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05/05/2023 | FRANCE | N°22/01426

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 05 mai 2023, 22/01426


MINUTE N° 230/2023





























Copie exécutoire à



- Me Nadine HEICHELBECH



- Me Katja MAKOWSKI





Le 5 mai 2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 05 MAI 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/01426 -

N° Portalis DBVW-V-B7G-HZ6W>


Décision déférée à la cour : 29 Mars 2022 par le président du tribunal judiciaire de Strasbourg





APPELANTE :



Madame [M] [T] épouse [F]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Nadine HEICHELBECH, Avocat à la cour





INTIMÉE :



S.A. ASSURA...

MINUTE N° 230/2023

Copie exécutoire à

- Me Nadine HEICHELBECH

- Me Katja MAKOWSKI

Le 5 mai 2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 05 MAI 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/01426 -

N° Portalis DBVW-V-B7G-HZ6W

Décision déférée à la cour : 29 Mars 2022 par le président du tribunal judiciaire de Strasbourg

APPELANTE :

Madame [M] [T] épouse [F]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Nadine HEICHELBECH, Avocat à la cour

INTIMÉE :

S.A. ASSURANCES DU CRÉDIT MUTUEL VIE

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Katja MAKOWSKI, Avocat à la cour

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Janvier 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats Madame Dominique DONATH, faisant fonction

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente, et Madame Sylvie SCHIRMANN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

- 2 -

FAITS et PROCÉDURE

En octobre 2010, dans le cadre de l'acquisition d'un bien immobilier, Mme [M] [T], épouse [F], a souscrit deux prêts auprès de la Caisse de Crédit Mutuel (CCM) Kochesberg, garantis par des assurances fournies par la SA Assurances du Crédit Mutuel (ACM) Vie.

Par assignation délivrée à la SA ACM Vie le 10 décembre 2021, elle a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Strasbourg d'une demande d'expertise médicale sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, afin que soient décrits son état de santé, les affections et troubles dont elle souffrait, ainsi que leurs conséquences sur sa capacité de travail et, le cas échéant, sur son incapacité permanente de travail ou son invalidité.

La société ACM Vie s'y est opposée.

Par ordonnance du 29 mars 2022, le juge des référés a rejeté cette demande, condamnant Mme [T], épouse [F], aux entiers frais et dépens ainsi qu'à payer à la société ACM Vie la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

S'agissant du contrat EN 110117020243601, dont il n'était pas contesté qu'il avait pris fin en novembre 2018, le juge des référés a considéré que les garanties du contrat d'assurance avaient cessé à cette date et que, dès lors, la requérante ne justifiait d'aucun intérêt légitime à solliciter une expertise judiciaire au titre de ce prêt, toute demande de prise en charge étant vouée à l'échec.

S'agissant du contrat EN 110117020243602 d'un montant de 161 800 euros, remboursable en 240 mois, le juge des référés a relevé que le refus de prise en charge de l'incapacité temporaire de travail résultait d'un défaut de communication des documents sollicités par l'assureur et contestée par l'assuré, si bien que la mise en 'uvre d'une expertise médicale était sans intérêt pour la solution du litige.

Concernant l'invalidité permanente, il a relevé que l'expertise d'arbitrage réalisée avait été acceptée par Mme [T], épouse [F], qui en contestait désormais les conclusions. Or, le recours à l'expertise d'arbitrage était prévu par le contrat d'assurance et le protocole d'expertise médicale d'arbitrage, accepté par Mme [T], épouse [F], le 7 septembre 2020, avait rappelé que les conclusions de cet examen s'imposeraient tant à l'assurée qu'à l'assureur, quels qu'en soient les résultats. En conséquence, l'expertise médicale sollicitée était inutile, l'action au fond étant d'ores et déjà vouée à l'échec, quel que soit son fondement juridique.

Mme [T], épouse [F], a interjeté appel de cette ordonnance le 7 avril 2022.

Par ordonnance du 8 juillet 2022, la présidente de la chambre a fixé d'office l'affaire à l'audience de plaidoirie du 6 janvier 2023, sur le fondement de l'article 905 du code de procédure civile.

- 3 -

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par ses conclusions d'appel transmises par voie électronique le 7 juillet 2002, Mme [T], épouse [F], sollicite que son appel soit déclaré recevable, que l'ordonnance déférée soit infirmée et que la cour, statuant à nouveau :

- ordonne une expertise médicale de sa personne, avec pour mission de décrire son état de santé, préciser les affections et troubles dont elle souffre ainsi que leurs conséquences sur sa capacité de travail, le cas échéant sur son incapacité permanente de travail ou son invalidité,

- désigne le médecin qu'il lui plaira de désigner,

- dise que la provision sur frais d'expertise est à la charge de la défenderesse et intimée,

- condamne la défenderesse et intimée aux entiers frais et dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 2 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- constate l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

A l'appui de sa demande d'expertise, Mme [T], épouse [F], expose souffrir de graves problèmes de santé invalidants, qui justifient le bénéfice des garanties résultant du contrat d'assurance prêt souscrit.

Elle fait valoir également que :

- le professeur [B], expert nommé par l'intimée, n'a pas tenu compte de l'ensemble des affections dont elle souffre et il a sous-évalué son état,

- elle-même dispose d'éléments médicaux démontrant son invalidité et justifiant une expertise judiciaire sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile,

- elle conteste ne pas avoir fourni les documents nécessaires à son assureur et, en tout cas, elle n'a pas eu connaissance des documents sollicités,

- contrairement à l'appréciation du premier juge, les dispositions contractuelles liant les parties ne font pas obstacle à une expertise ordonnée judiciairement.

Par ses conclusions d'intimée transmises par voie électronique le 21 juillet 2022, la société ACM Vie sollicite, au visa des articles 808 et 809 du code de procédure civile, de l'article 1103 du code de procédure civile et de l'article L 112'2 du code des assurances, que l'appel de Mme [T], épouse [F], soit déclaré irrecevable et mal fondé et, en conséquence, que l'ordonnance déférée soit confirmée en toutes ses dispositions.

Très subsidiairement, si une expertise devait être ordonnée, elle sollicite qu'il soit jugé que l'expert se conformera à la mission définie contractuellement, qu'elle détaille, et que l'avance des frais d'expertise soit mise à la charge de l'appelante.

En toute hypothèse, la société ACM Vie sollicite la condamnation de Mme [T], épouse [F], à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les frais et dépens de première instance et d'appel, y compris les éventuels frais d'expertise, et que soit rejetée toute conclusion dirigée à son encontre.

S'agissant du contrat EN 110117020243601, la société ACM Vie fait valoir d'une part que Mme [T], épouse [F], n'a pas fourni les documents nécessaires pour que son droit à indemnisation puisse être étudié à compter de la date du 3 novembre 2018, premier jour d'indemnisation après l'application de la franchise de 180 jours, et ce malgré les demandes qui lui ont été présentées successivement à ce titre. D'autre part, Mme [T], épouse [F], n'a droit à aucune indemnisation au titre de ce contrat, dans la mesure où celui-ci a pris fin en novembre 2018, du fait du remboursement total du prêt, ainsi que l'a retenu le premier juge.

- 4 -

Concernant le contrat EN 110117020243602, la société ACM Vie fait valoir qu'elle n'a pas à prendre en charge l'indemnisation de son assurée dans la mesure où, d'une part, s'agissant de la garantie incapacité temporaire totale de travail, là encore, Mme [T], épouse [F], n'a pas fourni les documents nécessaires pour que son droit à indemnisation puisse être étudié à compter du 3 novembre 2018, date du premier jour d'indemnisation après l'application de la franchise de 180 jours. D'autre part, s'agissant de la garantie invalidité permanente, l'expertise d'arbitrage, dont les conclusions s'imposent aux parties, fait apparaître des taux d'incapacité fonctionnelle et professionnelle ne permettant pas cette prise en charge.

Elle reprend les motifs de l'ordonnance déférée et souligne que, selon une jurisprudence constante, si les termes du protocole sont clairs, les conclusions de l'examen médical d'arbitrage s'imposent à l'assuré comme à l'assureur.

Très subsidiairement, si une expertise judiciaire devait être ordonnée, la société ACM Vie fait valoir que :

- la mission de l'expert devra être adaptée aux dispositions contractuelles applicables et complétée par la mission qu'elle préconise,

- les certificats médicaux produits par Mme [T], épouse [F], faisant état d'antécédents médicaux, il y aurait lieu d'appliquer une mission d'expertise avec antériorité,

- un pré-rapport devrait être déposé et les frais d'expertise devraient être mis à la charge de l'appelante, qui bénéficierait de cette mesure.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

MOTIFS

I ' Sur la demande d'expertise judiciaire

L'article 145 du code de procédure civile énonce que, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

En premier lieu, s'agissant du contrat EN 110117020243601, il doit être constaté que Mme [T], épouse [F], ne conteste toujours pas, à hauteur de cour, qu'il a pris fin en novembre 2018 et que les garanties du contrat d'assurance ont cessé à cette date, ainsi que l'a retenu le premier juge, ce dont il résulte effectivement que l'appelante ne justifie d'aucun intérêt légitime à solliciter une expertise judiciaire au titre de ce prêt, dans la mesure où toute demande de prise en charge en exécution du contrat d'assurance y afférent serait vouée à l'échec.

S'agissant du contrat EN 110117020243602 remboursable en 240 mois, dont le terme surviendra donc fin 2030, si le premier juge a relevé que le refus de prise en charge de l'incapacité temporaire de travail résultait d'un défaut de communication des documents sollicités par l'assureur, lequel était contesté par Mme [T], épouse [F], cette dernière ne justifie toujours pas avoir communiqué à l'intimée les documents réclamés dans les

- 5 -

courriers de cette dernière et notamment les justificatifs d'arrêt de travail pour la période postérieure au 30 octobre 2018 réclamés dans une lettre du 30 avril 2020. A défaut de la moindre explication de Mme [T], épouse [F], dans le cadre de l'appel, sur ce point et sur la question de la mise en 'uvre de cette garantie, force est de constater qu'elle ne justifie pas de ce qu'une expertise médicale présenterait à ce titre un intérêt pour la solution d'un litige.

Concernant la mise en 'uvre de la garantie invalidité permanente, le premier juge a rappelé les termes du paragraphe 13 des conditions générales « valant Notice d'information » paraphées par Mme [T], épouse [F], relatif au choix d'un médecin pour départager les parties en cas de désaccord entre le médecin de l'assureur et l'assuré, et selon lequel « Dans ce cas, les parties conviennent d'accepter les conclusions de cette expertise d'arbitrage et supporteront pour moitié les honoraires de ce médecin. »

La société ACM Vie, en proposant à Mme [T], épouse [F], l'organisation d'une « expertise médicale d'arbitrage », par un courrier du 20 août 2020, a écrit « Nous attirons votre attention sur le fait que les conclusions du médecin-expert arbitre, quelles qu'elles soient, s'imposeront aux deux parties, tant à vous qu'à nous ».

Mme [T], épouse [F], a signé le protocole d'arbitrage qui, après le rappel de ce que l'assureur et l'assurée conviennent d'un commun accord de la mise en place d'une expertise médicale d'arbitrage pratiquée par un expert choisi en commun, mentionne, au 3ème alinéa, « Les conclusions de cet examen s'imposeront tant à l'assurée qu'à l'assureur » et, plus loin, au-dessus de la signature de l'appelante, en gras, « Je soussignée, [F] [M] (nom et prénom en écriture manuscrite), déclare accepter les termes du protocole d'expertise médicale d'arbitrage ci-dessus et m'engage à accepter les conclusions de celle-ci quels qu'en soient les résultats. »

Il résulte de tous ces éléments que l'assurée a été très largement avisée des conséquences de la signature, par elle, du protocole d'expertise médicale d'arbitrage, et que, d'ailleurs, elle ne soutient nullement ne pas avoir compris la portée de son engagement.

Alors que la mission qui était confiée à l'expert par ce protocole signé par les deux parties n'avait nullement pour but de lui faire prendre position sur l'application du contrat, mais seulement d'émettre un avis médical sur l'état de santé de Mme [T], épouse [F], au regard des conditions médicales de mise en 'uvre des garanties, il apparaît donc qu'au vu de l'engagement signé par elle, l'appelante ne peut prétendre à ce que soit ordonnée une expertise médicale judiciaire.

En conséquence, l'ordonnance déférée doit être confirmée en ce qu'elle a rejeté cette demande.

II - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

L'ordonnance déférée étant confirmée en sa disposition principale, elle le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens engagés lors de la première instance.

La demande d'expertise de Mme [T], épouse [F], étant rejetée, cette dernière sera condamnée aux dépens de l'appel et à verser à la société ACM Vie la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens engagés par cette dernière en appel. Les mêmes motifs conduisent la cour à rejeter la demande présentée par l'appelante au même titre et sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue entre les parties par le juge des référés du tribunal judiciaire de Strasbourg le 29 mars 2022,

Ajoutant à ladite ordonnance,

CONDAMNE Mme [M] [T], épouse [F], aux dépens d'appel,

CONDAMNE Mme [M] [T], épouse [F], à payer à la SA Assurances du Crédit Mutuel (ACM) Vie la somme de 1 000,00 (mille) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de Mme [M] [T], épouse [F], présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exclus des dépens qu'elle a engagés en appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 22/01426
Date de la décision : 05/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-05;22.01426 ?
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