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24/06/2024 | FRANCE | N°23/00510

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 3 a, 24 juin 2024, 23/00510


MINUTE N° 24/329

























Copie exécutoire à :



- Me Marion BORGHI

- Me Déborah BAUMANN





Le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 24 Juin 2024



Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 23/00510 - N° Portalis DBVW-V-B7H-IABW



Décision déférée à la co

ur : jugement rendu le 05 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE



APPELANTE ET INTIMEE INCIDEMMENT :



Madame [O] [L]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Marion BORGHI, avocat au barreau de COLMAR





INTIMÉ ET APPELANT INCI...

MINUTE N° 24/329

Copie exécutoire à :

- Me Marion BORGHI

- Me Déborah BAUMANN

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 24 Juin 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 23/00510 - N° Portalis DBVW-V-B7H-IABW

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE ET INTIMEE INCIDEMMENT :

Madame [O] [L]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Marion BORGHI, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉ ET APPELANT INCIDEMMENT :

Monsieur [J] [C]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Déborah BAUMANN, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 avril 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme FABREGUETTES, présidente de chambre, et Mme DESHAYES, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme FABREGUETTES, présidente de chambre

Mme DESHAYES, conseillère

Mme MARTINO, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. BIERMANN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Isabelle FABREGUETTES, présidente et M. Jérôme BIERMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Le 5 février 2021, Madame [O] [L] a vendu à Monsieur [J] [C] un véhicule d'occasion de marque Nissan Patrol immatriculé [Immatriculation 5] et lui a remis un procès-verbal de contrôle technique en date du 20 janvier 2021 ne faisant pas état de défaillance majeure.

Le 12 février 2021, Monsieur [C] a soumis le véhicule à un nouveau contrôle technique, qui a constaté six défaillances majeures.

Se prévalant d'un rapport d'expertise amiable diligenté par son assureur en protection juridique relevant également l'existence de vices cachés affectant la sécurité du véhicule et que Madame [L] aurait volontairement occultés, Monsieur [C] a assigné Madame [O] [L] devant le tribunal judiciaire de Mulhouse par acte du 22 juin 2021, aux fins de voir prononcer la résolution de la vente en raison des vices cachés dont le véhicule est atteint, condamner la défenderesse à lui payer la somme de 4 500 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 mai 2021, se voir donner acte de ce qu'il tient le véhicule à disposition de Madame [L] moyennant paiement de ce montant et aux fins de voir condamner la défenderesse à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par jugement réputé contradictoire du 5 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :

-prononcé la résolution de la vente intervenue le 5 février 2021 entre Monsieur [J] [C] et Madame [O] [L] portant sur le véhicule Nissan Patrol immatriculé [Immatriculation 5],

-condamné Madame [O] [L] à restituer à Monsieur [J] [C] la somme de 4 500 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

-donné acte à Monsieur [J] [C], moyennant le règlement de ce montant, que le véhicule sera tenu à la disposition de Madame [O] [L] pendant un délai de deux mois à compter de la signification du jugement et que faute pour elle de reprendre le véhicule dans ce délai, Monsieur [C] sera délivré de son obligation de le restituer pour en disposer à sa convenance,

-débouté Monsieur [J] [C] de sa demande de dommages et intérêts,

-condamné Madame [O] [L] aux dépens de l'instance,

-condamné Madame [O] [L] à payer à Monsieur [J] [C] la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement,

-rappelé que la décision est exécutoire de plein droit.

Madame [O] [L] a interjeté appel de cette décision le 31 janvier 2023.

Par écritures notifiées le 27 octobre 2023, elle conclut à l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de :

-débouter Monsieur [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-rejeter son appel incident, et l'en débouter,

-le condamner au paiement de la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

-le condamner aux entiers frais et dépens.

Elle fait valoir que lors de la vente, Monsieur [C] a pu examiner le véhicule et en vérifier les éléments mécaniques ; qu'il a pu constater la rouille, dont il était fait état dans l'annonce qu'elle a passée sur le site Leboncoin et a essayé la voiture, ce qui lui a permis de constater aussi que les plaquettes de freins devaient être changées ; que l'intimé est d'ailleurs un professionnel de la mécanique ; qu'elle a confié le véhicule à un ancien client, garagiste, qui s'était proposé pour le faire passer au contrôle technique et qu'elle n'avait aucune connaissance de ce que ce contrôle technique aurait le cas échéant été trafiqué ; que la plainte déposée par Monsieur [C] à ce titre a été classée sans suite.

Elle soutient que la corrosion du châssis était apparente lors de la vente ; que Monsieur [C] a pu se convaincre des autres désordres dont il était affecté ; que le second contrôle technique ne détecte aucune défaillance majeure nécessitant l'immobilisation du véhicule ; qu'il ne relève aucune défaillance critique qui seule rendrait le véhicule impropre à sa destination ; que Monsieur [C] savait parfaitement que la voiture devait être rénovée ; qu'en tout état de cause, elle n'a pas sciemment caché l'état du véhicule, n'avait pas connaissance de vices cachés et ne saurait être tenue à des dommages et intérêts.

Par écritures notifiées le 9 novembre 2023, Monsieur [J] [C] a conclu à l'irrecevabilité ou au mal fondé de l'appel et sollicite confirmation du jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts.

Il demande à la cour de :

-déclarer l'appel incident recevable,

-condamner Madame [O] [L] à payer à Monsieur [C] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts,

En tout cas,

-débouter Madame [O] [L] de l'intégralité de ses demandes,

-condamner Madame [O] [L] aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il maintient que dès le lendemain de la vente, il a constaté d'importantes fuites d'huile ; que sa demande de carte grise a été refusée au motif de l'absence de contrôle technique valide, ce qui démontre que le procès-verbal que lui a communiqué Madame [L] était un faux ; qu'au regard des constatations du second procès-verbal de contrôle technique et du rapport d'expertise amiable, il est établi que le véhicule est impropre à son usage, en raison des vices cachés qui l'affectent ; que lui-même n'a pas de connaissances en mécanique et n'a pu constater les vices, qui n'étaient pas visibles ; qu'ils atteignent des éléments déterminants pour la sécurité du véhicule.

Il fait valoir que sa demande en dommages et intérêts est fondée au regard du faux contrôle technique remis par l'appelante et son attitude systématiquement fuyante et dont les man'uvres ont entraîné pour lui des démarches et tracas, ainsi que des frais de contrôle technique et d'expertise.

MOTIFS

En vertu des dispositions de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'article 1642 dispose que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

L'article 1643 prévoit que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

En l'espèce, Madame [L] a vendu à Monsieur [C] un véhicule d'occasion mis en circulation le 13 septembre 1996. Le kilométrage relevé lors du contrôle technique effectué le 12 février 2021 à la demande de Monsieur [C] était de 233 891, étant relevé qu'il était de 230 340 sur le procès-verbal de contrôle technique en date du 20 janvier 2021 remis à l'acquéreur au moment de la vente. Ce contrôle technique ne relève que trois défaillances mineures, consistant en une mauvaise orientation horizontale d'un feu de croisement avant gauche, une protection défectueuse des amortisseurs avant gauche et droit et la détérioration du capuchon antipoussière de la rotule de suspension.

En revanche, le contrôle technique en date du 12 février 2021 relève six défaillances majeures, consistant en : état du véhicule ne permettant pas la vérification des points de contrôle ; usure excessive (marque minimale atteinte) des garnitures ou plaquettes de freins arrières droit et gauche ; tambours ou disques de freins arrières droit et gauche encrassés par de l'huile, de la graisse ; jeu entre des organes de timonerie de direction qui devraient être fixes à droite ; jeu ou bruit excessif des roulements avant droit et gauche ; légère fêlure ou déformation d'un longeron ou d'une traverse, gauche, arrière droit et droit ; fuite excessive de liquide autre que de l'eau susceptible de porter atteinte à l'environnement ou constituant un risque pour la sécurité des autres usagers de la route. Il a aussi relevé trois défaillances mineures, consistant en le disque ou tambour de freins légèrement usé à l'avant gauche et droit, de la corrosion sur l'ensemble du châssis et l'endommagement du tuyau d'échappement et silencieux sans fuite ni risque de chute.

Il ressort par ailleurs de l'expertise privée réalisée à la diligence de l'assureur en protection juridique de l'acquéreur par le cabinet Auto Expertise Conseil 54, à laquelle Madame [L] a été

convoquée, effectuée le 7 avril 2021, que le véhicule est atteint de corrosion perforante à divers endroits de la carrosserie et sur le soubassement ; qu'il présente de même une fuite d'huile avec un écoulement très important sur l'ensemble du soubassement ; qu'il existe un jeu très important dans la rotule de direction droite, un jeu dans le roulement de roue avant gauche ; qu'il n'y a pas de plaquette de freins à l'arrière gauche.

L'expert conclut que le véhicule est impropre à l'usage auquel il est destiné, en ce qu'il présente un jeu très excessif dans le train avant ainsi que des fuites et une déformation du châssis le rendant impropre à l'utilisation et économiquement irréparable.

Madame [L] pointe à raison que la corrosion du bas de caisse et en divers points de la carrosserie était visible et d'ailleurs précisée sur l'annonce parue sur le site Leboncoin et ne peut donc constituer un vice caché, ce qui a d'ailleurs été également retenu par le premier juge.

En revanche, il convient de constater que les défaillances graves affectant les rotules de suspension, le jeu important dans la rotule de direction droite et dans le roulement de roue avant gauche, ainsi que la fuite d'huile importante relevée ne pouvaient être décelés par l'acquéreur au jour de la vente, étant relevé au demeurant qu'il ne résulte nullement du dossier que Monsieur [C] possède des connaissances étendues en matière de mécanique automobile ; que l'attestation de Monsieur [S] [V], compagnon de l'appelante, qui affirme que l'acquéreur a examiné la voiture pendant un bon moment, a roulé avec pour un essai et a constaté qu'elle fonctionnait très bien mais qu'il fallait changer les plaquettes, ne fait nullement preuve du caractère apparent des désordres relevés par l'expert.

L'appelante, qui se borne à soutenir que les défaillances majeures relevées sur le contrôle technique n'empêchent pas l'utilisation du véhicule mais nécessitent seulement des réparations, ne contredit pas utilement les constatations de l'expert, corroborées par le second procès-verbal de contrôle technique, selon lesquelles les désordres cachés relevés rendent le véhicule impropre à l'utilisation.

La concomitance des constatations précitées avec l'achat du véhicule démontre que les vices préexistaient à la vente, l'inverse n'étant d'ailleurs pas soutenu.

En conséquence, c'est à juste titre, par une décision qui sera confirmée, que le premier juge a prononcé la résolution de la vente par application de l'article 1641 du code civil et fait droit à la demande de Monsieur [C] tendant à la restitution du prix de vente.

Concernant la demande en dommages et intérêts, l'article 1645 du code civil dispose que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

En l'espèce, bien que les circonstances dans lesquelles a été établi le procès-verbal de contrôle technique en date du 20 janvier 2021, telles que relatées dans les écritures d'appel de Madame [L], soient pour le moins obscures, il ne résulte pour autant pas d'éléments du dossier autres que les propres déclarations de Monsieur [C] lors de son dépôt de plainte auprès des services de gendarmerie de [Localité 6] le 12 février 2021 que ce document, certes inexact et ne révélant pas la réalité de l'état du véhicule, soit un faux manifeste, utilisé en toute connaissance de cause par la venderesse.

De ce fait, en l'absence de démonstration de la connaissance des vices par l'appelante, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande en dommages et intérêts formée par Monsieur [C].

Il sera relevé à cet égard à titre surabondant que la production par ce dernier d'une note d'honoraires de 300 euros émise à son nom par le cabinet d'expertise ne démontre pas que ce coût a été finalement laissé à sa charge, alors qu'il bénéficie d'une assurance en protection juridique, à l'initiative de la demande d'expertise.

Sur les frais et dépens :

Les dispositions du jugement déféré quant aux frais et dépens seront confirmées.

Partie perdante, Madame [L] sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel et sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera alloué à l'intimé la somme de 1 500 euros en compensation des frais non compris dans les dépens qu'il a dû exposer pour faire valoir ses droits en appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement déféré,

Y ajoutant,

CONDAMNE Madame [O] [L] à payer à Monsieur [J] [C] la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE Madame [O] [L] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Madame [O] [L] aux dépens de l'instance d'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 3 a
Numéro d'arrêt : 23/00510
Date de la décision : 24/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-24;23.00510 ?
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