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26/07/2024 | FRANCE | N°22/00567

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 a, 26 juillet 2024, 22/00567


CKD



MINUTE N° 24/597



















































Copie exécutoire

aux avocats



Copie à Pôle emploi

Grand Est



le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



ARRET DU 26 JUILLET 2024



Numéro d'inscription au rép

ertoire général : 4 A N° RG 22/00567 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HYO3



Décision déférée à la Cour : 20 Janvier 2022 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG



APPELANTE :

Madame [L] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Mathieu WEYGAND, avocat au barreau de STRASBOURG

(bénéficie d'u...

CKD

MINUTE N° 24/597

Copie exécutoire

aux avocats

Copie à Pôle emploi

Grand Est

le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

ARRET DU 26 JUILLET 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 22/00567 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HYO3

Décision déférée à la Cour : 20 Janvier 2022 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [L] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Mathieu WEYGAND, avocat au barreau de STRASBOURG

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000283 du 22/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)

INTIMEE :

S.A.R.L. SOUS MON TOIT prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège,

N° SIRET : 509 83 3 7 37

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Guillaume HARTER, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Janvier 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme DORSCH, Président de Chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. PALLIERES, Conseiller

M. LE QUINQUIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

- signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme VELLAINE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCÉDURE et PRÉTENTION des PARTIES

Madame [L] [I], née le 29 septembre 1994, a été engagée par la SARL Sous mon toit, en qualité de garde d'enfants, par un contrat à durée indéterminée du 23 janvier 2019, à hauteur de 88 heures de travail par mois, moyennant un salaire brut de 882,64 €.

La salariée n'ayant pas repris son poste le 21 août 2019 à son retour de congé, l'employeur lui adressait le 27 août 2019 une mise en demeure d'avoir à justifier de son absence.

Le 02 septembre 2019, Madame [L] [I] a été convoquée à un entretien préalable, fixé au 12 septembre 2019.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 septembre 2019, elle a été licenciée pour faute grave, aux motifs de nombreuses absences injustifiées, et de son absence du 20 août au 26 août sans justificatif valable.

La salariée a le 15 octobre 2019 saisi le juge des référés du conseil des prud'hommes de [Localité 5], qui par ordonnance du 22 novembre 2019 a condamné la société à lui payer la somme de 1.295,32 € à titre de rappels de salaire, et 74,60 € à titre de majoration, ainsi qu'une somme de 1.500 € au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991. La délivrance d'un bulletin de salaire rectifié, et d'une attestation pôle emploi modifiée a également été ordonnée.

Contestant son licenciement, Madame [L] [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Strasbourg, le 20 novembre 2019, afin d'obtenir paiement d'indemnités de rupture, et de dommages et intérêts.

Par un jugement du 20 janvier 2022, le conseil de prud'hommes, après avoir constaté que la rémunération mensuelle brute est de 882,64 €, a débouté Madame [I] de ses demandes au titre :

du défaut de suivi médical,

du défaut de formation,

du droit à formation,

des manquements de la société durant la relation contractuelle.

Le conseil des prud'hommes a en outre jugé que le licenciement repose sur une faute grave, a débouté la salariée de ses demandes en ce sens, et l'a condamnée outre aux entiers frais et dépens, au paiement d'une somme de 1.250 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [I] a interjeté appel de la décision le 04 février 2022.

Par ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 04 mai 2022 Madame [I] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté ses demandes au titre des manquements durant la relation contractuelle, en ce qu'il a jugé que le licenciement reposait sur une faute grave, l'a déboutée de ses demandes indemnitaires, et l'a condamnée à payer 1.250 € à l'employeur ainsi qu'aux frais et dépens.

Elle demande à la cour, statuant à nouveau, de condamner la société Sous mon toit à lui payer les sommes de :

5.000 € nets au titre des manquements commis durant la relation de travail, et exécution déloyale du contrat de travail,

441,32 € bruts au titre de l'indemnité légale de licenciement,

5.295,84 € bruts au titre du licenciement abusif,

2.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct,

1.765,28 € au titre du préavis,

176,53 € au titre des congés payés afférents,

3.000 € au titre des honoraires de Maître Weygand en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle,

l'ensemble de ces sommes avec intérêts légaux depuis l'introduction de la demande en première instance,

ordonner la capitalisation des intérêts,

condamner la société aux entiers frais et dépens y compris l'intégralité des frais émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution de la décision à intervenir.

Par ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 1er août 2022 la SARL Sous mon toit, demande à la Cour de :

confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

débouté Madame [L] [I] de toutes ses demandes,

la condamner à lui payer la somme de 4.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles engagés à hauteur d'appel

la condamner aux entiers dépens des deux instances.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 décembre 2023.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour l'exposé des moyens des parties, à leurs conclusions ci-dessus visées.

MOTIFS

Sur le licenciement pour faute grave

La faute grave résulte d'un fait, ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail, ou des relations de travail d'une importance telle, qu'elle rend impossible le maintien du salarié fautif dans l'entreprise.

Il appartient par ailleurs à l'employeur qui l'invoque, de rapporter la preuve de l'existence d'une faute grave.

En l'espèce, Madame [L] [I] a été licenciée pour faute grave par lettre du 17 septembre 2019, connue des parties, aux motifs de nombreuses absences injustifiées, et de son absence du 20 août au 26 août sans justificatif valable, contraignant l'employeur à lui adresser une mise en demeure de justifier de cette absence par courrier recommandé du 27 août 2019. Dans cette lettre l'employeur rappelle le règlement intérieur, et souligne que ces absences injustifiées induisent le non-respect des engagements contractuels de la société, et désorganisent son bon fonctionnement.

Il résulte du bulletin de paye d'août 2019 que la salariée se trouvait en congés payés du 08 aout au lundi 19 août 2019, et qu'elle n'a pas repris son poste de travail à son retour de congés pour se trouver en absence injustifiée du mercredi 21août au samedi 24 août. Le lundi 26 août 2019 jusqu'au dimanche 1er septembre elle a été placée en arrêt maladie.

La salariée reconnaît cette absence, mais se prévaut d'un échange de SMS avec Madame [U] [R] le 15 août 2019 dans lequel elle l'informe être en Turquie, avoir eu « des problèmes au niveau des papiers » et avoir rendez-vous à l'ambassade française le 23, de sorte qu'elle ne peut quitter le territoire avant, ni être de retour avant le 26.

Il convient de relever qu'en réponse Madame [R] écrit notamment que cela est embêtant, qu'il faudra des justificatifs à son retour, et lui demande si elle assurera le 26, car elle doit effectuer 23 heures sur les deux semaines et est « irremplaçable avec tous ces congés ».

Force est de constater que hormis ses propres déclarations la salariée ne verse aux débats strictement aucun justificatif de ses problèmes administratifs ou diplomatiques, alors que son employeur lui avait indiqué que ceux-ci seraient nécessaires. L'achat d'une vignette pour un véhicule en Bulgarie le 24 août 2019 ne justifie de l'existence d'aucune difficulté. La mise en demeure du 27 août était par conséquent à cet égard justifiée. En effet cette absence de plusieurs jours est, et demeure injustifiée.

À compter du lundi 26 août la salariée a été placée en arrêt maladie de sorte que son absence à partir de cette date est justifiée.

La lettre de licenciement mentionne également de nombreuses absences injustifiées, et souligne qu'elles induisent le non-respect des engagements contractuels de la société, et désorganisent son bon fonctionnement.

Il résulte des bulletins de paye que Madame [I] s'est trouvée en absences injustifiées les 5, et 12 février, et du 13 au 16 février 2019. Elle ne justifie nullement de ces absences.

Des jours de carence sont par ailleurs déduits du 27 au 29 mars, du 26 au 27 avril, le 13 mai, et du 26 au 29 juin 2019 dans le cadre d'arrêts maladie, qui ne peuvent lui être reprochés.

Les absences injustifiées de plusieurs jours en août 2019, précédées d'absences injustifiées également durant plusieurs jours en février 2019, d'une salariée comptant une faible ancienneté, constituent une faute grave, sans qu'il soit nécessaire pour l'employeur d'établir une perturbation du service.

Cependant il apparaît en l'espèce que l'employeur a dû faire face au mécontentement de plusieurs clients, ce dont il justifie.

Ainsi par mail du 07 novembre 2019 Madame [O] [D] cliente de l'agence confirme sa demande de changement d'intervenante « suite aux nombreuses absences et du fait que certaines gardes n'ont pas pu être effectuées car la société n'était pas en mesure de trouver des personnes pour remplacer ». Et la cliente conclut : « dans tous les cas nous avons demandé à changer d'intervenante ».

Une copie d'écran d'un message SMS adressé à la salariée par Madame [P] [A] atteste du mécontentement de cette cliente suite à un incident survenu la veille. Elle explique : « vous avez la responsabilité de notre fils vous ne pouvez pas décider de ne pas aller le chercher une heure avant. Surtout que votre message ne me dit pas que vous n'allez pas chercher [K] ! Quand je travaille je suis en vente je n'ai vu votre message qu'à 18h30 quand mon mari m'a dit que [K] était tout seul au périscolaire qui n'était même pas au courant que personne ne venait ! Pour moi c'est vraiment une faute grave de laisser un enfant de six ans seul ».

Par ailleurs l'employeur affirme avoir perdu trois clients ([J], [P], et [S]), et avoir dû faire face au mécontentement des clients [H] et [D] en raison de « trop d'absences », [N] pour « pas à l'heure aux prestations » et [V] pour « pas venue au rendez-vous fixé »

En pièce 9 l'employeur produit une copie d'écran de SMS adressé à Madame [I] dans lequel le client indique « pour ce qui concerne demain, vous me mettez dans l'embarras, car vous nous prévenez à cette heure tardive. La garde prévue a lieu dans 9 heures comment voulez-vous que l'agence nous trouve quelqu'un pour le lundi matin quand vous prévenez' »

Il apparaît que les absences injustifiées, et de dernier moment, mettent en effet l'employeur en difficulté pour trouver une remplaçante à Madame [I].

Enfin, les compétences professionnelles de Madame [I] lorsqu'elle occupe son poste ne sont pas de nature à excuser les absences injustifiées

Il résulte de ce qui précède que le licenciement pour faute grave est justifié de sorte que le jugement est confirmé sur ce point, et en ce qu'il a rejeté les indemnités de préavis, de licenciement, et la demande de dommages et intérêts.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudices distincts

Madame [L] [I] réclame une somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour les préjudices distincts de son licenciement, en exposant que ce n'est que lorsqu'elle « a commencé à s'insurger contre les pratiques inadmissibles de son employeur qu'elle a été écartée de l'entreprise pour des motifs qui ne lui avaient jamais été reprochés auparavant à savoir des absences ».

Pour autant, le fait que la salariée ait émis des réclamations n'interdit nullement à l'employeur de la licencier dès lors que des fautes graves ont été commises, ce qui est le cas en l'espèce.

Si les absences injustifiées de février 2019 n'ont pas donné lieu à sanction disciplinaire, en revanche les nouvelles absences injustifiées d'aout 2019 ont été sanctionnées, avec rappel à juste titre des absences injustifiées antérieures.

L'employeur n'a en l'espèce commis aucune faute, et par ailleurs la salariée ne justifie d'aucun préjudice. Ce chef de demande ne peut-être que rejeté.

Le jugement déféré qui a omis de statuer sur ce chef de demande est par conséquent complété.

III. Sur les manquements au cours de la relation de travail et l'exécution déloyale du contrat de travail

A titre préliminaire la cour relève que la salariée ne fait pas appel du rejet de ses demandes de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale alors qu'elle ne s'est pas rendue à la convocation du médecin du travail, ou pour défaut de formation alors qu'elle a bénéficié de deux formations au cours de l'année 2019.

Elle réclame 5.000 € net de dommages et intérêts au titre des manquements commis au cours de la relation de travail, ainsi que de l'exécution déloyale.

Elle se plaint en premier lieu de ce que la procédure de licenciement ait été mise en 'uvre suite à sa menace de résiliation judiciaire du contrat de travail, alors d'une part que la chronologie des faits démontre qu'elle était d'ores et déjà convoquée à l'entretien préalable (le 02 septembre 2019) lorsqu'elle a adressé un courrier d'avocat le 10 septembre 2019, et que d'autre part et surtout, le licenciement pour faute grave a été jugé bien fondé.

Elle se plaint par ailleurs de ce que le volume d'heures prévues contractuellement n'était pas respecté, sans tenir compte de ses absences injustifiées particulièrement en février 2019, ainsi que de ses absences avec délai de carence.

S'agissant des contestations salariales, il résulte de l'ordonnance de référé du 22 novembre 2019 que l'employeur reconnaissait devoir la somme de 1.295,32 € au titre de rappels de salaires, ainsi que 74,60 € au titre des majorations d'heures complémentaires. Il a par conséquent été condamné à payer ces sommes. Il est relevé que la société Sous mon toit ne justifie d'aucune difficulté s'opposant au règlement de ces montants qu'elle reconnaissait devoir dès début octobre 2019, mais ne les a pas versés spontanément.

Il y a par conséquent bien une faute de l'employeur.

Pour autant Madame [I] doit établir que cette faute lui a causé un préjudice. Or si elle détaille les manquements qu'elle reproche à l'employeur, elle ne justifie d'aucun préjudice. Par conséquent sa demande de dommages et intérêts ne peut-être que rejetée.

Le jugement déféré par conséquent confirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.

IV. Sur les demandes annexes

Le jugement déféré doit être confirmé s'agissant des dépens mis à la charge de la salariée qui succombe, ainsi que des frais irrépétibles.

À hauteur de cour Madame [I] succombe là encore en toutes ses prétentions, de sorte qu'elle sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel, et que par voie de conséquence sa demande de frais irrépétibles est rejetée.

En revanche, l'équité ne commande pas de la condamner au paiement d'une somme supplémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 janvier 2022 par le conseil des prud'hommes de [Localité 5];

Y ajoutant

DEBOUTE Madame [L] [I] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudices distincts ;

CONDAMNE Madame [L] [I] aux dépens de la procédure d'appel ;

DEBOUTE Madame [L] [I] de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

DEBOUTE la SARL Sous mon toit de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 26 juillet 2024, signé par Mme Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Régine VELLAINE Greffier.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 a
Numéro d'arrêt : 22/00567
Date de la décision : 26/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-26;22.00567 ?
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