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05/04/2024 | FRANCE | N°21/00454

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 05 avril 2024, 21/00454


MINUTE N° 152/2024





























Copie exécutoire

aux avocats



Le 5 avril 2024



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 05 AVRIL 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00454 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPJ2



Décision déférée à la cour : 10 Novembre 2020 par le

tribunal judiciaire de STRASBOURG





APPELANT et intimé sur incident :



Le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6] sis [Adresse 7]

pris en la personne de son syndic, Monsieur [K] [V]

demeurant [Adresse 7] à [Localit...

MINUTE N° 152/2024

Copie exécutoire

aux avocats

Le 5 avril 2024

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 05 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00454 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPJ2

Décision déférée à la cour : 10 Novembre 2020 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANT et intimé sur incident :

Le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6] sis [Adresse 7]

pris en la personne de son syndic, Monsieur [K] [V]

demeurant [Adresse 7] à [Localité 9]

représenté par Me CROVISIER de la SELARL ARTHUS, avocat à la cour.

avocat plaidant : Me ROSENSTIEHL, avocat à Strasbourg.

INTIMÉE et appelante sur incident :

L'EUROMÉTROPOLE DE [Localité 9] prise en la personne de son représentant légal

sise [Adresse 1] à [Localité 5]

représentée par Me Laurence FRICK, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Décembre 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre

Madame Murielle ROBERT-NICOUD, conseiller

Madame Nathalie HERY, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Selon actes notariés des 25 et 27 novembre 1997, M. [K] [V] et Mme [N] [V], cette dernière avec son époux, ont acquis des lots d'un immeuble d'habitation en copropriété cadastré section DR n°[Cadastre 3]/[Cadastre 2], [Adresse 7] à [Localité 9].

L'établissement public Eurométropole de [Localité 9] est propriétaire d'une parcelle voisine cadastrée section DR n° 0[Cadastre 4]/00[Cadastre 2], [Adresse 8] à [Localité 9].

Lesdites propriétés sont séparées par un mur qui a partiellement été détruit lors de la réalisation de travaux d'aménagement effectués par l'Eurométropole de [Localité 9].

Lors de l'instruction de la déclaration préalable déposée par M. [V] en vue de la reconstruction du mur, il est apparu que le mur en question était construit sur le terrain appartenant à l'Eurométropole de [Localité 9].

En l'absence d'accord sur les modalités d'acquisition de la parcelle cadastrée section DR n° [Cadastre 4]/[Cadastre 2] [Adresse 8] à [Localité 9], sur laquelle une partie du mur empiétait, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7], pris en la personne de M. [V], a, par acte d'huissier en date du 11 juillet 2018, fait assigner l'Eurométropole de [Localité 9] devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins de voir constater l'acquisition par usucapion de ladite parcelle.

Par jugement contradictoire du 10 novembre 2020, le tribunal, devenu tribunal judiciaire de Strasbourg a :

- dit que la demande présentée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7], est recevable ;

- débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7], de ses prétentions ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7], à payer à l'Eurométropole de [Localité 9] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Sur l'irrecevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7] (le syndicat des copropriétaires), pour défaut de nomination régulière de M. [V] en qualité de syndic invoquée par le défendeur, le tribunal a rappelé, au visa de l'article 117 du code de procédure civile, que le défaut de pouvoir est une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte, et qu'est entaché d'une irrégularité de fond, l'acte accompli au nom d'une personne morale par un représentant irrégulier. Le tribunal a déclaré recevable le demandeur en ses prétentions dès lors que ce moyen ne constituait pas une fin de non-recevoir, après avoir toutefois relevé que le syndicat des copropriétaires ne justifiait d'aucune décision de l'assemblée générale des copropriétaires ratifiant la désignation de M. [V] en qualité de syndic comme le prévoyait le règlement de copropriété du 29 novembre 1997.

S'agissant de l'usucapion, le tribunal a rappelé qu'aux termes de l'article 2272 du code civil, le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans, ce délai étant abrégé à dix ans lorsque le possesseur a acquis de bonne foi et grâce à un juste titre. Considérant que l'acte de vente du 25 novembre 1997 sur lequel se fondait M. [V] n'avait pas pour objet la parcelle litigieuse cadastrée section DR n° [Cadastre 4]/[Cadastre 2] [Adresse 8] à [Localité 9], le tribunal a estimé que l'usucapion abrégée n'avait pas lieu de s'appliquer, car cet acte de vente ne constituait pas un juste titre.

Le tribunal a ensuite indiqué qu'il appartenait à M. [V] de justifier d'une possession trentenaire de la parcelle. A cet égard, il a souligné que celui-ci, qui indiquait que « l'acte de possession est l'existence d'un mur quasi centenaire », ne pouvait se contenter d'affirmer, d'une part, que la possession trentenaire résultait « des archives consultables par tout un chacun » faisant état de l'existence du mur depuis les années 1920-1930, alors que l'Eurométropole de [Localité 9] affirmait au contraire que le mur avait été construit suite aux travaux réalisés en 1991 par la Communauté urbaine de [Localité 9] et, d'autre part, que les membres de sa famille occupaient les lieux depuis 1976 sans produire aucune attestation ou photographie datable permettant d'établir que la parcelle était occupée depuis lors et que le mur était déjà construit sur ladite parcelle. Le tribunal a donc débouté M. [V] de ses prétentions, dès lors qu'il ne produisait aucun élément permettant de justifier la possession trentenaire invoquée.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble a interjeté appel de ce jugement le 11 janvier 2021, en ce qu'il l'a débouté de ses prétentions et l'a condamné à verser à l'Eurométropole de [Localité 9] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par ordonnance du 14 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la requête du syndicat des copropriétaires sollicitant la transmission d'une question préjudicielle au tribunal administratif aux fins de savoir si la parcelle cadastrée section DR n° [Cadastre 4]/[Cadastre 2], [Adresse 8] à [Localité 9] 0,08 are relevait du domaine public de l'Eurométropole de [Localité 9] et en conséquence de surseoir à statuer.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 6 juin 2023.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 4 avril 2022, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de le déclarer recevable et bien fondé en son appel, d'infirmer le jugement des chefs visés dans la déclaration d'appel et statuant à nouveau, de :

- dire et juger qu'il a acquis par usucapion trentenaire et en pleine propriété la parcelle située à [Localité 9], cadastrée section DR n° [Cadastre 4]/[Cadastre 2]- [Adresse 8],

en conséquence,

- le déclarer propriétaire dudit bien avec effet rétroactif,

- condamner l'Eurométropole de [Localité 9] aux entiers frais et dépens et à lui verser la somme de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

sur appel incident

- déclarer l'Eurométropole de [Localité 9] mal fondée en son appel incident,

- l'en débouter ainsi que de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner l'Eurométropole de [Localité 9] aux entiers frais et dépens nés de l'appel incident.

Au soutien de son appel, l'appelant expose, au visa des articles 789 et 914 du code de procédure civile, que le défaut de pouvoir du syndic pour agir en justice constitue une irrégularité de fond qui aurait dû être soulevée devant le juge de la mise en état avant la clôture de l'instruction.

Il fait valoir, qu'en tout état de cause, et ce conformément à l'article 55 du décret du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, M. [V] a été autorisé par une décision du 27 juin 2018 de l'assemblée générale à représenter le syndicat des copropriétaires dans la présente procédure, de sorte qu'il a qualité à agir en justice. Il fait valoir que le procès-verbal de cette assemblée générale habilitant M. [V] en sa qualité de syndic à agir dans la présente instance suffit à démontrer que celui-ci a bien été nommé comme syndic.

En outre, il invoque le principe d'application immédiate des textes réglementaires relatifs à la procédure, dégagé par la jurisprudence administrative, pour soutenir que les nouvelles dispositions de l'alinéa 2 de l'article 55 précité limitant aux seuls copropriétaires la possibilité de se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice, sont applicables en l'espèce.

Il prétend, qu'à l'inverse de ce qu'affirme l'intimée, la désignation de M. [V] comme syndic est régulière, puisque conformément à l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, il a été désigné, le 27 juin 2018, à l'unanimité par l'assemblée extraordinaire des copropriétaires en tant que syndic capable d'ester en justice. Il ajoute que M. [V] a aussi été expressément autorisé par cette décision, en tant que syndic, à agir en justice s'agissant du présent litige. Il conclut, dès lors, que l'acte introductif d'instance n'est entaché d'aucune irrégularité de fond.

S'agissant de l'usucapion, il soutient que l'intimée n'est pas fondée à invoquer la règle de l'imprescriptibilité et d'inaliénabilité du domaine public, alors qu'elle ne démontre pas que la parcelle litigieuse est entièrement intégrée dans le domaine public : le seul classement d'un terrain privé en emplacement réservé au profit d'une personne publique en vue d'un aménagement public ne fait pas entrer ce bien dans le domaine public de la collectivité. Il ajoute que, contrairement à ce qu'affirme l'intimée, l'article L.2111-1 du code général des propriétés des personnes publiques ne prévoit pas que l'affectation à l'usage public confère à l'ensemble de la parcelle la qualité de domaine public.

Il fait valoir, ensuite, que la possession trentenaire peut se prouver par tous moyens, tels que des attestations de témoins. Il produit ainsi aux débats plusieurs attestations de témoins dont celles d'anciens locataires au [Adresse 7] entre 1976 jusqu'à 1990 témoignant de l'existence du mur antérieurement à l'année 1991, de sorte que c'est à tort que le premier juge a retenu qu'il ne produisait aucun élément permettant de justifier de la possession trentenaire invoquée.

Il soutient que les conditions de la prescription acquisitive visées à l'article 2261 du code civil sont remplies. S'agissant de la condition relative à une possession continue et non interrompue de la parcelle, il expose que, nonobstant le fait que plusieurs propriétaires se soient succédés, la propriété par usucapion est acquise par la seule intention de posséder, ce qui est le cas en l'espèce, dans la mesure où M. [V] et sa s'ur n'ont jamais manifesté la moindre renonciation expresse ou tacite en ce qui concerne la possession de la parcelle sur laquelle a été édifié le mur litigieux.

Il se prévaut, en outre, des dispositions de l'article 2265 du code civil permettant de compléter la prescription en joignant à la possession celle de son auteur, dès lors que la parcelle cadastrée section DR n° [Cadastre 4]/[Cadastre 2] [Adresse 8] à [Localité 9] ne forme qu'un seul tenant avec la parcelle de la copropriété, et, ajoute que l'empiètement du mur litigieux ayant débuté en 1920, soit à la date de sa construction, l'acquisition de la parcelle cadastrée section DR n° [Cadastre 4]/[Cadastre 2] [Adresse 8] à [Localité 9] par usucapion trentenaire est donc largement acquise, puisque la possession par les propriétaires successifs de la parcelle date au moins de cette époque.

Il fait valoir que les autres conditions requises par l'article 2261 du code civil ne font pas débats en précisant que la possession ne pouvait être que publique en présence du mur sur la parcelle litigieuse, non dissimulable, ainsi que non équivoque, dès lors qu'il s'est toujours conduit en propriétaire notamment en entretenant le mur et la parcelle.

*

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 28 novembre 2022, l'Eurométropole de [Localité 9] conclut au rejet de l'appel principal et forme appel incident pour demander l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré recevable la demande présentée par le syndicat des copropriétaires.

Elle sollicite la confirmation du jugement pour le surplus, le rejet de l'appel principal, et le débouté de l'appelant de l'intégralité de ses fins et conclusions.

Elle demande à la cour, statuant à nouveau, de :

- déclarer nulle l'assignation faite à la demande du syndicat des copropriétaires le 11 juillet 2018,

- déclarer nul, de ce fait, le jugement du 10 novembre 2020,

en tout état de cause,

- condamner le syndicat des copropriétaires au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Elle soutient qu'aux termes de l'article 117 du code de procédure civile, constitue une irrégularité de fond le défaut de capacité d'ester en justice ou le défaut de pouvoir d'une partie figurant au procès comme représentant d'une personne morale.

Elle fait valoir que le syndicat des copropriétaires ne peut agir que par le biais de son syndic, qui a seul pouvoir pour le représenter en justice. Elle prétend, qu'en l'espèce, M. [V] n'a jamais justifié avoir été nommé régulièrement syndic de copropriété, puisque le règlement de copropriété du 27 novembre 1997 versé aux débats en première instance par l'appelant, soumettait la nomination de M. [V] en qualité de syndic à la ratification de la première assemblée générale des copropriétaires, mais que le syndicat des copropriétaires n'a jamais justifié d'aucune décision de l'assemblée générale des copropriétaires ratifiant cette désignation. Elle souligne l'absence de production aux débats de ce règlement par l'appelant à hauteur de cour et produit, pour sa part, sous annexe 15, ledit règlement.

Elle ajoute que l'autorisation d'ester en justice produite par l'appelant pour justifier de la qualité à agir du syndic ne permet pas non plus de justifier de la nomination régulière de M. [V] en qualité de syndic de la copropriété et ne régularise pas l'absence de désignation régulière d'un syndic conformément aux dispositions de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Elle expose, à cet effet, que le syndic doit être désigné, soit dans le règlement de copropriété, soit dans un autre acte ayant recueilli l'accord unanime des copropriétaires, soit par l'assemblée générale statuant à la majorité des voix conformément à l'article 25 de la loi précitée, de sorte que le procès-verbal de l'assemblée générale autorisant M. [V] à agir en qualité de syndic ne lui confère pas la qualité de syndic. Elle conclut ainsi à la nullité de l'acte introductif d'instance et, par conséquent, à celle du jugement.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, elle fait valoir au visa des articles 117 et 118 du code de procédure civile, que l'irrégularité de fond constitue un moyen qui peut être proposé en tout état de cause.

Elle ajoute que les dispositions de l'article 55 du décret du 17 mars 1967, qui dénient au syndic le pouvoir d'intenter une action en justice sans y avoir été habilité par une délibération de l'assemblée générale, revêtent un caractère d'ordre public, de sorte que, conformément à l'article 120 du code de procédure civile, la cour doit soulever d'office la nullité de l'assignation qui a été délivrée en première instance pour le compte du syndicat des copropriétaires.

Elle affirme, en outre, que les nouvelles dispositions de l'article 55 du décret du 17 mars 1967 limitant aux seuls copropriétaires la possibilité de se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndicat à agir en justice, n'ont pas vocation à s'appliquer en l'espèce, dès lors que l'instance a été introduite devant le tribunal avant la date d'entrée en vigueur desdites dispositions le 29 juin 2019.

S'agissant de l'usucapion invoquée par l'appelant, elle soutient que la règle de l'inaliénabilité et de l'imprescriptibilité du domaine public, affirmée par l'article L.1311-1 du code général des collectivités territoriales, interdit l'acquisition par prescription de la propriété d'un bien faisant partie du domaine public ; qu'en l'espèce, la parcelle litigieuse cadastrée section DR n° [Cadastre 4] /[Cadastre 2] [Adresse 8] à [Localité 9], étant classée en emplacement réservé par le PLU de l'Eurométropole de [Localité 9], est inconstructible. Elle indique que cette parcelle est intégrée à un square affecté à l'usage du public et ajoute, au visa de l'article L.2111-1 du code général des propriétés des personnes publiques, que l'affectation de la parcelle à un usage du public confère à l'ensemble de la parcelle la qualité de domaine public, de sorte que l'ensemble de la parcelle et le mur qui y est érigé ne peuvent faire l'objet de prescription.

Elle prétend, par ailleurs, que l'appelant ne peut se prévaloir de l'usucapion abrégée, puisque l'acte de vente du 25 novembre 1997 ne porte pas sur la parcelle qu'il entend prescrire et ne peut donc constituer un juste titre.

Elle fait valoir que l'appelant ne justifie pas non plus d'une possession trentenaire de la parcelle au motif qu'il résulte des actes produits par ce dernier qu'il n'a lui-même acquis la parcelle cadastrée section DR n° [Cadastre 3]/[Cadastre 2], mise ensuite en copropriété, que le 27 novembre 1997.

Elle soutient, enfin, que les dispositions de l'article 2265 du code civil n'ont pas vocation à s'appliquer, au motif qu'il résulte de l'état descriptif de division produit en annexe 15 que la parcelle litigieuse ne fait pas partie des biens acquis par M. [V] et son indivisaire, respectivement les biens transmis au syndicat des copropriétaires.

Elle ajoute que ce n'est qu'éventuellement à compter de 2016, date de destruction du mur, que le syndicat des copropriétaires pourrait faire valoir la prescription en alléguant que le mur délimitait son terrain, mais qu'en tout état de cause, il ne démontre pas une prescription trentenaire.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

MOTIFS

Aux termes de l'article 117 du code de procédure civile, constitue une irrégularité de fond le défaut de capacité d'ester en justice ou le défaut de pouvoir d'une partie figurant au procès comme représentant d'une personne morale.

Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, le syndic est chargé de représenter le syndicat dans tous les actes civils et en justice.

Il en résulte que toute assignation doit être délivrée par le syndic lorsqu'elle est à la requête du syndicat.

En l'espèce, selon le règlement de copropriété, reçu par un notaire les 25 et 27 novembre 1997, concernant l'immeuble cadastré à [Localité 9]-[Localité 6], section DR n°[Cadastre 3]/[Cadastre 2] - [Adresse 7], le syndic est nommé par l'assemblée générale de l'ensemble des copropriétaires pour une durée de trois années, à la majorité des voix de tous les copropriétaires et peut être révoqué à tout moment dans les mêmes conditions ; M. [K] [V] est 'dès à présent' nommé comme syndic et 'cette nomination sera soumise à la ratification de la première assemblée générale des copropriétaires'.

Il en résulte que M. [V] a ainsi été désigné syndic pour une durée de trois années, sous réserve de ratification par la première assemblée générale des copropriétaires.

Or, n'est produit aucun procès-verbal de cette première assemblée générale, ni procès-verbal d'une assemblée générale ratifiant cette nomination. En outre, le délai de trois ans est échu, et l'était déjà notamment lors de l'assemblée générale extraordinaire du 27 juin 2018.

Selon le procès-verbal de ladite assemblée, 'l'assemblée générale des copropriétaires donne tous pouvoirs à M. [K] [V], en tant que syndic de copropriété, à ester en justice, et spécialement pour (...)'.

Ainsi, par cette résolution, cette assemblée générale ne s'est prononcée que sur l'autorisation d'agir en justice, mais pas sur la désignation du syndic.

Dès lors, il n'est pas justifié que M. [V] ait été régulièrement désigné en qualité de syndic de la copropriété.

La délivrance de l'assignation en justice le 11 juillet 2018 à la demande du syndicat des copropriétaires 'pris en la personne de M. [K] [V]' est donc entachée d'une irrégularité de fond, puisque celui-ci n'avait pas la qualité de syndic.

En application de l'article 118 du code de procédure civile, une telle irrégularité de fond peut être soulevée en tout état de cause.

L'article 55 du décret du 17 mars 1967 n'a pas vocation à s'appliquer, car l'irrégularité de fond ne tient pas à l'absence d'autorisation d'agir en justice, mais à l'absence de preuve de la désignation de M. [V] en qualité de syndic de la copropriété.

Il n'est pas soutenu que cette irrégularité de fond ait été régularisée.

Il en résulte la nullité de l'assignation, et partant, du jugement entrepris.

Succombant, le syndicat des copropriétaires sera condamné à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Il sera condamné à payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'Eurométropole de [Localité 9] et sa demande à ce titre sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

DÉCLARE nulle l'assignation délivrée, le 11 juillet 2018, à l'Eurométropole de [Localité 9], par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7], pris en la personne de M. [V] ;

En conséquence,

ANNULE le jugement du tribunal judiciaire de [Localité 9] du 10 novembre 2020  ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7], à supporter les dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7], à payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'Eurométropole de [Localité 9] ;

REJETTE la demande du syndicat des copropriétaires de l'immeuble à [Localité 9] [Localité 6], sis [Adresse 7] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/00454
Date de la décision : 05/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-05;21.00454 ?
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