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07/07/2023 | FRANCE | N°21/02882

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 07 juillet 2023, 21/02882


MINUTE N° 361/2023

























Copie exécutoire à



- la SELARL LEXAVOUE COLMAR



- Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA



- Me Joëlle LITOU- WOLFF



Le 7 juillet 2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 7 JUILLET 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/02882 -


N° Portalis DBVW-V-B7F-HTQN



Décision déférée à la cour : 17 Mai 2021 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG





APPELANT :



Monsieur [P] [Z]

demeurant [Adresse 2] à [Localité 4]



représenté par Me Guillaume HARTER de la SELARL LEXAVOUE COLM...

MINUTE N° 361/2023

Copie exécutoire à

- la SELARL LEXAVOUE COLMAR

- Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA

- Me Joëlle LITOU- WOLFF

Le 7 juillet 2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 7 JUILLET 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/02882 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HTQN

Décision déférée à la cour : 17 Mai 2021 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANT :

Monsieur [P] [Z]

demeurant [Adresse 2] à [Localité 4]

représenté par Me Guillaume HARTER de la SELARL LEXAVOUE COLMAR, avocat à la cour.

INTIMÉE :

La S.A. ALLIANZ IARD

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1] à

[Localité 6]

représentée par Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA, avocat à la cour.

plaidant : Me Lucie KLEIN, avocat au barreau de Strasbourg

INTIMÉE et APPELANTE SUR APPEL INCIDENT :

La S.A.R.L. CARROSSERIE DE L'ANNEAU DU RHIN

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 3] à [Localité 5]

représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la cour

plaidant : Me ZAIGER, avocat au barreau de Strasbourg

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre, et Madame Nathalie HERY, conseiller, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, conseiller

Madame Nathalie HERY, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique DONATH, faisant fonction

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente, et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

Suite à un accident survenu le 10 mars 2014, le véhicule Aston Martin appartenant à M. [P] [Z], assuré auprès de la société Allianz, a été confié à la SARL Carrosserie Anneau du Rhin.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 décembre 2014, la société Carrosserie Anneau du Rhin a informé M. [Z] que le véhicule étant stationné dans ses locaux depuis le 13 mars 2014, elle mettait en compte des frais de gardiennage à compter du 1er décembre 2014 à raison de 20 euros HT par jour, et lui a demandé de procéder à l'enlèvement du véhicule.

M. [Z] et la société Allianz étant en désaccord sur l'indemnisation du sinistre, M. [Z] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg qui a ordonné une expertise judiciaire. Le rapport a été déposé le 24 novembre 2015.

Ayant vainement mis en demeure M. [Z] de reprendre possession dudit véhicule et de régler les frais de gardiennage, la société Carrosserie Anneau du Rhin l'a fait citer devant le tribunal de grande instance de Strasbourg par exploit du 26 janvier 2018. M. [Z] a appelé en cause la société Allianz, par exploit du 11 avril 2019. Les deux procédures ont été jointes.

Par jugement en date du 17 mai 2021, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire a :

- condamné M. [Z] à payer à la société Carrosserie Anneau du Rhin les sommes de :

- 27 024 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 2018, pour la période allant du 1er décembre 2014 au 31 décembre 2017,

- 24 euros par jour à compter du 1er janvier 2018 et jusqu'à enlèvement du véhicule,

- ordonné la capitalisation des intérêts échus des capitaux qui produiront intérêts au même taux dès lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière,

- condamné M. [Z] à enlever à ses frais le véhicule, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à compter du délai d'un mois courant à compter de la signification du jugement et jusqu'à enlèvement du véhicule,

- dit n'y avoir lieu à se réserver le contentieux de l'astreinte,

- débouté la société Carrosserie Anneau du Rhin de ses demandes dirigées contre la société Allianz,

- débouté M. [Z] de son appel en garantie dirigée contre la société Allianz,

- condamné M. [Z] aux dépens et au paiement à la société Carrosserie Anneau du Rhin d'une somme de 2 000 euros et à la société Allianz d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour rejeter les prétentions de M. [Z] qui soutenait ne plus être propriétaire du véhicule qu'il avait cédé à la société Allianz, ce qu'avait constaté le tribunal dans un jugement du 22 janvier 2018 dans le litige l'ayant opposé à son assureur, le tribunal a relevé que ce jugement avait rejeté sa demande de prise en charge des frais de gardiennage, non pas au motif que la société Allianz était propriétaire du véhicule, mais en raison de l'absence de toute justification du paiement desdits frais.

Le tribunal ajoutait qu'en tout état de cause, M. [Z] restait propriétaire du véhicule et devait assumer le paiement des frais de gardiennage jusqu'à la date de cession opérant transfert de propriété, or la preuve d'une telle cession n'était pas rapportée, bien que le véhicule ait été déclaré à l'état d'épave, au contraire l'assureur avait indiqué à l'expert qu'aucun document de cession n'avait été signé et qu'elle s'opposait à toute cession du véhicule.

Le premier juge a également écarté le moyen tiré de l'application de l'article L.327-1 du code de la route, ce texte ne prévoyant pas un transfert de propriété automatique du véhicule quand bien même l'assureur aurait-t-il payé l'indemnité correspondant à la valeur vénale du véhicule, une telle cession supposant en vertu de ce texte, un accord de l'assuré et l'accomplissement de formalités qui n'ont pas été effectuées.

Le tribunal a donc considéré que M. [Z] était resté propriétaire du véhicule et qu'il était lié à la société Carrosserie Anneau du Rhin par un contrat de dépôt, lequel était présumé fait à titre onéreux. Si aucun élément ne permettait d'établir que le véhicule avait été confié au garage pour réparation, ou pour la vente, la prestation fournie par le garage l'était à titre principal et non accessoire, de sorte qu'il appartenait à M. [Z] de procéder à l'enlèvement du véhicule lorsqu'il a été mis en demeure de le faire, sous peine de se voir imputer des frais de gardiennage. M. [Z] ne s'étant pas exécuté était donc redevable des frais de gardiennage.

Pour rejeter l'appel en garantie de M. [Z] contre la société Allianz, le tribunal a considéré que la preuve d'une faute de cette dernière n'était pas rapportée, qu'il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir formulé de proposition de cession et d'indemnisation en perte totale, alors qu'elle contestait les conditions de sa garantie, et que plusieurs expertises amiables et judiciaires avaient eu lieu, et qu'il ne pouvait pas non plus lui être reproché la durée de l'immobilisation puisque M. [Z] n'avait donné aucune suite aux mises en demeure d'enlever le véhicule.

M. [Z] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 4 juin 2022, en toutes ses dispositions le concernant.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 6 septembre 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 23 décembre 2021, M. [Z] demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter la société Carrosserie Anneau du Rhin de l'intégralité de ses prétentions, subsidiairement, de condamner la société Allianz à le garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, de débouter la société Allianz de l'intégralité de ses prétentions et de la condamner solidairement avec la société Carrosserie Anneau du Rhin au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Il soutient qu'il n'est pas le propriétaire de l'épave en application de l'article L.327-1 du code de la route, la société Allianz ayant manqué à son obligation de proposer la cession contre indemnisation de la valeur de l'épave. Il estime que le jugement du 22 janvier 2018 a considéré qu'il en résultait transfert de propriété au profit de la société Allianz, laquelle était redevable des frais de gardiennage a autorité de chose jugée, de sorte que la société Carrosserie Anneau du Rhin doit être déboutée de ses demandes mal dirigées.

Il ajoute que la société Carrosserie Anneau du Rhin ne fonde sa réclamation sur aucun document contractuel. Il ne conteste pas l'existence d'un contrat de dépôt mais affirme que selon une jurisprudence constante, le contrat de dépôt qui n'est pas en lien avec un contrat d'entreprise, ne peut donner lieu à facturation de frais de gardiennage par le garagiste. Il conteste tout contrat d'entreprise dont la société Carrosserie Anneau du Rhin ne rapporte pas la preuve et soutient n'avoir jamais consenti à un dépôt rémunéré.

Subsidiairement, il demande la garantie de la société Allianz qui a engagé sa responsabilité contractuelle en manquant à l'obligation qui lui est imposée par l'article L.327-1 du code de la route de proposer à l'assuré, dans les 15 jours suivant le classement du véhicule en épave, la cession du véhicule et son indemnisation en perte totale, soulignant qu'elle avait été informée de la réclamation du garage.

*

Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 9 juin 2022, la société Carrosserie Anneau du Rhin conclut au rejet de l'appel principal et demande la confirmation du jugement sous réserve de l'évolution du litige, et en conséquence de condamner M. [Z] à lui payer une indemnité journalière de 24 euros du 1er janvier 2018 au 30 août 2021 date à laquelle il a repris possession du véhicule, soit la somme de 32 088 euros avec intérêts au taux légal.

Elle sollicite également la condamnation de M. [Z] au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens d'appel.

Elle forme un appel incident subsidiaire pour demander la condamnation de la société Allianz au paiement des mêmes montants, la capitalisation des intérêts échus et une indemnité de procédure de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, concluant au rejet des prétentions de la société Allianz.

Elle prétend que M. [Z] lui a confié le véhicule pour réparations après expertise laquelle a eu lieu le 24 juin 2014. N'ayant pas obtenu la confirmation des travaux de réparation, elle a informé M. [Z] de ce qu'elle facturerait des frais de gardiennage, à hauteur de 24 euros TTC par jour, à défaut de reprise du véhicule.

Elle invoque les usages de la profession et le fait que M. [Z] avait été dûment averti de l'existence de frais de gardiennage par de multiples courriers. Elle soutient que M. [Z] étant le propriétaire du véhicule au moment de son dépôt, elle était fondée à diriger son action contre lui, de sorte que le principe de l'obligation à la dette est acquis. Sur la contribution elle indique avoir été l'otage du conflit opposant M. [Z] à son assureur.

Elle fait siens les motifs du jugement. Elle ajoute que M. [Z] ayant demandé dans la procédure l'ayant opposé à la société Allianz le remboursement des frais de gardiennage, il s'agit d'une reconnaissance implicite de sa qualité d'obligé. En outre le dépôt était au départ accessoire aux réparations, ainsi que cela résulte du rapport d'expertise [E], le contentieux entre M. [Z] et son assureur portant justement sur le caractère réparable ou non du véhicule.

Si l'appel de M. [Z] devait être accueilli, elle forme un appel en garantie subsidiaire, sur le fondement de l'article 1240 du code civil reprochant à la société Allianz d'avoir laissé abusivement le véhicule entreposé dans ses locaux, l'assureur n'ayant pas sollicité de contre-expertise judiciaire

*

Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 20 janvier 2022, la société Allianz conclut à l'irrecevabilité, en tous cas au rejet de l'appel de M. [Z], ainsi qu'à l'irrecevabilité en tous cas au rejet de l'appel incident subsidiaire de la société Carrosserie Anneau du Rhin, à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté la société Carrosserie Anneau du Rhin et M. [Z] de leurs demandes dirigées contre elle, et subsidiairement, à la condamnation de ce dernier à la garantir de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées contre elle. En tous cas, elle demande la condamnation de M. [Z] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle indique que le litige avec son assuré trouve sa source dans le fait que le véhicule avait subi des modifications. Elle soutient que c'est à bon droit que le tribunal a écarté les demandes de M. [Z], l'assureur qui n'a commis aucune faute, n'ayant pas à l'indemniser de sa propre turpitude.

Elle reconnaît s'être opposée à toute cession ou destruction du véhicule, dans la mesure où des investigations consistant en l'envoi de pièces au fabricant avaient été envisagées, mais en aucun cas à son déplacement, ayant au contraire expressément indiqué qu'il appartenait à l'assuré d'en reprendre possession. Or M. [Z] n'a pas déféré aux mises en demeure du garage alors qu'il était informé de la facturation de frais. Elle indique n'être ni propriétaire ni dépositaire du véhicule et que M. [Z] s'est volontairement abstenu de toute démarche pour limiter lesdits frais, elle-même n'ayant été informée que le 9 janvier 2019 de l'action engagée par la société Carrosserie Anneau du Rhin contre M. [Z], le 26 janvier 2018, soit quatre jours après le premier jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg.

Elle estime que du fait de sa négligence fautive, M. [Z] est seul responsable de l'existence des frais de gardiennage, de sorte que la société Allianz ne pourra qu'être mise hors de cause, à défaut M. [Z] devra la garantir.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

MOTIFS

La société Allianz conclut à l'irrecevabilité de l'appel principal et de l'appel incident mais sans soulever aucun moyen précis. En l'absence de cause d'irrecevabilité susceptible d'être soulevée d'office, il y a lieu de déclarer les appels recevables.

Sur la demande de la société Carrosserie Anneau du Rhin dirigée contre M. [Z]

Il est constant que M. [Z] était le propriétaire du véhicule accidenté au jour de son dépôt dans les locaux de la société Carrosserie Anneau du Rhin.

Pour contester être redevable des frais de gardiennage, M. [Z] prétend en premier lieu qu'il n'était plus le propriétaire de l'épave, et se prévaut à cet égard du non-respect par la société Allianz des dispositions de l'article L.327-1 du code de la route, dans sa rédaction applicable au litige, qui énonce : ' Les entreprises d'assurances tenues à un titre quelconque à indemniser les dommages à un véhicule dont un rapport d'expertise fait apparaître que le montant des réparations est supérieur à la valeur de la chose assurée au moment du sinistre doivent dans les quinze jours suivant la remise du rapport d'expertise proposer une indemnisation en perte totale avec cession du véhicule à l'assureur. Le propriétaire du véhicule dispose de trente jours pour donner sa réponse.

Comme l'a exactement retenu le premier juge, si ce texte impose à l'assureur, lorsque le véhicule n'est pas économiquement réparable, de proposer une indemnisation en perte totale avec cession du véhicule à son profit, il ne prévoit toutefois pas un transfert automatique de propriété du véhicule accidenté à l'assureur, une telle cession supposant en effet l'accord du propriétaire et l'accomplissement de différentes formalités dont il n'est pas justifié.

L'appelant ne peut pas davantage se prévaloir du jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg en date du 22 janvier 2018, dans ses rapports avec la société Allianz, qui l'a débouté de sa demande en remboursement des frais de gardiennage, ce jugement étant dépourvu d'autorité de chose jugée à l'égard de la société Carrosserie Anneau du Rhin qui n'était pas partie à la procédure. En outre, ce jugement n'a pas rejeté la demande au motif que M. [Z] n'était plus propriétaire du véhicule mais à raison de l'absence de toute justification du paiement des frais de gardiennage, le motif surabondant reprenant une affirmation de l'expert selon laquelle le véhicule étant à l'état d'épave restait la propriété de l'assureur, étant sans emport dès lors que la preuve d'un tel transfert de propriété, qui est contesté, n'est pas rapportée.

Le moyen doit donc être rejeté.

M. [Z] conteste en second lieu le caractère onéreux du dépôt. Si conformément à l'article 1917 du code civil le dépôt proprement dit est essentiellement gratuit, il est toutefois admis que le contrat de dépôt d'un véhicule auprès d'un garagiste, accessoire au contrat d'entreprise, est présumé fait à titre onéreux.

En l'espèce, il n'est pas justifié de la conclusion d'un contrat d'entreprise entre la société Carrosserie Anneau du Rhin et M. [Z], que ce dernier conteste, la société ne produisant aucun devis ou ordre de réparation signé de l'appelant, ni aucun document quelconque susceptible d'étayer ses allégations, la seule désignation de la société Carrosserie Anneau du Rhin en qualité de 'réparateur' dans le rapport d'expertise du cabinet [E] mandaté par l'assureur étant insuffisante à cet égard.

Il y a donc lieu de considérer que le dépôt a initialement été conclu à titre gratuit, le véhicule ayant manifestement étant déposé dans les locaux de l'intimée dans l'attente de la réalisation des opérations d'expertise.

Toutefois, comme l'a justement relevé le premier juge, l'intimé a été dûment informé par la société Carrosserie Anneau du Rhin de ce qu'elle entendait mettre fin à la gratuité du dépôt à compter du 1er décembre 2014, et facturerait à compter de cette date des frais de gardiennage à hauteur de 20 € HT par jour, et a, corrélativement, été mis en demeure de reprendre possession de son véhicule par plusieurs courriers recommandés reçus les 23 décembre 2014, 18 mars 2015, 18 novembre 2016, 31 mars et 21 octobre 2017. M. [Z] n'ayant pas déféré à ces injonctions, ni effectué la moindre démarche afin de déplacer le véhicule, a ainsi nécessairement accepté le caractère onéreux du dépôt à compter du 1er décembre 2014.

Le jugement doit donc être confirmé en tant qu'il a accueilli la demande de la société Carrosserie Anneau du Rhin en paiement d'une somme de 27 024 euros au titre des frais de gardiennage pour la période du 1er décembre 2014 au 31 décembre 2017, et en paiement d'une indemnité journalière de 24 euros à compter du 1er janvier 2018. M. [Z] ayant toutefois repris possession du véhicule le 30 août 2021, le jugement sera complété sur ce dernier chef et la créance de la société Carrosserie Anneau du Rhin au titre des frais de gardiennage postérieurs au 1er janvier 2018 sera liquidée à la somme de 32 088 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur la demande de M. [Z] dirigée contre la société Allianz

M. [Z] reproche à la société Allianz d'avoir omis de lui proposer, dès le mois de juin 2014, suite au rapport de son expert, le cabinet [E], du 15 mai 2014, une indemnisation en perte totale avec cession du véhicule à son profit, conformément à l'article L.327-1 du code de la route, ce qui l'a contraint à exposer des frais de gardiennage.

Comme l'a exactement retenu le tribunal, cette abstention ne revêt pas un caractère fautif dès lors que la société Allianz déniait sa garantie et se prévalait de la nullité du contrat, reprochant à son assuré d'avoir omis de lui déclarer les modifications importantes apportées au véhicule qui, selon le cabinet [E], étaient de nature à alléger le véhicule et à en modifier les capacités techniques initiales et donc les caractéristiques.

Ainsi que l'a relevé le tribunal, cette appréciation ayant été contestée par M. [Z] qui s'est prévalu d'un rapport d'expertise selon lequel ces modifications n'étaient pas destinées à diminuer le poids du véhicule mais à apporter des améliorations esthétiques et de confort, une expertise judiciaire a été ordonnée le 24 février 2015 dont le rapport a été déposé le 24 novembre 2015, à la suite duquel M. [Z] a assigné son assureur devant le tribunal de grande instance de Strasbourg qui s'est prononcé le 22 janvier 2018 pour rejeter la demande de nullité du contrat, de sorte que jusqu'à cette date la garantie de la société Allianz était contestée.

En outre, si la société Allianz reconnaît s'être opposée à une cession ou à une destruction du véhicule, en cours d'expertise, au cas où une nouvelle expertise s'avérerait nécessaire, elle ne s'est pas pour autant opposée à ce que M. [Z], qui en demeurait propriétaire, le déplace dans un autre lieu que les locaux de la société Carrosserie Anneau du Rhin.

Par voie de conséquence, aucune faute imputable à la société Allianz n'étant caractérisée, le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de garantie formée par l'appelant contre son assureur.

Sur les dépens et les frais exclus des dépens

Le jugement étant confirmé en ses dispositions principales, il le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens.

Les dépens d'appel seront supportés par l'appelant qui sera débouté de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera en revanche alloué sur ce fondement à la société Carrosserie Anneau du Rhin, d'une part et à la société Allianz, d'autre part une somme de 1 500 euros, chacune.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

DECLARE l'appel principal et l'appel incident recevables ;

CONFIRME, dans les limites de l'appel, le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 17 mai 2021 ;

Y ajoutant,

FIXE à la somme de 32 088 euros, (trente deux mille quatre-vingt-huit euros) le montant dû par M. [P] [Z] à la société Carrosserie Anneau du Rhin au titre des frais de gardiennage pour la période du 1er janvier 2018 au 30 août 2021, auxquels il a été condamné par ledit jugement, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

DÉBOUTE M. [P] [Z] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [P] [Z] aux entiers dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la SARL Carrosserie Anneau du Rhin, d'une part, et à la SA Allianz, d'autre part, une somme de 1 500 € (mille cinq cents euros), chacune, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/02882
Date de la décision : 07/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-07;21.02882 ?
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