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21/03/2024 | FRANCE | N°21/03465

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 21 mars 2024, 21/03465


MINUTE N° 118/2024



































































Copie exécutoire

aux avocats



Le 21 mars 2024



La greffière

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 21 MARS 2024





Numéro d'inscr

iption au répertoire général : 2 A N° RG 21/03465 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HUQZ



Décision déférée à la cour : 17 Mars 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg





APPELANTES et INTIMÉES SUR APPEL INCIDENT :



Madame [I] [O]

demeurant [Adresse 4] à [Localité 6]



représentée par Me Noémie BRUNNER, Avocat à la cour



La SASU PROJECTBOX...

MINUTE N° 118/2024

Copie exécutoire

aux avocats

Le 21 mars 2024

La greffière

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 21 MARS 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/03465 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HUQZ

Décision déférée à la cour : 17 Mars 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg

APPELANTES et INTIMÉES SUR APPEL INCIDENT :

Madame [I] [O]

demeurant [Adresse 4] à [Localité 6]

représentée par Me Noémie BRUNNER, Avocat à la cour

La SASU PROJECTBOX, prise en la personne de son représentant légal

ayant siège [Adresse 3] à [Localité 5]

représentée par Me Valérie SPIESER-DECHRISTÉ, Avocat à la cour

INTIMÉS et APPELANTS SUR APPEL INCIDENT :

Madame [L] [K]

demeurant [Adresse 1] à [Localité 8]

Monsieur [Y] [P]

demeurant [Adresse 7] à [Localité 8]

représenté par Me Joëlle LITOU-WOLFF, Avocat à la cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Novembre 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre, et Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseillère

Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente, et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

En mars 2012, Mme [I] [O] qui était propriétaire d'un appartement, sis [Adresse 2] à [Localité 8] comportant une véranda, a fait réaliser par la SASU Projectbox des travaux de 'remise en état' de cette véranda.

Selon acte authentique en date du 6 mai 2013, M. [Y] [P] et Mme [L] [K] (les consorts [K]-[P]) ont acquis l'appartement de Mme [O], pour un prix de 179 000 euros.

Se plaignant de l'existence d'infiltrations d'eau dans la véranda, les consorts [K]-[P] ont fait assigner Mme [O] et la société Projectbox devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg, qui a ordonné, le 29 mars 2018, une expertise judiciaire confiée à M. [D].

Lors des opérations d'expertise, la société Projectbox a indiqué qu'elle avait sous-traité les travaux à l'entreprise Quentin Herr, placée en liquidation judiciaire le 18 février 2013, à la suite de quoi, les opérations d'expertises ont été étendues, par ordonnance du 14 août 2018, à l'assureur de responsabilité décennale de cette société, la SA MAAF Assurances, à la requête des consorts [K]-[P].

L'expert a déposé son rapport définitif le 12 avril 2019 après que la société MAAF Assurances ait finalement fait savoir qu'elle refusait sa garantie.

Le 28 février 2020, les consorts [K]-[P] ont vendu l'appartement.

Suite à l'échec d'une tentative de conciliation, les consorts [K]-[P] ont fait citer Mme [O] et la société Projectbox devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement des travaux de remise en état ainsi que d'une somme de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral, outre une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement réputé contradictoire du 17 mars 2021, la société Projectbox n'ayant pas comparu, le tribunal, devenu tribunal judiciaire de Strasbourg a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- déclaré la demande formée par les consorts [K]-[P] recevable ;

- condamné solidairement 'Mme [J]' et la société Projectbox à payer aux consorts [K]-[P] la somme de 14 973,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

- débouté les consorts [K]-[P] de leur demande en dommages et intérêts concernant le préjudice moral ;

- condamné solidairement 'Mme [J]' et la société Projectbox aux dépens et à payer aux consorts [K]-[P] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a considéré que la clause de non-recours insérée dans l'acte de vente du 6 mai 2013 était sans effet en matière de vices de la construction et de garantie décennale, les demandeurs étant fondés à opposer à Mme [O] les dispositions d'ordre public de l'article 1792-1 du code civil ; que Mme [O] étant réputée constructeur devait répondre des désordres qui rendaient la véranda impropre à sa destination de pièce habitable ; qu'en l'absence de cas de force majeure ou d'une quelconque faute de la victime invoquées par la défenderesse, celle-ci ne pouvait s'exonérer de sa responsabilité au seul motif que les travaux avaient été commandés et payés par son compagnon dans la mesure où l'article 1792-1 n'opérait aucune distinction entre les travaux réalisés personnellement et ceux effectués pour son compte.

Le tribunal a estimé que l'intervention de la société Projectbox dans les travaux à l'origine des infiltrations était incontestable en relevant qu'elle avait établi le devis et reconnu lors des opérations d'expertise avoir confié les travaux incriminés à un sous-traitant, ce qui justifiait sa condamnation solidaire avec Mme [O].

Sur la réparation des désordres, le tribunal a retenu que, nonobstant la revente de l'appartement en 2020, les demandeurs avaient néanmoins subi un préjudice consistant dans le fait qu'ils avaient dû effectuer des travaux de remise en état et en payer le prix. Le tribunal leur a donc alloué la somme de 14 973,20 euros en réparation de leur préjudice matériel conformément au devis examiné et validé par l'expert judiciaire.

Le tribunal a toutefois rejeté la demande d'indemnisation des consorts [K]-[P] au titre du préjudice moral au motif qu'aucun lien de causalité direct n'était établi entre le préjudice allégué et le retard dans la vente du bien litigieux ; le tribunal ayant, au demeurant, relevé que l'appartement pouvait le cas échéant être mis en vente dès le dépôt du rapport d'expertise judiciaire.

Par requête du 13 avril 2021, les consorts [K]-[P] ont saisi le tribunal judiciaire de Strasbourg en rectification d'erreur matérielle et en complément du jugement rendu le 17 mars 2021.

Par jugement rectificatif du 23 juin 2021, le tribunal a, d'une part, rectifié une erreur matérielle affectant le dispositif du jugement en ce qu'il convenait de remplacer les mots « [I] [J] » par les mots « [I] [O] », d'autre part, complété le dispositif du jugement en ce qu'il convenait d'intégrer la mention suivante : « condamne solidairement [I] [O] et la société Projectbox aux frais et dépens de la procédure de référé expertise R.CIV 18/00173 ».

Le 23 juillet 2021 Mme [O] a interjeté appel du jugement du 17 mars 2021, rectifié par jugement du 23 juin 2021, intimant toutes les parties, en ce qu'il a déclaré recevable la demande formée par les consorts [K]-[P], en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec la société Projectbox à verser aux consorts [K]-[P] la somme de 14 973,20 euros avec intérêts aux taux légal à compter de ce jour ainsi qu'aux dépens et à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec la société Projectbox aux frais et dépens de la procédure de référé expertise R.CIV 18/00173 

Le 2 septembre 2021, la société Projectbox a quant à elle interjeté appel des jugements du 17 mars 2021 et du 23 juin 2021, intimant toutes les parties, son appel tendant à l'annulation à tout le moins la réformation ou l'infirmation du jugement du 17 mars 2021 rectifié par jugement du 23 juin 2021, en ce qu'il a déclaré la demande formée par les consorts [K]-[P] recevable, en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec Mme [O] à leur verser la somme de 14 973,20 euros avec intérêts aux taux légal à compter du jugement, en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec Mme [O] aux dépens et au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec Mme [O] aux frais et dépens de la procédure de référé expertise R.CIV 18/00173. 

Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 6 septembre 2022.

Par ordonnance contradictoire de référé du 9 février 2022, la présidente de chambre de la cour d'appel de Colmar, agissant sur délégation de la première présidente près la même cour, a ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 17 mars 2021, tel que rectifié par la même juridiction le 23 juin 2021.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 6 juin 2023.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique 20 mai 2022, Mme [O] demande à la cour de se déclarer saisie de son appel contre le jugement dit rectificatif du 23 juin 2021, de la déclarer recevable et bien fondée en son appel, d'infirmer le jugement du 17 mars 2021 et rectifié le 23 juin 2021 en ce qu'il a déclaré les demande des consorts [K]-[P] recevables, en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec la société Projectbox à verser aux consorts [K]-[P] la somme de 14 973,20 euros avec intérêts aux taux légal à compter du jugement, ainsi qu'aux dépens et à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure.

Elle demande à cour, statuant à nouveau, au visa de l'article 1792 du code civil, de :

- juger que les consorts [K]-[P] ne sont pas recevables à engager une action à son encontre sur le fondement de la garantie décennale,

- juger que les consorts [K]-[P] n'ont plus qualité à agir à son encontre,

- déclarer irrecevables les demandes indemnitaires formées par les consort [K]-[P] à son encontre,

- les rejeter,

subsidiairement,

- juger que les travaux réalisés par la société Projectbox ne relèvent pas de travaux importants soumis à la garantie décennale sur le fondement des dispositions de l'article 1792 et suivants du code civil,

- juger qu'il n'existe aucune imputabilité des désordres à l'encontre de Mme [O] qui n'est pas tenue par la garantie décennale,

- débouter les consorts [K]-[P] de l'intégralité de leurs demandes formées à son encontre en ce compris leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

très subsidiairement,

- juger qu'aucune condamnation in solidum ne peut être prononcée à l'encontre de Mme [O] qui n'est aucunement à l'origine des désordres,

- juger que sa responsabilité ne pourrait être limitée qu'à hauteur de 5 % du montant des condamnations prononcées,

- juger que le montant des condamnations fixé à hauteur de 14.973,20 euros est trop élevé et n'est pas justifié,

- limiter le montant des condamnations à hauteur de 11.618,60 euros conformément au montant validé par le rapport d'expertise judiciaire,

- débouter les consorts [K]-[P] de toute autre demande formée à son encontre en ce compris leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire et juger que la société Projectbox a commis une faute en ne réalisant pas les travaux conformément aux règles de l'art,

- dire et juger en conséquence qu'elle est recevable et bien fondée à être relevée et garantie de l'intégralité des sommes mises à sa charge et ce, au visa de l'article 1382 du code civil,

- condamner la société Projectbox à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,

sur appel incident de la société Projectbox :

- statuer ce que de droit sur l'appel incident formé par la société Projectbox,

sur appel incident des consorts [K]-[P] :

-déclarer l'appel incident des consorts [K]-[P] mal fondé, le rejeter,

- débouter les consorts [K]-[P] de toute demande formée à ce titre,

en tout état de cause,

- débouter la société Projectbox de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à son encontre,

- débouter les consorts [K]-[P] de l'intégralité de leurs demandes,

- condamner les consorts [K]-[P] aux entiers dépens de première instance,

- condamner les consorts [K]-[P] à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les consorts [K]-[P] aux entiers frais et dépens de l'instance, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, l'appelante fait valoir que si la clause de non-recours en matière de vices cachés insérée dans l'acte de vente n'est pas applicable en matière de garantie décennale, cette garantie ne couvre pas les désordres apparents, or la véranda était un ouvrage visible au moment de la vente que les consorts [K]-[P] ont accepté sans formuler de réserves. Elle en déduit qu'ils ne sont pas recevables à engager une action sur le fondement de la garantie décennale pour des travaux réalisés antérieurement à la vente.

Elle fait ensuite valoir que les consorts [K]-[P] sont dépourvus de qualité à agir à son encontre car ils ne sont plus propriétaires de l'appartement qu'ils ont revendu le 28 février 2020, et reproche au tribunal de n'avoir pas tiré les conséquences utiles de ce fait.

Subsidiairement, elle soutient qu'elle n'a pas réalisé des travaux de grande ampleur ou de création d'ouvrages soumis à la garantie décennale dans la mesure où elle n'a pas procédé à l'extension de la véranda qui existait déjà lorsqu'elle a acquis l'appartement en 2011, mais seulement à sa rénovation.

De plus, elle indique que l'expert n'a pas constaté l'existence de désordres de nature décennale, ni leur lien de causalité avec les travaux effectués par la société Projectbox.

Elle fait valoir ensuite que les désordres ne lui sont pas imputables puisque les travaux litigieux ont été commandés et payés par M. [A], qui atteste qu'il n'était pas question de créer une surface habitable et fait état de l'intervention d'un tiers depuis la vente de l'appartement, or les consorts [K]-[P] ne se sont plaints de l'existence d'infiltrations que 5 ans après ladite vente.

Très subsidiairement, elle fait valoir, dans l'hypothèse où sa responsabilité devrait être retenue, qu'il n'y aurait pas lieu à une condamnation in solidum avec la société Projectbox, en l'absence de faute commune ayant contribué à l'entier dommage, et que sa part de responsabilité ne saurait excéder 5% du montant des condamnations, dans la mesure où n'ayant ni commandé ni réalisé les travaux, elle n'est pas à l'origine des désordres allégués, qui proviennent d'un non-respect des règles de l'art par la société Projectbox, entreprise spécialisée.

Elle soutient que, contrairement à ce que prétendent les consorts [K]-[P], la jurisprudence de la Cour de cassation qui considère, en matière de garantie des vices cachés, que la responsabilité du vendeur-constructeur ne peut être recherchée que dans le cas où il a lui-même conçu ou réalisé les travaux est transposable au titre de la garantie décennale, de sorte qu'en l'espèce, c'est la société Projectbox qui doit seule répondre des conséquences liées à son intervention défectueuse, en application de l'article 1792 du code civil. Elle souligne qu'en tout état de cause l'action en garantie décennale se transmet du vendeur à l'acquéreur.

Elle conteste enfin le quantum du préjudice matériel retenu par le premier juge qui ne correspond pas au chiffrage de l'expert judiciaire, et qui n'est pas justifié, pas plus que la réalité du préjudice moral allégué.

A titre infiniment subsidiaire, elle forme un appel en garantie contre la société Projectbox, l'expert judiciaire ayant mis en exergue les multiples non-conformités et non -respect des règles de l'art commis par cette dernière. Elle considère que cette demande est recevable, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle mais qu'elle est l'accessoire de sa demande principale ou à tout le moins constitue une demande reconventionnelle au sens de l'article 567 du code procédure civile, une telle demande étant admise pour la première fois en appel selon la Cour de cassation.

*

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 24 janvier 2023, la société Projectbox demande à la cour de la déclarer recevable et bien fondée en son appel, d'infirmer le jugement du 17 mars 2021 rectifié le 23 juin 2021 en ce qu'il l'a condamnée solidairement avec Mme [O] à payer aux consorts [K]-[P] la somme de 14 973,20 euros, de confirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau, au visa des articles 1792 et suivants, 1134 et suivants et 1147 suivants devenus 1231-1 et suivants du code civil devenus 1231-1 et suivants du code civil ainsi que de l'article 594 du code de procédure civile, de :

- limiter le montant de la somme allouée aux consorts [K]-[P] au titre de leur préjudice matériel au chiffrage des travaux de réparation tel que validé par l'expert judiciaire, à savoir 12 780,46 euros,

Sur l'appel de Mme [O] :

- juger l'appel de Mme [O] irrecevable et mal fondé,

- le rejeter,

- juger les demandes suivantes de Mme [O] comme nouvelles et donc irrecevables :

' juge qu'aucune condamnation in solidum ne peut être prononcée à l'encontre de Mme [O] qui n'est aucunement à l'origine des désordres,

' juge que la responsabilité de Mme [O] ne pourrait être limitée qu'à hauteur de 5 % du montant des condamnations prononcées,

' dise et juge que la Société Projectbox a commis une faute en ne réalisant pas les travaux conformément aux règles de l'art,

' dise et juge en conséquence que Mme [O] est recevable et bien fondée à être relevée et garantie de l'intégralité des sommes mises à sa charge et ce, au visa de l'article 1382 du code civil,

' condamne la société Projectbox à garantir Madame [O] de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,

- débouter Mme [O] de l'ensemble de ses fins, prétentions et moyens.

Sur l'appel incident de Mme [K] et M. [P] :

- débouter les consorts [K]-[P] de leur appel incident,

- le rejeter,

- débouter tout autre concluant de ses prétentions, fins et moyens dirigés à son encontre,

- condamner Mme [O] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers frais et dépens de l'appel.

Au soutien de son appel, la société Projectbox indique ne pas contester la réalité des désordres, ni leur caractère décennal, ni la nécessité des travaux à effectuer pour y remédier, et forme appel uniquement sur le quantum de la condamnation reprochant aux premiers juges de n'avoir pas retenu le montant du devis de réfection arrêté par l'expert.

Elle soulève l'irrecevabilité de la demande en garantie formée par Mme [O] à son encontre, au motif qu'elle constitue une demande nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile, dès lors qu'elle n'avait formulé aucun appel en garantie en première instance, ni aucune autre prétention à son encontre, de sorte que cet appel en garantie ne peut non plus constituer l'accessoire, la conséquence ou le complément d'une prétention déjà formulée en première instance par Mme [O] conformément à l'article 566 du code de procédure civile. Elle souligne par ailleurs que cet appel en garantie repose au surplus sur un fondement juridique erroné.

Elle fait aussi valoir que, contrairement à ce que soutient l'appelante, cette prétention ne peut pas non plus s'analyser en une demande reconventionnelle puisqu'elle ne formule aucune demande à l'encontre de Mme [O].

Contrairement à ce que prétendent les consorts [K]-[P], elle soutient qu'elle a bien saisi la cour d'un appel portant tant sur le jugement rectifié du 17 mars 2021 que sur le jugement rectificatif du 23 juin 2021 lequel est expressément visé dans sa déclaration d'appel ainsi que dans ses conclusions justificatives d'appel. Partant, elle conclut qu'elle a bien saisi la cour d'une demande d'infirmation du chef ajouté par le premier juge dans son jugement du 23 juin 2021 qui porte sur sa condamnation solidaire.

*

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 octobre 2022, Mme [L] [K] et M. [Y] [P] demandent à la cour, de :

sur l'appel de la société Projectbox,

- dire la cour non saisie de l'appel de la société Projectbox contre le jugement dit rectificatif du 23 juin 2021,

- en conséquence, le confirmer,

- condamner la société Projectbox aux dépens de cet appel,

- dire la société Projectbox mal fondée en son appel du jugement du 17 mars 2021,

- l'en débouter, ainsi que de l'intégralité de ses fins, moyens, demandes et prétentions,

en conséquence,

- confirmer le jugement du 17 mars 2021,

Y ajoutant :

- condamner la société Projectbox aux entiers frais et dépens d'appel ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l''instance d'appel.

Sur l'appel de Mme [O], incident et sur provocation :

- dire Mme [O] mal fondée en son appel,

- l'en débouter, ainsi que de l'intégralité de ses fins, moyens et conclusions à leur égard,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés de leur demande de condamnation de Mme [O] à leur payer une somme de 3 000 euros de dommages et intérêts,

- condamner Mme [O] à leur payer la somme 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

-la condamner aux entiers frais et dépens de l'appel incident et provoqué ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 2 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- la débouter de toutes conclusions contraires.

Ils soutiennent tout d'abord que la société Projectbox n'a pas demandé expressément l'infirmation du jugement dit « rectificatif » rendu le 23 juin 2021 dans le dispositif de ses

conclusions justificatives d'appel, et n'a pas non plus saisi la cour d'une demande d'infirmation du chef ajouté par les premiers juges dans ce jugement portant sur la condamnation solidaire de la société Projectbox et de Mme [O] aux frais et dépens de la procédure de référé expertise, de sorte que la cour n'a pas été saisie d'un appel du second jugement.

Pareillement, ils soutiennent que la condamnation de Mme [O] aux frais et dépens de la procédure de référé expertise est aussi définitive car seul le jugement du 17 mars 2021 est visé dans sa déclaration d'appel du 23 juillet 2021. Ils ajoutent que Mme [O] n'a pas non plus régularisé une seconde déclaration d'appel dans le délai prévu à l'article 908 du code de procédure civile ouvert par son premier appel.

Au fond, ils fondent leur action sur les dispositions de l'article 1792-1 2° du code civil et soutiennent que Mme [O] qui a fait réaliser une pièce en extension de son appartement, est réputée constructeur, les travaux effectués par la société Projectbox ayant été achevés selon facture du 24 mai 2012.

Ils soutiennent que la clause selon laquelle l'acquéreur prend le bien en l'état ne peut exclure l'action sur le fondement de la garantie décennale qui est d'ordre public ; qu'il importe peu que les travaux aient été facturés au nom de l'ancien compagnon de Mme [O] dès lors que l'article 1792-1 du code civil ne fait aucune distinction entre les travaux réalisés personnellement et ceux effectués pour le compte du vendeur, et qu'au surplus M. [A] atteste que les travaux ont bien été réalisés pour le compte des deux, Mme [O] en étant au surplus devenue propriétaire par voie d'accession ; que Mme [O] ne peut, de bonne foi, affirmer avoir réalisé de simples travaux de rénovation de la véranda, alors que le devis et la facture de la société Projectbox révèlent la réalisation des travaux pouvant être assimilés à la construction d'un ouvrage ayant consisté en la création d'une pièce à vivre avec charpente, couverture, 'velux' et fenêtres, pose d'un parquet sur sous-couche accoustique, s'agissant en réalité de transformer une véranda existante en pièce habitable utilisée comme « jardin d'hiver ».

Ils soutiennent que l'existence des désordres est confirmée par les constats effectués contradictoirement par M. [D] dont résulte la preuve de la nature décennale des désordres, s'agissant d'infiltrations, et que Mme [O] ne peut soutenir que le vice aurait été apparent car la véranda était visible au moment de la vente, sauf à admettre qu'elle en avait connaissance ce qui la constituerait de mauvaise foi, alors que le vice n'était pas connu des acquéreurs.

Ils font valoir que nonobstant la revente de leur appartement en cours d'instance, ils demeurent recevables à agir en réparation de leur préjudice matériel puisqu'ils ont supporté notamment les frais de remise en état, outre le fait qu'ils se sont réservés le droit d'agir en réparation de leur préjudice en prévoyant une clause à cet effet dans l'acte de revente du bien litigieux.

Ils soutiennent que le coût des travaux de reprise s'est avéré supérieur à l'évaluation de l'expert comme en attestent les factures émises par l'entreprise Art, toitures et traditions du 29 novembre 2019, et avoir aussi subi un préjudice moral lié au fait qu'ils n'ont pu revendre leur appartement jusqu'à réparation des malfaçons et qu'ils ont été privés de la jouissance de la véranda au cours des travaux de réfection pendant plusieurs semaines, sans compter le paiement des charges de copropriétés et de taxes foncières ainsi que le poids du financement des travaux de réfections qu'ils supportent encore en l'absence de l'exécution du jugement déféré par Mme [O].

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

MOTIFS

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Selon l'article 901 du code de procédure civile, la déclaration d'appel est faite par acte, comportant à peine de nullité, notamment l'indication de la décision attaquée et les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, et selon l'article 562 du même code, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. (...)

Enfin, selon l'article 954, alinéa 3 du même code, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En l'espèce, force est de constater que la déclaration d'appel régularisée par Mme [O] le 23 juillet du 2021, ne vise que le jugement du 17 mars 2021, la référence faite au 'jugement du 17 mars 2021 rectifié par jugement du 23 juin 2021' dans la rubrique destinée à l'énoncé des chefs de jugement critiqués ne pouvant suffire à considérer que la cour serait saisie d'un appel contre le jugement rectificatif du 23 juin 2021.

Dès lors, la connaissance du jugement rectificatif du 23 juin 2021 n'a pas été dévolue à la cour par l'appel de Mme [O], celle-ci n'ayant pas non plus régularisé une seconde déclaration d'appel dans le délai de trois mois qui lui était imparti par l'article 908 du code de procédure civile pour conclure.

Si, à l'inverse, la déclaration d'appel régularisée par la société Projectbox, le 2 septembre 2021, vise tant le jugement du 17 mars 2021 que le jugement rectificatif du 23 juin 2021, dont la connaissance est par conséquent dévolue à la cour, en revanche, la société Projectbox ne formule pas, dans le dispositif de ses conclusion, de demande d'infirmation du chef du jugement du 23 juin 2021 qui l'a condamnée solidairement avec Mme [O] aux frais et dépens de la procédure de référé expertise R.CIV 18/00173 comme cela apparaissait pourtant dans sa déclaration d'appel, de sorte que la cour si elle est bien saisie d'un appel contre le jugement 'rectificatif' du 23 juin 2021, ne peut que le confirmer.

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir des consorts [K]-[P]

Si le droit d'agir sur le fondement de la garantie décennale se transmet avec le bien à l'acquéreur, le vendeur qui a agi en réparation de dommages survenus avant la vente conserve toutefois qualité à agir si une clause de l'acte de vente prévoit expressément qu'il s'est réservé le droit d'agir.

En l'espèce, les consorts [K]-[P] ont pris la précaution de se réserver le droit d'agir en insérant une clause dans l'acte de vente du 28 février 2020, aux termes de laquelle d'une part, ils ont informé le sous-acquéreur de l'existence d'une procédure judiciaire en

cours les opposant à la société qui a construit la véranda pour le compte du précédent propriétaire ainsi qu'audit propriétaire, en raison des défauts d'étanchéité et de la circonstance qu'ils ont fait effectuer les travaux correctifs, et d'autre part sont convenus avec l'acquéreur que toutes les conséquences à venir concernant cette procédure feraient la perte ou le profit des vendeurs.

Par ailleurs, il est admis que le maître de l'ouvrage ne peut conserver, après la cession de l'ouvrage, un intérêt à agir sur le fondement de la responsabilité décennale qu'à la condition que l'action présente pour lui un intérêt direct et certain.

En l'espèce, comme l'ont retenu les premiers juges, les consorts [K]-[P] justifient avoir fait effectuer les travaux de remise en état qui s'imposaient et en avoir supporté le coût, ainsi que cela résulte des factures de l'entreprise Art, toitures et traditions du 29 novembre 2019.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré l'actions des consorts [K]-[P] en réparation de ce préjudice recevable.

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des prétentions nouvelles formulées par Mme [O].

En application de l'article 564 du code de procédure civile, les parties ne peuvent soumettre de nouvelles prétentions à la cour d'appel, excepté dans les limites prévues aux articles 564 et 567 dudit code.

Selon l'article 565 du même code, la prétention n'est pas nouvelle si elle tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge. Il est admis que la faculté de soumettre aux juges d'appel des demandes tendant aux mêmes fins que celles portées devant les premiers juges implique qu'une demande ait été formée devant ces derniers.

Or, en l'espèce force est de constater que ce n'est qu'à hauteur d'appel que Mme [O] a formé une demande en garantie contre la société Projectbox.

C'est donc vainement que Mme [O] soutient que son appel en garantie subsidiaire dirigé contre cette société serait l'accessoire de sa demande principale, alors qu'elle n'avait soumis aux premiers juges aucune prétention dirigée à l'encontre de la société Projectbox.

Par ailleurs, si selon l'article 567 du code de procédure civile, les demandes reconventionnelles sont recevables en appel, toutefois n'est pas reconventionnelle la demande formée en appel par une partie contre un de ses co-défendeurs en première instance qui n'a élevé aucune prétention à son encontre.

Or, Mme [O] n'était pas demanderesse en première instance mais co-défenderesse de la société Projectbox, qui étant non-comparante n'avait formé aucune demande à son encontre, de sorte que les prétentions formulées par Mme [O] à hauteur d'appel à l'encontre de celle-ci, ne sauraient non plus s'analyser en des demandes reconventionnelles.

Dès lors, l'appel en garantie formulé à titre subsidiaire par Mme [O] contre la société Projectbox qui ne tend ni à opposer compensation, ni à faire écarter les prétentions adverses ou à faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait, constitue une demande nouvelle prohibée par l'article 564 précité et doit donc être déclaré irrecevable.

En revanche, sont recevables les prétentions de Mme [O] tendant d'une part à ce qu'aucune condamnation in solidum n'intervienne avec la société Projectbox dans l'hypothèse où la cour devrait retenir sa responsabilité et d'autre part à limiter sa part de responsabilité à hauteur de 5 % du montant des condamnations prononcées, s'agissant de prétentions tendant à faire écarter, à tout le moins partiellement, les demandes des consorts [K]-[P].

Sur les responsabilités

A titre liminaire, il convient de constater que la société Projectbox ne conteste ni la matérialité des désordres, ni leur caractère décennal, ni le principe de sa responsabilité, son appel ne portant que sur le quantum de la condamnation.

Aux termes de l'article 1792 du code civil tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage des désordres qui rendent l'ouvrage impropre à sa destination ou qui compromettent sa solidité.

En vertu de l'article 1792-1 2 ° du même code est réputée constructeur, toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire.

Par voie de conséquence, la personne même non professionnelle qui réalise des travaux de rénovation dans son immeuble avant de le revendre à un tiers, a la qualité de constructeur, et est tenue de la garantie décennale, à condition que ces travaux soient constitutifs d'un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil.

Selon une jurisprudence établie, les travaux de rénovation constituent des ouvrages au sens de cet article s'il ne s'agit pas de simples travaux d'entretien et s'ils revêtent une certaine importance.

Mme [O] conteste avoir réalisé des travaux de rénovation de grande ampleur ou de construction d'un ouvrage soumis à la garantie décennale en soutenant que seuls des travaux de simple rénovation de la véranda existante ont été réalisés par la société Projectbox. Force est toutefois de constater qu'il ressort des devis établis par cette société le 24 février 2012 et de la facture du 24 mai 2012 qu'il s'agissait de travaux de grande ampleur puisqu'ils consistaient en la démolition de la structure existante, la mise en place d'une nouvelle structure comportant une charpente en poutres lamellées collées, la réalisation d'une toiture en panneaux sandwiches, la mise en place d'une gouttière, la pose de trois 'velux' munis de volets roulants solaires dans la toiture, la pose de fenêtres double vitrage, ainsi que la réfection du sol avec mise en place d'un treillis soudé, pose d'une chape et d'un parquet flottant sur sous-couche acoustique.

En outre, il ressort des constatations de l'expert judiciaire ainsi que des photographies prises par ce dernier, et de l'attestation de M. [A] que la réalisation de ces travaux a abouti à la transformation de la véranda existante en une pièce à vivre qualifiée de 'jardin d'hiver'.

Dès lors, par leur nature et leur ampleur ces travaux peuvent être qualifiés de travaux de construction d'un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil.

La responsabilité de Mme [O], propriétaire de l'appartement dans lequel ont été réalisés ces travaux, qui, en tant que vendeur après achèvement, est réputée constructeur, est donc susceptible d'être recherchée sur le fondement de la garantie décennale, quand bien même les travaux auraient-ils étaient commandés et payés par son ex-compagnon, M. [A].

L'existence d'une réception des travaux, intervenue en l'occurrence au jour de l'achèvement des travaux, Mme [O], maître de l'ouvrage, occupant les lieux, n'est pas discutée.

Il n'est pas soutenu que les désordres d'infiltrations constatés par l'expert auraient étaient apparents lors de la réception des travaux.

Il n'est pas non-plus établi qu'ils l'aient été au moment de la vente, comme le soutient Mme [O], la seule existence de la véranda ne suffisant pas à considérer que les désordres l'affectant étaient nécessairement apparents à cette date, ni même que les consorts [K]-[P] aient pu, au moment de leur acquisition, en avoir connaissance ainsi que de leurs causes, de leur ampleur et de leurs conséquences.

En l'espèce, l'expert a confirmé l'existence de traces d'infiltration d'eau invoquées par les consorts [K]-[P] dans leur assignation en référé, au niveau des traverses basses des chevêtres en bois relatifs aux fenêtres de toit, sur le plafond à l'extrémité de la véranda et au droit du mur intérieur relatif à la façade Nord-Ouest. De plus, l'expert a indiqué qu'au vu de ses constatations et des multiples lacunes observées sur les lieux, les infiltrations en provenance de l'enveloppe constituant la pièce véranda relevaient de faits certains, ce que les tests qu'il a effectués ensuite devaient confirmer, puisqu'ils ont mis en évidence l'existence de fuites au niveau des divers raccordements exécutés au niveau d'une des fenêtres de toit.

Après examen de l'ensemble des raccordements, l'expert a conclu que l'origine des infiltrations résidait dans des défauts de conformité aux règles de l'art et à des lacunes en matières d'étanchéité des divers raccordements entre les fenêtres de toit et les panneaux EDR, ainsi que des raccordements des panneaux EDR au droit du faîtage et en façade, la cornière métallique fixée sur l'entrait en bois de la façade dont la fonction consiste à maintenir les panneaux EDR ne pouvant empêcher les infiltrations d'eau pluviale à l'intérieur de la véranda.

Enfin, l'expert judiciaire a aussi constaté un défaut de conformité aux exigences techniques dans la pose des panneaux de couverture sur les chevrons relatifs à la charpente en bois, estimant que la pose actuelle ne pouvait résorber les différentes sollicitations mécaniques dues aux diverses dilations, avec un risque de fluage du bois et d'infiltrations.

En l'état de ces constatations, et comme l'a retenu le premier juge, les désordres consistant en des infiltrations d'eau pluviale rendent la véranda impropre à sa destination de pièce habitable, et sont donc de gravité décennale.

C'est vainement que Mme [O] conteste l'imputabilité des désordres, aux motifs qu'elle n'a pas réalisé les travaux qui ont été commandés et payés par son ex-compagnon, alors qu'ils ont été effectués dans l'appartement dont elle était propriétaire et qu'ils occupaient

tous deux, cette circonstance ne revêtant pas la nature d'une cause étrangère seule susceptible de l'exonérer de la responsabilité pesant sur elle en sa qualité de vendeur après achèvement. Elle ne démontre pas non plus l'intervention qu'elle allègue d'un tiers après la vente.

Par voie de conséquence, la société Projectbox ne contestant pas sa responsabilité, le jugement doit être approuvé en tant qu'il a condamné Mme [O] et la société Projectbox à indemniser les consorts [K]-[P] de leur préjudice sur le fondement de la garantie décennale.

Le jugement sera toutefois infirmé en tant qu'il a prononcé une condamnation solidaire, la condamnation devant être prononcée in solidum, en l'absence de toute solidarité expresse, les consorts [K]-[P] étant fondés à demander la réparation intégrale de leur préjudice à chacun des constructeurs responsables du dommage.

Sur les dommages

- Sur la réparation du préjudice matériel

S'agissant du préjudice matériel, l'expert a indiqué que la toiture de la véranda devait être intégralement déposée et remise en état dans les règles de l'art, et a chiffré le coût des travaux de remise en état à hauteur de 11 618, 60 euros HT (12 780,46 euros TTC) suivant devis estimatif établi par l'entreprise Art, toitures et traditions le 13 novembre 2018, tout en émettant des réserves au regard de la récupération des fenêtres de toit sans référencer les kits spécifiques et nécessaires pour le raccord aux éléments de toiture.

Les consorts [K]-[P] produisent les factures d'exécution des travaux en date du 29 novembre 2019 pour un montant total de 14 973,20 euros.

Il convient de constater que les travaux ont été réalisés plus d'un an après l'émission du devis sur lequel s'est fondé l'expert, et qui était stipulé valable pour trois mois hors augmentation du prix du métal.

La comparaison du devis initial et des factures permet de constater des prestations sensiblement similaires. Si la fourniture et la pose d'une toiture en bac acier a été remplacée par la fourniture et la pose d'une couverture zinc plus onéreuse, en revanche certains postes, tels que le lot bardage, la remise en place des 'velux' et le traitement de ces ouvertures se sont révélés d'un coût moindre, alors que le coût unitaire des éléments de zinguerie a par ailleurs augmenté.

En l'état de ces constatations et en l'absence de contestations précises relatives à ces factures par les appelantes, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a alloué aux consorts [K]-[P] la somme de 14 973,20 euros correspondant au coût qu'ils ont réellement exposé pour les travaux de remise en état.

- Sur la réparation du préjudice moral

Il n'est nullement démontré que les consorts [K]-[P] avaient un projet de revente de leur appartement qui aurait été retardé du fait de l'exécution des travaux de remise en état, dont la durée n'est pas non plus précisée, de sorte qu'en l'absence de preuve d'un lien de

causalité  entre le préjudice moral invoqué et le retard prétendument pris dans la vente du bien litigieux, et de démonstration d'un préjudice de jouissance, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation des consorts [K]-[P] de ce chef.

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré étant confirmé, en ses dispositions principales, il le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance.

En considération de la solution du litige, les dépens d'appel seront supportés in solidum par la société Projectbox et par Mme [O] qui seront déboutées de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera par contre alloué, sur ce fondement, une somme de 2 500 euros au profit des consorts [K]-[P], en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement 'rectificatif' du 23 juin 2021 ;

CONFIRME, dans les limites de l'appel, le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 17 mars 2021 tel que rectifié par jugement du 23 juin 2021, sauf en ce qu'il a condamné solidairement Mme [I] [O] et la société Projectbox à payer aux consorts [K]-[P] la somme de 14 973,20 euros avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

INFIRME le jugement entrepris de ce seul chef ;

Statuant à nouveau dans cette limite et ajoutant au jugement,

DÉCLARE recevables les prétentions de Mme [O] tendant à voir juger qu'aucune condamnation in solidum ne peut être prononcée à son encontre et que sa responsabilité ne pourra être limitée qu'à hauteur de 5 % du montant des condamnations prononcées ;

CONDAMNE in solidum Mme [I] [O] et la SAS Projectbox à payer à Mme [L] [K] et à M. [Y] [P] la somme de 14 973,20 euros TTC (quatorze mille neuf cent soixante-treize euros et vingt centimes), outre intérêts au taux légal à compter du jugement ;

DÉCLARE Mme [O] irrecevable en son appel en garantie dirigé contre la société Projectbox ;

CONDAMNE in solidum Mme [I] [O] et la SAS Projectbox à payer à Mme [L] [K] et à M. [Y] [P], ensemble, la somme de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel ;

DÉBOUTE Mme [O] et la société Projectbox de leurs demandes sur ce fondement ;

CONDAMNE in solidum Mme [I] [O] et la SAS Projectbox aux entiers dépens de l'appel.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/03465
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;21.03465 ?
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