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08/06/2023 | FRANCE | N°21/01070

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 08 juin 2023, 21/01070


MINUTE N° 292/2023

























Copie exécutoire à



- Me Guillaume HARTER



- Me Christine LAISSUE-

STRAVOPODIS



- Me Nadine HEICHELBECH



- Me Anne CROVISIER





Le 8 juin 2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR



DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 08 JUIN 2023







Numéro d'insc

ription au répertoire général : 2 A N° RG 21/01070 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HQLV



Décision déférée à la cour : 06 Janvier 2021 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG







APPELANTES et INTIMÉES SUR APPELS INCIDENTS :



1/ La S.A.R.L. CABINET DKS, prise en la personne de son re...

MINUTE N° 292/2023

Copie exécutoire à

- Me Guillaume HARTER

- Me Christine LAISSUE-

STRAVOPODIS

- Me Nadine HEICHELBECH

- Me Anne CROVISIER

Le 8 juin 2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 08 JUIN 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/01070 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HQLV

Décision déférée à la cour : 06 Janvier 2021 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANTES et INTIMÉES SUR APPELS INCIDENTS :

1/ La S.A.R.L. CABINET DKS, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 3] à [Localité 15]

2 / La Compagnie d'assurance MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS, prise en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 6] à [Localité 21]

1 & 2/ représentées par Me Guillaume HARTER, avocat à la cour.

Avocat plaidant : Me PRADIGNAC, avocat à Colmar.

INTIMÉES et APPELANTES SUR APPELS INCIDENT OU EN GARANTIE :

1/ La S.A. SMA venant aux droits de la SMABTP - [Adresse 5] à [Localité 20], représentée par son représentant légal -

ayant son siège social [Adresse 14] à [Localité 20]

représentée par Me Anne CROVISIER, avocat à la cour.

Avocat plaidant : Me WECHTER, avocat à Strasbourg

2/ La Compagnie d'assurance GROUPAMA GRAND EST, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 4]

3/ La S.A.R.L. FALIERES, prise en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 2] - à [Localité 16]

2 & 3/ représentées par Me LAISSUE-STRAVOPODIS, avocat à la cour.

4/ La S.C.I. AXCELIA, représentée par son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 13] à [Localité 19]

5/ La S.C.I. BANLEWARD, représentée par son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 1]

6/ La S.C.I. GILEWARD, représentée par son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 9] à [Localité 18]

7/ La S.C.I. MONEYPENNY, représentée par son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 12] à[Localité 17]E

8/ Le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE [Adresse 8], agissant par son syndic la Société ALSIMMO ayant siège [Adresse 10], représentée par son représentant légal

sis [Adresse 8] à [Localité 15]

4 à 8/ représentées par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour.

Avocat plaidant : Me GEHIN, avocat à Epinal.

La S.A.S.U. SOCIETE DE CONSTRUCTION ET DE RENOVATION DU PATRIMOINE ATLANTIQUE, en liquidation judiciaire, représentée par la SCP DOLLEY COLLET es qualité de mandataire judiciaire

dont le siège social était [Adresse 22] à [Localité 11]

régulièrement assignée le 2 juin 2021

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre, et Madame Myriam DENORT, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRÊT réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, Président, et Madame Sylvie SCHIRMANN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Les copropriétaires de l'immeuble [Adresse 7] à [Localité 15], constitués en AFUL, ont fait procéder à des travaux de rénovation de leur immeuble.

Par contrat du 15 décembre 2004, une convention de maîtrise d''uvre a été conclue avec la SARL DKS société d'Architectes, assurée par la société MAF.

La SARL Société de Construction et de Rénovation du Patrimoine Atlantique (Socorepa), assurée auprès de la SA SMA BTP, est intervenue en qualité d'entreprise générale, selon marché du 15 décembre 2004, portant sur les lots « tous corps d'état », étant autorisée à faire appel à des sous-traitants.

Le lot « chaufferie-chauffage » comprenant l'installation de chaudières individuelles et de radiateurs a été sous-traité par la SARL Socorepa à la SASU Ets Falières, assurée auprès de la compagnie Groupama Grand Est, selon marché du 26 décembre 2006, pour un prix total de 61 663,69 euros TTC. Le DQE a été établi par la SARL DKS société d'Architectes.

La réception a été prononcée sans réserve, le 12 avril 2008.

Courant 2012, les locataires ont été alertés par des odeurs de gaz et de brûlé. Le syndicat des copropriétaires a alors sollicité une expertise judiciaire. Par ordonnance du 26 février 2013, le président du tribunal de grande instance de Strasbourg statuant en référé a fait droit à la demande et désigné Monsieur [H], afin d'y procéder. L'expert a déposé son rapport, le 26 février 2014, dans lequel il expose avoir constaté des désordres affectant 10 des 13 logements. Selon lui, les dysfonctionnements sont dus à une mauvaise conception de l'installation : les chaudières à tirage naturel n'auraient pas dû être implantées dans des pièces en position centrale (cuisine ou salle de bain) déjà dotées d'une bouche d'extraction de VMC ce qui occasionne une mise en dépression des chaudières et ne permet pas d'assurer le renouvellement convenable de l'air.

C'est dans ce contexte que, par acte du 5 avril 2017, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8], la SCI Axcelia, la SCI Monneypenny, la SCI Banleward et la SCI Gileward ont saisi le tribunal de grande instance de Strasbourg, aux fins de voir la SARL Socorepa et son assureur la SMA BTP, la SARL DKS cabinet d'architectes, la SASU Ets Falières et son assureur la compagnie Groupama Grand Est, condamnés à leur payer différents montants, au titre de leurs différents préjudices.

Des appels en garantie croisés ont été régularisés.

Par jugement prononcé le 6 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Strasbourg a :

- dit la SASU Socorepa, là SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF tenues à réparation des désordres ;

- rejeté les demandes formées contre la SARL Falières et Groupama Grand Est ;

- condamné in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 60 000 euros avec indexation sur l'indice BT 01 du mois de février 2014 à la date du jugement, puis avec intérêts au taux légal à compter de cette date et capitalisation par année entière;

- condamné in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 3 870,47 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation par année entière;

- condamné in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF à verser avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation par année entière:

' à la SCI Axcelia la somme de 4 948,93 euros ;

' à la SCI Moneypenny la somme de 4 410,01 euros ;

' à la SCI Banleward la somme de 4 215,23 euros ;

' à la SCI Gileward la somme de 4 723,75 euros ;

- condamné in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF aux entiers dépens dont ceux de la procédure en référé comprenant le coût de l'expertise judiciaire, ainsi qu'à verser sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 2 000 euros et à chacune des SCI une somme de 600 euros ;

- débouté la SARL Falières et Groupama Grand Est de leur demande formulée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF à garantir la SA SMA de la condamnation prononcée sur les demandes principales en principal, intérêts, dommages intérêts, frais et article 700 du code de procédure civile ;

- dit sans objet le surplus des appels en garantie ;

- laissé à la charge de la SA SMA les dépens exposés au titre de son appel en garantie et rejeté ses demandes sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté le surplus des demandes ;

- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire.

La juridiction a rappelé que les désordres se manifestant par des émanations de monoxyde de carbone dans certains logements, trouvent leur origine dans une défaillance de conception découlant de l'association pourtant interdite de chaudières à tirage naturel et de système VMC. Estimant que chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité sans qu'il n'y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilité, le tribunal a estimé que la société Socorepa est débitrice d'une responsabilité en sa qualité de constructeur du lot incriminé, son assurance la SMA devant la garantir.

Le tribunal écartait la responsabilité de la société Falières (et mettait hors de cause son assureur) recherchée sur le fondement de l'article 1240 du code civil au motif que :

' le fait d'avoir établi, pour 3 logements, des certificats de conformité non corrélés avec la réalité constitue une faute ; cependant celle-ci n'est pas en relation causale avec le préjudice subi par les demanderesses, lequel ne concerne pas l'installation spécifique des trois logements en cause,

' le problème technique constaté par l'expert judiciaire résultait de la coexistence d'une VMC et d'une chaudière à tirage naturel ; or la SASU Ets Falières n'était pas chargée de la conception générale et n'était pas intervenue dans l'installation de la VMC,

' la SASU Ets Falières justifie avoir apporté au maître d'ouvrage une réponse technique en provenance d'un service technique d'assistance, concernant la juxtaposition des systèmes incriminés, de sorte qu'elle n'a pas manqué à son obligation de conseil et qu'il ne peut lui être reproché le défaut de conception de l'ouvrage.

Sur la responsabilité décennale de la SARL DKS société d'Architectes (et la mise en cause de son assureur la MAF), le tribunal estime qu'elle doit être engagée car :

' il résulte de la convention de maîtrise d''uvre que la SARL DKS société d'Architectes était en charge d'une mission complète de maîtrise d''uvre incluant les spécifications techniques détaillées, la consultation des entreprises et la préparation des marchés,

' elle a retenu un choix de conception inadapté,

' il ressort de l'expertise judiciaire que la solution technique adéquate a été écartée par le maître d''uvre, cette appréciation de l'expert étant confirmée par le fait qu'elle avait été envisagée dans le DQE.

S'agissant de l'action en recherche de responsabilité de la SAS Socorepa, elle était accueillie par la juridiction en ce qu'elle était fondée sur l'article 1792 du code civil, la société ayant la qualité de constructeur, le système de chauffage étant déficient.

Les sociétés Socorepa, SMA, DKS société d'Architectes et son assureur la MAF ont donc été condamnés, in solidum, à réparer le préjudice des demanderesses, celles-ci étant déboutées de leurs revendications à l'égard de la SASU Ets Falières et de Groupama.

Les appels en garantie régularisés par les défenderesses à l'encontre de la SASU Ets Falières et de Groupama ont été corrélativement rejetés.

Le tribunal a accordé diverses sommes au syndicat de copropriétaires et aux différents copropriétaires.

La SARL Cabinet DKS et la compagnie d'assurance Mutuelle des Architectes Français (MAF) ont interjeté appel de ce jugement le 18 février 2021.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 juillet 2021, la SARL cabinet DKS et la compagnie d'assurances la Mutuelle des Architectes Français (MAF), demandent à la cour de :

INFIRMER totalement le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 6 janvier 2021 en ce qu'il a notamment :

- dit la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF tenues à réparation des désordres ;

- rejeté les demandes formées contre la SARL Falières et Groupama Grand Est ;

- condamné in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 60 000 euros avec indexation sur l'indice BT 01 du mois de février 2014 à la date du jugement, puis avec intérêts au taux légal à compter de cette date et capitalisation par année entière ;

- condamné in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 3 870,47 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation par année entière ;

- condamné in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF à verser avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation par année entière :

' à la SCI Axcelia la somme de 4 948,93 euros ;

' à la SCI Moneypenny la somme de 4 410,01 euros ;

' à la SCI Banleward la somme de 4 215,23 euros ;

' à la SCI Gileward la somme de 4 723,75 euros ;

- condamné in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF aux entiers dépens dont ceux de la procédure en référé comprenant le coût de l'expertise judiciaire, ainsi qu'à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 2 000 euros et à chacune des SCI la somme de 600 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la SARL Falières et Groupama Grand Est de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL D.K.S. cabinet d'architectes et la société MAF à garantir la SA SMA de la condamnation prononcée sur les demandes principales en principal, intérêts, dommages intérêts, frais et article 700 du code de procédure civile ;

- dit sans objet le surplus des appels en garantie ;

- laissé à la charge de la SA SMA les dépens exposés au titre de son appel en garantie et rejeté ses demandes sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté le surplus des demandes ;

- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire

REJETER les appels incidents et provoqués de la SA SMA, de la SASU Falières, de Groupama Grand Est, du syndicat des Copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8], de la SCI Axcelia, de la SCI Moneypenny, de la SCI BANELEWARD et de la SCI Gileward,

Ce faisant, statuant à nouveau,

A titre principal,

DEBOUTER les parties demanderesses et intimées de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions en ce que dirigées à l'encontre de la société D.K.S. Société d'Architectes et de son assureur la Mutuelle des Architectes Français en l'absence d'imputabilité des désordres à la mission confiée

CONDAMNER les demanderesses et intimées à payer à la société D.K.S. Société d'Architectes et à la MAF un montant de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens

A titre infiniment subsidiaire en cas de condamnation,

LIMITER le montant de l'indemnisation au titre des désordres matériels aux seuls logements affectés par les désordres, c'est à un dire à un montant maximal de 33 000 euros TTC DEBOUTER le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires du surplus de leurs demandes, en l'absence de justifications et/ou de lien de causalité entre les désordres et les préjudices annexes invoqués

CONDAMNER in solidum, la société de Construction et de Rénovation du Patrimoine Atlantique et son assureur la SMA SA venant aux droits de la SMABTP, la société Falières et son assureur Groupama Grand Est à garantir la société D.K.S. société d'Architectes et son assureur la Mutuelle des Architectes Français de toutes condamnations susceptibles d'intervenir à leur encontre en principal, intérêts, dommages et intérêts, frais, dépens, article 700 du code de procédure civile, ce sur un fondement quasi délictuel Les CONDAMNER à payer à la société D.K.S. société d'Architectes et à la Mutuelle des Architectes Français un montant de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens

DIRE et JUGER que la Mutuelle des Architectes Français est en droit d'opposer aux parties adverses les limites et conditions du contrat d'assurance souscrit par la société D.K.S. société d'Architectes notamment s'agissant des franchises

DEBOUTER toutes parties de leurs éventuelles demandes en ce que dirigées à l'encontre de la société D.K.S. société d'Architectes.

Au soutien de leur appel, la société Cabinet DKS et son assureur estiment que la responsabilité de l'architecte ne peut être retenue sur le fondement de l'article 1792 du code civil, car l'imputabilité des désordres à la mission qui lui a été confiée n'est pas démontrée. Le premier juge aurait fait une mauvaise analyse du contrat de maîtrise d''uvre en retenant de manière rapide que le contrat serait un contrat de mission complète, alors que sa lecture démontrerait qu'il existe des limites à celles-ci, notamment en ce que les études techniques « béton fluide acoustique » n'était pas insérées. L'architecte ne pourrait alors engager sa responsabilité que pour les seules missions énumérées au titre du contrat.

L'expert se serait également trompé en affirmant que c'était la maîtrise d''uvre qui aurait choisi de mettre en place les chaudières individuelles à tirage naturel et que la solution de conduits de fumées spécifiques adaptés à la situation aurait été écartée par la maîtrise d''uvre. Ce serait le maître d'ouvrage qui aurait choisi d'opter pour la solution là moins coûteuse résidant dans la conservation des conduits de fumées existants.

La société Socorepa qui devait vérifier la possibilité de conserver les conduits de fumées, serait responsable de ce désordre, tout comme son sous-traitant l'entreprise Falières, qui aurait dû émettre des réserves à propos d'une incompatibilité entre le système de chauffage choisi et le type de VMC présent.

En outre l'entreprise Falières aurait émis des certificats erronés concernant précisément la capacité des entrées d'air mises en 'uvre ; il y aurait par conséquent lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de l'architecte et l'a condamné à payer diverses sommes.

À titre subsidiaire en cas de confirmation de la condamnation de l'architecte il y aurait lieu de réduire les montants mis en cause par la copropriété, notamment au niveau de la prise en charge du coût de l'installation d'une chaudière collective.

Etant donné que l'installation mise en cause n'a pas impacté quatre logements, il conviendrait d'appliquer un prorata aux travaux envisagés pour les seuls 6 logements concernés sur 10, en appliquant un taux de TVA de 10 % et non pas de 20 %, de sorte que la somme retenue ne saurait être supérieure à 33 000 euros TTC, et non pas 60 000 comme jugé en première instance.

S'agissant des différents copropriétaires, les appelants indiquent que plusieurs préjudices allégués ne seraient pas justifiés par des factures acquittées, que les réductions de loyer au profit de locataires ne seraient pas forcément liées à la survenue des désordres, et que de manière générale une SCI ' personne morale ' ne pourrait prétendre à se voir indemniser d'un préjudice de jouissance.

D'autre part la MAF serait en droit d'opposer aux parties adverses les limites et conditions du contrat d'assurance souscrit par la société Cabinet DKS, notamment s'agissant des franchises applicables.

S'agissant des appels en garantie, la société d'architectes et son assureur estiment être en droit de demander la garantie de la société Socorepa et de son assureur SMA venant aux droits de la SMABTP ainsi que de la société Falières et de son assureur Groupama, et ce sur un fondement quasi délictuel.

Concernant la société Socorepa, entreprise générale qui devait réaliser des études concernant son lot, elle aurait été défaillante dans sa mission de réalisation mais aussi de surveillance des travaux faits par son sous-traitant.

Quant à la société Falières, elle aurait commis une faute en ne choisissant pas une option dont les caractéristiques répondaient aux besoins. Elle ne pouvait conserver les conduits d'évacuation des fumées existants. En outre, contrairement à ce que le tribunal a décidé, les appelants considèrent qu'il y a un lien de causalité entre la faute résultant des 3 certificats inexacts de l'entreprise Falières et le dommage, comme l'aurait d'ailleurs retenu l'expert.

L'architecte ajoute avoir demandé à la société Fallières si l'installation de chaudières dans des pièces équipées de VMC (cf. annexe 2 de Groupama) était possible, et en réponse la société lui aurait expliqué en produisant un courrier d'une société AT Energie que l'utilisation d'un conduit de fumée individuel serait possible dans un logement équipé d'une ventilation mécanique contrôlée en cas de local séparé disposant de sa propre entrée d'air.

Ce serait la société Falières qui aurait mis en 'uvre une solution non conforme et non règlementaire.

Contrairement à ce qu'indique Groupama, les franchises contractuelles ne seraient pas opposables aux tiers pour les dommages de nature décennale ainsi que tous les préjudices relevant d'un dommage de cette nature.

Enfin, il conviendrait de condamner les sociétés Socorepa et Falières avec leurs assurances à garantir intégralement la société Cabinet DKS.

* * *

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 19 octobre 2021 la SMA demande à la cour de :

1) Statuant sur l'appel principal formé par la société DKS cabinet d'architectes et la MAF

DECLARER la société DKS cabinet d'architectes et la MAF irrecevables et en tout état de cause mal fondées en leur appel principal ;

En conséquence,

Les DEBOUTER de l'intégralité de leurs fins, moyens et conclusions ;

CONDAMNER in solidum la société DKS cabinet d'architectes et la MAF aux entiers dépens et frais de l'appel principal et à verser à la Compagnie SMA la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

2. Statuant sur l'appel incident et provoqué formé par la Compagnie SMA

Statuant sur l'absence de responsabilité de la société Socorepa sur appel incident

DECLARER la Compagnie SMA recevable en son appel incident et provoqué subsidiaire et le DIRE bien fondé ;

En conséquence,

INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a :

« DIT la SASU Socorepa et la SA SMA tenues à réparation des désordres ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa et la SA SMA à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 60.000 euros avec indexation sur l'indice BT 01 du mois de février 2014 à la date du présent jugement, puis avec intérêts au taux légal à compter de cette date et capitalisation par année entière ; CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa et la SA SMA à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 3.870,47 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement et capitalisation par année entière ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa et la SA SMA à verser avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement et capitalisation par année entière :

à la SCI Axcelia la somme de 4 948,93 euros ;

à la SCI Moneypenny la somme de 4 410,01 euros ;

à la SCI Banleward la somme de 4 215,23 euros ;

à la SCI Gileward la somme de 4 723,75 euros ; »

Statuant à nouveau,

DEBOUTER les parties adverses de toutes demandes, fins et prétentions dirigées à l'encontre de la société Socorepa et de la compagnie SMA en l'absence d'imputabilité des désordres constatés ;

3) Statuant sur les appels en garantie de la Compagnie SMA

DECLARER la Compagnie SMA recevable et bien fondée en ses appels en garantie ;

Statuant sur l'appel en garantie dirigé contre Falières et Groupama sur appel provoqué subsidiaire en cas de rejet de l'appel incident

INFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a REJETE les demandes contre la SARL Falières et Groupama Grand Est

Statuant à nouveau,

CONDAMNER la société Falières et son assureur Groupama Grand Est à garantir la Compagnie SMA de la condamnation prononcée sur les demandes en principal, intérêts, dommages intérêts, frais et article 700 du code de procédure civile ;

4) Statuant sur l'appel en garantie dirigé contre DKS cabinet d'architectes et la MAF

CONFIRMER le jugement déféré en ce qu'il a :

« CONDAMNE la SARL DKS cabinet d'architectes et la société MAF à garantir la SA SMA de la condamnation prononcée sur les demandes principales en principal, intérêts, dommages intérêts, frais et article 700 du code de procédure civile ; » Statuant sur l'article 700 du code de procédure civile, les frais et dépens

CONDAMNE in solidum la société DKS cabinet d'architectes, la MAF, la société Falières et la Compagnie Groupama aux entiers dépens nés de l'appel principal, incident et provoqué et à verser à la Compagnie SMA la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; Statuant sur l'appel incident et en garantie de la société Falières et de Groupama Grand Est à l'encontre de la société Socorepa et de la Compagnie SMA DECLARE la société Falières et la Compagnie Groupama Grand Est irrecevables et en tout état de cause mal fondées ;

DEBOUTE la société Falières et la Compagnie Groupama Grand Est de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Socorepa et la Compagnie SMA, es qualité d'assureur de la société Socorepa ;

Les a CONDAMNE aux entiers frais et dépens nés de l'appel principal, incident et provoqué des demandes dirigées à l'encontre de la société Socorepa et de la Compagnie SMA ainsi qu'au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

5) Statuant sur l'appel incident du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15], et des copropriétaires SCI Axcelia, SCI Moneypenny, SCI Banleward et SCI Gileward

DECLARER le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15], la SCI Axcelia, la SCI Moneypenny, la SCI Banleward, la SCI GILWARD mal fondés en leur appel incident ;

En conséquence,

Les en DEBOUTER ainsi que de l'intégralité de leurs fins, moyens et conclusions et les CONDAMNER aux entiers frais et dépens nés de l'appel principal, incident et provoqué;

La société SMA soutient que le choix d'installer simultanément un système VMC indépendant et des chaudières à tirage naturel, résulte du devis descriptif estimatif du lot numéro 11 qui a été rédigé par la société Cabinet DKS cabinet d'architecte.

Elle attire l'attention de la cour sur la remarque de l'expert « la solution qui aurait permis un fonctionnement correct (généralement appelée solution 3CE) a été envisagée (article 9) mais écartée d'emblée par le maître d''uvre ». Les désordres résulteraient donc d'une erreur de conception seule imputable à la société Cabinet DKS commise dans le cadre de sa mission générale.

Le cabinet d'architecte ne saurait prétendre que les études du lot chauffage ne relevaient pas de sa mission; la société SMA estime que le choix de se faire assister ou non d'un BET appartient au maître d''uvre, qui a en outre une obligation de conseil, et qui en l'espèce a de surcroît d'emblée écarté la solution qui aurait permis d'éviter la survenue de ces désordres.

Il y aurait donc lieu de retenir les conclusions de l'expert selon lesquelles les désordres constatés étaient imputables d'une part au maître d''uvre Cabinet DKS, et d'autre part à l'entreprise Falières chargée de la réalisation du lot « chaufferie'chauffage ».

La compagnie SMA forme un appel incident en considérant qu'aucune des parties au litige, ni même le tribunal, n'aurait démontré que les désordres constatés par l'expert lui seraient imputables. En sa qualité d'entreprise générale elle a sous-traité l'ensemble du lot chaufferie- chauffage à la société Falières, spécialiste.

Le jugement déféré devrait être infirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Socorepa et l'a condamnée avec la compagnie SMA à réparer les désordres.

En tout état de cause, à titre subsidiaire la compagnie SMA forme un appel en garantie contre la société Falières et son assureur Groupama en reprenant les développements évoqués plus haut sur les fautes du sous-traitant qui n'aurait pas vérifié la solution conçue et retenue par le maître d''uvre, n'aurait pas respecté les dispositions de l'article 10 prévu au devis (vérification de l'état de conformité des conduits de fumée existants), aurait commis une erreur dans l'exécution des travaux et été défaillante dans son devoir de conseil tant à l'égard de l'entreprise principale que du maître de l'ouvrage et du maître d''uvre.

La compagnie SMA forme aussi un appel en garantie contre le cabinet d'architecte et la MAF sur le fondement de la responsabilité quasi délictuelle reprochant au maître d''uvre d'avoir préconisé une installation ne permettant pas un fonctionnement normal, et d'avoir écarté d'emblée une solution technique qui aurait évité la survenue des désordres objets du présent litige.

S'agissant de l'appel incident en appel en garantie formé à son encontre par la société Falières et son assureur, aux fins de voir la société Socorepa et le cabinet DKS prendre en charge 85 % de l'ensemble des condamnations, la société SMA estime qu'il ne peut qu'être rejeté, la société Falières ne pouvant prétendre pouvoir échapper à son obligation de résultat contractée envers le donneur d'ordre.

Concernant l'appel incident du syndicat des copropriétaires et des quatre SCI propriétaires, la compagnie expose qu'aucun développement de leur part ne justifierait leur appel incident et ne serait de nature à remettre en cause la motivation du premier juge qui a limité les montants accordés.

* * *

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 7 décembre 2022, la SASU établissements Falières et son assureur Groupama Grand Est, demandent à la cour de :

REJETER l'appel principal de la SARL DKS société d'Architectes et de la MAF,

REJETER l'appel incident de la SA SMA,

REJETER l'appel incident du syndicat des Copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15] et de la SCI Axcelia, la SCI Moneypenny, la SCI Banleward et la SCI Gileward,

CONFIRMER intégralement le jugement entrepris,

A titre subsidiaire,

FAIRE DROIT à l'appel incident et provoqué de la compagnie Groupama Grand Est et de la SASU Ets Falières,

INFIRMER le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Sur les demandes principales :

LIMITER les prétentions du syndicat des Copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15] au titre des travaux de réparation à l a somme TTC de 35 889, 60 euros subsidiairement de 56 929, 60 euros.

DEBOUTER le syndicat des Copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15] pour le surplus de ses demandes

DEBOUTER la SCI Axcelia, la SCI Moneypenny, la SCI Banleward et la SCI Gileward de leurs demandes de dommages et intérêts,

DEBOUTER la SCI Axcelia et la SCI Banleward de leurs demandes indemnitaires hormis celles relatives aux travaux provisoires,

DIRE ET JUGER que Groupama est fondée à opposer sa franchise applicable au sous-traitant avec un minimum de 2 054 euros et un maximum de 10 275 euros (en tenant compte de l'indice BT01 applicable à la date de déclaration de sinistre au 18/01/2013 : 875,3),

DIRE ET JUGER que Groupama n'est pas tenue au titre des dommages immatériels,

Sur les appels en garantie,

REJETER les appels en garantie dirigés à l'encontre de la SASU Ets Falières et de la compagnie Groupama Grand Est,

DIRE ET JUGER que la part et portion de responsabilité de la SASU Ets Falières ne peut excéder 15 % de l'ensemble des préjudices,

CONDAMNER in solidum la société DKS société d'Architectes, la Mutuelle des Architectes Français, la société Socorepa et son assureur la SMABTP à garantir à hauteur de 85 % la société Falières et Groupama Grand Est de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre tant en principal, intérêts, dommages et intérêts, frais et article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER in solidum la société DKS société d'Architectes, la Mutuelle des Architectes Français, la société Socorepa et son assureur la SMABTP à payer à la société Falières et Groupama Grand Est la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et les CONDAMNER aux entiers frais et dépens.

La société Falières et Groupama sollicitent de la cour de confirmer le jugement de première instance. Le premier juge a, à juste titre, estimé que l'architecte avait une mission complète de maîtrise d''uvre et ne pouvait se défausser de sa responsabilité au motif que l'étude des fluides n'était pas incluse dans le contrat de maîtrise. L'architecte devait avoir une vision globale du projet étant chargé de la conception générale et de la coordination des travaux.

Il aurait commis une faute en ne coordonnant pas les lots « VMC » et « chauffage », ayant en outre opté pour une solution dangereuse non conforme aux règles de l'art.

De son côté la société Falières aurait rempli son obligation de conseil au moment de l'installation des chaudières ; elle a soulevé la difficulté relative à la présence de VMC et a demandé confirmation pour la présence des chaudières en salle de bain et en cuisine. Elle n'a en outre pas réalisé les travaux de VMC, tout en attirant l'attention de l'architecte sur la difficulté technique relative à la présence d'une chaudière murale à tirage naturel et d'une bouche de VMC dans une même pièce.

La seule faute qu'on pourrait lui reprocher, serait d'avoir établi trois certificats de conformité comportant des mentions erronées, mais ces certificats seraient sans aucune relation causale avec le préjudice causé.

Dans ces conditions l'appel incident du syndicat des copropriétaires afin d'obtenir la condamnation de la société Falières in solidum avec l'architecte, ne saurait être accueilli, car la présomption de responsabilité posée par l'article 1792 du code civil nécessite une imputabilité qui n'est pas démontrée en l'espèce.

À titre subsidiaire, les intimées forment un premier appel incident portant sur les montants alloués au syndicat des copropriétaires et aux quatre SCI, qui lui paraissent disproportionnés.

Elles indiquent formuler également un appel en garantie à l'encontre de la société Cabinet DKS, de la MAF, de la société Socorepa et de la société SMA, en demandant à la cour de fixer la part de responsabilité de chacun de ces intervenants à l'acte de construire afin de permettre des recours et des appels en garantie. Elles considèrent que la responsabilité de la société Falières devrait être considérée comme limitée de sorte que les quatre appelés en garantie devraient la garantir à hauteur de 85 % de l'ensemble des condamnations prononcées.

Enfin, la société Groupama Grand Est explique que la société Falières avait souscrit deux contrats un premier couvrant sa RCD le second couvrant sa RCP. Le premier contrat mobilisable pour les dommages de nature décennale ne couvrirait pas les dommages immatériels consécutifs, et le seul contrat mobilisable - dès lors que la responsabilité de la société Falières est recherchée sur le fondement de la responsabilité délictuelle en qualité de sous-traitant - est le contrat RC dont les franchises contractuelles seraient opposables aux tiers.

* * *

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 17 août 2021, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15], la SCI Axcelia, la SCI Moneypenny, la SCI Banleward et la SCI Gileward, demandent à la cour de :

DECLARER l'appel principal mal fondé ;

DEBOUTER les appelants principaux de l'ensemble de leurs fins, moyens et prétentions.

CONFIRMER le jugement de première instance en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :

- rejeté les demandes dirigées contre la société Falières et son assureur Groupama

- limité l'indemnisation des copropriétaires au montant de 4 948,93 euros au profit de la SCI Axcelia, 4 410,01 euros au profit de la SCI Moneypenny, 4 215,23 euros au profit de la SCI Banleward et 4 723,75 euros au profit de la SCI Gileward :

ET sur appel incident, l'INFIRMER sur ces dispositions ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNER la société Falières et son assureur Groupama Grand Est ensemble et in solidum avec la SMA, DKS cabinet d'architectes, MAF, à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15] :

- la somme de 60 000 euros au titre des travaux de reprise définitifs, avec indexation sur l'indice BT01 du coût de la construction du mois de février 2014, date du rapport d'expertise de Monsieur [H], jusqu'au jour de la décision à intervenir puis avec intérêts au taux légal et capitalisation par année entière conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- la somme de 3 870,47 euros au titre des frais annexes, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et capitalisation par année entière conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

CONDAMNER in solidum la SMA, DKS cabinet d'architectes, MAF, Falières, Groupama Grand Est à payer à titre de dommages et intérêts :

à la SCI Axcelia la somme de 14 478,83 euros

à la SCI Moneypenny la somme de 4 910,01 euros

à la SCI Banleward la somme de 6 405,00 euros

à la SCI Gileward la somme de 4 723,75 euros

le tout avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et capitalisation par année entière conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

DEBOUTER la SA SMA de son appel incident et de ses demandes ;

DEBOUTER Groupama Grand Est et la SARL Falières de leurs appel incident et de leurs demandes ;

Au surplus,

CONDAMNER les appelants ou toute partie succombante in solidum aux entiers frais et dépens de la procédure d'appel.

CONDAMNER in solidum les sociétés SMA, DKS cabinet d'architectes, MAF, Falières, Groupama Grand Est à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3 000 euros et à chacune des SCI propriétaires la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les maîtres d'ouvrage estiment que le rapport d'expertise judiciaire impute de manière très claire les désordres aux travaux de rénovation réalisés par la société Falières sous-traitant de la société Socorepa, intervenant sous la maîtrise d''uvre de la SARL Cabinet DKS, et que l'expert a retenu des défauts de conception, de contrôle et de vérification. Contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, il conviendrait de retenir la responsabilité de tous les intervenants, y compris la société Falières qui aurait été titulaire d'une obligation de résultat non atteinte et de condamner l'ensemble des intervenants et leurs assureurs à les indemniser.

Le syndicat des copropriétaires demande la confirmation de la condamnation qui lui permet d'obtenir une indemnisation de 60 000 euros TTC au titre des travaux pour l'implantation d'une chaufferie collective et de 3870,47 euros au titre des frais annexes (coût des diagnostics et frais en lien avec les désordres).

S'agissant du préjudice subi par la SCI Axcelia, cette dernière estime qu'il devrait être fixé à 14 478,83 euros, comprenant les factures en lien avec l'installation du système provisoire de chauffe-eau pour 2948,93 euros TTC, mais aussi :

' une réduction de loyer de 500 euros consentie à la locataire pour le préjudice de jouissance qu'elle a subi,

' la perte de loyer de 1 038 euros suite au départ de la locataire,

' une perte de 7 423 euros, car pour trouver un nouveau locataire la SCI aurait dû revoir à la baisse le montant du loyer, en engageant de surcroît des honoraires pour la recherche de locataires à hauteur de 568,90 euros,

- une somme de 2 000 euros pour la dédommager des tracas administratifs.

La SCI Moneypenny chiffre son préjudice à une somme de 4 910,01 euros, soit 2 910,01 euros au titre des diverses factures engagées et 2 000 euros au titre de dommages-intérêts.

Concernant la SCI Banleward, elle chiffre son préjudice à 6 405 euros, soit 2 715,23 euros au titre des factures réglées, 656,35 euros pour la réduction de loyer concédée à son locataire, 1 033,42 euros de dette de loyer suite au départ définitif du locataire, et enfin une somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Enfin, la SCI Gileward réclame le paiement d'une somme de 4 723,75 euros correspondant à 2 732,75 euros au titre des factures plus 2 000 euros de dommages et intérêts.

* * *

La SASU société de construction et de rénovation du patrimoine atlantique (Socorepa), représentée par la SCP Dolley Collet, se voyait signifier la déclaration d'appel le 2 juin 2021, à personne habilitée. La société ne constituait pas avocat et n'était pas représentée devant la présente cour.

L'arrêt sera rendu par décision réputée contradictoire.

* * *

Par ordonnance du 7 février 2023, la présidente de chambre, chargée de la mise en état, a ordonné la clôture de la procédure et renvoyé l'affaire à l'audience du 23 mars 2023.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions transmises aux dates susvisées.

MOTIVATION

1) Sur les responsabilités des parties mises en cause

1-1) Sur la nature des désordres et l'implication des assureurs

Les maîtres d'ouvrage mènent leur action sur le fondement d'une part de la responsabilité civile décennale, à l'encontre de la société Socorepa et du maître d''uvre la société DKS cabinet d'architectes, d'autre part sur celui de la responsabilité civile délictuelle à l'encontre du sous-traitant la société Falières, et enfin sur les dispositions de l'article L 124'3 du code des assurances contre les assureurs des différents intervenants.

Ces derniers dénient tous leurs responsabilités pour diverses raisons, se rejetant mutuellement la faute.

Le premier juge a fort logiquement fait référence aux travaux de l'expert judiciaire Monsieur [H] qui a expliqué les raisons des désordres constatés à l'origine des émanations de monoxyde de carbone dans certains des logements qui ont fait l'objet des rénovations confiées aux professionnels présents à l'instance.

Il est à noter qu'aucun de ces derniers ne conteste les conclusions de l'expert, à savoir que ces émanations de monoxyde de carbone proviennent d'une défaillance de conception des travaux ayant consisté en l'installation de nouvelles chaudières à tirage naturel dans des salles de bain ou des cuisines dotées de VMC.

L'expert a précisé que « il n'y a aucune probabilité de fonctionnement correct lors de l'allumage du brûleur après une longue période de non fonctionnement en été. Dans cette configuration, il n'y a plus de gaz chaud qui pourrait amorcer le tirage dans le conduit vertical. Ceci est le cas par exemple lors d'un puisage d'eau chaude en fin de journée après absence du locataire. En réalité, compte tenu de la mise en dépression du logement, le tirage va s'inverser dans le conduit de fumées. Les gaz brûlés, comprenant le monoxyde de carbone, vont se répandre dans le logement ».

Il s'agit de désordres graves, de nature décennale, qui remettent en cause l'habitabilité même des logements concernés.

Groupama et la MAF, estiment qu'en tout état de cause, en cas de condamnation de leur part à garantir leurs assurés respectifs (la société Falières et DKS), il y aurait lieu d'appliquer les plafonds de garantie et franchises.

Les franchises et plafonds de garantie sont opposables à la victime et au tiers, sauf pour les dommages relevant d'une garantie obligatoire.

La juridiction de première instance, qui a constaté que tous les faits dommageables imputables d'une part à la société Falières, d'autre part à l'architecte, relèvent de la garantie décennale qui est obligatoire (cf. annexe I de l'article 243-9 du code des assurances) tant pour le constructeur que pour l'architecte, a pu logiquement déduire que les limites des contrats d'assurance contractés par la société auprès de Groupama et par l'architecte auprès de la MAF, ne peuvent être opposées aux tiers.

En conséquence, tant la MAF que Groupama ne pourront obtenir une limitation de leur garantie et ne pourront opposer aux parties adverses les limites et conditions des contrats d'assurance souscrits par la société Falières et la société DKS.

De surcroît, le moyen soulevé par Groupama, selon lequel le contrat mobilisable pour les dommages de nature décennale dont la société Falières est responsable en qualité de sous-traitant ne couvrirait pas les dommages consécutifs immatériels, ne présente aucun intérêt puisque les préjudices - objet des débats et qui seront développés plus loin - sont tous de nature matérielle en ce qu'ils portent sur le coût du remplacement du système de chauffage, des pertes de loyers, des frais engagés pour maintenir les locataires dans les lieux suite à la mise en place de chauffages d'appoint, des frais administratifs ou encore une dévalorisation de valeur de loyer.

1-2) Sur la responsabilité de l'architecte, la société DKS cabinets d'architectes

Le chantier a fait l'objet d'une faute de conception résidant dans le choix de mettre en place dans un même espace, une chaudière à tirage naturel et une VMC, ce qui est contraire à la législation et qui explique directement l'impossibilité d'évacuer les fumées de combustions comprenant du monoxyde de carbone par le conduit de cheminée.

Contrairement à ce que soutient l'architecte, sa mission générale de conception et de supervision des travaux lui imposait l'impérative obligation de vérifier la compatibilité du système de chauffage prévu avec l'existence, ou la mise en place, d'une VMC, et ce d'autant plus qu'un problème d'évacuation des fumées de combustion peut entraîner un risque pour la santé des occupants des logements concernés.

En outre, c'est l'architecte qui a rédigé le devis descriptif estimatif du lot numéro 11 qui prévoyait l'installation simultanée de VMC indépendantes et de chaudières à tirage naturel dans le même espace.

L'expert judiciaire a en outre relevé que l'architecte a écarté la solution qui aurait permis un fonctionnement correct (« la solution qui aurait permis un fonctionnement correct (généralement appelée solution 3CE) a été envisagée (article 9) mais écartée d'emblée par le maître d''uvre ») - (page 4 du rapport d'expertise).

L'architecte a donc bel et bien commis une erreur de conception, ayant préconisé une installation qui ne permettrait pas un fonctionnement normal des chaudières, et alors même que par courrier du 28 février 2008, le « CEDIF- ingénierie immobilière assembleurs de talent » lui écrivait au sujet du chantier de l'immeuble [Adresse 8], attirant son attention sur cette problématique ( « suite à notre visite du 27 février 2008, nous vous prions de bien vouloir nous faire parvenir un courrier spécifiant qu'il n'est pas possible techniquement d'installer d'extraction VMC dans les salles de bains, dès lors que les chaudières à tirage naturel y sont mises » (annexes 7 des pièces de la société Falières).

Le fait d'avoir maintenu les préconisations du devis descriptif initial concernant le lot 11 constitue clairement une faute.

Le moyen soutenu par le cabinet d'architectes, selon lequel il ne pourrait voir sa responsabilité engagée au motif que les études du lot chauffage n'auraient pas relevé de sa mission, est particulièrement inopérant ; les missions qui lui étaient confiées, de direction des travaux, de contrôle de ceux-ci, de conseil, lui imposaient de vérifier que l'installation de chauffage était aux normes.

Il lui appartenait si nécessaire de se faire assister d'un BET pour les lots techniques ; le fait que les études techniques aient été exclues de la mission de maîtrise d''uvre n'exonérait donc pas l'architecte de son obligation de conseil et de résultat.

La responsabilité de l'architecte doit être retenue, comme l'a décidé le premier juge, de sorte que celui-ci et son assureur, la MAF, devront indemniser les propriétaires.

1-3) Sur la responsabilité de la société SOCOREPA

Les désordres en question portent sur une question de sécurité en ce sens que la manifestation de ce phénomène de non évacuation des fumées de combustion contenant du monoxyde de carbone de chaudières, était particulièrement dangereux pour la santé des occupants des logements.

Une obligation de résultat incombait à la société SOCOREPA, en charge du lot comprenant la mise en place des chaudières.

Le fait que cette société, titulaire de ce lot, ait choisi de le sous-traiter ne lui permet pas de se dédouaner de sa responsabilité ; le premier juge a parfaitement bien rappelé son obligation de répondre des désordres apparus sur le lot qui lui a été confié et de répondre des manquements de son sous-traitant.

La société Socorepa, avec son assureur la société SMA venant aux droits de la SMABTP - qui ne conteste plus à hauteur d'appel devoir garantir son assurée ' devront indemniser les maîtres de l'ouvrage : la décision du premier juge en ce sens sera dès lors confirmée.

1-4) Sur la responsabilité de la société Falières

Selon contrat de sous-traitance du 26 décembre 2006, la société Socorepa a confié à la société Falières le lot « chaufferie'chauffage ». C'est donc la société Falières qui s'est chargée de l'installation des chauffages litigieux.

Il est rappelé que le sous-traitant est tenu d'une obligation de résultat envers son donneur d'ordre.

En premier lieu, force est de constater que la société Falières n'a pas réalisé la vérification préalable de faisabilité de la solution retenue et préconisée par le maître d''uvre, alors pourtant que l'article 10 du devis descriptif lui imposait une telle vérification. Elle a donc ignoré une obligation contractuelle.

En deuxième lieu, de manière générale, en sa qualité de spécialiste des installations de chauffage, de maintenance, de réparation et de traitement d'air, la société Socorepa se devait de vérifier la solution retenue par le maître d''uvre DKS, ce qu'elle n'a pas fait, notamment au niveau de la capacité d'évacuation des fumées de combustion par les conduits existants en tenant compte de l'installation de VMC dans un même espace du logement. Il s'agit là d'une deuxième faute, directement en lien avec la survenue des désordres et des préjudices en litige.

En troisième lieu, il convient de rappeler que trois certificats de conformité qu'elle a rédigés en fin de chantier sont totalement erronés, en ce qu'ils indiquent faussement que les chaudières de 30 kWh ont été posées en cuisine alors qu'elles l'avaient été dans une salle de bain aveugle équipée de VMC (logements 103,107 et 111). Or l'arrêté du 2 août 1977 relatif aux règles techniques et de sécurité applicables aux installations de gaz combustible situées à l'intérieur des bâtiments d'habitation, rend l'installateur responsable du bon fonctionnement via un certificat de conformité par lequel il atteste le caractère suffisant du tirage thermique.

Ces fausses attestations révèlent que la société Falières ne s'est nullement préoccupée de la question de la compatibilité des installations de chauffage avec le mode de ventilation choisie, alors pourtant qu'elle avait des effets sur son fonctionnement ; que cette absence de préoccupation ' avérée par la légèreté avec laquelle elle a rédigé les attestations sus évoquées - est fautive.

En conséquence, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, la cour constate que la société Falières - dont la responsabilité est recherchée sur le fondement de l'article 1240 du code civil - a bel et bien commis des fautes dans l'exécution des travaux réalisés, mais également à l'égard de son devoir de conseil qu'elle se devait d'apporter à l'entreprise principale et au maître d''uvre, directement à l'origine de la survenue des désordres.

Elle ne saurait prétendre pouvoir être mise hors de cause au motif qu'elle a transmis au maître d'ouvrage délégué une réponse technique datée du 20 décembre 2007 - qui lui avait été transmise par le service d'assistance technique « AT-Energies » - dans laquelle il était clairement indiqué que « l'utilisation d'un conduit de fumée individuel n'est possible dans un logement doté d'une ventilation mécanique contrôlée, que si l'appareil raccordé est situé dans un local séparé par une porte non perméable des locaux ventilés par VMC. Ce local doit posséder sa propre entrée d'air' » (pièce 3 de la société Falières).

En sa qualité de professionnel, elle n'aurait pas dû accepter de mettre en 'uvre un système de chauffage qu'elle savait inadapté et potentiellement dangereux : sa connaissance au cours de l'exécution du chantier du caractère inadapté des installations de chauffage devant être mis en place dans les lieux, aurait dû pousser la société Falières à refuser d'intervenir.

Il y a par conséquent lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a mis hors de cause la société Falières et son assureur Groupama.

2) Sur l'indemnisation de la copropriété et des SCI

Il est de principe que chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage des responsabilités entre les divers responsables qui n'affecte que les rapports réciproques de ces derniers.

Les sociétés DKS cabinet d'architectes et MAF, Socorepa et SMA, Falières et Groupama, seront dès lors condamnées in solidum à réparer les préjudices subis par les propriétaires.

2-1) Sur le préjudice du syndicat de copropriété

Les appelants contestent l'évaluation de l'indemnisation principale de la SCI faite à hauteur de 60 000 euros TTC retenue par le premier juge, au titre du financement de la solution de réparation consistant à l'installation d'un système de chauffage collectif au motif que seuls 6 des 10 logements avaient soufferts de désordres.

Cependant, selon l'expert, pour mettre fin aux désordres persistants dans les six logements, la solution la plus simple était de procéder à la mise en place d'un chauffage centralisé bénéficiant aux 10 logements.

Il est rappelé que la deuxième solution - consistant à mettre en place des chaudières à ventouse dans chaque logement - aurait nécessité le remplacement couteux des conduits de fumées existants, maçonnés, qui traversent verticalement l'immeuble ; si cette solution aurait été possible au moment de la phase du chantier, elle était exclue pour des logements habités, et ce d'autant plus que l'immeuble se trouvant dans un secteur soumis à l'avis de l'architecte des bâtiments de France, il n'était pas évident que la solution de la chaudière à ventouse, nécessitant des percements de murs, ait reçu l'agrément.

Enfin, la troisième solution préconisée (à savoir le remplacement des chaudières par un système de chauffage uniquement électrique), d'une part était tout aussi couteux (50 294.57 euros HT), et d'autre part risquait d'être moins performant d'un point de vue énergétique.

Dans ces conditions, il y a lieu de retenir le montant de 50 000 euros HT correspondant aux travaux d'installation de la chaudière collective, et de mettre à la charge des constructeurs (et de leurs assureurs) l'intégralité de ce montant.

Au regard de l'ancienneté du bâtiment, la TVA applicable n'est pas de 20 % comme retenu dans le calcul de l'expert mais de 10 %, de sorte que l'estimation des travaux à 50 000 euros hors-taxes donnera un montant à la charge des constructeurs et de leurs assureurs de 55 000 euros TTC.

Le jugement sera dès lors infirmé uniquement sur le montant mis en compte, qui sera réduit de 60 000 à 55 000 euros TTC.

S'agissant des frais annexes mis à la charge des constructeurs, la société DKS cabinet d'architectes conteste la nécessité de prendre en compte la somme de 352,62 euros TTC au titre des frais que le syndic devra engager lors du suivi des travaux d'installation du chauffage central. Le cabinet d'architecte ne démontre cependant pas que ce montant ne doit pas être pris en compte. L'importance des travaux nécessitera forcément une attention et un investissement de la part du syndic qui doivent ête prises en compte. Par conséquent la décision du premier juge de condamner les constructeurs à verser une somme de 3 870,47 euros au titre des frais annexes (intégrant cette somme contestée de 352,62 euros) sera confirmée, si ce n'est que la société Falières et son assureur seront également condamnés in solidum à régler ce montant.

2- 2) Sur le préjudice de la SCI Axcelia

Le premier juge a accordé à la SCI la somme de 4 948,93 euros correspondant aux mesures provisoires urgentes prises pour maintenir dans les lieux son locataire (2 948,93 euros TTC), à la remise de loyers consentie au locataire (500 euros) et à l'indemnisation des tracas administratifs subis (1 500 euros).

La SCI réclame une indemnisation supplémentaire pour suppléer à la perte de loyer suite au départ du locataire (1 038 euros) et à la réduction du loyer qu'elle aurait décidée de pratiquer suite à ces problèmes et ce pour un montant de 7 423 euros.

Comme l'a remarqué le premier juge, il n'est pas établi que le départ du locataire soit imputable à la survenue des désordres, ou encore que la baisse de loyer ait été la conséquence directe et exclusive des désordres constatés, en sachant que la mise en place d'un chauffage central est de nature à mettre un terme définitif de ceux-ci.

La décision du premier juge sera dès lors confirmée.

2-3) Sur le préjudice de la SCI Moneypenny

La SCI réclame une somme de 4 910,01 euros ; en première instance elle a obtenu une somme de 4 410,01 euros. Le juge lui a octroyé une somme de 2 910,01 euros au titre des mesures provisoires prises pour permettre le maintien de son locataire, somme justifiée par la production de cinq factures, et a fixé le montant correspondant à l'indemnisation du titre « gestion des difficultés » à 1500 euros alors que le montant réclamé était de 2 000 euros.

La cour note que la SCI n'apporte aucun élément de fait de nature à démontrer que ce montant de 1 500 euros n'est pas à même à l'indemniser des tracas administratifs.

La décision du premier juge doit être confirmée.

2-4) Sur le préjudice de la SCI Banleward

Le tribunal a accordé à la SCI la somme de 4 215,23 euros correspondant aux mesures provisoires urgentes prises pour maintenir dans les lieux son locataire

(2 715,23 euros TTC) augmentée d'une somme de 1 500 euros pour l'indemniser des gestions de difficultés.

La SCI réclame à nouveau à hauteur d'appel une somme de 6 405 euros, au motif qu'il conviendrait de l'indemniser de l'impayé de 2 033,42 euros laissé par son locataire et à hauteur de 2 000 euros, et non pas de 1 500 euros, pour les difficultés de gestion.

Cependant, elle ne démontre pas que le montant de 1 500 euros n'est pas suffisant pour l'indemniser, et n'apporte aucun élément de preuve de nature à démontrer que l'impayé locatif serait la résultante de la survenue des désordres.

Il y a lieu de confirmer la décision de première instance ayant statué sur le chiffrage de son indemnisation du préjudice.

2-5) Sur le préjudice de la SCI Gileward

En première instance, la SCI s'est vu allouer une somme de 4 723,75 euros à titre de dommages-intérêts, intégrant la somme de 2 723,75 euros au titre des frais provisoires d'aménagement et de 1 500 euros pour les difficultés de gestion.

La SCI réclame 500 euros supplémentaire au titre des difficultés de gestion, sans apporter d'explications utiles sur le caractère insuffisant de la somme de 1 500 euros qui lui a été allouée à ce titre, de sorte que son appel incident ne pourrait être accueilli, le chiffrage du préjudice réalisé par le premier juge devant être confirmé.

3) Sur les différents appels en garanties

Comme en première instance, chacune des parties condamnées forme des prétentions contre ses co-défendeurs, au motif que les fautes imputées aux autres seraient prédominantes.

Le premier juge a estimé que la cause première des désordres résulte d'un défaut de conception de l'ouvrage par l'adoption d'une solution non-conforme à la réglementation, que le système de chauffage retenu s'était montré déficient dans le cadre de son association avec la VMC en place. Puis, considérant que cette décision initiale ressortait de la compétence du maître d''uvre en charge des spécificités techniques à retenir et du contrôle général des travaux, le tribunal retenait l'argument de la société SMA selon lequel la société Socorepa n'avait pas dans sa mission la conception des travaux, de sorte que le tribunal accueillait son appel en garantie formé contre l'architecte.

Il résulte des développements précédents que les trois constructeurs au litige ont tous étés défaillants à différents niveaux.

L'architecte a failli en adoptant un mode de chauffage inadapté et en ne réagissant pas aux informations qui lui ont été données.

La société Socorepa, spécialiste du chauffage, a commis une faute en ne vérifiant pas les spécifications du système de chauffage et en ne supervisant pas le travail de son sous-traitant.

Quant au sous-traitant, la société Falières, elle a été défaillante car elle a accepté de mettre en place un système de chauffage qu'elle savait pertinemment contraire aux normes.

Chacun des trois intervenants a donc été en capacité d'interrompre le processus d'installation du système de chauffage défaillant prévu.

Par conséquent, il convient de fixer la part et portion de responsabilités de chacun des intervenants à l'acte de construire défaillant à hauteur de 1/3, de sorte qu'il convient de condamner chacun des binômes suivant :

* DKS cabinet d'architectes et son assureur MAF,

* Socorepa et SMA,

* Falières et Groupama,

à garantir les autres binômes à hauteur de 2/3 de l'ensemble des condamnations prononcées.

4) sur les demandes accessoires

Les montants mis en comptes porteront intérêts au taux légal à compter de la date du premier jugement, soit le 6 janvier 2021 et avec capitalisation par année entière, sauf pour la somme de 55 000 euros qui sera indexée sur l'indice BT 01 du mois de février 2014 à la date du jugement de première instance puis au taux d'intérêts au taux légal.

Le jugement de première instance statuant sur la question des dépens ' qui incluent les frais d'expertise et d'huissier engagés à l'occasion de la procédure de référé ' et de l'article 700 du code de procédure civile, sera également infirmé en ce que la société Falières et son assureur sont dorénavant condamnés à indemniser les préjudices aux côtés des deux autres intervenants.

Les dépens de première instance et d'appel, comprenant ceux des appels en garantie, seront mis à la charge in solidum de la société Socorepa, de la SA SMA, de la SARL DKS cabinet d'architectes, de la société MAF, de la SARL Falières et de la société Groupama Grand Est.

Sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure de première instance, la société Socorepa, la SA SMA, de la SARL DKS cabinet d'architectes, la société MAF, de la SARL Falières et la société Groupama Grand Est seront en outre condamnées in solidum à verser à la copropriété de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 2 000 euros, et à chacune des quatre SCI la somme de 600 euros.

Concernant les frais d'appel, la société Socorepa, la SA SMA, la SARL DKS cabinet d'architectes, la société MAF, la SARL Falières et la société Groupama Grand Est seront condamnées in solidum à les prendre en charge.

Ces mêmes intervenants seront condamnés à verser in solidum à la copropriété de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 15] et aux quatre SCI une somme de 3 500 euros.

Corrélativement, les demandes formulées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par les constructeurs et leurs assureurs seront écartées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile :

INFIRME le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 6 janvier 2021 ;

Et statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT et JUGE que la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand Est, sont tenues à réparation des désordres ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand Est à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 55 000 euros (cinquante-cinq mille euros) avec indexation sur l'indice BT 01 à compter du mois de février 2014, et avec capitalisation par année entière ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand Est à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 3 870,47 euros (trois mille huit cent soixante-dix euros et quarante-sept centimes) avec intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2021 et capitalisation par année entière ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand Est à verser, avec intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2021et capitalisation par année entière :

' à la SCI Axcelia la somme de 4 948,93 euros (quatre mille neuf cent quarante-huit euros et quatre-vingt-treize centimes) ;

' à la SCI Moneypenny la somme de 4 410,01 euros (quatre mille quatre cent dix euros et un centime) ;

' à la SCI Banleward la somme de 4 215,23 euros (quatre mille deux cent quinze euros et vingt-trois centimes) ;

' à la SCI Gileward la somme de 4 723,75 euros (quatre mille sept cent vingt-trois euros et soixante-quinze centimes) ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand Est aux entiers dépens de première instance, dont ceux de la procédure en référé comprenant le coût de l'expertise judiciaire ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand à verser, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance : 

* au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15] la somme de 2 000 euros (deux mille euros) ;

* à la SCI Axcelia, la somme de 600 euros (six cents euros) ;

* à la SCI Moneypenny la somme de 600 euros (six cents euros);

* à la SCI Banleward la somme de 600 euros (six cents euros) ;

* à la SCI Gileward la somme de 600 euros (six cents euros) ;

REJETTE les demandes formulées par la société MAF et la société Groupama Grand Est aux fins de voir opposer aux parties adverses les limites et conditions de leur contrat d'assurance en ce qu'il porte des franchises et des plafonds d'indemnisation ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand Est aux entiers dépens d'appel ;

CONDAMNE in solidum la SASU Socorepa, la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand à verser, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles engagés à hauteur d'appel, la somme globale de 3 500 euros (trois mille cinq cents euros) au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] à [Localité 15], à la SCI Axcelia, à la SCI Moneypenny, à la SCI Banleward et à la SCI Gileward ;

FIXE la part et proportion de responsabilités à hauteur de un tiers, pour chaque binôme suivant

* DKS cabinet d'architectes et son assureur MAF

* Socorepa et SMA,

* Falières et Groupama ;

et CONDAMNE chacun de ces binômes à garantir les autres binômes à hauteur de deux tiers de l'ensemble des condamnations prononcées ;

DÉBOUTE la SA SMA, la SARL D.K.S. cabinet d'architectes, la société MAF, la société Falières et Groupama Grand Est de leurs demandes sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/01070
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;21.01070 ?
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