(GLQ/KG
MINUTE N° 23/468
Copie exécutoire
aux avocats
Copie à Pôle emploi
Grand Est
le
Le greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION A
ARRET DU 26 MAI 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/01892
N° Portalis DBVW-V-B7F-HRZA
Décision déférée à la Cour : 16 Mars 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE COLMAR
APPELANT :
Monsieur [B] [T]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Benoît NICOLAS, avocat au barreau de COLMAR
INTIMEES :
S.A.S.U. 3MA GROUP
Prise en la personne de son représentant légal
N° SIRET : 490 57 3 2 19
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Stephanie ROTH, avocat à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme DORSCH, Président de Chambre
M. PALLIERES, Conseiller
M. LE QUINQUIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,
- signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme Wallaert, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
La S.A.S.U. 3MA GROUP est une société de services en communication et en conseil marketing, spécialisée dans la création, l'impression, la personnalisation et la diffusion de messages imprimés et digitaux. Elle emploie 185 salariés.
Par contrat à durée indéterminée du 18 décembre 2007, M. [B] [T] a été embauché en qualité de chef magasinier par la Société européenne d'envois, avec effet à compter du 02 janvier 2008. Le contrat de travail a été transféré à la S.A.S.U. 3MA GROUP à compter du 1er juin 2011.
M. [B] [T] a été promu au poste de responsable logistique en 2014.
Le 24 janvier 2020, M. [B] [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Colmar pour obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur.
Par courrier du 12 février 2020, M. [B] [T] a notifié à la S.A.S.U. 3MA GROUP sa prise d'acte de la rupture du contrat de travail.
Par jugement du 16 mars 2021, le conseil de prud'hommes a :
- dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par M. [B] [T] produit les effets d'une démission,
- débouté M. [B] [T] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif et de ses demandes indemnitaires subséquentes,
- dit qu'il n'y a pas lieu de requalifier la lettre de l'employeur en date du 27 septembre 2019 en lettre d'avertissement,
- débouté M. [B] [T] de sa demande de dommages et intérêts pour annulation de l`avertissement,
- débouté M. [B] [T] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- condamné la S.A.S.U. 3MA GROUP à payer à M. [B] [T] la somme de 6 104,62 euros bruts au titre des heures supplémentaires et 610,46 euros bruts au titre de congés payés y afférents, avec les intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2020,
- débouté M. [B] [T] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé,
- condamné la S.A.S.U. 3MA GROUP aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [B] [T] a interjeté appel le 08 avril 2021.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 mai 2022, M. [B] [T] demande à la cour de réformer le jugement et, statuant à nouveau, de :
- dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail est fondée eu égard aux manquements imputables à l'employeur et qu'elle produit les effets d'un licenciement abusif,
- qualifier la lettre du 27 septembre 2019 comme un avertissement et annuler cet avertissement,
- dire que M. [B] [T] a été victime d'un harcèlement moral,
- condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :
* 9 100 euros brut au titre du préavis,
* 910 euros au titre des congés payés sur préavis,
* 9 605,55 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
* 33 366,63 euros au titre des dommages et intérêts,
* 5 000 euros au titre des dommages et intérêts pour annulation de l'avertissement,
* 20 000 euros au titre du harcèlement moral subi,
* 11 647,59 euros au titre des heures supplémentaires,
* 1 164,76 euros au titre des congés payés afférents,
* 18 200 euros au titre du travail dissimulé,
- débouter la S.A.S.U. 3MA GROUP de ses demandes,
- condamner la S.A.S.U. 3MA GROUP aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 17 décembre 2021, la S.A.S.U. 3MA GROUP demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement de 6 104,62 euros bruts au titre des heures supplémentaires, 610,46 euros bruts au titre des congés payés afférents et 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle demande à la cour, statuant à nouveau, de débouter M. [B] [T] de ses demandes et de confirmer le jugement pour le surplus.
A titre subsidiaire, elle demande à la cour d'ordonner avant dire droit à M. [B] [T] de produire ses horaires de travail jour par jour. Elle demande par ailleurs à la cour de réduire le montant des condamnations relatives au préavis à 4 550 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, à 455 euros bruts au titre des congés payés afférents et à 9 100 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En tout état de cause, elle demande à la cour de condamner M. [B] [T] aux dépens de première instance et d'appel et au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un exposé plus complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux écritures précitées, en application de l'article 455 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 10 juin 2022. L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 10 mars 2023 et mise en délibéré au 26 mai 2023.
MOTIFS
Sur le rappel d'heures supplémentaires
Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
En l'espèce, à l'appui de sa demande, M. [B] [T] produit un décompte quotidien du nombre d'heures travaillées entre le 12 décembre 2016et le 31 décembre 2019 et évalue à 11 647,59 euros le montant dû par l'employeur à ce titre.
La S.A.S.U. 3MA GROUP reproche au salarié de ne pas préciser ses horaires de travail quotidiens. Il appartient toutefois à l'employeur de contrôler les heures de travail du salarié, ce qu'il s'est manifestement abstenu de faire en n'imposant pas au salarié d'utiliser le système de pointeuse qui était pourtant mis en place au sein de l'entreprise. La S.A.S.U. 3MA GROUP ne peut dès lors opposer à M. [B] [T] sa propre carence sur ce point, les éléments produits par le salarié apparaissant en outre suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement. Il convient donc de rejeter la demande formée par la S.A.S.U. 3MA GROUP avant dire droit et tendant à la transmission par le salarié de ses horaires de travail quotidiens.
Pour contester le décompte produit par M. [B] [T], la S.A.S.U. 3MA GROUP produit par ailleurs des attestations de salariés qui témoignent que M. [B] [T] faisait une pause de dix minutes le matin et l'après-midi et une pause de deux heures pour déjeuner à son domicile. L'employeur pointe également les contradictions entre le décompte établi par le salarié, qui intègre un temps de travail de 7,75 heures en cas de déplacement à [Localité 3] et l'attestation rédigée par son épouse qui déclare que M. [B] [T] travaillait 7,5 heures ces jours-là. Il justifie enfin que M. [B] [T] a comptabilisé en temps de travail quatre jours d'absence autorisée.
Au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a évalué le montant dû par la S.A.S.U. 3MA GROUP au titre des heures supplémentaires impayées à 6 104,62 euros bruts, outre 610,46 euros bruts au titre des congés payés afférents.
Sur le travail dissimulé
En application de l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Aux termes de l'article L. 8223-1, en cas de rupture du contrat de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours dans les conditions prévues à l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité égale à six mois de salaire.
M. [B] [T] fait valoir que la S.A.S.U. 3MA GROUP ne pouvait ignorer que des heures supplémentaires lui étaient dues. Cet élément est toutefois insuffisant pour démontrer le caractère intentionnel exigé par les dispositions précitées et le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnité pour travail dissimulé.
Sur la lettre adressée par l'employeur le 27 septembre 2019
Aux termes de l'article L. 1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.
Dans un courrier du 27 septembre 2019, la S.A.S.U. 3MA GROUP reproche à M. [B] [T] plusieurs dysfonctionnement dans l'organisation de son service, liés selon l'employeur à un manque d'organisation et d'anticipation de sa part. Il est ainsi reproché au salarié de n'avoir pas mis en place d'organisation pour assurer la continuité du service, notamment lors de ses absences du lundi dans le cadre de son congé de présence parental ou lors du relais pris avec son adjoint pendant les congés du mois d'août 2019, ce qui aurait laissé des collaborateurs gérer certaines tâches sans consignes précises. L'employeur constate l'absence d'évolution, de proposition ou d'amélioration dans le fonctionnement du service ainsi qu'un désintérêt de la part de M. [B] [T] pour sa fonction et pour l'activité de l'entreprise et lui demande de prendre en compte ces remarques pour remédier à cette situation, en précisant que la situation pourrait amener l'employeur à revoir l'organisation du service en l'absence d'amélioration d'ici la fin de l'année 2019.
M. [B] [T] soutient que ce courrier, destiné selon lui à l'inciter à renoncer à son droit à congés, constituait un avertissement puisque l'employeur y dénonçait des faits considérés comme fautifs.
Aucun élément ne permet de considérer que, par ce courrier, l'employeur entendait sanctionner le salarié, étant constaté que M. [B] [T] ne démontre pas qu'il était de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. Le conseil de prud'hommes a donc, à juste titre, qualifié ce courrier de simple rappel des missions du salarié et des attentes de l'employeur qui ne constituait pas pour autant un avertissement disciplinaire. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [B] [T] de sa demande de requalification de ce courrier en avertissement et de la demande de dommages et intérêts afférente.
Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
En application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Pour caractériser l'existence d'un harcèlement moral, M. [B] [T] invoque les éléments suivants :
- des griefs fallacieux formulés dans le courrier du 27 septembre 2019 et lors d'un entretien d'évaluation : indépendamment de la qualification de sanction disciplinaire, l'employeur fait état dans ce courrier d'un certain nombre de reproches adressés au salarié. Cet élément est donc matériellement établi.
- la publication d'un poste correspondant à celui occupé par M. [B] [T] : il est matériellement établi que l'entreprise a publié une fiche de poste pour un emploi de responsable « supply chain ».
- la suppression de la mise à disposition d'un véhicule : il est matériellement établi que M. [B] [T] bénéficiait d'un véhicule depuis le mois de juin 2016 et qu'il lui a été demandé de restituer ce véhicule au mois de décembre 2019.
- des messages du supérieur hiérarchique de M. [B] [T] lui demandant d'être présent le lundi suivant : M. [B] [T] justifie que deux messages lui ont été adressés en ce sens par son supérieur hiérarchique, M. [U] [X] le 10 et le 17 août 2019.
S'agissant des griefs formulés contre le salarié, l'employeur fait valoir qu'ils avaient déjà été relevés lors de l'entretien annuel du 1er octobre 2018. L'appréciation globale du salarié est en effet la suivante : « suivi clients parfait, interne à améliorer, connaît son métier, très bon collaborateur » et au verso les mentions « suivi à améliorer, gestion des stocks à améliorer, initiatives !! ». En conclusion de l'entretien du 19 décembre 2017, l'appréciation était la suivante : « collaborateur impliqué, expérimenté et compétent. Devrait parfois plus s'affirmer. On attend encore plus d'initiative. » Les reproches contenus dans le courrier du 27 septembre 2019 apparaissent dans la continuité de ces évaluations et sont confirmés par l'attestation établie par M. [U] [X], supérieur hiérarchique de M. [B] [T] qui témoigne des difficultés rencontrées par celui-ci pour organiser son service notamment pendant ses absences. Les mêmes reproches sont également repris dans l'évaluation du 05 décembre 2019, l'appréciation globale étant rédigée de la manière suivante : « la partie interne n'a pas été améliorée, il faut y travailler (organisation et management) », avec au verso les mentions « communication, management à parfaire, manque de réponse quant aux objectifs de cette année, on attendait plus quant à l'engagement ».
Les statistiques produites par M. [B] [T] faisant apparaître très peu d'incidents imputables au service logistique pour les mois de juillet et août 2019 sont contredites par celles produites par l'employeur pour l'ensemble de l'année, qui montrent au contraire une augmentation significative de ces incidents par rapport aux années précédentes. Ces éléments ne permettent pas, en toute hypothèse, de remettre en cause les appréciations critiques qui étaient émises quant à son travail depuis plusieurs années et qui sont antérieures à sa demande de congé de présence parentale formulée le 17 janvier 2019, ce qui conduit à exclure tout lien entre ces critiques et la situation personnelle du salarié.
S'agissant du véhicule mis à la disposition du salarié, M. [B] [T] soutient qu'il s'agissait d'un véhicule de fonction, ce qui ne résulte toutefois ni du contrat de travail, ni des bulletins de paie qui ne mentionnent pas d'avantage en nature. Il ne produit aucun autre élément permettant de considérer que ce véhicule était un véhicule de fonction et non un véhicule de service comme soutenu par la S.A.S.U. 3MA GROUP. Celle-ci précise qu'elle tolère l'utilisation du véhicule pour effectuer les trajets entre le domicile et le lieu de travail. Elle ajoute que, suite à la naissance prématurée de son enfant, M. [B] [T] a été placé en arrêt de travail du mois d'octobre 2018 au mois de janvier 2019 et que, pendant cette période, le salarié avait reçu l'autorisation temporaire et exceptionnelle d'utiliser le véhicule de service pour rendre visite à sa fille pendant son hospitalisation. L'employeur justifie en outre que M. [B] [T] a indûment fait prendre en charge par l'employeur des frais de carburant pendant son arrêt de travail, motif qui explique la décision de demander à M. [B] [T] de ne plus utiliser le véhicule de service pour ses trajets domicile-travail. Il résulte par ailleurs du courrier du 09 janvier 2020 que l'employeur a continué à mettre à la disposition du salarié un véhicule pour effectuer les déplacements entre les différents sites de l'entreprise.
La S.A.S.U. 3MA GROUP produit par ailleurs la fiche de poste relatif à l'emploi de responsable « supply chain » qui montre que ce poste ne correspond pas à celui de responsable logistique occupé par M. [B] [T] mais à la création d'un poste situé à l'échelon hiérarchique immédiatement supérieur à ceux de responsable logistique et de responsable achats occupés par M. [B] [T] et l'un de ses collègues. L'employeur précise à ce titre que la création de ce poste était destinée à renforcer les équipes logistiques et achats, aucun élément ne permettant d'établir qu'elle entrainait une modification des fonctions et des responsabilités de M. [B] [T] et .
S'agissant des jours de repos pris par le salarié dans le cadre de son congé de présence parentale, l'employeur fait valoir qu'il avait convenu avec lui que le jour de présence parentale hebdomadaire serait fixé le lundi, avec toutefois la possibilité de modifier ce jour à la demande du salarié ou de l'employeur. Il précise que M. [B] [T] a ainsi modifié son jour de congé le vendredi 26 avril, le jeudi 23 mai ainsi que les mardis 18 juin, 03 septembre, 17 septembre et 24 septembre 2019 et qu'il a été uniquement demandé au salarié de venir travailler le lundi 13 mai 2019 en raison d'une surcharge de travail liée à l'acheminement des bulletins de vote en prévision des élections européennes qui se tenaient le 26 mai suivant. Ces éléments qui ne sont pas contestés par M. [B] [T] résultent du planning du salarié produit par l'employeur. La S.A.S.U. 3MA GROUP indique également que les deux messages adressés au mois d'août 2019 par M. [X] ne correspondaient pas à une pression pour faire renoncer le salarié au congé de présence parentale mais à une simple demande de modifier son jour de congé. M. [X] atteste à ce titre d'une charge de travail importante au cours de cette période et reproche à M. [B] [T] d'avoir accentuer cette difficulté en accordant des congés à certains de ses collaborateurs au cours de cette période, ce qui résulte d'un message qu'il lui a adressé le 17 août 2019.
Compte tenu des explications fournies par l'employeur, les faits invoqués par M. [B] [T], même pris dans leur ensemble, apparaissent ainsi étrangers à toute situation de harcèlement moral. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [B] [T] de la demande de dommages et intérêts formée à ce titre.
Sur la prise d'acte de la rupture du contrat de travail
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit d'un licenciement nul si les manquements reprochés à l'employeur sont de nature à entraîner la nullité du licenciement, soit dans le cas contraire, d'une démission.
La prise d'acte ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'à la condition que les faits invoqués, non seulement, soient établis, la charge de cette preuve incombant au salarié, mais constituent un manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.
En l'espèce, M. [B] [T] invoque plusieurs motifs dans les courriers adressés à l'employeur le 21 novembre 2019, le 19 décembre 2019, le 15 janvier 2020 et 12 février 2020 ainsi que dans ses conclusions.
Il a été constaté ci-dessus que M. [B] [T] échouait à rapporter la preuve des griefs relatifs à l'avertissement abusif qui lui aurait été adressé par le courrier en date du 27 septembre 2019, à la publication d'un poste identique au sien et à la situation alléguée de harcèlement moral.
Il a également été relevé que la mise à disposition d'un véhicule n'était pas prévue par le contrat de travail et n'était pas mentionnée sur les bulletins de paie. La suppression de cet avantage, qui ne concernait que les trajets entre le domicile du salarié et son lieu de travail et qui correspondait à une simple tolérance de l'employeur, ne constitue donc pas une modification du contrat de travail nécessitant l'accord du salarié et ne peut dès lors pas justifier la rupture du contrat aux torts de l'employeur alors que le salarié ne conteste pas qu'un véhicule était toujours laissé à sa disposition pour effectuer les trajets entre les différents sites de l'entreprise.
S'agissant enfin des heures supplémentaires, il convient de constater que le salarié fait état d'une situation qui perdurait de manière régulière et habituelle au moins depuis l'année 2016, la période antérieure étant couverte par le délai de prescription. Il ne justifie pourtant d'aucune réclamation adressée à l'employeur avant le courrier du 21 novembre 2019 ni d'aucun décompte avant celui annexé au courrier du 28 décembre 2019. Ce grief apparaît donc trop ancien pour pouvoir justifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisait les effets d'une démission et en ce qu'il a débouté M. [B] [T] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif et de ses demandes indemnitaires subséquentes.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la S.A.S.U. 3MA GROUP aux dépens et au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Compte tenu de l'issue du litige, il convient de rejeter les demandes formées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [B] [T] qui succombe en son appel sera condamné aux dépens de la prcédure.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par mise à disposition au greffe par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Colmar du 16 mars 2021 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
DÉBOUTE la S.A.S.U. 3MA GROUP de sa demande avant dire droit tendant à ce qu'il soit ordonné à M. [B] [T] de transmettre ses horaires de travail jour par jour ;
CONDAMNE M. [B] [T] aux dépens de la procédure d'appel ;
REJETTE les demandes formées à hauteur d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 26 mai 2023, signé par Madame Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Caroline Wallaert, Greffier.
Le Greffier Le Président