttes basses, et a donc interrompu utilement la prescription biennale, de même que la désignation ultérieure d'experts ;
-d'autre part, que M. Y... n'a pas effectué de fausse déclaration et que la société Groupama Grand Est, en dépêchant un inspecteur et un agent privé de recherches, puis un huissier de justice, pour rencontrer M. Rémy Y... seul, alors que l'expertise contradictoire privée était en cours, a commis à l'encontre de ce dernier, psychologiquement fragile, et qui s'était en tout état de cause refusé à estimer les dommages, des manoeuvres dolosives et des violences qui ne permettent pas d'opposer la déchéance contractuelle de garantie et doivent être sanctionnées ;

La clôture de l'instruction a été prononcée le 12 mars 2007 ;

La cour d'appel se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, à la décision déférée ainsi qu'aux écritures d'appel évoquées ci-dessus ;

Motifs de l'arrêt :

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription biennale :
Attendu que l'assignation délivrée le 9 juillet 2004 à l'encontre de la société Groupama Grand Est, citant celle-ci devant le tribunal de grande instance de Chaumont en paiement de l'indemnité d'assurance, d'une part, mentionne expressément qu'elle est établie à la requête, notamment, de Mme Y..., gérante du G. a. e. c. des Gouttes basses, d'autre part, réclame condamnation de l'assureur au profit exclusif dudit G. a. e. c. ;
Qu'il en résulte que cette citation, délivrée régulièrement au nom et pour le compte du G. a. e. c. des Gouttes basses, victime du sinistre survenu le 14 août 2003, a interrompu avant l'expiration du délai biennal la prescription instituée par l'article L. 114-1 du code des assurances, que lui oppose la société Groupama Grand Est ;
Qu'il y a lieu, par conséquent, de confirmer le jugement déféré qui a déclaré l'action du G. a. e. c. non prescrite ;
Sur la déchéance contractuelle de garantie :
Attendu qu'au Titre II des conditions générales du contrat souscrit par le G. a. e. c. des Gouttes basses auprès de la société Groupama Grand Est, il est stipulé, aux termes de son article 4 intitulé " le sinistre ", qu " en cas de fausses déclarations faites sciemment sur la nature, les causes, les circonstances et les conséquences d'un sinistre, vous perdez pour ce sinistre le bénéficie des garanties de ce contrat " ;
Attendu qu'il est au préalable mentionné, dans ce même article, que l'assuré doit transmettre à l'assureur " un état estimatif certifié sincère et signé, des objets assurés, détériorés ou volés " ; que la société Groupama Grand Est a au demeurant rappelé, dans une lettre du 22 août 2003 adressée à Mme Y..., qu'il appartenait à celle-ci de lui faire parvenir, en particulier, une " liste du contenu endommagé certifiée sincère et véritable " ;
Attendu qu'il résulte de ceci que la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré doit être appréciée, au sens même de la convention des parties, au regard de la réclamation certifiée sincère adressée par l'assuré pour le paiement de l'indemnité d'assurance ;
Et attendu, à cet égard, que ni l'audition de M. Rémy Y... par les enquêteurs de la gendarmerie, ni son attestation recueillie le 2 octobre 2003 à la seule initiative d'enquêteurs de l'assureur-alors que l'expertise conjointe destinée à préciser l'étendue et l'estimation des dommages était encore à venir-ni davantage l'état " préparatoire servant de base au règlement amiable " adressé le 23 septembre 2003 par l'expert du G. a. e. c. à l'expert de la société Groupama Grand Est, ne constituent l'état estimatif " certifié sincère " adressé par l'assuré à l'assureur pour le paiement de l'indemnité, sur la foi duquel doit être appréciée la fausse déclaration intentionnelle de nature à entraîner la déchéance contractuelle de garantie ;
Qu'il s'ensuit qu'il y a lieu de confirmer également de ce chef le jugement déféré, qui a rejeté la déchéance de garantie opposée par la société Groupama Grand Est ;
Qu'il en résulte la confirmation de ses dispositions relatives à l'indemnisation du bâtiment incendie et à l'organisation de l'expertise sur le contenu de celui-ci ;
Sur la demande de dommages-intérêts pour dol et violences :
Attendu qu'il est reproché à la société Groupama Grand Est d'avoir commis des manoeuvres constitutives de dol ou de violences à l'égard de M. Rémy Y..., en obtenant de celui-ci des attestations et déclarations dictées par l'espoir suggéré d'une indemnisation plus prompte ;
Attendu, toutefois, que l'on ne peut en soi faire grief à l'assureur, en présence des indications incertaines ou approximatives livrées par M. Rémy Y..., et compte tenu de l'ampleur du sinistre et de l'indemnisation en jeu, d'avoir diligenté des enquêteurs privés puis un huissier de justice auprès de l'intéressé, afin d'obtenir de celui-ci des informations plus explicites et précises sur l'étendue des pertes subies ;

Et attendu qu'il ne résulte d'aucune pièce ni d'aucun des éléments de preuve versés au débat que ces personnes, à supposer même qu'elles aient suscité chez M. Rémy Y... l'espérance d'un règlement plus diligent du sinistre, aient exercé une quelconque pression sur lui, de nature à avérer l'existence de manoeuvres constitutives de dol, que ne révèlent pas les attestations recueillies, ou de violences quelconques ;

Qu'il s'ensuit que la demande en dommages-intérêts pour préjudice moral doit être rejetée ;
Sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive et vexatoire :
Attendu que la société Groupama Grand Est, ainsi qu'il a été souligné ci-dessus, était en droit de s'interroger sur l'étendue des pertes subies par son assuré à la suite du sinistre déclaré ;
Attendu qu'elle pouvait, de ce fait, procéder sans abus à une enquête auprès des membres du G. a. e. c. des Gouttes basses-en recueillant en particulier les déclarations de M. Rémy Y...-dont il n'apparaît pas, en l'absence au dossier d'élément de preuve le révélant, qu'elle a revêtu le caractère vexatoire que dénoncent les intimés ;
Qu'il y a lieu, par conséquent, de rejeter la demande en dommages-intérêts pour résistance abusive et vexatoire ;
Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de faire supporter par la société Groupama Grand Est, à hauteur de la somme de 1 500 €, la charge des frais irrépétibles exposés par le G. a. e. c. des Gouttes basses et M. et Mme Y... pour les besoins de la procédure d'appel ;
Sur les dépens :
Attendu qu'il convient, du fait de la confirmation de la décision entreprise, de laisser à la société Groupama Grand Est la charge des dépens d'appel ;

Par ces motifs :

La cour d'appel, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré prononcé le 31 mai 2006 par le tribunal de grande instance de Chaumont ;
Rejette les demandes en dommages-intérêts présentées en faveur tant du G. a. e. c. des Gouttes basses que de M. Rémy Y... ;

Condamne la société Groupama Grand Est à payer la somme de 1 500 € au G. a. e. c. des Gouttes basses et à M. et Mme Y..., en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Laisse à la société Groupama Grand Est la charge des dépens d'appel avec droit de recouvrement de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Ct0349
Numéro d'arrêt : 06/1205
Date de la décision : 17/04/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Chaumont


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.dijon;arret;2007-04-17;06.1205 ?
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