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05/06/2023 | FRANCE | N°22/00071

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 3 a, 05 juin 2023, 22/00071


MINUTE N° 23/226





























Copie exécutoire à :



- Me Sophie BEN AISSA-ELCHINGER

- Me Emmanuelle LIESS-NUSSBAUMER





Le



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 05 Juin 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/00071 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H

XT5



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 08 décembre 2021 par le juge des contentieux de la protection d'Illkirch-Graffenstaden



APPELANTE :



Madame [T] [E]

[Adresse 1]

[Localité 3]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numér...

MINUTE N° 23/226

Copie exécutoire à :

- Me Sophie BEN AISSA-ELCHINGER

- Me Emmanuelle LIESS-NUSSBAUMER

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 05 Juin 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/00071 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HXT5

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 08 décembre 2021 par le juge des contentieux de la protection d'Illkirch-Graffenstaden

APPELANTE :

Madame [T] [E]

[Adresse 1]

[Localité 3]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022-000025 du 25/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)

Représentée par Me Sophie BEN AISSA-ELCHINGER, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉE :

S.A.S. SOGEFINANCEMENT

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuelle LIESS-NUSSBAUMER, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées

dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Suivant offre de crédit «  expresso » acceptée en date du 27 mars 2018, la Sas Sogefinancement a accordé à Madame [T] [E] un prêt d'un montant de 31 500 € remboursable au moyen de 84 mensualités réglées par prélèvement Sepa au débit du compte, d'un montant de 427,67 €, au taux contractuel de 3,80 % l'an avec un Taeg fixe de 5,12 %.

Un avenant est intervenu le 19 juillet 2019 aux termes duquel le montant réaménagé de 27 585,36 € sera remboursé en 72 men- sualités de 429,07 €.

Par lettre recommandée du 9 janvier 2020, non retirée par son destinataire, la Sas Sogefinancement a mis en demeure Madame [T] [E] de régulariser les mensualités impayées d'un montant global de 1 496,32 € et ce, dans un délai de quinze jours sous peine de déchéance du terme.

Par ordonnance d'injonction de payer en date du 7 juillet 2020, Madame [T] [E] a été condamnée à payer à la Sas Sogefinancement la somme de 25 355,36 € en principal au titre du solde du crédit Expresso consenti le 27 mars 2018, et ce, sans intérêt suite à déchéance du droit aux intérêts appliqués.

Cette ordonnance a été signifiée à Madame [T] [E] par dépôt en l'étude de l'huissier instrumentaire le 15 septembre 2020 et elle y a formé opposition par lettre recommandée expédiée le 14 octobre 2020.

Devant le tribunal de proximité d' Illkirch Graffenstaden, la Sas Sogefinancement a réclamé le paiement des sommes de :

- 1 806,99 € au titre des mensualités impayées,

- 25 865,92 € au titre du capital restant dû, le tout avec intérêts au taux conventionnel annuel de 3,80 % l'an à compter du 11 février 2020,

- 2 179,31 € au titre de l'indemnité légale de 8 %,

- 13,06 € au titre des intérêts échus au jour de la déchéance du terme,

- 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [T] [E] a résisté aux demandes en opposant en premier lieu la nullité de la requête en injonction de payer. Au fond, elle a notamment remis en cause la validité de certaines clauses du contrat, a conclu à la nullité de la déchéance du terme et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de la Sas Sogefinancement à lui payer la somme de 8 000 € à titre de dommages intérêts pour manquement à l'obligation de mise en garde et a demandé la levée du fichage à la Banque de France.

Par jugement en date du 8 décembre 2021, le tribunal ainsi saisi a :

- Déclaré recevable l'opposition formée par Madame [T] [E] à l'ordonnance d'injonction de payer du 7 juillet 2020,

- Mis à néant ladite ordonnance et statuant à nouveau :

- Rejeté toute exception de nullité relative à la requête en injonction de payer,

- Déclaré régulière la déchéance du terme prononcée par la Sas Sogefinancement relativement au crédit à la consommation souscrit le 27 mars 2018 par Madame [T] [E],

- Prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts et cela à compter de la conclusion du contrat,

- Condamné Madame [T] [E] à payer à la Sas Sogefinancement la somme de 25 391,22 € au titre du capital restant dû,

- Dit que ce capital ne produira pas intérêts, ni au taux conventionnel ni au taux légal,

- Débouté Madame [T] [E] de sa demande reconventionnelle en délais de paiement,

- Débouté Madame [T] [E] de sa demande reconventionnelle en dommages intérêts,

- Débouté Madame [T] [E] de sa demande en défichage des fichiers de la Banque de France,

- Débouté la Sas Sogefinancement de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné Madame [T] [E] aux dépens qui comprendront les dépens de la procédure d'injonction de payer hors frais de requête et frais accessoires,

- Rappelé que la présente décision est exécutoire de droit par provision.

Madame [T] [E] a interjeté appel à l'encontre de cette décision suivant déclaration en date du 3 janvier 2022 et par dernières écritures notifiées le 19 février 2023, elle demande à la cour de :

Sur l'appel principal

-déclarer l'appel recevable et bien fondé,

Y faisant droit,

-infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré régulière la déchéance du terme prononcée par la Sas Sogefinancement, en ce qu'il l'a condamnée à payer à la Sas Sogefinancement la somme de 25 391,22 € au titre du capital restant dû, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages intérêts, de sa demande reconventionnelle en délais de grâce et de sa demande au titre du défichage des fichiers de la Banque de France et en ce qu'il l'a condamnée aux dépens,

Et statuant à nouveau,

-déclarer nulle et non fondée la déchéance du terme prononcée par la Sas Sogefinancement,

En conséquence,

-débouter la Sas Sogefinancement de l'ensemble de ses demandes,

-condamner la Sas Sogefinancement à payer à Madame [T] [E] une somme de 8 000 € à titre de dommages intérêts,

-ordonner la levée du fichage Banque de France lié aux incidents de paiement concernant ce prêt,

-suspendre le paiement des échéances du prêt pour une durée de six mois,

-condamner la Sas Sogefinancement aux entiers dépens des procédures de première instance et d'appel ainsi qu'à verser à Madame [T] [E] une somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-confirmer le jugement déféré pour le surplus,

Sur l'appel incident

-rejeter l'appel incident formé par la Sas Sogefinancement

-la débouter de l'ensemble de ses demandes.

Par uniques écritures notifiées le 30 juin 2022, la Sas Sogefinancement demande à la cour de :

Sur l'appel principal

-dire et juger l'appel mal fondé,

En conséquence :

-en débouter l'appelante,

-confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer et l'a mise à néant, a rejeté toute exception de nullité relative à la requête en injonction de payer, a déclaré régulière la déchéance du terme prononcée, a débouté Madame [T] [E] de ses demandes reconventionnelles en délais de paiement et en dommages intérêts ainsi que de sa demande en « défichage » des fichiers de la Banque de France et en ce qu'il l'a condamnée aux dépens,

Sur l'appel incident

-le dire recevable et bien fondé,

-infirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts à compter de la conclusion du contrat, en ce qu'il a condamné Madame [T] [E] à lui payer la somme de 25 391,22 € au titre du capital restant dû, a dit que ce capital ne produira pas d'intérêt ni au taux conventionnel ni au taux légal et l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau :

-dire et juger qu'il n'y a pas lieu à déchéance du droit aux intérêts,

Par conséquent :

-condamner Madame [T] [E] à lui payer :

* la somme de 1 806,99 € au titre des mensualités impayées,

* la somme de 25 865,92 € au titre du capital restant dû,

avec les intérêts au taux conventionnel annuel de 3,80 % à compter du 11 février 2020,

* la somme de 2 179,31 € au titre de la pénalité légale du 8 % avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,

-condamner Madame [T] [E] à lui payer la somme de 1 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance ainsi qu'une somme de 2 000 € au titre de la procédure d'appel,

-condamner Madame [T] [E] aux entiers frais et dépens y compris ceux de la procédure d'injonction de payer.

MOTIFS

Vu les dernières écritures des parties ci-dessus spécifiées et auxquelles il est référé pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, en application de l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu les pièces régulièrement communiquées ;

À titre liminaire, il convient de constater qu'aucune des parties ne remet en cause les dispositions du jugement déféré en ce qu'elles ont déclaré l'opposition formée par Madame [T] [E] à l'ordonnance d'injonction de payer litigieuse recevable et l'ont mise à néant et de même en ce qu'a été rejetée toute exception de nullité relative à la requête en injonction de payer.

Sur la nullité de la déchéance du terme

Madame [T] [E] ne conteste plus à hauteur de cour que la banque a satisfait à son obligation de délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle, avant de prononcer la déchéance du terme.

Le premier juge a en effet justement analysé les faits de la cause et a appliqué les règles de droit qui s'imposaient pour déterminer, par des motifs pertinents que la cour adopte, que la mise en demeure expédiée le 9 janvier 2020 valait à l'échéance des quinze jours de délai annoncés, déchéance du terme, faute de preuve de régularisation.

Madame [T] [E] soutient désormais à hauteur de cour qu'elle demeure fondée à soulever la nullité de la déchéance du terme en raison du fait qu'elle bénéficiait d'une facilité de caisse pour un montant de 4 000 €, dont la banque n'aurait pas tenu compte, rejetant de manière abusive les prélèvements des mensualités du prêt qui lui étaient présentés. Elle ajoute qu'elle bénéficiait par ailleurs d'un contrat « Qietis » pour lequel elle versait une cotisation et que la banque n'a pas fait application du contrat.

Elle produit notamment, au soutien de ses allégations, un document intitulé « facilité de caisse - conditions générale notice d'information » à l'en-tête de la Société Générale ainsi qu'un avenant, également à l'en-tête de la Société Générale en date du 17 avril 2019 indiquant « votre facilité de caisse a été modifiée comme suit : la Société Générale vous autorise à utiliser aux conditions indiquées dans les conditions générales, sur votre compte désigné ci-avant, une facilité de caisse d'un montant de 4000 €, pour de courtes durées renouvelables ne devant pas excéder 15 jours consécutifs ou non par mois calendaire, le compte devant redevenir créditeur'.

Pour autant, Madame [E] ne peut, en vertu de l'effet relatif des contrats, opposer à la Sas Sogefinancement des actes et contrats qu'elle a conclus avec la Sa Société Générale, cette société et sa filiale la Sas Sogefinancement, constituant deux personnes morales distinctes.

À supposer que la Sa Société Générale,  sous l'égide de laquelle a été conclu le contrat de crédit litigieux pour le compte du prêteur la Sas Sogefinancement, ait commis une faute dans l'exécution du contrat d'ouverture de compte bancaire la liant à Madame [E], Madame [E] disposerait alors d'une action en responsabilité à l'encontre de son banquier.

Mais cette circonstance, à la supposer avérée, ne peut influer dans les relations entre les parties au contrat de crédit, soit la Sas Sogefinancement en qualité de prêteur et Madame [E] en qualité d'emprunteur.

Madame [E] soutient ensuite qu'aucun prélèvement de mensualités n'a été effectué sur son compte fin septembre 2019 ni fin octobre 2019, les relevés de compte bancaire en ligne ne faisant mention ni d'un prélèvement ni d'un rejet et qu'en date du 5 novembre 2019 s'est présenté un prélèvement d'un montant de 563,19 € qu'elle a contesté.

L'appelante ne produit cependant pas les relevés de son compte bancaire pour les mois de septembre et octobre 2019.

Elle ne justifie pas n' avoir été débitrice d'aucune somme à la date d'expédition de la lettre de mise en demeure ni avoir régularisé l'arriéré dans le délai de quinze jours qui lui était octroyé pour faire obstacle à la déchéance du terme.

Les arguments développés par Madame [E] pour s'opposer à la déchéance du terme n'apparaissant pas fondés, il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a déclaré régulière la déchéance du terme prononcée par la Sas Sogefinancement relativement au crédit à la consommation souscrit le 27 mars 2018 par Madame [T] [E].

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Pour déchoir la banque de son droit aux intérêts aux intérêts, le premier juge, au visa des articles L312-16 et L341-2 du code de la consommation, a considéré que la Sas Sogefinancement, sur laquelle repose la charge de la preuve d'avoir effectivement consulté le fichier prévu à l'article L751-1, se borne à produire aux débats une synthèse établie par ses soins comportant une « clé bdf » qui ne correspond pas à un code d'identification sécurisé, communiqué par le Ficp lors d'une consultation, mais seulement à la date de naissance de l'emprunteur immédiatement suivie des cinq premières lettres de son nom. Il a estimé que la mention d'une telle clé, dont le prêteur dispose des éléments constitutifs, qu'il peut donc façonner lui-même, en indiquant la date de son choix pour la consultation, réelle ou supposée, ne peut constituer la preuve de la consultation exigée par les dispositions susvisés.

La Sas Sogefinancement, qui demande l'infirmation du jugement déféré de ce chef, ne conteste la décision du juge des contentieux de la protection qu'en ce que la motivation du jugement sous entend qu'elle aurait pu façonner pour les besoins de la cause le document qu'elle verse au débat comme justificatif de la consultation par elle du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.

Il est de droit constant que l'organisme de crédit doit rapporter la preuve de la consultation en temps et heure du fichier national des incidents de remboursement des crédits.

Or, l'intimée ne conteste pas que le document qu'elle produit pour justifier de l'exécution par elle de son obligation de consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits est objectivement dépourvu de toute force probante en tant qu'il constitue une pièce que l'intimée s'est constituée à elle-même et qui ne permet en aucun cas de se convaincre de l'effectif respect, par elle, des dispositions de l'article L312- 16 sus-visé.

La Sas Sogefinancement, ne rapportant pas la preuve d'avoir respecté les dispositions de l'article L312-16 du code de la consommation s'agissant de la consultation du FICP, la déchéance totale du droit aux intérêts sera prononcée sans qu'il soit même nécessaire d'examiner le bien-fondé du second cas de déchéance du droit aux intérêts, retenu par le premier juge.

La Sas Sogefinancement ne conteste pas, même à titre subsidiaire, les dispositions du jugement déféré par lesquelles il a été jugé que le capital restant dû ne produira pas intérêts au taux légal.

La décision déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a condamné Madame [T] [E] à payer à la Sas Sogefinancement la somme de 25 391,22 € au titre du capital restant dû et a dit que ce capital ne produira pas intérêts ni au taux conventionnel ni au taux légal.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par Madame [T] [E]

En vertu de l'article 1353 du code civil, celui qui se prévaut d'une obligation doit la prouver.

Comme devant le premier juge, Madame [T] [E] soutient que la banque a manqué à son devoir de mise en garde quant au risque d'endettement excessif susceptible de découler de l'octroi du crédit litigieux. Elle explique à cet égard que, lors de la souscription du prêt litigieux, elle était âgée de 63 ans, avait le statut de personne handicapée et bénéficiait d'une pension d'invalidité d'un montant de 633 € ; qu'au moment de sa mise à la retraite le montant de cette pension est passé à la somme de 391 € et que la banque aurait dû l'alerter sur les conséquences prévisibles d'une baisse de revenus.

Le premier juge a très exactement précisé le cadre juridique dans lequel s'inscrit l'action en responsabilité de la banque pour manquement à son obligation de mise en garde et la cour se réfère expressément aux énonciations du jugement déféré de ce chef.

Pour rejeter la demande de Madame [E], il a relevé que la fiche de dialogue remplie par cette dernière lors de la souscription du crédit faisait état d'une rémunération d'un montant de 2 100 € par mois correspondant à une pension d'invalidité et à sa majoration et d'une absence de charges de logement ou de crédit. Il a retenu qu'au vu de ces seuls éléments, le risque d'endettement n'est pas précisément établi au vu des capacités financières déclarées et qu'en tout état de cause, Madame [E] n'établit pas la réalité de la baisse de ses revenus pas plus que l'inadaptation du prêt à l'évolution de ses revenus.

Force est de constater que Madame [T] [E], à laquelle incombe la charge de la preuve de l'inadéquation du prêt à ses capacités financières lors de la souscription du crédit ne produit, pas plus qu'elle ne l'avait fait devant le premier juge, d'élément justificatif de sa situation financière que ce soit au jour de la souscription du crédit litigieux ou que ce soit postérieurement à sa mise à la retraite, dont elle ne justifie d'ailleurs pas.

Elle n'apporte ainsi aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations.

En l'état du seul élément d'appréciation dont dispose la cour, soit la fiche de dialogue remplie par Madame [E] lors de la souscription du crédit litigieux qui mentionne les revenus et charges déclarés, tels que mentionné supra, il ne peut qu'être retenu avec le premier juge que Madame [E] n'établit pas que la banque était tenue d'un devoir de mise en garde à son égard lors de la souscription du crédit litigieux, quand bien même une mise à la retraite était prévisible.

La décision déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de dommages intérêts de Madame [T] [E] pour manquement de la Sas Sogefinancement à l'obligation de mise en garde.

Madame [E] invoque ensuite un manquement de la Sas Sogefinancement à une obligation de conseil : elle explique que les conditions générales du contrat de crédit Expresso lui permettaient de faire reporter sans frais ses mensualités de remboursement jusqu'à trois fois par an de manière à pallier un imprévu et que cette possibilité ne lui a jamais été proposée alors même qu'elle était régulièrement en contact avec son conseiller bancaire, l'informant des difficultés qu'elle rencontrait. Elle ajoute avoir sollicité à plusieurs reprises des rendez-vous auprès de son agence bancaire afin d'étudier la possibilité d'organiser un regroupement de crédit et de souscrire un prêt à taux zéro, auquel elle avait droit en qualité de personne en situation de handicap et de primo accédante.

Cependant, il appartenait à Madame [E], pour le cas où les difficultés de paiement qu'elle a rencontré à la fin de l'année 2019, n'étaient que purement conjoncturelles et passagères, de solliciter elle-même le cas échéant, le report des mensualités impayées, comme le prévoyait le contrat.

Elle ne justifie au demeurant pas qu'elle aurait été en capacité de faire face à ses obligations et de reprendre le cours normal des paiements si un report avait été accepté.

Elle prétend encore que la banque a tout fait pour créer une situation d'endettement à son détriment en lui retirant sans information préalable ni préavis la facilité de caisse dont elle bénéficiait et en portant au débit de son compte de nombreux frais injustifiés.

Encore une fois, Madame [E], qui se trompe d'adversaire, ne peut engager la responsabilité de la Sas Sogefinancement pour des faits qu'elle impute à la Sa Société Générale dans le cadre de l'exécution du contrat d'ouverture de compte bancaire qu'elle a souscrite auprès de cette dernière.

Il résulte de l'ensemble de ces énonciations que Madame [T] [E] échoue, comme devant le premier juge, dans son action en responsabilité dirigée contre la Sas Sogefinancement et que le jugement déféré devra être confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de la somme de 8 000 € à titre de dommages intérêts.

Il conviendra dès lors de confirmer également le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande tendant à voir lever le fichage de Madame [E] auprès de la Banque de France.

Sur la demande de délais de paiement

En vertu de l'article L314-20 du code de la consommation, dont Madame [T] [E] se prévaut pour solliciter la suspension du paiement des échéances du prêt pour une durée de six mois, l'exécution des obligations du débiteur peut être, notamment en cas de licenciement, suspendue par ordonnance du juge des contentieux de la protection dans les conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil.

Il ne peut être fait droit à cette demande dès lors que, d'une part, Madame [T] [E] ne justifie pas de ses revenus et de ses charges, et que d'autre part, elle n'indique pas en quoi elle serait, au terme du délai de grâce qu'elle sollicite, en capacité de régler la somme de 25 391,22 € qui serait alors exigible.

La demande ne peut qu'être dès lors rejetée, Madame [E] devant le cas échéant, s'orienter vers une procédure de surendettement.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dispositions du jugement déféré quant aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

Partie perdante à hauteur d'appel, Madame [E] sera condamnée aux dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En revanche, il sera fait droit à la demande formée par la Sas Sogefinancement au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans la limite de la somme de 1 000 €.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant,

REJETTE la demande de suspension de paiement des échéances du prêt pour une durée de six mois,

CONDAMNE Madame [T] [E] à payer à la Sas Sogefinancement la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE Madame [T] [E] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Madame [T] [E] aux dépens d'appel.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 3 a
Numéro d'arrêt : 22/00071
Date de la décision : 05/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-05;22.00071 ?
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