N° RG 22/04197 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H6SD
Minute N° : 8M 41/2023
Notification par
LRAR aux parties
Copie exécutoire à
Me [Y]
le
Le greffier,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
ORDONNANCE DU 06 JUIN 2023
Audience tenue par Madame DELNAUD, première présidente de la cour d'appel de Colmar, assistée de Mme HOUSER, greffier
APPELANTE :
Madame [F] [B]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
comparante
INTIME :
Maître [M] [Y], avocat inscrit au barreau de Strasbourg, ès qualités d'administrateur de l'étude de Me [X] [D]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
non comparante, non représentée
DEBATS en audience publique du 11 Avril 2023
ORDONNANCE CONTRADICTOIRE du 06 Juin 2023
prononcée publiquement par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Nature de l'affaire : contestation d'honoraires d'avocat
EXPOSE DES MOTIFS
Maître Pascale Millet-Vonesch, avocate inscrite au barreau de Strasbourg, est intervenue au soutien des intérêts de Madame [F] [B], pour l'assister dans une procédure de partage après divorce.
Une convention d'honoraires a été signée le 05 juin 2019 à [Localité 4] par les parties, prévoyant les honoraires de base fixés à la somme de 3 000 euros HT et pour les diligences non couvertes des honoraires complémentaires décomptés à l'heure à un taux de 180 euros HT.
Maître [X] [D] a établi une facture récapitulative le 21 octobre 2021 d'un montant de 14.688 euros TTC et précisant que déduction faite des provisions payées d'un montant de 5.400 euros TTC, le reste à payer est de 9.288 euros TTC.
Madame [F] [B] a saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de [Localité 4] d'une contestation des frais et honoraires le 17 février 2022, réceptionnée à l'Ordre des avocats de [Localité 4] le 18 février 2022.
Par ordonnance du 22 février 2022, et vu l'article 173 du décret du 27 novembre 1991, le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Strasbourg, considérant que Maître [X] [D] était démissionnaire, a désigné Maître [M] [Y], avocate au barreau de Strasbourg, en qualité d'administrateur du cabinet de Maître [X] [D].
Par ordonnance du 17 juin 2022 et conformément à l'article 175 alinéa 3 du décret du 27 novembre 1991, le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de [Localité 4] a prorogé de quatre mois le délai pour statuer.
Par ordonnance du 18 octobre 2022, le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de [Localité 4] a débouté Madame [F] [B] de sa demande, a fixé à la somme de 14.688 euros TTC le montant total des honoraires, et l'a condamnée à verser à Maître [M] [Y], en qualité d'administrateur de l'étude de Maître [X] [D], la somme restant due de 8.088 euros TTC. Le Bâtonnier a ordonné l'exécution provisoire de la décision à hauteur de 1 500 €.
Cette décision a été notifiée à Madame [F] [B] le 20 octobre 2022.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 novembre 2022 enregistrée au greffe de la Cour d'appel de Colmar le 18 novembre 2022, Madame [F] [B] a formé un recours et sollicité l'infirmation de l'ordonnance du 18 octobre 2022.
Par conclusions du 23 février 2023, Maître [M] [Y], agissant en qualité d'administrateur de Maître [X] [D], sollicite le rejet de la contestation formée par Madame [F] [B] ainsi que la confirmation de l'ordonnance du 18 octobre 2022 du Bâtonnier et en conséquence, la fixation des honoraires de Maître [X] [D] à 14.688 euros TTC, étant précisé que Madame [F] [B] s'est acquittée de provisions à hauteur de 6.600 euros TTC et de 1.500 euros au titre de l'exécution provisoire. Il est également sollicité la condamnation de Madame [F] [B] aux entiers frais et dépens de la
procédure, ainsi que le paiement à Maître [M] [Y] es qualité d'une somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de ses prétentions, Maître [M] [Y] reconnait, s'agissant du chèque de 1.200 euros, que la non prise en compte était une erreur et qu'il doit être déduit de la facture récapitulative ainsi que le souligne Madame [B]. Sur la fixation des honoraires, elle fait valoir que Maître [X] [D] a fait une application exacte de la convention, sans avoir facturé deux fois les mêmes tâches dès lors que seules ont été facturées les heures afférentes à la procédure après procès-verbal de difficulté et la procédure incidente. Ainsi que le prévoit l'article 2 de la convention d'honoraires les diligences non couvertes par les honoraires de base telles que présence à expertise et procédure suite à procès-verbal de difficulté, donnent lieu à des honoraires complémentaires, ce qui est le cas en l'espèce. Elle souligne que Maître [X] [D] a été amenée à effectuer un travail important de recherches et de calculs et la rédaction de conclusions.
Par conclusions du 22 mars 2023, Madame [F] [B] fait valoir que le montant des honoraires n'est pas en adéquation avec la convention d'honoraires signée par les parties. Elle soutient en ce sens, d'une part, que Maître [X] [D] a d'abord nié avoir perçu un chèque d'un montant de 1.200 euros, avant de reconnaitre l'avoir encaissé, et d'autre part, que la facture récapitulative ne mentionne qu'un règlement de 5.400 euros TTC, alors même que 8.200 euros TTC ont été réglés. Par ailleurs, elle soutient que le raisonnement effectué par Maître [X] [D] pour établir la facture récapitulative revient à facturer certaines mêmes tâches, à la fois incluses dans l'honoraire de base forfaitaire et dans le décompte taux horaire, notamment pour l'étude du dossier et de l'ensemble des documents remis, les recherches nécessaires pour déterminer la masse active et le chiffrage de la liquidation de la communauté, ou encore le secrétariat et les échanges de mails. Elle invoque un procédé déloyal employé par Maître [X] [D], dès lors que si la convention prévoyait un honoraire forfaitaire d'un montant de 3.600 euros TTC et un honoraire complémentaire décompté au taux horaire à hauteur de 180 euros HT, la procédure de partage judiciaire a été finalement quasi intégralement facturée au taux horaire.
L'affaire a été appelée à l'audience du 7 mars 2023 à laquelle Madame [B], présente, a sollicité un renvoi, accepté par Maitre [T] [L] substituant Maitre [Y]. L'affaire a été renvoyée pour plaider à l'audience du 11 avril 2023, à laquelle Madame [B] a maintenu ses demandes et exposé les éléments contenus dans ses écritures. Maitre [Y] n'a pas comparu.
Par courrier du 12 avril 2023, Maitre [Y], tout en reconnaissant avoir été destinataire d'un avis de renvoi à l'audience du 11 avril 2023 et indiqué que son absence résultait d'une erreur a sollicité la réouverture des débats. Madame [B], soulignant s'être déplacée à [Localité 3] à deux reprises s'est opposée à cette demande qui a été rejetée. Par courrier du 17 avril 2023, Maitre [T] [L] a sollicité la prise en compte de ses écritures et pièces du 23 février 2023.
MOTIFS
Aux termes de l'article 16 du code de procédure civile, il appartient au juge de faire respecter la contradiction. Il est constant que les écritures des parties ont été contradictoirement discutées ; en particulier les conclusions et pièces du 23 février 2023 de Maitre [Y] ont été portées à la connaissance de Madame [B], qui a sollicité un renvoi pour répondre.
Il convient de retenir ces éléments dans le débat.
En application de l'article 176 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, la décision du Bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d'appel, dans le délai d'un mois.
En l'espèce, l'ordonnance, rappelant ces dispositions réglementaires, a été notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception le 20 octobre 2020 et le recours a été formé par demandeur le 17 novembre 2022.
Il convient de le déclarer recevable.
Sur le montant des honoraires
L'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 tel qu'il résulte de la modification de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 prévoit que :
'Les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.
Sauf en cas d'urgence ou de force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat conclut par écrit avec son client une convention d'honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
Les parties ont signé une convention d'honoraires le 5 juin 2019, par laquelle Madame [F] [B] confie à Maitre [X] [D] la défense de ses intérêts dans une procédure de partage.
La rémunération de l'avocat comprend un honoraire de base de 3.600 € TTC, incluant l'étude du dossier, les pourparlers, les interventions auprès de l'expert, les recherches nécessaires pour déterminer la masse active, la rédaction d'un projet de partage, les réunions chez le notaire dans la limite de 2, les déplacements et le suivi du dossier, et des honoraires complémentaires pour les diligences non couvertes telles que la présence à expertise, procédure suite à un procès-verbal de difficultés, facturés 180 € HT de l'heure.
Il convient de relever que cette convention n'a pas de caractère « déloyal », les diligences de l'avocat et donc le cout des honoraires variant logiquement selon que la procédure amiable devant le notaire aboutit à un accord ou qu'une instance est introduite devant le tribunal judiciaire.
Il résulte des pièces versées aux débats que Maitre [D] a facturé 800 € TTC les 5 juin 2019 et 20 septembre 2019, à valoir sur les honoraires. Le procès-verbal de difficulté ayant été établi par Maitre [C] à la date du 27 aout 2019 selon le jugement du 24 février 2022, il en résulte que ces provisions concernent la procédure incluse dans l'honoraire de base, ainsi que l'a relevé le bâtonnier de l'ordre des avocats de [Localité 4], étant observé que Maitre [D] n'a pas facturé les 3.600 € contractuellement prévus.
La facture querellée du 21 octobre 2021, dite récapitulative, concerne donc, ainsi que mentionné en en-tête, « la procédure suite PV de difficulté et la procédure d'incident ». Le détail de cette facture permet de distinguer les travaux préparatoires à l'audience au fond et les travaux dans le cadre de la procédure d'incident.
Au regard de la complexité du dossier, qui nécessitait un travail minutieux pour la prise en compte de l'ensemble des éléments et pièces devant être produits devant la juridiction au bénéfice de Madame [B], le temps passé est adapté. En outre aucun acte n'est facturé deux fois, le travail de l'avocat après le procès-verbal de difficulté nécessitant d'établir dans son intégralité la liquidation du régime matrimonial et de faire de nombreuses demandes (attribution préférentielle, nouvelle fixation de l'indemnité d'occupation, fixation date de jouissance divise, dommages et intérêts). Enfin le taux horaire appliqué est le taux contractuellement prévu.
La décision du bâtonnier fixant les honoraires à 14 688 € TTC sera confirmée.
Sur les sommes versées par Madame [B]
La somme de 1.600 € versée par Madame [B] suite aux factures des 5 juin et 20 septembre 2019 n'a pas à être déduite de la facture récapitulative, dès lors que celle-ci ne concerne que les honoraires dus pour la procédure sur incident et après procès-verbal de difficulté, en application de la convention. Par suite, cette facture n'inclut pas l'honoraire de base ni les provisions versées à ce titre.
Le bâtonnier a par conséquent justement retenu que Madame [B] a réglé 6.600 € au titre de la facture récapitulative.
Sur la demande au titre des frais irrépétibles
Il serait inéquitable de laisser à la charge de Maitre [Y], es qualité d'administrateur du cabinet de Maitre [D] la totalité des frais irrépétibles engagés au cours de présente instance. Madame [B] sera condamnée au paiement de la somme de 200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant par décision contradictoire mise à disposition au greffe,
Déclarons l'appel recevable,
Confirmons l'ordonnance du Bâtonnier de l'ordre des avocats de [Localité 4] du 18 octobre 2022,
Y ajoutant,
Condamnons Madame [F] [B] à payer à Maitre [Y], es qualité d'administrateur du cabinet de Maitre [D] la somme de 200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamnons Madame [F] [B] aux dépens.
La greffière, La première présidente,