La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2023 | FRANCE | N°21/04536

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 a, 06 juin 2023, 21/04536


ÀGLQ/KG





MINUTE N° 23/485

















































Copie exécutoire

aux avocats



Copie à Pôle emploi

Grand Est



le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



ARRET DU 06 JUIN 2023



Numéro d'inscription au rÃ

©pertoire général : 4 A N° RG 21/04536

N° Portalis DBVW-V-B7F-HWJV



Décision déférée à la Cour : 12 Octobre 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG



APPELANTE :



Madame [W] [L]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Corinne ZIMMERMANN, avocat au barreau de STRASBOURG



INTI...

ÀGLQ/KG

MINUTE N° 23/485

Copie exécutoire

aux avocats

Copie à Pôle emploi

Grand Est

le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

ARRET DU 06 JUIN 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/04536

N° Portalis DBVW-V-B7F-HWJV

Décision déférée à la Cour : 12 Octobre 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [W] [L]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Corinne ZIMMERMANN, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE :

S.A. ALSACE HABITAT

prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 548 501 360

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Franck MERKLING, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme DORSCH, Président de Chambre, et M. LE QUINQUIS, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. PALLIERES, Conseiller

M. LE QUINQUIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme ARMSPACH-SENGLE

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

- signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 25 juin 1984, Mme [W] [L] a été embauchée en qualité de secrétaire par la S.A.E.M. SOCIETE IMMOBILIERE DU BAS-RHIN (SIBAR). Mme [W] [L] bénéficie du statut cadre depuis 1998. Par avenant du 20 mars 2003, elle a été nommée chef de service des affaires générales à compter du 1er mars 2003.

Le 25 juillet 2018, suite à la fusion des sociétés SIBAR et LA STRASBOURGEOISE HABITAT intervenue à la fin de l'année 2017, Mme [W] [L] a adressé à son employeur un courrier pour se plaindre de l'absence d'évolution de sa rémunération, de sa classification, de sa rétrogradation dans le nouvel organigramme issu de la fusion des deux sociétés et d'une mise à l'écart s'analysant en un harcèlement moral.

Le 15 juillet 2019, Mme [W] [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Strasbourg pour faire reconnaître une situation de harcèlement moral et de discrimination salariale.

Mme [W] [L] a été placée en arrêt de maladie du 04 décembre 2019 au 22 septembre 2020. A l'issue de la visite médicale de reprise, le médecin du travail a émis un avis d'inaptitude de la salariée, précisant que l'état de santé de la salariée faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Par courrier du 22 octobre 2020, la S.A.E.M. ALSACE HABITAT, anciennement dénommée SIBAR, a notifié à Mme [W] [L] son licenciement pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.

Par jugement du 12 octobre 2021, le conseil de prud'hommes a débouté Mme [W] [L] de l'ensemble de ses demandes.

Mme [W] [L] a interjeté appel le 27 octobre 2021.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 janvier 2022, Mme [W] [L] demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :

- dire qu'elle a subi des agissements de harcèlement moral.

- dire qu'elle a subi une rétrogradation en termes de fonction et de responsabilités,

- dire qu'elle est victime de discrimination salariale,

- dire qu'elle peut prétendre à la classification conventionnelle C3,

- dire que le licenciement est nul,

- condamner la S.A.E.M. ALSACE HABITAT, anciennement dénommée SIBAR, au paiement des montants suivants :

* 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement et rétrogradation,

* 11 624,80 euros à titre d'arriérés de salaire pour la période de mars à décembre 2016, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 1 162,48 euros à titre d'arriérés de congés payés sur salaire pour la période de mars à décembre 2016, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 13 949,76 euros à titre d'arriérés de salaire pour l'`année 2017, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 1 394,97 euros à titre d'arriérés de congés payés sur salaire pour l'année 2017, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 13 949,76 euros à titre d'arriérés de salaire pour l'année 2018, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 1 394,97 euros à titre d'arriérés de congés payés sur salaire pour l'année 2018, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 2 329,96 euros à titre d'arriérés de salaire pour les mois de janvier et février 2019, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 233 euros à titre d'arriérés de congés payés sur salaire pour les mois de janvier et février 2019, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 1 015,60 euros à titre de régularisation de prime d'assiduité pour la période de mars à décembre 2016, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 1 218,72 euros à titre de régularisation de prime d'assiduité pour l'année 2017, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l'employeur de la convocation par le greffe,

* 812,48 euros à titre de régularisation de prime d'assiduité pour l'année 2018, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l°employeur de la convocation par le greffe,

* 203,12 euros à titre de régularisation de prime d'assiduité pour les mois de janvier et février 2019, augmentés des intérêts légaux à compter de la réception par l"emp1oyeur de la convocation par le greffe,

* 76 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- condamner la S.A.E.M. ALSACE HABITAT à régler mensuellement jusqu'au licenciement :

* un salaire de base de 3 815 euros brut,

* une prime d'ancienneté de 123,50 euros brut,

* une prime d'assiduité de 343,35 euros brut,

- condamner la S.A.E.M. ALSACE HABITAT à délivrer des bulletins de salaire rectifiés pour la période de mars 2016 à ce jour, rémunération avec justification du paiement des charges afférentes,

- condamner la S.A.E.M. ALSACE HABITAT à faire apparaître sur les bulletins de salaire la classification conventionnelle C3,

- condamner la S.A.E.M. ALSACE HABITAT au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner la S.A.E.M. ALSACE HABITAT aux éventuels frais et dépens y compris l'intégralité des frais émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution de la décision à intervenir par voie d'huissier et en particulier tous les droits de recouvrement ou d'encaissement sans exclusion du droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du créancier.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 14 avril 2022, la S.A.E.M. ALSACE HABITAT, anciennement dénommée SIBAR demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter Mme [W] [L] de ses demandes et de la condamner aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un exposé plus complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux écritures précitées, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 07 septembre 2022. L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 17 mars 2023 et mise en délibéré au 06 juin 2023.

MOTIFS

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L. 1152-2, dans sa version applicable au présent litige, prévoit par ailleurs qu'aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Pour caractériser l'existence d'un harcèlement moral, Mme [W] [L] invoque tout d'abord le comportement et le harcèlement auquel se serait livré M. [J] [A], directeur général, à son égard. Pour en justifier, elle produit un courriel qu'elle a adressé à M. [A] le 29 juillet 2009 dans lequel elle fait état d'une attitude « enthousiaste » de M. [A] à son égard et lui explique notamment qu'elle souhaite que leur relation se limite à un cadre strictement professionnel. Elle produit par ailleurs deux attestations de salariées, la première établie par Mme [D] [H] qui déclare avoir subi des gestes déplacés de la part de M. [A] lorsqu'elle était salariée de la SIBAR entre 1992 et 1998 mais qui ne fait état d'aucun fait dont aurait été victime Mme [W] [L] et dont elle aurait été le témoin direct, la seconde établie par Mme [W] [U], chef de projet immobilier, qui témoigne de l'attitude autoritaire et agressive de M. [A] et qui fait état de rumeurs et des récits que lui a fait Mme [W] [L] sur le comportement du directeur à son égard mais qui ne rapporte aucun comportement de la part de M. [A] à l'égard de sa collègue dont elle aurait été le témoin direct.

Il sera également relevé que, si Mme [W] [L] soutient qu'elle aurait fait l'objet de mise à l'écart, d'humiliations et de rétrogradation de la part de M. [A], elle ne fait état d'aucun comportement précis et circonstancié du directeur général à son égard et qui serait susceptible d'être qualifié de harcèlement. Elle soutient uniquement qu'elle aurait été écarté d'un projet de résidence senior dans lequel elle se serait investie, sans produire d'élément pour en justifier. Il sera relevé au contraire que la mise à l'écart dont elle se plaint se trouve contredite par un courriel adressé au président, M. [N] [T], le 11 janvier 2017, dans lequel elle fait état de la mission d'intérim de la direction générale qui lui avait été confiée par M. [A] au mois de juillet 2013 en y voyant la preuve d'une confiance et d'une reconnaissance de ses capacités. Le comportement de harcèlement allégué de la part du directeur général n'apparaît donc pas matériellement établi par la salariée.

Mme [W] [L] soutient également qu'elle aurait fait l'objet d'une mise à l'écart et d'une rétrogradation dans la nouvelle organisation mise en place à l'occasion de la fusion de la SIBAR et de la STRASBOURGEOISE HABITAT en 2017. Il résulte des pièces produites par les parties que l'organisation qui existait au sein de la société SIBAR a été profondément remaniée à l'occasion de cette fusion, ce qui a entraîné une évolution significative du poste de Mme [W] [L] qui justifie par ailleurs qu'à l'occasion d'un entretien professionnel avec M. [J] [A] le 28 novembre 2018, elle a fait état d'une dégradation de l'environnement de travail et de la suppression de certaines de ses missions. Cet élément, susceptible de laisser supposer l'existence d'une situation de harcèlement moral, apparaît matériellement établi.

Mme [W] [L] reproche enfin à son employeur une discrimination dans l'accès aux postes de responsabilité par rapport à d'autres salariés se trouvant dans une situation équivalente qui auraient bénéficié d'une promotion à un niveau hiérarchique plus élevé que le sien. Les pièces produites, notamment les nouveaux organigrammes, montrent en effet que des salariés qui occupaient comme Mme [W] [L] un poste de chef de service au sein de la SIBAR, sont positionnés comme chefs de pôle suite à l'opération de fusion. Cet élément apparaît donc matériellement établi.

S'agissant de la modification du poste de Mme [W] [L] dans le cadre de la nouvelle organisation, la S.A.E.M. ALSACE HABITAT, anciennement dénommée SIBAR justifie que ce poste n'a pas été supprimé mais que l'organisation des services a été modifiée. L'employeur explique que la SIBAR était organisée en sept services placés sous l'autorité de la direction générale, Mme [W] [L] occupant le poste de chef du service des affaires générales, et que, dans le cadre de la fusion, les sept services ont été regroupés en trois pôles. L'employeur fait valoir que Mme [W] [L] est désormais responsable du service communication-vente au sein du pôle location-vente et que sa position hiérarchique est restée inchangée. L'examen du nouvel organigramme permet à ce titre de constater que la création de chefs de pôle correspond à la création d'un niveau hiérarchique intermédiaire entre les responsables de service et la direction, ce qui se justifie par l'augmentation de la taille de l'entreprise. La fiche de poste produite par la salariée permet en outre de constater que si certaines missions qui lui étaient confiées antérieurement n'apparaissent plus (celles relatives à la vie sociale, aux conseils d'administration, aux assemblées générales, aux commissions d'appel d'offre), elle se voit toujours confier la communication ainsi que la commercialisation et la vente de logement. L'employeur précise que, pour cette mission, la charge de travail a augmenté significativement, Mme [W] [L] devant dorénavant suivre la vente de quarante logements par an, au lieu d'une vingtaine pour les années antérieures. Ainsi, l'employeur démontre que l'évolution des missions de Mme [W] [L] correspond à sa qualification et à ses compétences, étant relevé qu'elle s'est portée candidate à ce poste de responsable du service communication-vente dans un courriel du 16 novembre 2017. Enfin, la modification de l'intitulé de son emploi sur son bulletin de paie du mois de juillet 2020 (« commercialisateur accession et vente » au lieu de « chef de service ») ne permet pas d'établir que le poste occupé par la salariée aurait alors fait l'objet d'une mise à l'écart ou d'une rétrogradation. Au vu des explications fournies par l'employeur, il convient de constater que l'évolution du poste de Mme [W] [L] dans le cadre de la fusion de la SIBAR et de la STRASBOURGEOISE HABITAT est sans lien avec une situation de harcèlement moral.

S'agissant de l'accès aux postes de chefs de pôle, la S.A.E.M. ALSACE HABITAT, anciennement dénommée SIBAR justifie que les salariés qui apparaissent comme chefs de pôle sur l'organigramme du 27 mars 2018 (Mme [G] et MM. [C], [E], [M] [O] et [X] [O]) disposent d'une qualification supérieure à celle de Mme [W] [L], de même que Mme [K] [Z] dont le niveau hiérarchique est resté identique au sien. Au vu des explications de l'employeur, le fait de ne pas attribuer à Mme [W] [L] un poste de chef de pôle dans la nouvelle organisation apparaît donc sans lien avec une situation de harcèlement moral.

Le harcèlement moral allégué par Mme [W] [L] n'apparaît donc pas démontré et le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [W] [L] des demandes présentées à ce titre.

Sur la discrimination salariale

Selon le principe « à travail égal, salaire égal » dont ''inspirent les articles L. 1242-14, L. 1242-15, L. 2261-22-9°, L. 2271-1-8° et L. 3221-2 du code du travail, tout employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale. Sont considérés comme ayant une valeur égale par l'article L. 3221-4 du code précité les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

S'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.

En l'espèce, Mme [W] [L] est classée au niveau C2 de la convention collective et revendique l'application du niveau C3, ce qui correspond selon elle au classement des autres cadres chefs de services. Il apparaît toutefois que Mme [W] [L] se compare avec des salariés dont le niveau de qualification est supérieur au sien. Ainsi M. [X] [O], responsable du pôle administratif juridique et financier, classé C4, est titulaire d'un diplôme de niveau II en comptabilité. Mme [F] [G], responsable du pôle gestion locative-vente, classée C3, détient un diplôme de niveau I ou II (bac +5). Mme [W] [U] et M. [P] [E], chargés d'opération, classés C3, détiennent quant à eux un diplôme d'ingénieur.

Mme [W] [L] fait certes valoir que certains salariés (M. [V] [C] et M. [M] [O]) bénéficient de la qualification C3, ce qui correspond dans la convention collective à un diplôme de niveau I ou II, alors qu'ils ne disposent d'un diplôme de niveau III (bac +2). La correspondance entre la classification et le niveau de diplôme est toutefois mentionné à titre indicatif dans la convention collective. Force est de constater à ce titre que Mme [W] [L] bénéficie elle aussi d'une classification supérieure à celle à laquelle sa qualification lui permettrait de prétendre puisqu'en étant titulaire d'un diplôme de niveau IV (bac) elle bénéficie d'une classification C2 pour laquelle un diplôme de niveau III est théoriquement requis.

Il résulte de ces éléments que les salariés présents dans l'entreprise auxquels Mme [W] [L] se compare et qui relèvent d'une classification C3 ou supérieure ont tous un niveau de formation supérieur au sien, ce qui justifie la différence de classification.

Mme [W] [L] ne démontre pas non plus que ses fonctions ne correspondent pas à la classification C2.

Au vu de ces éléments, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [W] [L] de sa demande au titre de la discrimination salariale ainsi que de ses demandes de classification conventionnelle au niveau C3 et de rappel de salaires et de primes.

Il résulte par ailleurs de l'ensemble de ces éléments que la demande de nullité du licenciement pour harcèlement et discrimination n'est pas fondée et le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [W] [L] de cette demande.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme [W] [L] aux dépens et débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de l'issue du litige, il convient de condamner Mme [W] [L] aux dépens de la procédure d'appel. Par équité, Mme [W] [L] sera en outre condamnée à payer à la S.A.E.M. ALSACE HABITAT, anciennement dénommée SIBAR la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle sera par ailleurs déboutée de la demande présentée sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Strasbourg du 12 octobre 2021 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [W] [L] aux dépens de la procédure d'appel ;

CONDAMNE Mme [W] [L] à payer à la S.A.E.M. ALSACE HABITAT, anciennement dénommée SIBAR la somme de 2 000 euros (deux mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE Mme [W] [L] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 06 juin 2023, signé par Madame Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Martine Thomas, Greffier.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 a
Numéro d'arrêt : 21/04536
Date de la décision : 06/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-06;21.04536 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award