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25/05/2023 | FRANCE | N°21/04441

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 25 mai 2023, 21/04441


MINUTE N° 270/2023





























Copie exécutoire à



- Me Dominique Serge BERGMANN



- la SCP CAHN ET ASSOCIES





Le 25 mai 2023



Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 25 Mai 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/04441 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HWEZ





Décision déférée à la cour : 28 Septembre 2021 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG





APPELANT :



Monsieur [K] [Y]

demeurant [Adresse 8] à [Localité 6]



représenté par Me Dominique Serge BERGMANN, avocat à la cour.

avocat plaidant : Me Cédric D...

MINUTE N° 270/2023

Copie exécutoire à

- Me Dominique Serge BERGMANN

- la SCP CAHN ET ASSOCIES

Le 25 mai 2023

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 25 Mai 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/04441 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HWEZ

Décision déférée à la cour : 28 Septembre 2021 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANT :

Monsieur [K] [Y]

demeurant [Adresse 8] à [Localité 6]

représenté par Me Dominique Serge BERGMANN, avocat à la cour.

avocat plaidant : Me Cédric D'OOGHE, avocat à Strasbourg

INTIMÉ :

Monsieur LE DIRECTEUR GENERAL DES FINANCES PUBLIQUES, poursuites et diligences du Directeur Régional des finances Publiques d'Ile de France et de [Localité 12]

qui élit domicile en ses bureaux du Pôle juridictionnel judiciaire, Pôle

contrôle fiscal et affaires juridiques, situés [Adresse 2] '

[Localité 7]

représenté par la SCP CAHN ET ASSOCIES, société d'avocats à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, président et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

En date du 11 octobre 2016, les autorités fiscales allemandes ont transmis à l'administration fiscale française un renseignement selon lequel M. [K] [Y] a acheté en date du 10 décembre 2013, 44 lingots d'or pour un montant global de 1 004 627,23 euros auprès de la société Gold & Silver dont le siège se situe à Kehl en Allemagne. La facture d'achat du 10 décembre 2013 fournie par les autorités fiscales allemandes, révélait que le prix de 1 004 627,23 euros avait été réglé par un virement bancaire provenant d'un compte détenu auprès d'une agence de la banque du Crédit Suisse dont le siège se situe à [Localité 14] en Suisse.

Aucune déclaration n° 3916 « Déclaration par un résident d'un compte ouvert, détenu, utilisé ou clos à l'étranger » ou n° 3911 « Dossier de mise en conformité d'avoirs détenus à l'étranger » n'ayant été déposée précédemment par M. [Y] auprès de l'administration, cette dernière a engagé, en date du 22 novembre 2016, un examen de situation fiscale personnelle (ESFP) portant sur les années 2014 et 2015 à l'encontre de M et Mme [K] [Y], tout en diligentant, en date du 27 octobre 2017, une procédure d'assistance administrative auprès des autorités fiscales suisses aux fins d'obtenir communication des relevés bancaires portant sur le(s) compte(s) bancaire(s) détenu(s) par M. [Y] auprès du Crédit Suisse de [Localité 14], pour la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2016 et de ses états de fortune.

Les services fiscaux ont adressé au contribuable, en date du 30 août 2017, une demande n° 3907 de justification des avoirs détenus à l'étranger et non déclarés au titre de la période 2007 à 2013, dans le cadre de la procédure visée à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales.

Une proposition de rectification a été adressée à M. [K] [Y] le 20 février 2018 avec AR du 26 février 2018.

L'administration y taxait, sur le fondement de l'article 755 du code général des impôts (CGI), les avoirs figurant sur les comptes bancaires détenus par M. [K] [Y] auprès du Crédit Suisse pour le montant le plus élevé constaté sur ses comptes soit 2 166 071 euros, au 31 décembre 2007 au motif que l'origine de ces avoirs n'est pas démontrée.

Les impositions subséquentes ont été mises en recouvrement le 30 avril 2018 pour 1 299 643 euros. Par une réclamation du 28 décembre 2018 réceptionnée le 7 janvier 2019, le redevable a contesté le bien-fondé de cette imposition.

Cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet tacite.

Suivant exploit délivré le 26 mars 2020, M. [K] [Y] a assigné le directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et de Paris devant le tribunal judiciaire de Strasbourg aux fins d'obtenir la décharge des droits d'enregistrement pour la somme de 1 299 643 euros.

Par jugement du 28 septembre 2021 le tribunal judiciaire de Strasbourg a rejeté toutes les demandes de Monsieur [K] [Y], le condamnant aux dépens de l'instance.

Le premier juge a estimé que les allégations de Monsieur [Y] selon lesquelles ses avoirs en Suisse avaient pour origine, d'une part le versement d'une indemnité d'assurance de 300 000 CHF, et d'autre part un virement réalisé à partir des comptes suisses de son père [P] [D] dans les années 2000, n'étaient pas fondées.

S'agissant des 300 000 CHF que le contribuable affirmait avoir touchés de la part d'une compagnie d'assurances en 1977, la juridiction a estimé que l'attestation rédigée par un témoin ne serait pas de nature à démontrer l'origine des fonds.

Concernant les sommes provenant prétendument des comptes suisses du père de l'appelant, la juridiction a considéré que l'attestation établie par Monsieur [A], ancien banquier, et le document attestant de l'ouverture d'un compte dans les livres du Crédit Suisse par Monsieur [Y], n'étaient pas de nature à établir l'origine des fonds présents sur les comptes litigieux. La juridiction a estimé en outre que la déclaration rectificative de succession du père de l'appelant rédigée en 2017 n'était pas davantage de nature à prouver quoi que ce soit.

Monsieur [Y] a interjeté appel de ce jugement par une déclaration d'appel du 18 octobre 2021 enregistrée le 18 octobre 2021.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 17 janvier 2022 Monsieur [K] [Y] demande à la cour de :

- recevoir son appel,

- infirmer le jugement entrepris du 28 septembre 2021 rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg en ce qu'il a :

débouté [K] [Y] de toutes ses demandes ;

condamné [K] [Y] aux dépens de l'instance ;

Statuant à nouveau,

- juger les demandes de Monsieur [K] [Y] recevables et bien fondées.

- juger que Monsieur [K] [Y] apporte la preuve de l'origine des fonds.

En conséquence,

- ordonner la décharge totale des droits d'enregistrement mis en recouvrement le 30 avril 2018 pour la somme de 1 299 643,00 euros ;

À titre subsidiaire,

- ordonner la décharge partielle des droits d'enregistrement ;

En tout état de cause,

- condamner Monsieur le Directeur départemental des Finances publiques de l'Île de-France et de [Localité 12] en tous les frais et dépens des deux instances ainsi qu'à une indemnité de 6 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, Monsieur [Y] indique que l'article 755 du code général des impôts ne crée qu'une présomption qui peut être combattue par la preuve contraire, cette présomption pouvant être levée par le contribuable qui justifie de l'origine et des modalités d'acquisition des avoirs dissimulés à l'étranger. Il estime être en mesure de démontrer l'origine des fonds qui étaient présents sur le compte qu'il avait ouvert à son nom dans un établissement bancaire suisse.

En premier lieu, il affirme que parmi la somme litigieuse, figure un montant de 300 000 CHF qu'il avait touchés à titre de dommages-intérêts de la compagnie d'assurances Winterthur en 1977 en dédommagement d'un préjudice subi suite à un accident remontant à 1967 alors qu'il se trouvait en Suisse à Arosa.

Il affirme que ces fonds ont été initialement gérés par un cabinet d'avocats à Bâle avant d'être transférés sur un compte ouvert à son nom auprès du Crédit Suisse. Outre l'attestation établie par un témoin, Madame [J], qui avait été produite en première instance, il précise verser aux débats à hauteur d'appel une seconde attestation émanant de Monsieur [X].

Il affirme ne pas comprendre pourquoi le tribunal en première instance a écarté la première attestation, ajoutant que rien n'autorise l'administration fiscale de douter de la teneur de ces deux témoignages. Du fait de l'ancienneté des faits, de l'inexistence d'archives sur cet accident qui s'est produit en 1967, ou encore de documents bancaires, seules des attestations pourraient démontrer l'existence de cette indemnisation.

La contre-valeur de ses 300 000 CHF étant de 496 584 euros, il y aurait lieu d'infirmer le jugement et d'ordonner une décharge portant sur ce montant.

En deuxième lieu, l'appelant soutient que le complément des avoirs proviendrait de virements réalisés par son père Monsieur [P] [D] [Y] à partir des comptes bancaires que ce dernier détenait en Suisse.

L'appelant explique que son père disposait de plusieurs comptes en Suisse, le détail de ses avoirs déposés en Suisse figurant dans la déclaration de succession rectificative du 29 novembre 2017 versée aux débats.

Suite à un accident de santé survenu en 1998, son père aurait souhaité transférer ses avoirs suisses au profit de ces deux enfants, [K] et [V], comme l'atteste Monsieur [G] [A], ancien banquier au Crédit Suisse de [Localité 14] qui indique que dans les années 2000, sur instructions de [P] [D] [Y], ses avoirs ont été transférés sur de nouveaux comptes ouverts auprès du Crédit Suisse à hauteur de 50 % pour chacun de ses deux enfants, [K] et [V]. L'appelant précise produire aux débats la preuve qu'il a bel et bien ouvert un compte dans l'établissement bancaire suisse pour qu'il soit réceptacle des fonds virés par son père.

Il conviendrait de se référer à la déclaration rectificative de succession pour constater que le total des avoirs détenus par le père de l'appelant sur différents comptes en Suisse s'élevait à 2 403 361 euros, ce qui explique que la somme de 1 201 680 euros ait été virée sur le compte de l'appelant.

En tenant compte du taux de change retenu par l'administration fiscale au 31 décembre 2007 cette somme représenterait maintenant 1 989 130 euros.

Monsieur [Y] attire l'attention de la cour sur ses avis d'imposition sur ses revenus 2000 à 2014; l'examen de ces pièces démontrerait que ses revenus annuels avant imposition, oscillant entre 45 000 et 60 000 euros, n'étaient pas de nature à lui permettre d'épargner une somme aussi importante que celle présente sur les comptes suisses pour plus de 2 millions d'euros.

Enfin Monsieur [Y] soutient que l'administration ne pourrait taxer ces avoirs une nouvelle fois au titre des droits d'enregistrement sur le fondement de l'article 755 du code général des impôts, alors que ces derniers figurent sur la déclaration de succession rectificative de Monsieur [P] [D] [Y] déposée le 29 novembre 2017 et auraient déjà été soumis à l'impôt sur les successions.

* * *

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 avril 2022, Monsieur le directeur général des finances publiques demande à la cour de :

- dire et juger Monsieur [K] [Y] mal fondé en son appel du jugement rendu le 28 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg ;

- confirmer les rappels de droits et de pénalités effectués par l'administration ;

et y faisant droit :

- condamner Monsieur [K] [Y] en tous les dépens de première instance et d'appel ;

- condamner Monsieur [K] [Y] à verser à l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'administration estime que Monsieur [Y] ne démontrerait pas l'origine des fonds d'un montant de plus de 2 millions d'euros qui étaient présents sur ses comptes ouverts auprès du Crédit Suisse.

Concernant les allégations de Monsieur [Y] portant sur le fait qu'il aurait touché des dommages-intérêts à hauteur de 300 000 CHF en 1977, les services fiscaux estiment que les deux attestations de témoin produites sont insuffisantes pour démontrer l'existence de cette indemnisation et des circonstances dans lesquelles elle aurait eu lieu. Elle considère qu'il aurait fallu produire des documents de nature bancaire ou émanant de l'assureur pour établir la preuve de ce mouvement financier.

Au sujet du reliquat des sommes présentes au 31 décembre 2007 sur les comptes détenus par Monsieur [Y] auprès du Crédit Suisse de [Localité 14], l'administration soutient que l'attestation rédigée par l'ancien banquier de [Localité 14] ne serait pas probante pour établir la réalité des mouvements financiers allégués (à savoir qu'ils seraient le résultat de la répartition par Monsieur [P] [D] [Y] de ses avoirs détenus en Suisse au profit entre ses enfants [K] et [V]).

L'administration attire l'attention de la cour sur les incohérences qui existeraient entre la version proposée à la cour par Monsieur [Y] (une répartition à hauteur de 50 % des avoirs détenus par [P] [D] [Y] au profit de ces deux enfants) et celle qu'il avait soutenue au cours de la procédure fiscale - par le biais de son conseil - selon laquelle « en 1998, Monsieur [Y] [P] [D] a fait une attaque suite à laquelle il a souhaité mettre de l'ordre dans ses affaires. Au cours de l'année 2000 il a ainsi scindé le compte bancaire qu'il détenait auprès du Crédit Suisse de [Localité 14] depuis au moins 50 ans, en trois comptes distincts au nom de [E] [Y] son épouse, de Monsieur [K] [Y] son fils et de Madame [V] [Y] sa fille ».

Elle considère que les allégations de l'appelant, selon lesquelles il y a eu transfert d'une partie des avoirs de Monsieur [P] [D] [Y] vers un compte ouvert au nom de [K] [Y], ne sont étayées par aucune pièce justificative utile, de sorte qu'il n'existerait pas de traçabilité continue des flux financiers à l'origine des avoirs non déclarés.

Monsieur [Y] ne saurait davantage soutenir que :

- l'administration ne pourrait taxer ses avoirs au titre des droits d'enregistrement sur le fondement de l'article 755 du code général des impôts dans la mesure où ces montants figurent sur la déclaration de succession rectificative de Monsieur [P] [D] [Y] déposée le 29 novembre 2017 par ses enfants en ce qu'ils auraient d'ores et déjà été soumis à imposition, alors d'une part que la déclaration de succession rectificative n'a pas été signée par Monsieur [K] [Y], et d'autre part que ce dernier n'a jamais payé les 140 000 euros de droits de succession dont il est redevable au même titre que sa s'ur,

- l'examen de ses déclarations de revenus serait de nature à démontrer qu'il ne disposerait pas de capacités d'épargne lui permettant de détenir une somme de près de 2,4 millions d'euros sur un compte suisse, cet argument ne prouvant rien quant à l'origine des sommes litigieuses ; les services fiscaux rappellent que c'est justement parce qu'ils doutent de l'origine successorale de ces fonds, qu'ils les ont taxés en application de l'article 755 du code général des impôts.

* * *

Par ordonnance du 22 septembre 2022, la présidente de chambre, chargée de la mise en état, a ordonné la clôture de la procédure et renvoyé l'affaire à l'audience du 16 mars 2023.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions transmises aux dates susvisées.

MOTIVATION

L'article 755 du code général des impôts, qui fonde le redressement litigieux, prévoit que les avoirs figurant sur un compte à l'étranger et dont l'origine et les modalités d'acquisition n'ont pas été justifiées dans le cadre de la procédure prévue à l'article L 23 C du livre des procédures fiscales, sont réputés constituer, jusqu'à preuve contraire, un patrimoine acquis à titre gratuit, assujetti, à l'expiration des délais prévus au même article L 23 C aux droits de mutation à titre gratuit au taux de 60 %. Les droits sont alors calculés sur la valeur la plus élevée connue de l'administration des avoirs figurant sur ce compte au cours des 10 années précédant l'envoi de la demande prévue à l'article L 23 C.

Conformément à l'article L 71 du livre des procédures fiscales, en l'absence de réponse ou à défaut de réponse suffisante aux demandes d'informations ou de justifications prévues à l'article L 23 C du livre des procédures fiscales, dans les délais prévus au même article, la personne est taxée d'office dans les conditions prévues à l'article 755 du code général des impôts.

Au cas d'espèce, l'administration a taxé sur le fondement de cet article, les avoirs figurant sur les comptes bancaires détenus par Monsieur [Y] auprès du Crédit Suisse de [Localité 14] pour le montant le plus élevé constaté sur ses comptes soit 2 166 0 71 euros au 31 décembre 2007 au motif que l'origine de ces avoirs n'est pas démontrée.

Monsieur [Y] conteste ce redressement au motif qu'il a démontré l'origine de ses avoirs.

Il explique qu'une partie de ces avoirs proviendrait d'une somme qu'il aurait perçue en 1977 à titre de dommages-intérêts suite à un accident dont il a été victime 10 ans plus tôt en 1967 alors qu'il se trouvait dans une station d'hiver suisse.

Bien qu'il précise que cette somme aurait été versée par la compagnie d'assurances Winterthur, ou encore que dans un premier temps ces fonds auraient été gérés par un cabinet d'avocats à Bâle avant d'être transférés sur le compte qu'il a ouvert auprès du Crédit Suisse, force est de constater qu'il ne produit aucun document comptable ou bancaire permettant d'établir, la réalité du versement des 300 000 CHF en 1977 à son profit, la présence de ces fonds sur un compte d'avocats, l'existence d'un mandat confié à cet avocat, ou le transfert des fonds en direction de son compte ouvert au Crédit Suisse.

Et quand bien même il aurait produit de telles preuves, elles n'auraient pas été suffisantes en soi à démontrer que ces fonds étaient bel et bien encore présents sur ses comptes 30 années plus tard, seule la production de l'historique de ses comptes bancaires étant de nature à prouver qu'il ne les a pas employés depuis 2007.

Dans ces conditions, le premier juge a, à juste titre, considéré que l'attestation produite par madame [J] n'était pas de nature à démontrer que les fonds présents sur le compte suisse de Monsieur [Y] en 2007 provenaient bien de cette indemnisation d'assurance. Le même raisonnement doit être tenu au sujet de l'attestation de monsieur [X] produite à hauteur d'appel, qui ne fait qu'évoquer la survenue d'un accident de ski en 1967 et une indemnisation en 1977.

L'appelant soutient que le reliquat des sommes présentes au 31 décembre 2007 sur ses comptes détenus auprès du Crédit Suisse de [Localité 14] proviendrait de la répartition par son père [P] [D] au profit de ses proches, de ses avoirs détenus en Suisse.

À l'appui de cette explication Monsieur [Y] produit une attestation établie par Monsieur [G] [A] le 3 novembre 2018 (pièce 7 de l'appelant) au terme de laquelle le témoin affirme « j'ai reçu début des années 2000 (l'année exacte ne m'est plus connue) de Monsieur [P] [D] [Y], né le [Date naissance 1] 1925 à [Localité 13], notaire, (') décédé le [Date décès 5] 2009 à [Localité 9], l'ordre en tant que directeur du Crédit Suisse à [Localité 14] (Suisse) de transférer ses avoirs sur de nouveaux comptes au Crédit Suisse à [Localité 14]. Ses avoirs ont été transférés sur des comptes numérotés au nom du fils, [K] [Y] né le [Date naissance 4] 1954 à [Localité 11] (Suisse) et au nom de la fille [V] [Y] née le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 10] à hauteur de 50 % chacun des avoirs détenus par Monsieur [P] [D] [Y]. Après transfert des avoirs, le compte de Monsieur [P] [D] [Y] a été clôturé ».

Comme dans le cas précédent, la cour ne peut que constater que cette attestation n'est accompagnée d'aucun document comptable ou bancaire pouvant objectiver les événements avancés.

Ni l'ouverture des comptes au profit des enfants [Y], ni les flux financiers à partir du compte du père en direction de ceux des enfants, ni la fermeture du compte du donateur, ne sont corroborés par la production de pièces utiles.

En outre, comme cela a déjà été expliqué précédemment, même si l'existence de mouvements financiers à partir des comptes du père en direction de celui de l'appelant avait été établie, pour retenir que ces fonds prétendument donnés au cours des années 2000 étaient bien ceux présents en 2007 sur le compte de Monsieur [Y], il aurait fallu produire les extraits de compte.

En conséquence, à partir du moment où Monsieur [Y] ne justifie pas de l'origine des avoirs constatés au 31 décembre 2007 sur ses comptes du Crédit Suisse, il n'est pas possible de considérer que ces fonds figurent sur la déclaration de succession rectificative de Monsieur [P] [D] [Y] déposée le 29 novembre 2017.

Enfin, la production des déclarations de revenus de Monsieur [Y] n'est guère davantage de nature à établir l'origine des fonds qui se trouvaient sur ses comptes en Suisse.

À défaut de production de pièces utiles et irréfutables, la cour rejoint le raisonnement tenu par le premier juge qui a conclu au rejet des demandes de Monsieur [Y].

La décision du premier juge sera corrélativement confirmée en toutes ses dispositions.

Le jugement de première instance statuant sur la question des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile, sera également confirmé.

Monsieur [K] [Y], partie succombante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel et à verser à l'administration fiscale une somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés dans le cadre de la procédure d'appel, ces condamnations emportant nécessairement rejet de la propre demande de Monsieur [Y] tendant à être indemnisé de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile :

CONFIRME le jugement rendu le 28 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant

CONDAMNE Monsieur [K] [Y] aux dépens de la procédure d'appel,

CONDAMNE Monsieur [K] [Y] à verser à l'État représenté par le directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et de [Localité 12] une somme de 3000 euros (trois mille euros) au titre des frais irrépétibles qu'il a engagés à hauteur d'appel,

REJETTE la demande de Monsieur [K] [Y] fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/04441
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;21.04441 ?
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