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13/04/2023 | FRANCE | N°21/03196

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 13 avril 2023, 21/03196


MINUTE N° 183/2023

























Copie exécutoire à



- Me Thierry CAHN



- Me Pégah HOSSEINI SARADJEH





Le 13 avril 2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 13 Avril 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/03196 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HUCY



Décision dÃ

©férée à la cour : 14 Mai 2021 par le SAVERNE





APPELANTS et intimés sur incident :



Monsieur [T] [X]

demeurant [Adresse 2]



La S.A. ALLIANZ IARD prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1]



représentés par Me...

MINUTE N° 183/2023

Copie exécutoire à

- Me Thierry CAHN

- Me Pégah HOSSEINI SARADJEH

Le 13 avril 2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 13 Avril 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/03196 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HUCY

Décision déférée à la cour : 14 Mai 2021 par le SAVERNE

APPELANTS et intimés sur incident :

Monsieur [T] [X]

demeurant [Adresse 2]

La S.A. ALLIANZ IARD prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1]

représentés par Me Thierry CAHN, avocat à la cour.

INTIMÉS et appelants sur incident :

1/ Monsieur [T] [R]

demeurant [Adresse 5]

2/ La Compagnie d'assurance MACIF Société d'assurance Mutuelle, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 4]

1&2/ représentés par Me Pégah HOSSEINI SARADJEH, avocat à la cour.

APPELÉE EN DÉCLARATION D'ARRÊT COMMUN :

La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU BAS-RHIN, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 3]

assignée le 3 janvier 2022 à personne morale, n'ayant pas constitué avocat.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Février 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre, et Madame Nathalie HERY, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRÊT réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, président et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 21 mai 2017, Monsieur [T] [X] circulait sur la RD 214 sur la commune de [Localité 8] (67), à bord de son véhicule de marque Maserati modèle Gran Turismo, immatriculé [Immatriculation 7], accompagné de son épouse. Ce véhicule était assuré auprès de la SA Allianz IARD.

Monsieur [T] [R] circulait sur la même route, en sens inverse, au volant d'une motocyclette de marque Suzuki, modèle SV650, immatriculée [Immatriculation 6], assurée auprès de la Macif.

Les deux véhicules se sont percutés dans un virage, monsieur [R] étant gravement blessé dans l'accident.

Une enquête était diligentée par la gendarmerie nationale de [Localité 9] dans le cadre d'une enquête préliminaire, qui faisait à son issue l'objet d'un classement sans suite de la part du parquet de Saverne.

La Macif, assureur de Monsieur [T] [R], a mandaté le docteur [F] [C] qui a évalué le préjudice de Monsieur [R] dans un rapport du 3 septembre 2019.

La SA Allianz IARD, assureur de Monsieur [X], a mandaté le Cabinet Equad pour enquêter sur les circonstances de l'accident.

Par exploit introductif d'instance en date du 23 janvier 2020, Monsieur [R] et la Macif ont saisi le tribunal judiciaire de Saverne d'une demande tendant à l'indemnisation intégrale du préjudice subi par Monsieur [R], sollicitant divers montants ainsi que l'organisation d'une expertise médicale.

La SA Allianz IARD et Monsieur [X] se sont opposés à la demande au motif que Monsieur [R] aurait commis des fautes de conduite excluant tout droit à indemnisation.

Par jugement du 14 mai 2021, le tribunal, tout en considérant que Monsieur [R] avait perdu le contrôle de son véhicule, n'a pas retenu de faute à son encontre et a dit que son droit à indemnisation était entier. Il a en outre ordonné une expertise médicale confiée au docteur [B] et accordé à M. [R] une provision de 10 000 euros, enjoint à Monsieur [R] d'obtenir de la CPAM du Bas-Rhin le décompte des prestations que l'organisme a versées suite à cet acccident, et réservé les droits et demandes des parties pour le surplus.

Après avoir rappelé les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 applicables au cas d'espèce, le juge est venu constater l'existence d'une implication du véhicule de Monsieur [X] dans la survenue de l'accident du 21 mai 2017, estimant qu'il ressortait des éléments du dossier que cet accident a été provoqué par la perte de contrôle du véhicule de Monsieur [R] dans un virage.

La juridiction a écarté des débats le constat d'accident amiable au motif qu'il n'avait pas été établi et signé par Monsieur [R], de sorte qu'il n'était pas à même de démontrer quoi que ce soit.

La juridiction a retenu que la présence de gravillons sur la route pouvait expliquer la perte de contrôle du véhicule par Monsieur [R], sans que cette perte de contrôle puisse être considérée comme fautive en l'absence de toute signalisation de la présence de ces gravillons.

La juridiction en déduisait que les défendeurs ne démontraient pas que l'accident avait son origine dans une faute imputable à Monsieur [R] susceptible d'exclure ou de réduire son droit à indemnisation.

Corrélativement une expertise médicale était ordonnée, et au regard des éléments médicaux déjà produits une provision était accordée à Monsieur [R] pour un montant de 10 000 euros.

La SA Allianz IARD et Monsieur [X] ont interjeté appel de ce jugement le 9 juillet 2021 en toutes ses dispositions, sauf celles visant à rejeter les demandes.

PRETENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 11 octobre 2021, la SA Allianz IARD et Monsieur [X] demandent à la cour de :

' à titre principal :

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Saverne du 14 mai 2021 en toutes ses dispositions ;

- déclarer Monsieur [R] seul et entier responsable de l'accident survenu le 21 mai 2017 ;

- dire et juger que Monsieur [R] a commis des fautes de conduite ;

- prononcer l'exclusion du droit à indemnisation de Monsieur [R] ;

- débouter Monsieur [R] et la Macif de l'ensemble de leurs fins et prétentions ;

- condamner solidairement Monsieur [R] et la Macif à payer à la SA Allianz IARD une indemnité de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement Monsieur [R] et la Macif aux entiers dépens de la présente procédure ;

' à titre subsidiaire :

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu un droit à indemnisation total de Monsieur [R];

- réduire de 90 % le droit à indemnisation de Monsieur [R] ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné une expertise ;

- donner acte à la SA Allianz IARD de son offre provisionnelle à hauteur de 3.000 euros ;

- débouter les demandeurs du surplus ;

En tout de cause,

- déclarer l'arrêt commun et opposable à la CPAM du Bas-Rhin.

Au soutien de leur appel, la SA Allianz IARD et Monsieur [X] font valoir que le tribunal ne pouvait affirmer que l'accident avait été provoqué par la perte de contrôle du véhicule de Monsieur [R] dans le virage, et en même temps estimer que cette perte de contrôle n'était pas due à une faute exclusive du motard.

Ils soutiennent que toutes les pièces du dossier démontrent l'existence de fautes sérieuses de conduite de la part de Monsieur [R] qui excluraient tout droit à indemnisation à son profit. Ils considèrent que le constat amiable est opposable à Monsieur [R], même si ce dernier ne l'a pas signé, et qu'en tout état de cause sa teneur serait confirmée par celle du rapport d'expertise établie par le cabinet Equad qui a retenu l'existence d'une perte de contrôle par Monsieur [R] de son véhicule et un franchissement de la ligne médiane, mais également par la teneur du procès-verbal d'enquête des gendarmes.

L'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, applicable en l'espèce qui dispose que la faute commise par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis, s'appliquerait en l'espèce ; Monsieur [R] aurait commis plusieurs fautes, à savoir une perte de contrôle de son véhicule et un franchissement de la ligne médiane, à l'origine de la survenue du choc avec le véhicule de Monsieur [X] qui circulait régulièrement sur sa voie de circulation.

Les appelants font référence à un arrêt de la Cour de cassation qui aurait jugé que le franchissement de l'axe médian, peu importe la cause, constitue une faute exclusive de tout droit à indemnisation (civile 2eme, 15 mars 2007). Dans ces conditions, la présence de gravillons sur la chaussée ne pourrait faire disparaître le caractère fautif de la conduite de Monsieur [R], et ce d'autant plus que la présence de gravillons serait hypothétique, le tribunal ayant lui-même indiqué que la DDE s'était contentée de préciser que « il y a souvent des gravillons sur cette route » sans certitude.

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour ne devrait pas exclure le droit à indemnisation de Monsieur [R], il conviendrait qu'elle le limitât de manière substantielle, la part de responsabilité de Monsieur [R] dans la survenue de l'accident ne pouvant être inférieure au seuil de 90 %.

La société faisait une offre d'indemnisation à titre subsidiaire ; chiffrant le préjudice subi à 30 000 euros (soit 6 000 euros pour la tierce personne avant consolidation ; 4 000 euros pour la gêne temporaire ; 7 500 euros pour les souffrances endurées ; 5 000 euros pour le préjudice esthétique ; 500 euros pour les frais divers ; 7 000 euros pour le DFP), après application du taux de réduction de 90 %, les intimés proposent une indemnisation de 3 000 euros.

* * *

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 29 décembre 2021, Monsieur [R] et la Macif demandent à la cour de :

- déclarer l'appel principal mal fondé et le rejeter,

- dire et juger que le véhicule conduit par Monsieur [X], assuré par la compagnie d'assurance Allianz IARD est impliqué dans la survenance de l'accident du 21 mai 2017 ;

- dire et juger que Monsieur [X] et son assureur, Allianz IARD, sont tenus d'indemniser Monsieur [R] pour l'ensemble des préjudices subis par ce dernier ;

- Dire et juger que le droit à indemnisation de Monsieur [R] est total ;

En conséquence, débouter Monsieur [X] et la SA Allianz IARD de l'ensemble de leur demandes, fins et conclusions ;

Subsidiairement, dire et juger que le pourcentage de réduction du droit à indemnisation de Monsieur [R] ne pourra être supérieur à 10% ;

Sur l'appel incident formé par Monsieur [R] et la Macif :

- déclarer l'appel incident recevable et bien fondé ;

Y faisant droit,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné solidairement Monsieur [X] et la SA Allianz IARD à payer à Monsieur [R] la somme de 10 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ;

Et statuant à nouveau :

- condamner solidairement Monsieur [X] et la SAS Allianz IARD à payer à Monsieur [R] la somme de 50 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ;

En tout état de cause :

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;

- condamner solidairement Monsieur [X] et Allianz IARD à payer à Monsieur [R] et à la Macif la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement Monsieur [X] et Allianz IARD aux frais et dépens ;

- déclarer l'arrêt commun et opposable à la CPAM du Bas-Rhin ;

Monsieur [R] et la Macif indiquent que le jour de l'accident Monsieur [R] se trouvait avec un groupe de quatre motards et que deux d'entre eux indiquent que la route était gravillonnée et n'était pas pourvue de panneaux indiquant une zone de travaux ou de route glissante. Le responsable de la DDE du Bas-Rhin aurait confirmé aux services de gendarmerie que « il y a souvent des gravillons sur cette route ».

Les intimés rejoignent le premier juge qui a écarté le constat amiable des preuves utiles en ce qu'il n'avait été ni rempli ni signé par Monsieur [R]. Monsieur [L] - ami de Monsieur [R] qui l'avait signé en lieu et place de ce dernier - n'avait pas été témoin de la scène d'accident et ne pouvait alors valablement signer un document relatant des faits qu'il n'avait pas constatés personnellement.

Quant aux déclarations de Monsieur [X], elles ne pourraient avoir force probante dans la mesure où ce dernier avait indiqué n'avoir quasiment aucun souvenir des circonstances exactes et précises de l'accident.

Il y aurait par conséquent lieu de constater qu'il existerait une indétermination des causes et des circonstances de l'accident de la circulation, ce qui était de nature à exclure qu'une faute puisse être imputée à l'un quelconque des deux conducteurs impliqués. Le classement sans suite de la procédure pénale par le procureur de la république viendrait confirmer cette analyse.

Si le tribunal venait à considérer que Monsieur [R] s'était déporté sur la voie de circulation opposée, il y aurait lieu de retenir la circonstance que la route était gravillonnée, phénomène qui avait favorisé le dérapage de sa moto sans que l'on puisse imputer une faute à l'un des deux conducteurs. Les intimés faisaient référence à un arrêt de la cour d'appel de Rennes du 5 janvier 2005 dans laquelle cette dernière a jugé que la présence anormale, excessive et non signalée de gravillons sur une chaussée dans une courbe a été la cause imprévisible et irrésistible de la perte de contrôle d'un véhicule.

A titre subsidiaire, si la cour retenait une faute de conduite à l'encontre de Monsieur [R], son droit à indemnisation ne pourrait être amputé de plus de 10 % compte tenu des circonstances évoquées précédemment.

S'agissant de l'indemnisation des préjudices subis par Monsieur [R], les intimés demandent l'infirmation de la première décision et la condamnation des appelants au versement d'une provision d'un montant de 50 000 euros qui s'expliquait par l'importance du préjudice. Les intimés proposent une première évaluation (préjudice professionnel 8 077,82 euros ; frais de logement à l'adaptation post consolidation 122 373 euros ; frais de véhicule adapté post consolidation 48 820,17 euros ; perte de gains professionnels post consolidation 155 237,92 euros ; déficit fonctionnel permanent de 42 % 165 480 euros ; préjudices matériels divers 2 858,40 euros).

* * *

La caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin se voyait signifier à personne habilitée, le 20 octobre 2021, la déclaration d'appel ainsi que les conclusions déposées par les appelants. Les conclusions des intimés lui étaient notifiées, là encore à personne habilitée, le 29 décembre 2021. Elle ne constituait pas avocat

* * *

Par ordonnance du 3 mai 2022, la présidente de chambre, chargée de la mise en état, a ordonné la clôture de la procédure et renvoyé l'affaire à l'audience du 16 février 2023. Les parties étaient avisées par courrier du 24 juin 2022 que la date d'audience était reportée au 23 février 2023.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions transmises aux dates susvisées.

MOTIVATION

La loi du 5 juillet 1985 a instauré un régime spécifique de réparation des accidents de la circulation en posant le principe d'un droit à indemnisation des victimes indépendant de toute recherche de responsabilité.

Ce régime de responsabilité est applicable à tout véhicule impliqué dans un accident de la circulation, dès lors qu'il est intervenu d'une manière ou d'une autre, ce qui a été le cas pour les véhicules conduits par Monsieur [R] et Monsieur [X] dans la survenue de l'accident du 21 mai 2017.

Aux termes de l'article 4 de cette loi « la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ».

Les juges du fond, appelés à déterminer si un conducteur a commis une faute de nature à exclure en totalité ou partiellement son droit à indemnisation, n'ont pas à rechercher si cette faute était la cause exclusive de l'accident.

La faute du conducteur'victime ayant contribué à son préjudice doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur.

La Cour de cassation a ainsi estimé que la circulation dans la moitié gauche de la chaussée peut être cause d'exclusion du droit à indemnisation, tout comme le fait d'avoir freiné brutalement sur une route boueuse et d'avoir perdu le contrôle du véhicule.

En l'espèce il y a lieu de se pencher sur les circonstances qui ont conduit à l'accident et plus particulièrement de s'interroger sur la conduite de Monsieur [R] afin de vérifier si ce dernier a commis ou non une faute.

Eu égard le caractère non contradictoire du constat amiable d'accident qui a été rédigé et signé exclusivement par Monsieur [X] et non pas par Monsieur [R], ce document ne peut être considéré comme un élément de preuve utile et sera écarté des débats, comme l'a décidé le premier juge.

Il résulte de l'enquête de gendarmerie que Monsieur [R] a perdu le contrôle de son véhicule alors qu'il se trouvait en descente et dans un virage.

Il a déclaré aux enquêteurs que « j'ai abordé un virage à droite. D'un coup j'ai senti mon train arrière perdre de l'adhérence. Je me suis redressé sur mon engin et j'ai lâché les gaz. Le frein moteur a fait son action, mais j'ai commencé à me rapprocher de la ligne médiane (') je pense que j'ai franchi la ligne (') et je me suis retrouvé face à une voiture. Lorsque j'ai vu la voiture, j'ai essayé de reprendre la moto et freiner. Je suis parti en dérapage, en crabe montrant le flanc gauche de la moto. Ma jambe gauche s'est bloquée entre la voiture et la moto et je suis passé au-dessus du capot, j'ai tapé le pare-brise et mon dos a tapé le toit de la voiture. J'ai fini la course à l'arrière de la voiture. »

Il ressort de ses propos que le conducteur de la moto a perdu le contrôle de son véhicule probablement du fait d'un manque d'expérience - que lui-même a évoqué aux gendarmes - et d'une vitesse inadaptée aux circonstances (route en descente et en lacets et gravillonnée).

Il ressort plus particulièrement du témoignage d'un des motards, monsieur [A], que la route était gravillonnée dès avant le col (« A partir du carrefour la route était gravillonnée ('). Nous avons entamé la descente du col (') »). Monsieur [R] ne saurait affirmer avoir été surpris par la présence de gravillons au moment de l'accident.

Il convenait alors pour monsieur [R], d'adapter sa vitesse et sa conduite à l'état de la route gravillonnée, ce qu'il n'a pas fait.

Il y a lieu de constater l'existence d'une première faute, à savoir un défaut de maîtrise.

Corrélativement à cette perte de contrôle, son véhicule a franchi la ligne médiane pour surprendre et percuter le véhicule de Monsieur [X]. La cour note que Monsieur [R] a confirmé le fait qu'il a franchi la ligne médiane lors de son entretien avec le docteur [C], médecin mandaté par sa compagnie d'assurances, la Macif, puisqu'il lui a déclaré avoir glissé dans un virage « ce qui l'a amené à se retrouver sur la file opposée » (annexe 5 de l'intimé, page 2).

L'examen des photographies versées aux débats par Monsieur [X] permet de confirmer ce franchissement ; on y constate que les traces de pneumatiques de la motocyclette de Monsieur [R] franchissent la ligne médiane ce qui révèle une trajectoire oblique caractéristique des sorties de route et de perte de contrôle d'une moto (annexe 5 de l'appelant).

Il s'en déduit une deuxième faute, à savoir un franchissement de ligne.

Aucune pièce du dossier ne vient en revanche démontrer que Monsieur [X] circulait à une vitesse inappropriée (sa vitesse est estimée à 70 km/h sur une portion limitée à 90 km/h) ou encore qu'il ait franchi la ligne médiane pour se retrouver sur la voie réservée aux usagers d'en face.

Dans ces conditions, le premier juge ne pouvait écarter l'existence d'une faute imputable à Monsieur [R], la présence éventuelle de gravillons sur cette route n'étant pas de nature à exclure la faute de Monsieur [R], en ce qu'il aurait dû adapter sa conduite et sa vitesse, d'une part à son expérience, d'autre part aux conditions de la chaussée.

Il y a par conséquent lieu d'infirmer le jugement entrepris, de dire que les deux fautes de conduite du conducteur de la motocyclette sont à l'origine exclusive de la survenue de cet accident, de déclarer Monsieur [R] seul et entièrement responsable de l'accident et de prononcer l'exclusion de son droit à indemnisation.

Monsieur [R] et la Macif, parties succombantes au sens de l'article 696 du code de procédure civile, seront condamnés aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.

En revanche il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ni en première instance ni à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile :

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saverne en date du 14 mai 2021

Et statuant à nouveau et y ajoutant :

REJETTE les demandes formées par Monsieur [T] [R] et la compagnie d'assurances Macif

CONDAMNE Monsieur [T] [R] et la compagnie d'assurances Macif aux dépens de première instance et d'appel,

REJETTE la demande formée par Monsieur [T] [X] et la compagnie SA Allianz IARD sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des procédures de première instance et d'appel,

REJETTE la demande de Monsieur [T] [R] et la compagnie d'assurances Macif fondée sur l'article 700 du code de procédure civile au titre des procédures de première instance et d'appel .

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/03196
Date de la décision : 13/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-13;21.03196 ?
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