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09/06/2023 | FRANCE | N°21/02799

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 09 juin 2023, 21/02799


MINUTE N° 301/2023





























Copie exécutoire à





- la SELARL LEXAVOUE COLMAR





- Me CHEVALLIER-GASCHY





Le 9 juin 2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 09 JUIN 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/02799 -

N° Por

talis DBVW-V-B7F-HTLO



Décision déférée à la cour : 30 Avril 2021 par le tribunal judiciaire de Mulhouse





APPELANTE :



S.C.I. LE [Adresse 6] prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 5] à

[Localité 3]



représentée par Me Guillaume...

MINUTE N° 301/2023

Copie exécutoire à

- la SELARL LEXAVOUE COLMAR

- Me CHEVALLIER-GASCHY

Le 9 juin 2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 09 JUIN 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/02799 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HTLO

Décision déférée à la cour : 30 Avril 2021 par le tribunal judiciaire de Mulhouse

APPELANTE :

S.C.I. LE [Adresse 6] prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 5] à

[Localité 3]

représentée par Me Guillaume HARTER de la SELARL LEXAVOUE COLMAR, Avocat à la cour

INTIMÉE :

S.C.I. [W] prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1] à

[Localité 4]

représentée par Me CHEVALLIER-GASCHY, Avocat à la cour

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Février 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Dominique DONATH, faisant fonction

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente, et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Selon acte du 2 avril 2019 valant compromis, la SCI [W] a vendu à M. [I] [E] un immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 4] cadastré dans cette commune Section KO n°[Cadastre 2] pour un prix de 445 000 euros.

Selon acte authentique du 3 juillet 2019, cet immeuble a été vendu par la SCI [W] à la SCI Le [Adresse 6] constituée par M. [E].

Se plaignant d'avoir découvert des infiltrations d'eau dans les combles de l'immeuble, la SCI Le [Adresse 6], par acte introductif d'instance du 24 décembre 2019, signifié le 31 janvier 2020, a fait assigner la SCI [W], devant le tribunal de grande instance de Mulhouse, sur le fondement de l'article 1641 du code civil, aux fins de condamnation à lui payer les sommes de 19 800 euros TTC, correspondant à la diminution du prix de vente égale au coût de réfection de la toiture et celle de 20 000 euros à titre d'indemnisation pour préjudice financier.

Par jugement du 30 avril 2021, le tribunal judiciaire remplaçant le tribunal de grande instance a notamment :

rejeté la demande correspondant à une réduction du prix de vente ;

rejeté la demande d'indemnisation au titre de la responsabilité contractuelle ;

rejeté la demande subsidiaire d'indemnisation au titre de la responsabilité délictuelle;

condamné la SCI [Adresse 6] à payer à la SCI [W] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile augmentée des intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2021, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

rejeté la demande de la SCI [Adresse 6] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur l'action estimatoire, après avoir rappelé les dispositions des articles 1641, 1642 et 1643 du code civil, le tribunal a mentionné que l'acte authentique de vente comportait une clause exclusive de garantie des vices cachés en page 10 et que la SCI Le [Adresse 6] n'établissait pas que la SCI [W] avait la qualité de vendeur professionnel.

Il a, toutefois, considéré que, d'une part, il résultait des échanges de courriels entre M. [V] [W] et son courtier d'assurance Assurimo, produits par la SCI Le [Adresse 6], que la SCI [W] avait déclaré, à son assureur la société Swiss Life, un sinistre dégât des eaux par infiltration de toiture du 25 août 2018 pour l'immeuble en cause, la SCI [W] ne justifiant d'aucune intervention pour y remédier et que, d'autre part, cette dernière n'en avait pas avisé la SCI Le [Adresse 6] préalablement à la signature de l'acte authentique.

Il en a déduit qu'il y avait lieu d'écarter le jeu de la clause exclusive de garantie des vices cachés mais qu'il était nécessaire de vérifier si la SCI Le [Adresse 6] n'avait pas pour autant connaissance du vice le rendant, dès lors, apparent.

Il a considéré qu'il était constant que les éléments de la toiture étaient visibles en sous-toit, les combles n'étant ni aménagés et ni isolés, une clause du compromis autorisant l'accès au 4ème étage des combles de l'immeuble à l'acquéreur, ainsi qu'à l'agence Julien Immo, à

compter de la signature du compromis dans l'optique de la création d'appartements dans les combles en vue d'un projet d'investissement locatif ayant nécessité une évaluation du coût des travaux par un professionnel de la construction, postérieurement au compromis et antérieurement à l'acte authentique de vente.

A défaut de force probante de l'attestation de témoin de M. [K] [G], gérant de la SARL Haute Alsace Renovation, aux termes de laquelle l'infiltration sur la toiture avait été détectée le 15 juillet 2019 lors d'un jour de forte pluie, le tribunal a décidé de ne pas en tenir compte, l'analyse des informations météorologiques pour cette date ne permettant pas, au demeurant, de confirmer la survenue de fortes pluies mais révélant que dans les jours précédant la signature du compromis de vente, il y avait eu de fortes précipitations de nature à laisser des traces en cas d'infiltrations ne pouvant échapper à l'attention du gérant de la SCI Le [Adresse 6] et à celui de la SARL Haute Alsace Rénovation laquelle, dans son devis accepté, a chiffré des travaux de réparations de tuiles et charpentes.

La SCI Le [Adresse 6] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 27 mai 2021.

L'instruction a été clôturée le 4 octobre 2022.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 11 mai 2022, la SCI Le [Adresse 6] demande à la cour de :

infirmer le jugement rendu par la première chambre civile du tribunal judiciaire de Mulhouse le 30 avril 2021 en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

en conséquence :

condamner la SCI [W] à lui verser la somme de 39 800 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;

condamner la SCI [W] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la SCI [W] à aux entiers frais et dépens de la procédure d'appel et de la procédure de première instance.

La SCI Le [Adresse 6] se prévaut de l'existence, dans l'acte authentique de vente du 3 juillet 2019, d'une clause exclusive de garantie des vices cachés et de ce qu'une SCI doit être considérée comme un professionnel de l'immobilier.

Elle soutient que cette clause ne peut jouer du fait de la mauvaise foi de la SCI [W] qui a déclaré un sinistre intervenu le 25 août 2018 sans toutefois l'en informer ou intervenir ou faire intervenir une entreprise compétente afin de remédier à l'infiltration, objet de la déclaration de sinistre.

Elle fait état de l'attestation de l'agent immobilier ayant reçu mandat de vendre l'immeuble en cause qui indique que, depuis son entrée en relation avec les époux [W], ceux-ci n'ont jamais évoqué l'existence d'un problème d'infiltration dans la toiture et d'une déclaration de sinistre auprès de leur assureur, ce dont il s'évince qu'il a surestimé la valeur du bien.

Elle conteste avoir la qualité d'acheteur professionnel puisqu'elle était strictement incapable d'apprécier la qualité de la chose vendue dès lors qu'elle n'a pu constater l'existence du désordre d'infiltration d'eau apparent uniquement les jours de pluies, étant souligné que l'immeuble litigieux était sa seule acquisition et qu'elle n'avait donc aucune expérience en matière immobilière, M. [E] exerçant la profession d'informaticien.

La SCI Le [Adresse 6] soutient qu'elle n'avait pas connaissance de l'existence des infiltrations d'eau avant la signature de l'acte authentique du 3 juillet 2019.

Elle précise qu'aucun diagnostic de la couverture de l'immeuble n'a été réalisé avant la vente et souligne que, sur le devis de travaux à réaliser, la ligne de réparation des tuiles et charpente a été biffée et n'est pas entrée dans le champ contractuel, ce qui s'explique par le fait que les premières observations d'infiltrations d'eau n'ont été constatées qu'après la réitération de l'acte authentique de vente en date du 3 juillet 2019, soit le 14 juillet 2019.

Elle souligne que le premier devis établi par M. [G] ne tenait pas compte des infiltrations contrairement au devis du 24 juillet 2019 établi après qu'elles aient été constatées, ces infiltrations ne se matérialisaient que les jours de fortes pluies.

La SCI Le [Adresse 6] indique encore que la SCI [W] avait des connaissances en matière immobilière et qu'elle lui a sciemment caché, lors de la vente, le désordre d'infiltration d'eau affectant la toiture de l'immeuble lequel est impropre à sa destination.

Elle évoque l'existence d'un trouble de jouissance incontestable puisqu'elle souhaitait aménager des appartements à fin de location saisonnière à compter de novembre 2019.

La SCI Le [Adresse 6] sollicite la somme de 19 800 euros TTC au titre de la réfection de la couverture de l'immeuble et la somme de 20 000 euros au titre du trouble subi puisqu'elle a été retardée de quatre mois dans l'aménagement des cinq studios dans les combles, chaque studio pouvant être loué un montant de 1 000 euros par mois.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 27 juillet 2022, la SCI [W] demande à la cour de :

déclarer l'appel de la SCI Le [Adresse 6] mal fondé ;

le rejeter ;

débouter la SCI Le [Adresse 6] de l'ensemble de ses fins et conclusions ;

sur demande additionnelle :

condamner la SCI Le [Adresse 6] à un montant de l 500 euros de dommages et intérêts, sur le fondement de l'article 1104 en l'absence de bonne foi dans l'exécution de la convention ;

condamner la SCI Le [Adresse 6] aux entiers frais et dépens ainsi qu'à une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI [W] indique que la SCI Le [Adresse 6] ne rapporte pas la preuve de l'existence de défauts cachés de l'immeuble qui le rendent impropre à l'usage auquel il est destiné ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.

Elle souligne que l'immeuble a été visité à plusieurs reprises avec un maître d'oeuvre et des entreprises avant l'acquisition, M. [W] ayant été présent lors d'une de ces visites aux côtés du maitre d''uvre et aucune infiltration n'ayant pu être constatée.

S'agissant du devis produit par la SCI Le [Adresse 6], elle argue de ce que rien ne permet de déterminer à quelle date la mention « Diverses réparations sur tuiles et charpente 1950 € » a été barrée, M. [G] qui l'a établi ayant intérêt à émettre un devis plus important visant la réfection de toute la toiture peu après l'acte de vente, l'attestation de ce dernier n'étant pas circonstanciée et ne précisant pas le siège des infiltrations et leur ampleur.

Elle s'étonne que ce témoin affirme que l'infiltration était ancienne mais non détectable alors que les tuiles et la charpente étaient apparentes dans les combles puisque la toiture était nue et non isolée.

Elle considère que le seul dégât des eaux constaté en août 2018 ne permet pas de démontrer que la toiture était affectée d'un vice caché la rendant impropre à sa destination, étant souligné que l'immeuble date de 1949 et que la toiture n'a jamais été changée.

Elle précise que le 15 juillet 2019, il n'y avait pas de pluie et que le 14 juillet 2019, la pluie n'était pas aussi importante que dans les mois précédents d'hiver et de printemps.

La SCI [W] fait encore valoir que même s'il devait être considéré que la toiture est affectée d'un vice, il ne peut être prétendu que ce vice aurait échappé au maître d'oeuvre et à l'entreprise Haute Alsace Rénovation, l'ensemble de la toiture étant visible puisque, à nu.

Elle ajoute que s'il devait être établi qu'un vice existait, il était caché également pour eux, de sorte que la clause d'éviction de la garantie des vices cachés doit trouver application.

La SCI [W] soutient que M. [E] est un réel professionnel de l'investissement immobilier, ce qu'elle-même n'est pas.

Elle en déduit que la clause de non-garantie des vices cachés, inscrite dans l'acte de vente doit trouver application dès lors que rien ne permet d'établir qu'il y ait un vice caché antérieur à la vente, connu du vendeur.

Très subsidiairement, quant aux travaux nécessaires et aux montants mis en compte, la SCI [W] indique que, sans la mesure où il n'existe aucun constat contradictoire sur l'existence, la nature et l'ampleur des infiltrations, les demandes financières adverses ne peuvent prospérer.

Sur la prétendue perte de loyer, la SCI [W] argue de ce qu'elle n'est pas responsable du délai d'instruction, respectivement d'opposition de l'administration en raison de l'intervention de l'architecte des bâtiments de France ni même des travaux réalisés par la partie adverse.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'action estimatoire

L'application des dispositions relatives à l'existence d'un vice caché implique, en premier lieu, que la SCI Le [Adresse 6] qui s'en prévaut démontre que les infiltrations d'eau dans les combles de l'immeuble vendu dont elle se plaint sont antérieures à la vente dudit immeuble.

A cet égard, force est de constater qu'aucun constat objectif notamment de la localisation de ces infiltrations d'eau n'a été établi à l'initiative de la SCI Le [Adresse 6].

En effet, les photographies produites n'ont aucune force probante sur ce point et l'attestation de M. [K] [G] n'est pas explicite sur la situation exacte des infiltrations constatées.

Aucun élément n'étant produit par la SCI Le [Adresse 6] permettant de déterminer que les infiltrations d'eau dont elle se plaint se situent au même endroit de la toiture que celles ayant fait l'objet d'une déclaration de sinistre intervenu le 25 août 2018 par la SCI [W] dont l'ampleur et la gravité sont, au demeurant, inconnues, et qu'elles préexistaient à la vente immobilière, il y a lieu de débouter la SCI Le [Adresse 6] de toutes ses demandes en lien avec l'action estimatoire, l'antériorité du vice n'étant pas établie.

Le jugement entrepris est donc confirmé.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement entrepris est confirmé de ces chefs, en rectifiant la dénomination de l'appelante qui est la SCI « Le [Adresse 6] » et non « [Adresse 6] ».

A hauteur d'appel, la SCI Le [Adresse 6] est condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à la SCI [W] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI Le [Adresse 6] est déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :

CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 30 avril 2021, la dénomination de l'appelante étant rectifiée comme étant la SCI « Le [Adresse 6] » et non « [Adresse 6] » ;

Y ajoutant :

CONDAMNE la SCI Le [Adresse 6] aux dépens de la procédure d'appel ;

CONDAMNE la SCI Le [Adresse 6] à payer à la SCI [W] la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure exposés à hauteur d'appel ;

DÉBOUTE la SCI Le [Adresse 6] de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/02799
Date de la décision : 09/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-09;21.02799 ?
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