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01/03/2007 | FRANCE | N°154B

France | France, Cour d'appel de Dijon, Ct0358, 01 mars 2007, 154B


Société JEUX RAVENSBURGER

C /
SA HELLER
Maître Pascale X...
Maître Jacques Y...
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 01 Mars 2007
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 01 MARS 2007
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 05 / 02226
Décision déférée à la Cour : AU FOND du 28 NOVEMBRE 2005, rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE CHALON SUR SAONE RG 1ère instance : 05 / 2217

APPELANTE :
SA RAVENSBURGER Dont le siège social est : 21 Rue Dornach BP 9 68120 PFASTATT

représentée par la SCP FONTAINE-TRANCHAN

D et SOULARD, avoués à la Cour assistée de Maître GREFFE avocat au Barreau de PARIS

INTIMEE :

S. A. HELLER Dont l...

Société JEUX RAVENSBURGER

C /
SA HELLER
Maître Pascale X...
Maître Jacques Y...
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 01 Mars 2007
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 01 MARS 2007
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 05 / 02226
Décision déférée à la Cour : AU FOND du 28 NOVEMBRE 2005, rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE CHALON SUR SAONE RG 1ère instance : 05 / 2217

APPELANTE :
SA RAVENSBURGER Dont le siège social est : 21 Rue Dornach BP 9 68120 PFASTATT

représentée par la SCP FONTAINE-TRANCHAND et SOULARD, avoués à la Cour assistée de Maître GREFFE avocat au Barreau de PARIS

INTIMEE :

S. A. HELLER Dont le siège social est : Chemin de la Porte BP 5 61160 TRUN

Représentée par la SCP BOURGEON KAWALA et BOUDY avoués à la Cour Assistée de Maître WEIL avocat au Barreau de PARIS

INTERVENANTS VOLONTAIRES :

Maître Pascale X... mandataire judiciaire, représentant des créanciers au redressement judiciaire de la société HELLER Demeurant : ...61303 L'AIGLE CEDEX

représentée par la SCP BOURGEON et KAWALA et BOUDY, avoués à la Cour assistée de Maître WEIL avocat au Barreau de PARIS

Maître Jacques Y... administrateur judiciaire de la société HELLER Demeurant : ...... 61202 ARGENTAN

représenté par la SCP BOURGEON et KAWALA et BOUDY, avoués à la Cour assisté de Maître WEIL avocat au Barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Février 2007 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur RICHARD, Conseiller et Monsieur BESSON, Conseiller chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries lors du délibéré, la Cour étant alors composée de :

Monsieur RICHARD, Conseiller présidant, désigné à ces fonctions par ordonnance de Monsieur le Premier Président du 31 janvier 2007, Président, Madame VAUTRAIN, Conseiller, assesseur, Monsieur BESSON, Conseiller, assesseur,

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme GARNAVAULT,

ARRET : rendu contradictoirement,

PRONONCE publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile
SIGNE par Monsieur RICHARD, Conseiller, et par Madame GARNAVAULT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DE L'AFFAIRE

La SA HELLER, venant aux droits de la société JOUSTRA, a pour activité principale la fabrication et la commercialisation de maquettes et de jouets pour enfants.

A partir des mois d'août 2002 et juillet 2003, elle a commercialisé deux jouets éducatifs, dont elle dit qu'ils ont eu un grand succès : un tour de potier dénommé " Terra Poterie " et un pyrograveur appelé " Pyro Maestro ".

Au début de l'année 2004, elle a constaté que la société concurrente RAVENSBURGER annonçait la sortie de deux nouveaux jouets : un tour de potier et un pyrograveur.
Relevant lors de leur commercialisation, au mois de septembre 2004, que ces jouets reprenaient de nombreuses caractéristiques de ceux qu'elle avait créés, elle a demandé la cessation de leur distribution, le 10 février 2005 puis a fait procéder à un constat, le 8 mars 2005, et à une saisie contrefaçon du pyrograveur le 14 mars 2005.
Le 8 avril 2005, elle a assigné la société RAVENSBURGER devant le tribunal de commerce de CHALON SUR SAONE pour obtenir sur le fondement de la contrefaçon et de la concurrence déloyale l'interdiction de poursuivre la publicité et la commercialisation, la désignation d'un expert et le paiement d'une provision.
Par jugement du 28 novembre 2005, le tribunal a :
-condamné la société RAVENSBURGER à payer à la société HELLER une somme d'un montant égal à ce que lui a rapporté la commercialisation du pyrograveur,-commis un expert pour déterminer le préjudice,-ordonné à la société RAVENSBURGER de retirer de la vente le jouet " pyrogravure " sur le marché français, sous astreinte de 500 € par infraction constatée à l'issue d'un délai de 8 jours à compter de la notification du jugement,-accordé à la société HELLER 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La SAS JEUX RAVENSBURGER, devenue depuis SA RAVENSBURGER, a fait appel.
Dans ses dernières écritures, en date du 21 décembre 2006, auxquelles il est fait référence par application de l'article 455 du nouveau code de procédure civile, elle déclare en ce qui concerne le pyrograveur, constater que l'action en contrefaçon est abandonnée et elle soutient qu'aucune concurrence déloyale ne peut être retenue.
Concernant le tour du potier, elle sollicite le rejet de la demande en soulignant la différence des conditionnements.
Elle affirme enfin qu'aucun préjudice n'est démontré.
Elle souhaite obtenir 100. 000 € pour procédure abusive et 20. 000 € en remboursement de ses frais irrépétibles et réclame la publication de l'arrêt.
La SA HELLER, par conclusions du 3 mai 2006, auxquelles il est pareillement fait référence, maintient que la société appelante a bien commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire, tant pour le pyrograveur que pour la tour du potier et elle considère que l'étendue de son préjudice doit être déterminé par expertise.
Elle souhaite qu'il soit fait injonction à la société RAVENSBURGER de retirer de la vente le jouet " poterie artiste " sur le marché français, qu'il lui soit fait interdiction de poursuivre toute publicité et commercialisation pour ces deux jouets, qu'elle soit condamnée à lui payer une somme égale à la marge brute réalisée par la vente de ces produits à la clientèle française depuis le début de la commercialisation en France, qu'une provision de 300. 000 € lui soit allouée et que la publication de la décision soit ordonnée.
Elle réclame 30. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La société HELLER ayant été déclarée en redressement judiciaire le 21 juillet 2006, Maître X... et Maître Y..., respectivement représentant des créanciers et administrateur de cette société sont intervenus pour reprendre à leur compte ses écritures.

MOTIFS DE LA DECISION

1. En ce qui concerne le pyrograveur Pyro Maestro

Attendu que la société HELLER reproche à la société appelante d'avoir reproduit de manière quasi servile les caractéristiques et les composantes de son pyrograveur tant sur la plan externe qu'interne (bouton poussoir, voyant lumineux, pointe en filament, etc..) ; qu'elle fait encore état des mentions portées sur les notices explicatives et affirme que les ressemblances ne sont pas imposées par des normes de standardisation ou par des nécessités fonctionnelles ;

Attendu que la société RAVENSBURGER conteste tout acte de concurrence déloyale, soutient que les dispositifs sont fonctionnels et que la société intimée n'invoque à l'appui de son action en concurrence déloyale aucun fait distinct de ceux invoqués au titre de la contrefaçon ;
Mais attendu que l'examen comparatif du pyrograveur de la société HELLER et du pyrograveur de la société RAVENSBURGER démontre que le second, commercialisé postérieurement, présente des caractéristiques identiques à celles du premier, qui créent nécessairement une confusion dans l'esprit de la clientèle ;

Attendu en effet que :

-les deux articles sont bicolores, fabriqués en matière plastique, de couleurs vives,-tous deux présentent un interrupteur sous la forme d'un bouton poussoir placé sur la partie supérieure de l'appareil,-tous deux sont constitués de deux coques assemblées par 4 vis placées aux mêmes endroits,-tous deux présentent en partie supérieure un voyant lumineux indiquant le fonctionnement,-tous deux ont une pointe en biseau séparée du corps de l'appareil par une collerette de même forme,-la pointe à filament, identique, est fixée par deux vis placée aux mêmes endroits,-tous deux sont dotés, à l'autre extrémité d'un passe-fil identique, intégré dans le prolongement de la géométrie du corps,-la conception interne des deux appareils est identique ;

Attendu que ces différente caractéristiques ne répondent pas à des nécessités fonctionnelles, comme le démontrent d'une part les pyrograveurs commercialisés antérieurement par les deux sociétés, dont l'aspect général et les composants étaient très différents, d'autre part le pyrograveur commercialisé plus récemment par la société RAVENSBURGER ;
Que les nouvelles normes de sécurité européennes imposaient des sujétions supplémentaires pour ce type de jouets mais n'imposaient pas une réponse identique de tous les fabricants en ce qui concerne la forme, l'apparence et les solutions techniques susceptibles de satisfaire à ces exigences ;
Attendu que la société HELLER avait donné une réponse originale et nouvelle ;
Qu'il apparaît que la société appelante a copié servilement, jusque dans ses moindres détails, le pyrograveur Pyro Maestro de la société HELLER ;
Qu'elle a ainsi commis des faits de concurrence déloyale et doit réparer le préjudice qui en est résulté pour la société intimée ;
Que la société HELLER justifie des investissements réalisés pour mettre au point ce jouet ; que la société RAVENSBURGER a profité de ces investissements ;
Que le tribunal a justement considéré que l'étendue du préjudice devait être déterminé par une mesure d'expertise, dont la mission sera toutefois précisée et le montant de la consignation majoré ;
Attendu que la société HELLER dont le préjudice est certain, doit recevoir dès à présent une provision de 25. 000 € ;
2. En ce qui concerne le tour de potier (Terra Poterie)

Attendu que la société HELLER explique qu'elle a conçu un système de pédale présentant de meilleures garanties de sécurité pour le consommateur puisqu'elle exclut tout contact entre l'eau et l'électricité ; Qu'elle reproche à la société appelante d'avoir copié et repris à son compte cette innovation ;

Attendu que la société RAVENSBURGER fait valoir que les deux produits n'ont en commun que le fait d'être tous deux des " tours de potier " et constate que la société HELLER revendique non pas le modèle mais la pédale et la conception du circuit électrique, étant précisé que la pédale, de forme banale, " est disposée dans le produit lui-même ", ce qui doit conduire à confirmer le rejet de la demande faite à ce titre ;
Attendu qu'effectivement la comparaison des deux tours de potier démontre qu'ils sont très différents, tant dans leur apparence que dans leur conditionnement, de sorte qu'aucun risque de confusion n'est possible ;
Attendu qu'aucune information n'est donnée sur l'existence et les avantages de cette pédale, à peine visible sur les emballages ;
Que la mise en place de cet accessoire répond aux exigences européennes en matière de sécurité des jouets ;
Qu'aucun fait de concurrence déloyale n'est donc démontré pour cet appareil ;
Que le rejet de la demande le concernant doit en conséquence être confirmé ;

3. Sur les demandes faites à titre de dommages intérêts et sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

Attendu que la société HELLER doit recevoir une somme complémentaire de3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que la société appelante, qui succombe, ne peut bénéficier de ce texte ;

Que la procédure n'étant pas abusive, la demande de dommages intérêts de la société RAVENSBURGER doit être rejetée ;

4. Sur la demande de publication

Attendu que le dispositif du présent arrêt doit être publié selon les modalités prévues au dispositif ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR
Donne acte à Maître X... et à Maître Y... ès qualités de leur intervention,
Confirme le jugement entrepris, sauf à dire que la société RAVENSBURGER a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société HELLER en commercialisant son pyrograveur " Pyrogravure ", à dire qu'elle doit réparer le préjudice en résultant pour cette société, et à préciser ainsi qu'il suit la mission de l'expert :
-entendre les parties ainsi que tous sachants à condition de consigner leurs dires et explications,-se faire remettre tous documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission,-donner à la juridiction tous éléments permettant de déterminer le préjudice de la société HELLER et dégager notamment la marge brute réalisée par la société RAVENSBURGER par la vente à la clientèle française du pyrograveur " Pyrogravure " imitant le Pyro Maestro,

Fixe à 4. 000 € le montant de la consignation à déposer par la société HELLER,
Confirme les autres modalités relatives à l'exécution de l'expertise,
Ajoutant,
Interdit à la société RAVENSBURGER de faire sur le territoire français toute publicité et commercialisation relatives au jouet " Pyrogravure " imitant le Pyro Maestro,
Condamne la société RAVENSBURGER à payer à la société HELLER la somme de 25. 000 € à titre de provision,
Ordonne la publication du dispositif de l'arrêt dans un quotidien à diffusion nationale aux frais de la société RAVENSBURGER, dans la limite de 3. 000 €,
Condamne la société RAVENSBURGER à payer à la société HELLER la somme de 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Rejette les autres demandes,
Condamne la société RAVENSBURGER aux dépens d'appel et dit que la SCP BOURGEON KAWALA BOUDY, avoués, pourra les recouvrer conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : Ct0358
Numéro d'arrêt : 154B
Date de la décision : 01/03/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Chalon-sur-Saône, 28 novembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.dijon;arret;2007-03-01;154b ?
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