La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/05/2023 | FRANCE | N°21/00864

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 25 mai 2023, 21/00864


MINUTE N° 267/2023

























Copie exécutoire à



- Me Valérie SPIESER



- Me Joëlle LITOU-WOLFF





Le 25 mai 2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 25 Mai 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00864 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HQBN



Décision défér

ée à la cour : 15 Décembre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE





APPELANTES et intimées sur incident :



Madame [F] [C]

demeurant [Adresse 3] à [Localité 5]



Madame [A] [C]

demeurant [Adresse 4] à [Localité 6]



représentées par Me Valérie SPI...

MINUTE N° 267/2023

Copie exécutoire à

- Me Valérie SPIESER

- Me Joëlle LITOU-WOLFF

Le 25 mai 2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 25 Mai 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00864 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HQBN

Décision déférée à la cour : 15 Décembre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANTES et intimées sur incident :

Madame [F] [C]

demeurant [Adresse 3] à [Localité 5]

Madame [A] [C]

demeurant [Adresse 4] à [Localité 6]

représentées par Me Valérie SPIESER, avocat à la cour.

Plaidant : Me SIMONNET, avocat à Strasbourg.

INTIMÉE et appelante sur incident :

Madame [M] [C]

demeurant [Adresse 2] à [Localité 7]

représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la cour.

Plaidant : Me Manuella HUET, avocat à Strasbourg

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre, et Madame Nathalie HERY, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 12 mai 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, président et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

[I] [C], né le 8 novembre 1898, décédé le 15 avril 1988, et son épouse [H] [D], née le 1er septembre 1907, décédée le 20 décembre 1993, ont eu deux enfants [K], né le 3 novembre 1936 et [M], née le 30 juin 1938.

[K] [C] a eu deux enfants d'une première union avec Mme [N] [P] dont il a divorcé, à savoir [J] et [L] et deux autres d'une union avec Mme [O] [W], [A] et [F].

Le 1er juin 1976, [I] [C] a légué à sa 'lle, [M], la quotité disponible la plus forte permise par la loi, de toute sa fortune mobilière et immobilière, avec la possibilité de conserver, pour son compte, dans la limite de la quotité disponible, tels biens mobiliers ou immobiliers qui lui conviendraient.

Le 6 mai 1981, [I] [C] et [H] [D] ont procédé, au profit de Mme [M] [C], à la donation en avancement d'hoirie avec réserve d'usage et d'habitation sur un immeuble [Adresse 2] à [Localité 7] avec rapport en moins prenant pour sa valeur au jour de la donation, soit 320 000 francs.

Le 6 juin 1990, [H] [D] a établi un testament au profit de sa fille, [M], lequel reprend les mêmes dispositions que celles de son mari, prédécédé le 15 avril 1988.

Par jugement du 24 mai 2005, le tribunal d'instance de Forbach a décidé la mise sous tutelle de [K] [C] et a désigné Mme [M] [C] pour exercer les fonctions d'administratrice légale sous contrôle judiciaire de la personne protégée.

[K] [C] est décédé le 11 octobre 2006.

Le 12 août 2008, Mmes [J] et [L] [C] ont sollicité le partage judiciaire de la succession de [K] [C] dit « [K] » auprès du tribunal d'instance de Metz, lequel a fait droit à cette requête, par ordonnance du 8 septembre 2008, Maîtres [E] et [Z], notaires, ayant été commis pour procéder aux opérations de partage.

Le 6 avril 2010, [A] et [F] [C] représentées par leur mère, Mme [O] [W], administratrice légale sous contrôle judiciaire, ont vendu à Mme [M] [C], à titre de licitation ne faisant pas cesser l'indivision, les droits indivis soit 2/12èmes leur revenant sur l'immeuble situé [Adresse 1] à [Localité 7] qu'elles ont recueilli dans la succession de leur père, [K] [C], le prix des parts licitées s'élevant à 46 667 euros.

Considérant que le règlement du partage de la succession de [K] [C] supposait que soit, au préalable, réglé le partage de la succession des parents de ce dernier, Mme [O] [W] en qualité de représentante légale de sa fille mineure [F] [C] et Mme [A] [C], le 9 janvier 2014, ont saisi le tribunal d'instance de Mulhouse d'une requête aux fins de partage judiciaire de la succession de [I] [C] et [H] [D].

Par ordonnance du 3 août 2016, le tribunal d'instance a déclaré la demande en partage recevable ; Mmes [M], [J] et [L] [C] ont formé un pourvoi immédiat à l'encontre de cette ordonnance.

Par arrêt du 12 avril 2018, rectifié par arrêt du 6 décembre 2018, la cour d'appe1 de Colmar a infirmé l'ordonnance du tribunal d'instance de Mulhouse du 3 août 2016 et a déclaré irrecevable la requête en partage judiciaire.

Par acte d'huissier en date du 13 octobre 2018, Mmes [F] et [A] [C], ont assigné Mme [M] [C] devant le tribunal de grande instance de Mulhouse afin notamment de voir constater le recel successoral des biens attribués à [H] [D] pour la part leur revenant et que les comptes d'indivision n'avaient jamais été approuvés par [K] [C].

Par jugement du 15 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Mulhouse remplaçant le tribunal de grande instance a :

constaté que les opérations de partage des successions de [I] et [H] [C] avaient eu lieu dans un cadre amiable entre les héritiers, [K] [C] et [M] [C], et étaient closes ;

déclaré irrecevable la demande de recel successoral de Mmes [A] [C] et [F] [C] ;

déclaré irrecevable la demande de « recalcul des droits » qui procéderait d'une dissimulation de la donation en avancement d'hoirie ;

rejeté les autres demandes de Mme [A] [C] et de Mme [F] [C], libellées de la manière suivante : « Dire et juger qu'aux termes du testament olographe dressé le 6 juin 1990, Mme [H] [C] a donné à sa fille, Mme [M] [C] la quotité disponible la plus forte permise par la loi, de toute sa fortune mobilière et immobilière avec la faculté de conserver, pour son compte, et dans la limite de la quotité disponible, tels biens mobiliers ou immobiliers qui lui conviendraient. Dire et juger qu'au terme du certificat collectif d'héritier établi le 18 juillet 1994, Mme [H] [D], a laissé « comme légataire universel pour la quotité disponible sa fille [M] [C] pour un tiers et comme héritiers légaux et à réserve ses deux enfants, à savoir [M] [C] et [K] [C], chacun pour un tiers. Dire et juger que l'immeuble [Adresse 1] a fait l'objet d'une vente - licitation évaluée à la somme de 280 000 frs, soit 46 167 euros pour chacune des demanderesses.» ;

rejeté la demande de désignation d'un notaire ;

rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive de Mme [M] [C] ;

condamné Mme [F] [C] et Mme [A] [C], chacune, à payer à Mme [M] [C] une somme de 3000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné Mmes [A] et [F] [C] aux dépens.

Le tribunal a déclaré irrecevable la demande formulée au titre du recel successoral, faisant état de ce que, dans un arrêt du 12 avril 2018, la cour d'appel de Colmar avait déclaré irrecevable la demande en partage de Mme [W], représentante de sa fille mineure [F], et de [A] [C], au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve d'une indivision subsistant au titre de la succession de [G] et [H] [C].

Il a ajouté que l'acte invoqué de vente sur licitation du 6 avril 2010 ne constituait pas un acte de partage mais un acte de cession de parts indivises par les héritiers et filles de [K] [C], [A] et [F], à leur tante Mme [M] [C], soulignant que ces parts indivises 'guraient au Livre Foncier sous le nom propre de [F] et [A], et non plus sous le nom de leur père.

Il a considéré que la vente de l'immeuble par Mme [M] [C] et ses deux autres nièces, [L] et [J] avait mis fin à l'indivision.

Il a également déclaré irrecevable la demande au titre d'un recalcul des droits, faute de précisions quant au fondement juridique de cette demande.

Le tribunal a encore retenu que le partage de la succession de [H] et [I] [C] était clos, quand bien même il n'y aurait pas eu d'acte de partage notarié ou de partage judiciaire puisque [K] et [M] s'étaient mis d'accord pour des opérations de partage à l'amiable, ayant abouti notamment aux deux ventes immobilières de [Localité 8] et de [Localité 7], [Adresse 1].

Il a considéré que les filles de [K] [C] ne pouvaient revenir sur les décisions de partage amiable de leur père, tant dans leur principe que dans leurs modalités, notamment en invoquant une prétendue dissimulation de leur tante à leur égard, alors même que la donation en avancement d'hoirie figurait en toutes lettres dans la déclaration de succession de [H] [D], déposée le 14 juin 1994.

Le tribunal a rejeté les autres demandes de [A] et [F] [C] considérant qu'il ne relevait pas de sa compétence de « dire et juger » mais de la liberté des parties concernant leurs droits patrimoniaux et successoraux.

Il a également rejeté la demande de désignation d'un notaire ainsi que la demande de dommages et intérêts de Mme [M] [C] pour procédure abusive à défaut pour elle de justifier de son préjudice.

Mmes [F] et [A] [C] ont formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 9 février 2021.

Par ordonnance du 25 août 2022, le tribunal judiciaire de Mulhouse a ordonné, sous réserve du droit des parties de provoquer par voie d'assignation, une décision sur le fond et sur la recevabilité du partage, l'ouverture d'une procédure de partage judiciaire de la succession de [I] [C] et d'[H] [D] et a désigné Maître [X], Notaire pour y procéder.

A la suite du pourvoi immédiat formé le 9 septembre 2022 par Mme [M] [C], le tribunal judiciaire de Mulhouse, par ordonnance du 14 novembre 2022 a dit n'y avoir lieu de rétracter l'ordonnance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 décembre 2022.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de leurs conclusions transmises par voie électronique le 25 novembre 2022, Mmes [F] et [A] [C] demandent à la cour de :

les déclarer recevables et bien fondées en leur appel ;

y faisant droit, infirmer le jugement du 8 décembre 2020 du tribunal judiciaire de Mulhouse en ce qu'il :

a constaté que les opérations de partage des successions [I] et [H] [C] ont eu lieu dans un cadre amiable entre les héritiers, [K] et [M] [C] et sont closes,

a déclaré irrecevable leur demande de recel successoral,

a déclaré irrecevable la demande de recalcul des droits qui procéderait d'une dissimulation de la donation de l'avancement d'hoirie,

les a condamnées chacune à payer à Mme [M] [C] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

et statuant à nouveau :

constater que Mme [M] [C], dans le cadre des opérations de partage, a sciemment dissimulé l'existence des libéralités préciputaires dont elle a béné'cié et qui auraient réduit ses droits dans le cadre dudit partage ;

constater la dissimulation volontaire par l'intimée des libéralités qui lui ont été consenties le 6 mai 1981, laquelle est constitutive d'un recel ;

condamner l'intimée à rapporter la libéralité consentie ;

la condamner à restituer les fruits des biens recelés y compris les loyers de l'immeuble ;

la condamner à les indemniser du préjudice subi en tenant compte de la valeur des immeubles au jour où ils ont été aliénés, à savoir [Adresse 1], [Adresse 2] et l'appartement à [Localité 8] ;

avant dire droit :

- désigner tel Notaire qu'il plaira à la cour avec pour mission de :

* établir le nouveau décompte résultant du recel successoral,

* déterminer les montants revenant aux concluantes ;

sur appel incident :

déclarer l'appel incident formé par Mme [M] [C] irrecevable en tous cas mal fondé ;

le rejeter ;

la débouter de l'intégralité de ses fins et conclusions ;

condamner Mme [M] [C] en tous les frais et dépens tant de première instance que d'appel ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la procédure de partage, Mmes [F] et [A] [C] font valoir que, par ordonnance du 25 août 2022, le tribunal de Mulhouse a ordonné l'ouverture d'une procédure de partage judiciaire et a désigné Me [X], Notaire, pour y procéder, après avoir indiqué que n'était pas rapportée la preuve de la liquidation de la succession des époux [C]-[D]. Elles ajoutent que le tribunal a maintenu sa décision après avoir mentionné la consistance de la masse à partager.

Elles considèrent que l'arrêt rendu le 12 avril 2018 par la cour d'appel de Colmar ne fait pas obstacle au dépôt d'une nouvelle requête dès lors qu'il subsiste une indivision entre les parties. Elles soulignent que, d'une part, s'agissant d'une décision d'irrecevabilité, une nouvelle demande ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée du moment que la cause d'irrecevabilité a disparu et, d'autre part, les décisions judiciaires émanant d'une juridiction gracieuse ne sont pas revêtues de l'autorité de la chose jugée et sont susceptibles d'être rapportées ou modifiées si les circonstances dans lesquelles elles ont été rendues ont changé.

Elles indiquent rapporter la preuve de ce qu'il existe toujours une indivision entre Mme [M] [C] et elles.

Sur la prescription, Mmes [F] et [A] [C] font valoir que, s'agissant des successions ouvertes avant le 1er janvier 2007, le délai pour introduire une action en recel est attaché à l'option successorale visée à l'ancien article 789 du code civil, de sorte que la demande en recel successoral reste recevable pendant trente ans à compter de l'ouverture de la succession puisque la prescription quinquennale ne concerne que les successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007.

Elles précisent que [I] [C] est décédé le 15 avril 1988, son épouse le 20 décembre 1993, de sorte que l'action en recel n'est pas prescrite et ne le sera que le 21 décembre 2023, la succession s'étant ouverte à compter du décès d'[H] [D] le 20 décembre 1993, ce que Mme [M] [C] reconnaît.

Sur le bien-fondé de leur demande afférente au recel, Mmes [A] et [F] [C] font valoir que, dans le cadre de la requête en partage judiciaire de la succession d'[H] [D] et de [I] [C], l'avocat de Mme [M] [C] a déposé des conclusions le 12 janvier 2015 devant le tribunal d'instance de Mulhouse dans lesquelles il précisait que les parties ont convenu, dans le cadre du règlement de la succession de leur mère, d'appliquer les modalités de partage d'un courrier de Maître [R], notaire à [Localité 7] en date du 23février 1995 ; or, n'étant pas encore nées, elles ignoraient les dispositions en faveur de Mme [M] [C].

Elles ajoutent que Mme [M] [C] reconnaît que la répartition du prix de vente ne s'est pas effectuée conformément aux préconisations de Me [R], notaire, puisque, en premier lieu, aucun partage des meubles et du mobilier n'est intervenu, qu'en second lieu, la répartition n'a pas été faite conformément à la règle édictée par le notaire et que, enfin, à aucun moment, les loyers des immeubles n'ont été répartis.

Elles reprochent à Mme [M] [C], d'une part, d'avoir dissimulé des donations jusqu'à la procédure de partage, ce qui lui a permis de percevoir sur les immeubles un montant supérieur au montant auquel elle pouvait prétendre en raison de l'atteinte de la réserve légale et, d'autre part, de ne pas avoir versé les loyers à son frère, au demeurant sous sa tutelle.

Elles évaluent le montant ainsi détourné, sans tenir compte des loyers, pour les immeubles, selon les calculs effectués par Maître [U], Notaire à [Localité 9], à un montant total de 194 686 euros, soit pour les deux concluantes ensemble 97 343 euros au lieu de 46 667 euros.

Sur l'appel incident, Mmes [A] et [F] [C], au cas où par impossible, la cour ne retiendrait pas le recel successoral caractérisé, lui demandent de les rétablir dans leurs droits selon la méthode d'évaluation retenue par Maître [U] et de désigner et renvoyer les parties devant le notaire actuellement en charge de la procédure de partage judiciaire des biens dépendant de la succession de [K] [C], leurs droits n'ayant pas été calculés conformément à la clé de répartition prévue par Maître [R], à savoir 52,43% pour Mme [M] [C] et 47,17% pour [K] [C] au droit duquel elles viennent.

Elles ajoutent qu'il faut également prendre en considération les loyers qui n'ont toujours pas été versés, ce que Mme [M] [C] reconnaît.

Elles évaluent leur préjudice comme suit :

. valeur de l'immeuble au [Adresse 1] : 300 000 euros

. valeur de l'immeuble au [Adresse 2] : 300 000 euros

. appartement à [Localité 8] : 38 000 euros

soit un total de 638 000 euros, ce qui induit une réserve individuelle de 212 667 euros, part qui aurait dû être dévolue aux enfants de [K] [C], déduction faite du prix de vente de l'appartement de [Localité 8] de 17 981 euros, soit un total de 194 686 euros, soit pour les concluantes ensemble 97 343 euros au lieu de 46 667 euros, montant perçu.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 29 novembre 2022, Mme [M] [C] demande à la cour de :

sur l'appel principal :

le dire irrecevable sinon mal fondé ;

dire irrecevables sinon mal fondés les moyens et prétentions développés par les appelantes ;

débouter Mme [A] et [F] [C] de l'ensemble de leurs fins, moyens et prétentions ;

confirmer le jugement entrepris sous réserve de l'appel incident ;

y ajoutant :

condamner Mmes [A] et [F] [C] à lui payer chacune une indemnité de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ainsi que les frais et dépens d'appel ;

sur appel incident :

réformer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

et statuant à nouveau sur ce seul chef :

condamner Mmes [A] et [F] [C] à payer chacune à Mme [M] [C] un montant de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et infâmante ;

débouter Mmes [A] et [F] [C] de toutes conclusions contraires ;

les condamner aux frais de l'appel incident.

Mme [M] [C] soutient que l'action en recel est irrecevable puisque, d'une part, il n'y avait pas de procédure de partage en cours à la date de la demande, et, d'autre part, la prescription est acquise.

Elle souligne qu'à la date de l'assignation en recel, il n'existait aucune procédure de partage en cours et qu'à la date de l'assignation en recel, la demande d'ouverture d'une telle procédure en partage de la succession des époux [C]-[D] avait été déclarée irrecevable par arrêt de la cour d'appel de Colmar du 12 avril 2018 en l'absence d'indivision subsistante.

Elle ajoute que, c'est en vain, que les appelantes font valoir l'existence d'une indivision successorale concernant la succession de [I] [C] et [H] [D].

Elle précise qu'en effet, s'agissant, en premier lieu, du compte de gestion, seule la subsistance d'un actif successoral au titre de la succession [C]-[D] serait de nature à justifier l'existence d'une indivision successorale ; or, le compte d'indivision ouvert par elle postérieurement aux décès de [I] [C] et [H] [D] et sur lequel ont été versés les loyers provenant des immeubles indivis et prélevées les charges afférentes à l'entretien de ces immeubles dont se prévalent les appelantes sont des créances nées postérieurement à l'ouverture de la succession [C]-[D] et ne caractérisent pas un actif successoral ; d'une part, l'immeuble sis au [Adresse 1] dépendant de la succession [C]-[D] a été liquidé de longue date et vendu le 6 octobre 2010 et, d'autre part, les loyers perçus postérieurement au décès des époux [C]-[D] constituent, non pas un actif successoral, mais une créance d'indivision ; le délai de prescription court à compter du jour de la naissance de la créance, ou tout du moins du jour où le titulaire a connu les faits lui permettant de l'exercer, de sorte que, compte tenu de la date de décès des époux [C]-[D] et de la date de perception des loyers, toutes prétentions au titre du compte d'indivision sont vouées à l'échec puisque prescrites ; [K] [C] n'a jamais demandé à percevoir les fruits de ce compte d'indivision puisqu'il y avait renoncé, ce compte a été définitivement liquidé et soldé au décès de [K] [C] et son solde transféré entre les mains de Maître [E] chargé du partage successoral de ce dernier, ce compte constituant, en conséquence, à ce jour, un actif de la succession de [K] [C] puisque né antérieurement à son décès, mais en aucun cas un actif de la succession de [I] [C] et [H] [D] puisque né postérieurement à leur décès ; la créance éventuelle en résultant qui ne constitue pas un actif successoral est prescrite de longue date.

S'agissant de la vente licitation du 6 avril 2010, Mme [M] [C] indique que cet acte a permis le rachat par elle de la quote-part indivise des appelantes dans un bien immobilier dépendant de la succession de leur père, [K] [C] mais n'a pas fait cesser l'indivision successorale de ce dernier qui a été maintenue pour l'ensemble des autres biens non partagés, étant souligné qu'elle n'est pas intervenue, en qualité de copartageante, mais de cessionnaire, de sorte que la vente licitation n'est pas un acte de partage mais un acte de vente lequel ne justifie pas de l'existence d'une indivision successorale.

Sur la prescription, Mme [M] [C] fait valoir que la succession d'[H] [D] a été ouverte le 20 décembre 1993, soit très largement avant que soit introduite la procédure en recel successoral, et que, par application les dispositions transitoires édictées par l'article 2222 du code civil, toute action en recel non introduite avant le 19 juin 2013 se heurte à la prescription, l'acte de vente licitation reçu le 6 avril 2010 par Maître [E] ne valant pas acte interruptif puisqu'il ne constitue pas, par sa nature, un acte de partage mais une vente.

Mme [M] [C] considère que l'action en recel est mal fondée puisque le recel doit porter sur un effet de la succession, ce que ne sont pas les fruits et revenus d'un bien indivis, [K] [C] ayant pleine et entière connaissance des avantages consentis à sa s'ur et n'ayant jamais, de son vivant, entendu les remettre en cause, les conditions du partage de la succession des époux [C]-[D], close de longue date au moment du partage de la succession de [K] [C] ayant, en outre, été directement réglées entre ce dernier et elle-même.

Elle ajoute qu'il n'est pas démontré qu'elle aurait abusé de la faiblesse de son frère et de sa qualité de tutrice pour dissimuler des actes, étant souligné qu'un long délai s'est écoulé entre le décès des époux [C]-[D] et la mise sous tutelle de [K] [C], qui avait pleinement connaissance de la donation immobilière du 6 mai 1981 et du testament de ses parents et n'a jamais voulu aucun des loyers ni un quelconque rapport des donations.

Sur la demande subsidiaire en recalcul des droits de Mmes [A] et [F] [C], Mme [M] [C] la considère, d'une part, irrecevable dès lors qu'aucune prétention n'a été formulée de ce chef à titre subsidiaire dans la déclaration d'appel et, d'autre part, vouée à l'échec puisque les appelantes ne visent aucun fondement juridique au soutien de cette prétention et que l'exercice d'une éventuelle action en réduction se heurte à la prescription, cette action se prescrivant par cinq ans à compter de l'ouverture de la succession ou deux ans à compter du jour où les héritiers ont eu connaissance de l'atteinte portée à leur réserve, sans jamais pouvoir excéder dix ans à compter du décès, étant souligné que le rapport d'une donation n'a aucun caractère obligatoire et que l'héritier réservataire peut renoncer à en bénéficier, les appelantes, agissant comme simples ayants-droit de [K] [C] ne pouvant agir que dans la limite de la volonté de leur père défunt.

Mme [M] [C] s'étonne du chiffrage du préjudice présenté par les appelantes puisqu'elles intègrent à l'actif successoral l'immeuble du [Adresse 2] qui a fait l'objet d'une donation à son bénéfice et n'entre donc pas en nature dans l'actif successoral, l'immeuble ayant été stipulé rapportable en moins prenant, pour sa valeur au jour de la donation.

Elle considère que les estimations de Maître [U], notaire de Mme [W], chiffrant les immeubles des 13 et [Adresse 2] à [Localité 7], à 300 000 euros chacun sont dénuées de tout sérieux et de tout fondement.

Sur appel incident, Mme [M] [C] expose que les appelantes ont volontairement procédé à des accusations graves et infamantes tant vis-à-vis de [K] [C] qu'à son égard, ce qui lui est préjudiciable au plan moral, indépendamment de l'atteinte à l'honneur faite par l'accusation de recel.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions transmises aux dates susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité des appels

Mme [M] [C] ne développant aucun moyen à l'appui de sa demande d'irrecevabilité de l'appel de Mmes [F] et [A] [C] et en l'absence de cause d'irrecevabilité susceptible d'être soulevée d'office, il y a lieu de déclarer leur appel recevable.

Mme [A] et [F] [C] ne développant aucun moyen à l'appui de leur demande d'irrecevabilité de l'appel incident de Mme [M] [C] et en l'absence de cause d'irrecevabilité susceptible d'être soulevée d'office, il y a lieu de déclarer l'appel incident recevable.

Sur la recevabilité des demandes de Mmes [A] et [F] [C] au titre du recel successoral et au titre d'un « recalcul des droits »

Mmes [F] et [A] [C] demandent à ce que l'ordonnance du 25 août 2022 rendue par le tribunal judiciaire de Mulhouse ordonnant le partage de la succession [D]-[C] produise des effets, ce à quoi il ne peut être fait droit dès lors que cette ordonnance n'a pas acquis force de chose jugée puisqu'elle a fait l'objet d'un pourvoi devant la cour d'appel de Colmar et a été transmise à cette cour après l'ordonnance du 14 novembre 2022 ayant dit n'y avoir lieu à la rétracter, aucune des parties ne justifiant que la cour ait statué.

De son côté, Mme [M] [C] entend se prévaloir de l'autorité de chose jugée de l'arrêt du 12 avril 2018, rectifié par arrêt du 6 décembre 2018, rendu par la cour d'appel de Colmar qui a infirmé l'ordonnance du tribunal d'instance de Mulhouse du 3 août 2016 et a déclaré irrecevable la requête en partage judiciaire déposée par Mme [O] [W] en qualité de représentante légale de sa fille mineure [F] [C] et par Mme [A] [C].

A la date de saisine du tribunal de grande instance de Mulhouse, soit le 13 octobre 2018, aucune procédure gracieuse de partage n'était en cours, une action au contentieux à cette fin étant, dès lors, possible.

Toutefois, force est de constater que Mmes [A] et [F] [C] forment des demandes relatives à un recel et à un recalcul des droits en découlant sans former concomitamment une demande de partage, de sorte que leurs demandes sont irrecevables.

Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts de Mme [M] [C] pour procédure abusive

Considération prise de ce que le caractère abusif de l'action diligentée par Mmes [A] et [F] [C] n'est pas établi, il y a lieu de débouter Mme [M] [C] de sa demande.

Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.

Sur les dépens et les frais de procédure

Le jugement entrepris est confirmé de ces chefs.

A hauteur d'appel, Mme [A] et [F] [C] sont condamnées aux dépens ainsi qu'à payer, chacune, à Mme [M] [C] la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles sont déboutées de leur demande formulée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :

DECLARE l'appel de Mme [A] [C] et Mme [F] [C] recevable ;

DECLARE l'appel incident de Mme [M] [C] recevable ;

CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 15 décembre 2020 ;

Y ajoutant :

CONDAMNE Mme [A] [C] et Mme [F] [C] aux dépens de la procédure d'appel ;

CONDAMNE Mme [A] [C] et [F] [C] à payer chacune à Mme [M] [C] la somme de 2000 (deux mille) euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure exposés à hauteur d'appel ;

DEBOUTE Mme [A] [C] et Mme [F] [C] de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, Le président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/00864
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;21.00864 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award