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28/05/2024 | FRANCE | N°22/00086

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 a, 28 mai 2024, 22/00086


CKD/KG





MINUTE N° 24/485



















































Copie exécutoire

aux avocats



Copie à Pôle emploi

Grand Est



le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



ARRET DU 28 MAI 2024



Numéro d'inscription

au répertoire général : 4 A N° RG 22/00086

N° Portalis DBVW-V-B7G-HXUZ



Décision déférée à la Cour : 09 Décembre 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE MULHOUSE



APPELANTE :



S.A.S. MANUFACTURE ALSACIENNE DE DENRÉES ALIMENTAIRES - MADA

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]...

CKD/KG

MINUTE N° 24/485

Copie exécutoire

aux avocats

Copie à Pôle emploi

Grand Est

le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

ARRET DU 28 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 22/00086

N° Portalis DBVW-V-B7G-HXUZ

Décision déférée à la Cour : 09 Décembre 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE MULHOUSE

APPELANTE :

S.A.S. MANUFACTURE ALSACIENNE DE DENRÉES ALIMENTAIRES - MADA

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Thierry CAHN, avocat à la Cour

INTIME :

Monsieur [V] [A]

[Adresse 1]

Représenté par Me Olivier SIMON, avocat au barreau de MULHOUSE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Octobre 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme DORSCH, Président de Chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. PALLIERES, Conseiller

M. LE QUINQUIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

- signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [V] [A], né le 02 janvier 1982, a été engagé par la SAS Manufacture alsacienne de denrées alimentaires (MADA), le 22 décembre 2002, en qualité d'apprenti.

A l'issue, les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée à compter du 13 septembre 2005 au terme duquel Monsieur [A] était embauché comme technicien recherche et développement et processus de fabrication, à hauteur de 35 heures de travail par semaine.

Depuis le 1er juin 2018, il occupait le poste de directeur technique et production, statut cadre et percevait un salaire de l'ordre de 5.335 €.

La convention collective nationale régissant la relation contractuelle était celle des cinq branches des industries alimentaires diverses.

L'entreprise comptait 24 salariés.

À compter de juillet 2018, M. [A] a été placé en arrêt de travail. Par un second avis du 20 novembre 2018, le médecin de travail l'a déclaré inapte à son poste, mais avec une aptitude restante à un poste similaire hors de l'entreprise.

Par courrier du 19 décembre 2018 la société informait le salarié des motifs de l'impossibilité de reclassement, et le convoquait le 21 décembre 2018 à un entretien préalable le 04 janvier 2019.

M. [A] a, par lettre du 09 janvier 2019, été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Estimant notamment avoir été victime de harcèlement moral, et d'un accident du travail entraînant une inaptitude d'origine professionnelle, et que son licenciement est nul, M. [A] a, le 05 mars 2019, saisi le conseil des prud'hommes de Mulhouse.

Par jugement de départage du 09 décembre 2021, le conseil des prud'hommes a condamné la SAS Mada à verser à M. [A] les sommes de :

* 14.348,46 € bruts au titre des heures supplémentaires effectuées pour la période 2016 à 2018,

* 1.434,85 € bruts au titre des congés payés afférents, avec taux d'intérêt légal à compter du 12 mars 2019 ;

* 5.800,08 € bruts au titre de la contrepartie obligatoire en repos des années 2016 et 2017, avec taux d'intérêt légal à compter du 12 mars 2019 ;

- dit que l'inaptitude repose sur une origine non-professionnelle ;

- constaté que la SAS Mada n'a pas respecté la procédure relative au licenciement pour inaptitude ;

- rejeté la demande de nullité du licenciement ;

- dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

- dit que le salarié de référence de M. [A] s'élève à 6.269,74 € ;

- condamné, en conséquence, la SAS Mada à verser à M. [A] les sommes de :

* 61.000 € nets au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec taux d'intérêt légal à compter du prononcé du jugement ;

* 18.809,22 € bruts au titre de l'indemnité de préavis,

* 1.880,92 € bruts au titre des congés payés sur préavis avec taux d'intérêt légal à compter du 12 mars 2019 ;

- ordonné la rectification des fiches de paie et de l'ensemble des documents de fin de contrat sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document sous 30 jours à compter de la notification du présent jugement ;

- ordonné le remboursement par la SAS Mada à Pôle Emploi des indemnités chômage versées à M. [A], dans la limite de six mois ;

- débouté M. [A] du surplus de ses demandes ;

- débouté la SAS Mada de ses demandes ;

- condamné la SAS Mada au paiement à M. [A] de la somme de 1.700 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement ;

- condamné la SAS Mada aux dépens.

La SAS Mada a interjeté appel de la décision le 04 janvier 2022.

Par dernières conclusions, transmises par voie électronique le 21 septembre 2022, la SAS Mada demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a :

- condamné la société à verser à M. [A] la somme de 14.348,46 € bruts au titre des heures supplémentaires, 1.434,85 € bruts au titre des congés payés afférents, et 5.800,08 € au titre de la contrepartie obligatoire en repos, et dit que le salaire mensuel brut moyen de référence est de 6.269,74 € ;

- dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et l'a condamnée à lui verser la somme de 61.000 € nets à titre de dommages-intérêts, 18.809,22 € bruts au titre de l'indemnité de préavis, 1.880,92 € bruts au titre des congés payés inhérents, outre 1.700 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné la rectification des fiches de paie et documents de fin de contrat, sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document, ainsi que le remboursement par la société à Pôle Emploi des indemnités chômage versées à M. [A] dans la limite de six mois.

Sur l'appel incident,

- déclarer l'appel incident irrecevable et mal fondé ;

- débouter M. [A] des fins de son appel incident tendant à voir déclarer le licenciement nul, reconnaître une origine professionnelle à son inaptitude et obtenir paiement de la somme de 100.315,84 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, 17.596,44 € nets à titre de rappel d'indemnité de licenciement, 37.618,44 € nets à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, et 37.618,44 € nets à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.

Statuant à nouveau,

- déclarer les demandes de M. [A] irrecevables et mal fondées ;

- débouter M. [A] de l'intégralité de ses prétentions ;

- le condamner à lui verser 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [A] aux entiers frais et dépens.

Par dernières conclusions, transmises par voie électronique le 21 juin 2022, M. [V] [A] demande à la cour d'infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a condamné la SAS Mada au versement des heures supplémentaires, congés payés sur heures supplémentaires, contrepartie obligatoire en repos, préavis, congés payés sur préavis, article 700 du code de procédure civile et astreinte sur les documents rectificatifs, et, statuant à nouveau, de condamner la SAS Mada à lui payer :

* 100.315,84 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

* 17.596,44 € au titre du rappel d'indemnité de licenciement ;

* 37.618,44 € au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

* 37.618,44 € au titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé.

À titre subsidiaire (si la Cour devait ne pas faire droit aux demandes d'heures supplémentaires - salaire de référence 5.806,05 €), condamner la SAS Mada à lui payer :

* 84.641,49 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 34.830,30 € au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

* 13.397,47 € de rappel d'indemnité de licenciement ;

À titre infiniment subsidiaire,

- confirmer le jugement s'agissant du versement de 61.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En tout état de cause,

- condamner la SAS Mada à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 07 décembre 2022.

Il est, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, renvoyé aux conclusions ci-dessus visées.

MOTIFS

I. Sur les créances liées au temps de travail et de repos

A. Sur les heures supplémentaires

L'article L. 3121-27 du code du travail dispose : " La durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine ".

L'article L. 3121-28 du code du travail dispose : " Toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent ".

L'article L. 3121-36 du code du travail dispose : " À défaut d'accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée à l'article L. 3121-27 ou de la durée considérée comme équivalente donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 % ".

Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l''existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies, afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

À l'appui de sa demande, M. [A] produit l'intégralité de ses relevés d'heures des années 2016, 2017 et 2018, affirmant que la direction de la SAS Mada en était destinataire, chaque mois. Ces relevés qui illustrent le suivi journalier, et hebdomadaires pour chacun des salariés, dont M. [A], sont des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre utilement.

Pour s'opposer à la demande, l'employeur fait valoir que le décompte est fantaisiste, que le salarié a en 2016 mis en compte des heures supplémentaires durant des semaines de congés payés, qu'il n'a jamais réclamé le paiement d'heures supplémentaires durant l'exécution du contrat, et ce malgré ses fonctions, qu'il ne mentionne pas les heures d'arrivée et de départ, ne déduit pas la pause d'une demi-heure, et que les heures supplémentaires de 35 à 39 heures lui ont régulièrement été payées. Pour autant la société appelante ne fournit pas son propre décompte, ni aucun élément probant.

À l'étude des pièces fournies par M. [A], il apparaît que contrairement aux affirmations de l'employeur les tableaux récapitulatifs en pièces 40, 50 et 51 du salarié démontrent que les heures supplémentaires jusqu'à 39 heures sont bien déduites, et que le salarié ne réclame que la différence au-delà. Contrairement aux affirmations de l'employeur les semaines de congés payés qu'il indique en page 21 de ses conclusions ne donne lieu à aucune demande de paiement d'heures supplémentaires (pièce 40).

En revanche force est de constater que l'employeur n'a pas rempli son obligation légale de contrôle du temps de travail et qu'il ne saurait reprocher au salarié de ne pas mentionner quotidiennement l'heure d'arrivée et de départ, critique et qu'il n'avait au demeurant jamais formuler lors de la réception des relevés durant l'exécution du contrat de travail.

Il en résulte que le conseil des prud'hommes, a parfaitement calculé le montant des heures supplémentaires restant dû, et que le jugement déféré allouant une somme de 14 348,46 € brutes, outre les congés payés afférents doit être confirmé.

B. Sur la contrepartie obligatoire en repos

L'article L. 3121-30 du code du travail dispose : " Des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale.

Les heures supplémentaires ouvrant droit au repos compensateur équivalent mentionné à l'article L. 3121-28 et celles accomplies dans les cas de travaux urgents énumérés à l'article L. 3132-4 ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires ".

L'article L. 3121-38 du code du travail dispose : " À défaut d'accord, la contrepartie obligatoire sous forme de repos mentionnée à l'article L. 3121-30 est fixée à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné au même article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.

Pour l'application du premier alinéa du présent article, l'effectif salarié et le franchissement du seuil de vingt salariés sont déterminés selon les modalités prévues à l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale ".

Il convient de noter, que la SAS Mada décomptait 24 salariés. Le conseil des prud'hommes a fait une exacte application des textes précités en allouant à Monsieur [A] la somme de 5.800,08 € au titre de la contrepartie en repos obligatoire pour les heures hors contingent en 2016 et 2017. Le jugement est sur ce point confirmé.

C. Sur le travail dissimulé

L'article L. 8221-5 du code du travail dispose : " Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales ".

L'article L. 8223-1 du code du travail dispose : " En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ".

Il appartient au salarié de rapporter la preuve du caractère intentionnel de la dissimulation d'une du nombre d'heures de travail effectué et prouvé, le seul fait de l'existence d'heures supplémentaires non payées étant à cet égard insuffisant. M. [A] échouant à rapporter la preuve d'une intentionnalité, la cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de ses demandes formées à ce titre.

II. Sur le harcèlement moral

L'article L. 1152-1 du code du travail dispose : " Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ".

L'article L. 1154-1 du code du travail dispose : " Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ".

A. Sur les éléments établis par le salarié

M. [A] invoque six faits à l'appui de sa demande relative au harcèlement moral, à savoir :

- le retrait de missions qui lui étaient, auparavant, dévolues,

- la tenue de propos humiliants lors d'une réunion du comité de direction (CODIR), le 9 juillet 2018,

- l'irrespect de la durée légale du temps de travail et du repos obligatoire,

- l'absence de décompte des heures supplémentaires,

- les accusations de chantage et de diffamation portées à son encontre,

- le dépôt, par l'employeur, d'une main courante à son égard.

Sur le retrait de fonctions, M. [A] affirme que la SAS Mada lui a retiré les missions d'embauche du personnel de production, sans recueillir son accord, et ne l'a plus associé aux décisions de l'entreprise, en dépit de sa qualité de directeur technique et de production, par exemple en janvier 2018, le directeur général M. [K] s'est opposé à sa volonté de ne distribuer une prime exceptionnelle qu'à 13 salariés sur 15.

Par ailleurs, il allègue qu'il a réclamé en vain, l'embauche de chefs d'équipes.

Cependant M. [A] ne justifie d'aucune demande d'embauche de chefs d'équipes, de sorte que ce grief ne peut dès lors être retenu.

Sur la tenue de propos humiliants lors de la réunion du CODIR, le 9 juillet 2018, M. [A] soutient que M. [K], directeur général, l'a directement mis en cause devant les autres cadres de l'entreprise, en lui faisant grief d'être à l'origine de la baisse de marge de la société, liée à un manque de productivité et à un nombre trop important de salariés intérimaires. Il se fonde sur l'attestation de témoin de Monsieur [I] [H] (pièce 82). Mais cet ancien conducteur de lignes automatisées, s'il évoque les compétences professionnelles de M. [A], n'a pas assisté à la réunion, mais indique simplement avoir vu M. [A] sortir d'une réunion CODIR et qu'il était méconnaissable.

La tenue de propos humiliants lors de cette réunion n'est par conséquent pas rapportée, d'autant que l'employeur verse aux débats des attestations de témoin de Monsieur [F] [T] directeur qualité, et de Mesdames [Y] directrice achats et finances et [R] DRH ayant tous trois assisté à la réunion et ne rapportant aucun propos humiliant tenu à l'égard de Monsieur [A]. Ce grief n'est par conséquent pas établi.

Sur le non-respect de la durée du travail et sur l'absence de décompte des heures supplémentaires, il a ci-dessus été jugé que des HS et repos compensateurs sont dûs au salarié.

Sur les accusations de chantage et de diffamation, M. [A] reproche à son employeur plusieurs propos contenus dans le courrier du 20 septembre 2018, à savoir des accusations de chantage sur la conclusion d'une éventuelle rupture conventionnelle, la menace d'en recourir aux instances judiciaires pour se protéger des allégations de harcèlement moral, en invoquant la diffamation, et des accusations de harcèlement moral portées, cette fois, à son encontre.

Sur le dépôt d'une main courante par l'employeur, M. [A] fait grief à la SAS Mada d'avoir procédé ainsi et d'avoir menacé de requérir la gendarmerie aux fins que soit réalisée une perquisition, en lui imputant des manquements graves.

***

Il résulte de ce qui précède que le salarié établit des faits qui, pris dans leur ensemble (sauf la demande d'embauche de chefs d'équipe, et les propos humiliants lors d'une réunion CODIR) permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, et qu'il convient d'examiner les éléments objectifs apportés en réponse par l'employeur.

B. Sur les réponses objectives apportées par l'employeur

S'agissant du retrait des fonctions, il apparaît que M. [A] a signé une fiche de fonctions, le 08 juin 2018, recensant ses nouvelles missions, de sorte que l'absence de recueil de son accord sur la restructuration du périmètre de ses prérogatives est invoquée à tort. Cette fiche indique en outre que la décision d'attribuer des primes exceptionnelles revenait, en dernière instance, à M. [K], représentant légal de la société.

S'agissant du non-respect de la durée du travail et de l'absence de décompte des heures supplémentaires, eu égard aux condamnations prononcées, l'employeur ne rapporte aucune réponses objectives permettant d'expliquer ce grief.

S'agissant des accusations de chantage et de diffamation, la SAS Mada justifie que le courrier du 20 septembre 2018 constitue une réponse à celui que lui adressait le salarié, le 11 septembre 2018 dans lequel il insiste sur sa volonté de rompre le contrat de travail par rupture conventionnelle et déclare avoir été victime de harcèlement moral lors de la réunion du CODIR, avoir consulté son médecin traitant, et ne plus avoir de relation de confiance qu'exige son poste.

Par ailleurs, le courrier du 20 septembre 2018 s'il comporte un certain nombre de reproches formulés à l'encontre du salarié, vise essentiellement à contester le harcèlement moral allégué. Enfin l'invitation à reconsidérer ses propos et à les retirer sous peine d'une procédure pour diffamation, ne constitue pas un chantage mais l'annonce de l'exercice d'un droit qui appartient à tout justiciable, qui peut l'exercer à ses risques et périls.

Dans son courrier du 03 octobre 2018, la SAS Mada informe le salarié du dépôt d'une main courante au motif qu'il a durant ses arrêts maladies, via sa messagerie professionnelle, téléchargé et transféré des documents appartenant à la société, relatifs à ses clients, aux processus de fabrication, aux projets commerciaux, ainsi qu'aux données comptables et financières, sur son adresse personnelle.

Il résulte de ses propres conclusions que le salarié reconnaît qu'il ne peut durant son arrêt maladie consulter ses mails professionnels, et que par ailleurs il ne conteste pas les téléchargements affirmant que rien ne lui interdit, pour assurer sa défense, de récupérer des données dont il peut avoir connaissance dans le cadre de ses fonctions.

Pour autant il ne justifie pas que les documents téléchargés de par leur spécificité aient été rendus nécessaires à la préparation de sa défense.

C. Sur la synthèse

Il résulte de tout ce qui précède que les agissements finalement retenus, et imputés à l'employeur sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral, sauf le non-paiement des heures supplémentaires et du repos compensateur.

Pour autant ce grief n'est pas constitutif de harcèlement moral, d'ailleurs le salarié n'a durant l'exécution du contrat de travail formulé aucune réclamation à cet égard.

Enfin les éléments médicaux versés aux débats, et justement analysés par les premiers juges, ne permettent pas d'établir un lien entre les problèmes de santé rencontrés par le salarié et un harcèlement moral, inexistant en l'espèce.

C'est donc à bon droit que le conseil des prud'hommes a rejeté la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral, le jugement est sur ce point confirmé.

III. Sur la rupture du contrat de travail

M. [A] a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement, le 09 janvier 2019, par la notification d'une lettre recommandée avec accusé de réception, rédigée comme ci-suivant :

" ('). Par la présente, nous avons le regret de devoir vous notifier votre licenciement en raison des motifs suivants :

Impossibilité de reclassement faisant suite à votre inaptitude définitive à votre poste constatée par avis médical du 20 novembre 2018.

Cet avis d'inaptitude fait suite à une 1ère visite intervenue le 6 novembre 2018 et des études de poste et de conditions de travail réalisées par le médecin du travail en date du 14 novembre 2018. Des échanges sont également intervenus entre nous et le médecin du travail en date des 8 octobre 2018 et 14 novembre 2018.

Par ailleurs, l'avis médical afférent au reclassement porte les conclusions et indications suivantes : " Aptitudes restantes en vue du reclassement : un poste similaire à l'extérieur de l'entreprise en ayant des contacts professionnels différents".

En conséquence, nous avons recherché des possibilités de reclassement vous concernant.

Il convient cependant de préciser que nous sommes une petite structure ne comportant qu'un seul site ; ainsi nous ne disposons pas d'établissement secondaire.

Nous n'avons malheureusement aucun poste disponible correspondant aux restrictions émises par le médecin du travail. Dès lors, votre reclassement au sein de notre entreprise s'avère impossible.

Nous avons également interrogé la société Holding NG30, mais cette société n'emploie pas de salarié et n'envisage pas de création de poste.

Enfin, nous avons recherché des possibilités de reclassement vous concernant auprès de nos entreprises partenaires, malheureusement sans succès.

Nous devons constater qu'en dépit des différents échanges intervenus avec le médecin du travail et nos différentes recherches, il ne nous est pas possible de vous proposer un autre emploi.

En conséquence, votre reclassement s'avère impossible (') ".

La SAS Mada fait grief aux premiers juges d'avoir considéré le licenciement comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse.

M. [A], quant à lui, invoque, par la voie d'un appel incident, des agissements constitutifs de harcèlement moral, et une violation de l'obligation de sécurité, propres à entraîner la nullité du licenciement. Par suite, il revendique l'origine professionnelle de son inaptitude.

A. Sur la nullité du licenciement

1. En raison du harcèlement moral

Il a ci-dessus été jugé qu'il n'y a pas eu harcèlement moral, de sorte que ce fondement ne peut conduire à la nullité du licenciement.

2. Sur l'obligation de sécurité

Il résulte de l'articulation du plan des conclusions de l'intimé que celui-ci sollicite la requalification en licenciement nul, non seulement en raison du harcèlement moral, mais également pour le non-respect de l'obligation de sécurité.

Or il est de jurisprudence constante que le non-respect de l'obligation de sécurité en elle-même, n'entraîne pas de nullité du licenciement, mais éventuellement une absence de cause réelle et sérieuse.

M. [A] soutient que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité prévue par l'article L. 4121-1 du code du travail, qui dispose que : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ".

M. [A] indique qu'il a été très touché psychologiquement, dès le premier arrêt maladie de juillet 2018, et pendant les mois suivants, et qu'il bénéficie d'un traitement antidépresseur et est actuellement sous psychothérapie.

Invoquant les éléments avancés dans le cadre de son argumentaire sur le harcèlement moral, il soutient que son état de santé est en relation directe avec le comportement de son employeur, la SAS Mada.

Cependant si la dégradation de son état de santé est incontestable, au vu des arrêts maladies et des conclusions du docteur [E], M. [A] n'argue d'aucune violation des règles de prévention du harcèlement moral, harcèlement qui n'a au demeurant pas été retenu.

Le manquement à l'obligation de sécurité n'est pas établi.

Le jugement entrepris sera confirmé, en ce qu'il a débouté M. [A] de ce chef.

B. Sur l'origine de l'inaptitude

1. En raison d'un accident du travail

M. [A] soutient que son inaptitude est d'origine professionnelle, en ce qu'elle résulte d'un fait accidentel, à savoir la réception à son domicile du courrier émis par son employeur, le 03 octobre 2018 ; qu'il a, ensuite, bénéficié d'arrêts de travail sur formulaire spécifique AT/MP, et qu'une déclaration d'accident du travail a été établie, le 26 octobre 2018 ; enfin, que la SAS Mada était informée du caractère professionnel de son affection au moment de l'établissement de la déclaration d'accident du travail et de l'enquête de la caisse de sécurité sociale.

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail, ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident, ou cette maladie, et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement (Cass. Soc., 9 juin 2010, nº 09-41.040).

En l'espèce, M. [A] a été destinataire à son domicile, d'un courrier recommandé daté du 03 octobre 2018, émise par la SAS Mada, par laquelle cette dernière le rappelle à ses obligations contractuelles, notamment de loyauté et de confidentialité, en lui reprochant des transferts de documents professionnels durant ses arrêts de travail.

Il convient de relever que M. [A] n'a déclaré l'accident du travail, que le 26 octobre 2018, celui-ci serait survenu à son domicile après la réception du courrier précité entraînant des conséquences sur son état de santé. Or il apparaît qu'il n'était pas, lors de la réception de ce courrier, placé sous le lien de subordination de son employeur, mais à son domicile, et que son contrat de travail était suspendu pour arrêt maladie simple.

Nonobstant l'autonomie du droit du travail à l'égard du droit de la sécurité sociale, il convient de relever, parmi les autres éléments, que la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a refusé la prise en charge, au titre de la législation professionnelle de l'accident déclaré, et que cette décision n'a pas été contestée.

Il convient de relever que M. [A], avant d'être licencié pour inaptitude, a été placé en arrêt de travail simples à compter du 09 juillet 2018, et qu'à compter du 07 novembre 2018, il a bénéficié d'arrêts de travail pour maladie non-professionnelle, et enfin que le médecin du travail lui-même a émis un avis d'inaptitude non professionnelle.

L'accident allégué, n'a pas été retenu, et n'est pas établi dans la présente, et enfin lors du licenciement pour inaptitude, le salarié se trouvait toujours en arrêt maladie simple.

Ainsi, il résulte de ce qui précède que l'inaptitude de M. [A] n'a pas d'origine professionnelle. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

2. En raison du harcèlement moral

Il a ci-dessus été jugé qu'il n'y a pas eu harcèlement moral, de sorte que ce fondement ne peut conduire à la qualification d'une inaptitude professionnelle nullité du licenciement.

C. Sur le respect de l'obligation de reclassement

Par avis du 20 novembre 2018, le médecin du travail, a conclu à l'inaptitude de M. [A], en les termes ci-suivants : " aptitudes restantes en vue du reclassement : un poste similaire à l'extérieur de l'entreprise en ayant des contacts professionnels différents ". Ledit médecin, dans son avis, n'a coché aucune des cases relatives aux cas de dispense de l'obligation de reclassement.

La SAS Mada a informé M. [A], par courrier du 18 décembre 2018 de l'impossibilité de reclassement. Par courrier du 21 décembre 2018, elle l'a convoqué à un entretien préalable, avant de le licencier par courrier du 09 janvier 2019.

M. [A] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce que la SAS Mada n'a pas procédé à la consultation des représentants du personnel, avant d'engager la procédure de licenciement.

L'article L. 1226-2 du code du travail dispose : " Lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail ".

La SAS Mada affirme, d'une part, qu'elle n'était pas tenue à cette consultation, car aucune proposition de reclassement n'a pu être émise, et d'autre part, qu'elle ne disposait pas de telles instances, en produisant un procès-verbal de carence aux élections des délégués du personnel, du 04 juillet 2014.

Or si l'employeur est dispensé de toute recherche d'un reclassement et, par suite, de la consultation du comité social et économique, lorsque le médecin du travail conclut que le maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à la santé du salarié, ou que son état de santé le rend inapte à toute activité professionnelle (Cass. Soc., 16 novembre 2022, n° 21-17.255), il n'en va pas de même lorsque l'employeur est tenu de rechercher un reclassement, mais n'y parvient pas.

En l'espèce, le médecin du travail, n'a pas conclu à une dispense de reclassement, et a formulé des indications relatives à celui-ci.

Il incombait à la SAS Mada de consulter le comité social et économique, en vertu des dispositions précitées. Elle a d'ailleurs bien procédé, sans succès, à une recherche de reclassement.

Par ailleurs la durée des mandats de telles instances s'élevait à quatre ans, selon les dispositions légales alors en vigueur, de sorte que de nouvelles élections devaient être organisées en juillet 2018.

Dès lors, la SAS Mada ne peut valablement se prévaloir du procès-verbal de carence de 2014 pour justifier de son défaut de consultation des représentants du personnel, dans le cadre de la recherche du reclassement de M. [A] licencié le 09 janvier 2019. L'employeur a en l'espèce bien méconnue les dispositions relatives au reclassement.

Or la méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident non professionnel, ou une maladie, dont celle imposant à l'employeur de consulter les délégués du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 30 septembre 2020, n° 19-11.974).

Ainsi, eu égard à ce qui précède, le jugement querellé sera confirmé en ce qu'il a considéré que le licenciement de M. [A] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

IV. Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail

A. Sur le salaire de référence

Il convient de noter que M. [A] était placé en arrêt de travail depuis le mois de juillet 2018 jusqu'à la notification de son licenciement. Le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est celui des 12 ou des 3 derniers mois précédant l'arrêt de travail pour maladie.

La cour faisant droit aux demandes formées au titre des heures supplémentaires, le salaire de référence, sur la période de juillet 2017 à juin 2018, s'élève à 6.269,74 €, tel que jugé par le conseil des prud'hommes, dont le jugement est confirmé sur ce point.

B. Sur les dommages intérêts pour licenciement nul

M. [A] étant débouté de sa demande de nullité du licenciement, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts à ce titre, et son appel incident rejeté.

C. Sur les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

Il a été jugé ci-dessus que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Aux termes de ses conclusions, M. [A] sollicite le versement d'une indemnité correspondant à 13,5 mois de salaire brut, soit le taux maximal fixé par l'article L. 1235-3 du code du travail, sans produire aucune pièce de nature à étayer l'augmentation de la somme allouée.

Or il apparaît que compte tenu de l'ancienneté de 16 ans du salarié au moment du licenciement, de son âge, du salaire moyen perçu, et de sa capacité à retrouver un emploi, eu égard à son expérience professionnelle et sa formation, et des conséquences du licenciement ; la somme de 61 000 € allouée par les premiers juges indemnise justement le préjudice subi. Le jugement sera cependant infirmé en ce que le montant alloué est prononcé en net au lieu en brut.

Les premiers juges ont justement calculé l'indemnité de préavis de trois mois, ainsi que l'indemnité de congés payés y afférents. Le jugement est également confirmé sur ce point.

L'inaptitude prononcée à l'égard de M. [A] étant d'origine non-professionnelle, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté ce dernier de ses demandes à ce titre.

L'article L. 1235-4 du code du travail dispose : " Dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé ".

La cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS Mada à rembourser les indemnités de chômage versées à M. [A] dans la limite de six mois.

D. Sur la rectification des fiches de paie et des documents de fin de contrat

La SAS Mada indique que l'établissement de bulletins de salaire rectificatifs, datés du mois de la réalisation d'éventuelles heures supplémentaires et la modification de l'attestation destinée à Pôle Emploi n'est pas techniquement réalisable, du fait des protections légales intégrées dans les logiciels informatiques, et sollicite, par conséquent, l'infirmation du jugement entrepris sur ces points.

Or la rectification des bulletins de paye et des documents de fin de contrat s'impose eu égard à la solution du litige. Les problèmes que l'employeur rencontre avec son logiciel ne peuvent le dispenser de cette obligation.

Compte-tenu de l'opposition de l'employeur et afin de garantir l'exécution de la décision l'astreinte prononcée par les premiers juges sera maintenue, et le jugement confirmé tant sur la remise des documents que sur l'astreinte.

V. Sur les demandes accessoires

Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

L'appelante qui succombe pour l'essentiel, est condamnée aux dépens de la procédure d'appel, et par voie de conséquence déboutée de sa demande de frais irrépétibles.

L'équité commande par ailleurs de la condamner à payer à Monsieur [A] une somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Mulhouse en formation de départage le 9 décembre 2021 en toutes ses dispositions, SAUF en ce qu'il condamne l'employeur à payer une somme de 61 000 € net à titre au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé, et y ajoutant,

CONDAMNE la SAS Mada, à payer à Monsieur [V] [A] la somme de 61 000 € brut (soixante et un mille euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec les intérêts légaux à compter du prononcé du présent arrêt ;

DÉBOUTE Monsieur [V] [A] de son appel incident ;

CONDAMNE la SAS Mada, à payer à Monsieur [V] [A] la somme de 2.000 € (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS Mada aux entiers dépens de la procédure d'appel.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 28 mai 2024, signé par Madame Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Martine Thomas, Greffier.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 a
Numéro d'arrêt : 22/00086
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;22.00086 ?
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