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01/07/2024 | FRANCE | N°23/03700

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 3 a, 01 juillet 2024, 23/03700


MINUTE N° 24/346





























Copie exécutoire à :



- Me Katja MAKOWSKI

- Me Déborah BAUMANN





Le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 01 Juillet 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 23/03700 - N° Portalis DBVW-V-B7H-IFJI



D

écision déférée à la cour : jugement rendu le 29 septembre 2023 par le juge de l'exécution de Mulhouse





APPELANTE :



S.A. INTRUM DEBT FINANCE AG

[Adresse 5] - [Localité 2] (SUISSE)



Représentée par Me Katja MAKOWSKI, avocat au barreau de COLMAR





INTIMÉ :...

MINUTE N° 24/346

Copie exécutoire à :

- Me Katja MAKOWSKI

- Me Déborah BAUMANN

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 01 Juillet 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 23/03700 - N° Portalis DBVW-V-B7H-IFJI

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 29 septembre 2023 par le juge de l'exécution de Mulhouse

APPELANTE :

S.A. INTRUM DEBT FINANCE AG

[Adresse 5] - [Localité 2] (SUISSE)

Représentée par Me Katja MAKOWSKI, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉ :

Monsieur [E] [N]

[Adresse 1] [Localité 3]

Représenté par Me Déborah BAUMANN, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 mai 2024, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme FABREGUETTES, présidente de chambre

Mme DESHAYES, conseillère

Mme MARTINO, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. BIERMANN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Isabelle FABREGUETTES, présidente et M. Jérôme BIERMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Par exploit du 1er mars 2022, à la requête de la Sa Intrum Debt Finance Ag, venant aux droits de la Bnp, Maître [L] [O], huissier de justice, a signifié à la caisse de Crédit Agricole Alsace Vosges la saisie attribution des sommes dont elle serait personnellement tenue envers Monsieur [E] [N] et ce aux fins de recouvrement d'une somme en principal, frais et intérêts de 21 707,73 euros en exécution d'une ordonnance portant injonction de payer rendue par le tribunal d'instance d'Altkirch le 24 juin 2009.

Cette saisie a été dénoncée à Monsieur [E] [N] le 7 mars 2022.

Ce dernier a, par exploit du 7 avril 2022, fait assigner la Sa Intrum Debt Finance Ag devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Mulhouse afin d'obtenir la mainlevée de cette saisie et la condamnation de la Sa Intrum Debt Finance Ag à lui payer une indemnité de procédure de 1 500 euros en sus des dépens.

Il a essentiellement soulevé le défaut de qualité à agir de la Sa Intrum Debt Finance Ag faute de caractère probant des documents produits quant à la cession de créance intervenue entre la Bnp et la défenderesse, a contesté avoir signé le prêt concerné, vraisemblablement signé par ses parents ayant usurpé son identité et a subsidiairement conclu sur l'absence de possibilité pour lui d'opter pour le retrait de l'article 1699 du code civil et sur l'irrégularité de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer exécutoire et du commandement de payer aux fins de saisie vente faite par acte du 15 octobre 2009.

Il a ainsi demandé le rejet des demandes adverses, sa mise hors de cause ou, subsidiairement la remise totale des intérêts de retard, de la clause pénale et des frais et en tout état de cause la mainlevée de la saisie-attribution contestée et la condamnation de la Sa Intrum Debt Finance Ag aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 1 500 euros.

La Sa Intrum Debt Finance Ag s'est opposée à ces demandes en l'absence d'élément probant utile permettant d'écarter la signature de Monsieur [E] [N], en l'absence de faculté pour

l'intéressé d'opter pour le retrait de l'article 1699 du code civil faute de contestation préalable du droit cédé et au vu des diligences effectuées par l'huissier instrumentaire et des éléments démontrant que le débiteur résidait bien à l'adresse de ses parents au moment de la signification contestée.

Par jugement contradictoire rendu le 29 septembre 2023, le juge de l'exécution délégué du tribunal judiciaire de Mulhouse a :

- déclaré recevable la contestation formée par Monsieur [E] [N] ;

- dit que la Sa Intrum Debt Finance Ag ne justifiait pas de sa qualité à agir comme créancier de Monsieur [E] [N] ;

- donné mainlevée de la saisie attribution signifiée à la Caisse de Crédit AgricoIe Alsace Vosges le 1er mars 2022 à la requête de la Sa Intrum Debt Finance Ag ;

- condamné la Sa Intrum Debt Finance Ag aux dépens et à payer à Monsieur [E] [N] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour se déterminer ainsi, le premier juge a retenu que la saisie litigieuse avait été engagée sur la base d'une ordonnance portant injonction de payer rendue par le tribunal d'Altkirch le 24 juin 2009 au bénéfice de la Sa Bnp Personal finance ; que, si, selon bordereau de cession de créance en date du 18 décembre 2018, la Sa Bnp Personal finance avait cédé à Intrum Debt Finance Ag 20 366 créances pour un montant total de 90 456 432,46 euros, ledit bordereau ne mentionnait aucune référence à la créance détenue contre Monsieur [E] [N] ni ne renvoyait à une annexe portant liste détaillée ou individualisée des créances cédées ; que le document intitulé « extrait de l'annexe au contrat de cession du 18 décembre 2018 » non daté ni signé ou paraphé par le cédant ou le cessionnaire n'avait pas de force probante suffisante ; que la Sa Intrum Debt Finance Ag ne justifiait donc pas de sa qualité à agir comme créancier de Monsieur [E] [N].

Par déclaration enregistrée le 12 octobre 2023, la Sa Intrum Debt Finance Ag a formé appel sur l'ensemble de ces dispositions.

L'examen de l'affaire a été fixé à bref délai par ordonnance du 17 novembre 2023.

Par conclusions notifiées le 5 avril 2024, la société Intrum Debt Finance Ag demande à la cour de lui donner acte qu'elle produit en annexe un bordereau d'énumération de pièces, d'infirmer la décision critiquée et, statuant à nouveau, de débouter Monsieur [E] [N] de sa demande de mainlevée de la saisie-

attribution signifiée au Crédit Agricole Alsace Vosges le 1er mars 2022 et de l'ensemble de ses fins et prétentions, le condamner à lui payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 2 000 euros pour la procédure d'appel et 1 000 euros pour la procédure de première instance, outre les entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

A l'appui de sa contestation, la société Intrum Debt Finance Ag soutient essentiellement que :

- Monsieur [E] [N] a, en date du 17 avril 2007, souscrit un contrat de prêt auprès de Cetelem, devenu ultérieurement Bnp Paribas personal finance, pour un montant de 17 000 euros remboursable en 60 mensualités de 392,20 euros moyennant un taux de 8,66%, dont la déchéance du terme a été prononcée le 2 octobre 2008 et qui a fait l'objet d'une ordonnance d'injonction de payer rendue le 24 juin 2009, rendue exécutoire le 24 septembre 2009 et signifiée au débiteur le 15 octobre 2009 ;

- cette créance a été cédée par Bnp à la Sa Intrum Debt Finance Ag par acte de cession du 18 décembre 2018 qui a été signifié à Monsieur [E] [N] par acte du 13 août 2019 avec commandement de payer aux fins de saisie-vente ;

- l'acte de cession individualisée portant sur une créance d'un montant de 15 757,25 euros dû par Monsieur [E] [N] concerne un autre prêt sous référence n°88879596369200 non concerné par le présent litige ;

- le prêt litigieux sous référence n°88879596369201, ainsi que le nom de Monsieur [E] [N], se retrouvent sur le récapitulatif de créance annexé à l'acte de cession global du 18 juin 2018, le numéro de dossier visé à l'annexe étant identique à celui figurant sur le contrat de prêt, la lettre de mise en demeure, le tableau d'amortissement et l'ordonnance d'injonction de payer, ce qui démontre la qualité à agir de l'appelante.

En réplique aux demandes subsidiaires adverses, la Sa Intrum Debt Finance Ag souligne que la comparaison des signatures figurant sur l'acte de prêt et sur le permis de conduire de l'intéressé est difficile compte tenu du caractère illisible de la copie mais qu'il n'apparaît pas de réelle différence entre elles ; que, s'agissant d'une éventuelle usurpation de son identité, Monsieur [E] [N] ne justifie d'aucune plainte à ce titre, qu'en outre, diverses pièces figurant au dossier confirment qu'il résidait à l'adresse de ses parents à cette date et qu'il a produit ses fiches de paye et RIB à l'appui du prêt souscrit.

L'appelante estime que Monsieur [E] [N] ne peut prétendre avoir réservé son droit de retrait en application de l'article 1699 du code civil alors qu'il n'a justifié d'aucune contestation au fond du droit cédé antérieurement à la cession (l'ordonnance d'injonction de payer n'ayant fait l'objet d'aucune opposition) et que le rachat de créance globale est légal dans la mesure où la créance est individualisable, comme c'était le cas.

L'appelante estime enfin que les diligences accomplies par l'huissier tant lors de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer que lors de la signification de la cession avec commandement de payer ont été suffisantes puisque, s'agissant de la première, l'huissier s'est présenté à la seule adresse connue de l'intéressé et s'est vu confirmer celle-ci par un voisin et que, s'agissant de la seconde, il a accompli diverses vérifications (boîte aux lettres, voisinage, mairie). L'intéressé n'a en tout état de cause subi aucun préjudice puisqu'il a contesté la saisie et que les intérêts ont été limités à deux ans dans l'acte de saisie.

Par conclusions notifiées le 2 mai 2024, Monsieur [E] [N] demande à la cour de :

- déclarer l'appel de la société Intrum Debt Finance Ag irrecevable, en tout cas mal fondé ;

- en conséquence, le rejeter, débouter la société Intrum Debt Finance Ag de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

à titre subsidiaire, si par impossible la société Sa Intrum Debt Finance Ag devait avoir qualité pour agir :

- constater qu'il n'a pas souscrit le prêt litigieux ;

- en conséquence, débouter la partie adverse de toutes ses demandes, fins et conclusions, et ordonner sa mise hors de cause ;

à titre infiniment subsidiaire :

- constater l'irrégularité de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer du 24 juin 2009 signifiée le 15 octobre 2009 ;

- en conséquence, ordonner la mainlevée de la saisie attribution pratiquée le 7 mars 2022 sur son compte bancaire à l'initiative de la Sa Intrum Debt Finance Ag ;

à titre très infiniment subsidiaire :

- constater qu'il n'a pas pu exercer son droit de retrait lors de la cession de créances ;

-ordonner la remise totale des intérêts de retard, de la clause pénale et des frais mis en compte ;

en tout cas :

-ordonner la mainlevée de la saisie attribution pratiquée le 7 mars 2022 sur son compte bancaire à l'initiative de la Sa Intrum Debt Finance Ag ;

- condamner la Sa Intrum Debt Finance Ag à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et 2 000 euros pour la procédure en appel ;

- la condamner aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

En réplique, Monsieur [E] [N] fait essentiellement valoir que :

- la société Intrum Debt Finance Ag n'a pas qualité à agir faute de preuve suffisante de la cession de la créance le concernant ; en outre, les nouvelles pièces produites par l'appelante devant la cour sont sujettes à caution, l'appelante ayant d'ailleurs finalement reconnu que ces documents étaient relatifs à une autre créance ; s'agissant de la créance litigieuse, le bordereau de « cession de créances et annexe de créance cédée 8887959639201 » et l' « extrait de l'annexe au contrat de cession du 18 décembre 2018 portant liste des créances cédées » ne prouvent pas la cession ;

- il doit être mis hors de cause dès lors qu'il conteste avoir signé le prêt litigieux, comme en atteste la comparaison entre les signatures figurant sur le contrat de prêt et son permis de conduire et le fait que l'adresse mentionnée correspond à celle de ses parents, dont il avait pourtant quitté le domicile avant même sa majorité ; le prêt a d'ailleurs été signé par ces derniers car ils rencontraient d'importantes difficultés financières ; des documents justificatifs à son nom ont été produits lors de la souscription du prêt car ils étaient restés chez ses parents et que ceux-ci pouvaient facilement établir des fiches de paye au nom de leur fils avec l'entête de leur restaurant ; étant resté dans l'ignorance de cet acte, il n'apas porté plainte étant précisé que ses parents sont désormais décédés.

Subsidiairement, il soulève l'irrégularité de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer exécutoire délivrée le 15 octobre 2009 par dépôt à étude et non à personne, étant rappelé que l'acte a été délivré à l'adresse de ses parents où il ne résidait plus depuis

longtemps. Il considère que les diligences de l'huissier, constituées seulement d'une vérification auprès d'un voisin, étaient insuffisantes, d'autant que son père et lui portant le même nom, ledit voisin a pu les confondre.

Il argue de ce que l'ordonnance d'injonction de payer, non signifiée régulièrement, doit être considérée comme non avenue et ne peut plus servir de fondement aux mesures d'exécution ou que son irrégularité doit, à tout le moins être considérée comme lui causant grief faute d'avoir pu être informé de la procédure contre lui et d'avoir pu former contestation avant, les intérêts ayant ainsi continué à courir.

Il se prévaut enfin des dispositions de l'article 1699 du code civil et de l'impossibilité de verser au cessionnaire le prix payé au cédant faute de mention du prix réel de la cession dans l'acte.

L'affaire a été examinée à l'audience du 6 mai 2024 et la décision mise en délibéré pour être rendue le 1er juillet 2024.

MOTIFS

À titre liminaire, il est rappelé que, aux termes de l'article 954, alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine les moyens au soutien de ses prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. Ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à « dire et juger » ou « constater », en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d'emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour ne statuera pas sur ces demandes dans le dispositif de l'arrêt.

La cour n'est par ailleurs pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes. Il lui appartient d'examiner en premier lieu les prétentions des parties dont l'accueil est de nature à influer sur la solution du litige, sans s'arrêter à l'ordre dans lequel elles sont présentées, dès lors qu'elles tendent toutes à la même fin.

Aucune des parties ne remettant en cause la recevabilité de la contestation formée par Monsieur [E] [N], il convient de la confirmer.

Aux termes de l'article L121-2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive.

Aux termes de l'article L111-2 du code des procédures civiles d'exécution, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d'exécution.

Sur le défaut de qualité à agir de la Sa Intrum Debt Finance Ag

Selon l'article 1321 du code civil, la cession de créance est un contrat par lequel le créancier cédant transmet, à titre onéreux ou gratuit, tout ou partie de sa créance contre le débiteur cédé à un tiers appelé le cessionnaire. Elle peut porter sur une ou plusieurs créances présentes ou futures, déterminées ou déterminables.

L'article 1322 du même code précise que la cession doit être constatée par écrit et l'article 1324 dispose que la cession est opposable au débiteur s'il y a consenti ou si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.

En l'espèce, le premier juge a estimé que les pièces produites par la Sa Intrum Debt Finance Ag étaient insuffisantes à justifier de sa qualité à agir en qualité de créancier de Monsieur [E] [N].

C'est à juste titre qu'il a relevé que le « bordereau de cession de créance » produit en annexe 10 ne faisait aucune référence à la créance prétendument détenue par la société Bnp contre Monsieur [E] [N], ledit bordereau daté du 18 décembre 2018 se contentant d'indiquer que la cession portait sur 20 366 créances représentant la somme totale de 90 465 432,46 euros.

Y était toutefois joint un document dénommé « extrait de l'annexe au contrat de cession du 18 décembre 2018 portant liste des créances cédées » sur lequel figurent les indications suivantes :

Référence IMX

Référence Ancredoss siclid

Nom

Prénom

Valeur faciale

810170574

88879596369001

[N]

[E]

15757,25 euros

L'appelante produit à hauteur de cour un nouvel « extrait de l'annexe au contrat de cession du 18 décembre 2018 portant liste des créances cédées » en annexe 27 présenté selon le même format et portant les informations suivantes :

Référence IMX

Référence Ancredoss siclid

Nom

Prénom

Valeur faciale

810170575

88879596369201

[N]

[E]

17 001,17 euros

Il résulte des pièces du dossier et des écritures des parties que deux contrats ont été souscrits au nom de Monsieur [E] [N] auprès de la société Cetelem, à savoir :

- un crédit de 17 000 euros en date du 17 avril 2017 portant référence n°88879596369201 ayant donné lieu à la délivrance d'une ordonnance n°279/2009 délivrée par le tribunal d'instance d'Altkirch le 24 juin 2009 portant injonction à Monsieur [E] [N] de payer à la société Bnp Paribas personal finance les sommes de 15 088,30 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance, 531,49 euros au titre de la clause pénale et 4,35 euros au titre des frais accessoires,

- un crédit de 15 000 euros en date du 13 octobre 2007 portant référence n°88879596369001 ayant donné lieu à la délivrance d'une ordonnance n°278/2009 délivrée par le tribunal d'instance d'Altkirch le 24 juin 2009 portant injonction à Monsieur [E] [N] de payer à la société Bnp Paribas personal finance les sommes de 14 054,45 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance, 504,43 euros au titre de la clause pénale et 4,35 euros au titre des frais accessoires.

L'extrait d'annexe produit devant le juge de l'exécution était relatif à la créance du contrat n°88879596369001 et non à la créance n°8887959639201 pour le recouvrement de laquelle a été diligentée la saisie-attribution litigieuse. Le premier juge a donc justement estimé que la Sa Intrum Debt Finance Ag ne justifiait pas de sa qualité à agir.

Toutefois, l'appelante a produit, à hauteur de cour, un autre extrait de l'annexe au contrat de cession sur lequel figure la créance concernée, laquelle est identifiable puisque portant la référence du crédit à savoir n°8887959639201 ainsi que les nom et prénom du débiteur.

Aucun texte n'édicte le mode de preuve de la liste des créances cédées et la cour peut, sur la base des documents produits, à savoir le bordereau de cession de créance et l'annexe précitée, suffisamment se convaincre de ce que la créance litigieuse faisait partie des 20 366 créances cédées, étant au surplus observé que la Sa Intrum Debt Finance Ag a présenté les pièces afférentes au crédit litigieux, ayant donc été mise en possession de ces derniers par la société cédante.

La Sa Intrum Debt Finance Ag justifie en annexe 13 avoir fait signifier la cession de créance par acte du 13 août 2019 déposé à étude à une adresse à [Localité 4] dont l'intéressé ne soutient ni ne démontre qu'il ne s'agissait pas de son adresse, l'huissier de justice faisant d'ailleurs mention de plusieurs vérifications (boîte aux lettres, voisinage et mairie).

La cession de créance ayant été valablement notifiée à l'intéressé, elle lui est opposable et la société Intrum Debt Finance Ag, en qualité de créancière de Monsieur [E] [N], a qualité à engager une action en recouvrement à son encontre.

Le jugement déféré sera donc infirmé.

Les développements sur l'éventuel défaut de pouvoir des signataires intervenus au nom de la Sa Intrum Debt Finance Ag sont inopérants alors que l'intimé n'en tire aucune conséquence juridique et qu'en tout état de cause, le défaut de pouvoir des signataires du contrat de cession litigieux, qui n'est nullement établi, constitue une nullité relative que seules les parties au contrat de cession pourraient invoquer et dont Monsieur [E] [N] ne peut se prévaloir en sa qualité de débiteur cédé, tiers au contrat de cession de créance.

Sur la contestation du titre exécutoire

Comme indiqué supra, la mise en 'uvre d'une mesure d'exécution doit se fonder sur un titre exécutoire.

Conformément au dernier alinéa de l'article 1411 du code civil, l'ordonnance portant injonction de payer est non avenue si elle n'a pas été signifiée dans les six mois de sa date.

En l'espèce, Monsieur [E] [N] s'est vu enjoindre, par ordonnance du 24 juin 2009, de payer à la société Bnp, aux droits de laquelle vient désormais la Sa Intrum Debt Finance Ag, diverses sommes au titre du prêt n°8887959639201.

Monsieur [E] [N] conteste la régularité de la signification opérée le 15 octobre 2009 et argue du caractère non-avenu de l'ordonnance d'injonction de payer.

Or, il ressort du dossier que l'ordonnance d'injonction de payer a été signifiée au débiteur par exploit d'huissier en date du 15 juillet 2009, remis à étude, dont le greffe du tribunal d'instance a pris connaissance avant d'apposer la formule exécutoire le 24 septembre 2009. Aucune des parties ne conteste ni même ne produit cet acte.

La seule constatation de la délivrance de la formule exécutoire par le greffe, après vérification d'une signification dans les délais, suffit, en l'état, à écarter tout caractère non avenu de l'ordonnance d'injonction de payer.

Les critiques du débiteur quant aux modalités de la signification diligentée le 15 octobre 2009 portant signification de l'ordonnance d'injonction de payer revêtue de la formule exécutoire et commandement de payer avant saisie-vente sont sans emport sur l'issue du présent litige dès lors qu'il est acquis que la partie créancière dispose d'un titre exécutoire.

Alors qu'en l'absence de signification à personne du titre exécutoire, le point de départ du délai d'opposition est différé jusqu'à l'expiration du délai d'un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur, Monsieur [E] [N] prétend avoir formé opposition

à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 24 juin 2009 sans toutefois en justifier.

L'intimé demande par ailleurs à voir ordonner sa mise hors de cause aux motifs qu'il n'aurait pas souscrit le crédit concerné.

Ce moyen qui tend en fait à remettre en cause le titre exécutoire sera rejeté sans avoir à en examiner son bien-fondé dès lors que, conformément aux dispositions de l'article R121-1 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution.

La Sa Intrum Debt Finance Ag justifie donc disposer d'une créance liquide et exigible fondée sur un titre exécutoire et pouvait donc engager toute mesure d'exécution qu'elle estimait utile.

Par suite, la saisie-attribution diligentée le 1er mars 2022 était fondée et la demande en mainlevée présentée par Monsieur [E] [N] sera donc rejetée.

Sur la demande subsidiaire de remise des intérêts de retard, clause pénale et frais

Se prévalant de l'irrégularité de la signification du 15 octobre 2009, Monsieur [E] [N] demande à bénéficier de la remise totale des intérêts de retard mis en compte, de la clause pénale et des frais. Cette demande s'assimile à une modification du titre exécutoire et ne peut donc prospérer.

S'agissant plus particulièrement de la remise des intérêts sous prétexte d'une connaissance tardive de la décision rendue à son encontre, l'intéressé n'en précise pas le fondement, étant au surplus observé qu'il a eu connaissance de la cession de créance par acte de signification du 13 août 2019 soit antérieurement à la saisie-attribution objet du présent litige et n'a alors formulé aucune contestation ni engagé de procédure.

En tout état de cause, la Sa Intrum Debt Finance Ag a d'ores et déjà déduit de sa réclamation une grande partie des intérêts, comme cela ressort expressément de l'acte de signification de cession de créance du 13 août 2019 qui porte déduction des intérêts prescrits et du décompte figurant à l'acte de saisie-attribution qui ne porte réclamation que des intérêts courus postérieurement à janvier 2017.

Cette demande sera donc rejetée.

Sur la « demande » infiniment subsidiaire relative au droit de retrait

L'article 1699 du code civil dispose que celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s'en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite. L'article 1700 précise que la chose est censée litigieuse dès qu'il y a procès et contestation sur le fond du droit.

Le retrait litigieux, institution dont le caractère exceptionnel impose une interprétation stricte, ne peut être exercé que si, antérieurement à la cession, un procès a été engagé sur le bien-fondé du droit cédé et qu'au cours de l'instance, celui qui entend exercer le retrait a, en qualité de défendeur, contesté ce droit au fond.

En l'espèce, Monsieur [E] [N] ne peut donc contester la validité de la cession intervenue en date du 18 décembre 2018 alors qu'aucun litige n'existait à cette date et que le prix de la cession ne constitue pas un élément nécessaire à l'information du débiteur cédé quant au transport de la créance (Civ 1ere, 12 nov. 2015).

Non seulement, Monsieur [E] [N] ne justifie pas remplir les conditions d'application de ces dispositions mais en outre, sa demande tendant à voir « constater » qu'il n'a pu exercer son droit de retrait ne constitue pas une prétention de nature à saisir la présente cour.

Sur les frais et dépens

La décision de première instance étant infirmée, Monsieur [E] [N] sera condamné aux dépens tant de première instance que d'appel et débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Il paraît en outre équitable de condamner ce dernier à payer à la partie adverse une indemnité de procédure qui sera justement fixée à la somme de 1 000 euros pour chacune des instances, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement rendu le 29 septembre 2023 par le juge de l'exécution délégué du tribunal judiciaire de Mulhouse  sauf en ce qu'il a déclaré recevable la contestation formée par Monsieur [E] [N] ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

DEBOUTE Monsieur [E] [N] de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution diligentée le 1er mars 2022 auprès de la Caisse de Crédit Agricole Alsace Vosges ;

DEBOUTE Monsieur [E] [N] de sa demande de mise hors de cause ;

DEBOUTE Monsieur [E] [N] de sa demande en remise totale des intérêts de retard, de la clause pénale et des frais mis en compte ;

DEBOUTE Monsieur [E] [N] de toutes autres demandes ;

DEBOUTE Monsieur [E] [N] de ses demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [E] [N] à verser à la Sa Intrum Debt Finance Ag, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

CONDAMNE Monsieur [E] [N] aux frais et dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 3 a
Numéro d'arrêt : 23/03700
Date de la décision : 01/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-01;23.03700 ?
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