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10/03/2023 | FRANCE | N°21/00640

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 10 mars 2023, 21/00640


MINUTE N° 136/2023

























Copie exécutoire à



- Me Marion POLIDORI



- Me Noémie BRUNNER





Le 10/03/2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT AVANT DIRE DROIT DU 10 MARS 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00640 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPUX



Déci

sion déférée à la cour : 17 Décembre 2020 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG





APPELANT :



Monsieur [L] [W]

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Marion POLIDORI, avocat à la cour.





INTIMEE :



La S.A.R.L. GREINER ELECTRICITE ET ENERG...

MINUTE N° 136/2023

Copie exécutoire à

- Me Marion POLIDORI

- Me Noémie BRUNNER

Le 10/03/2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT AVANT DIRE DROIT DU 10 MARS 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00640 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPUX

Décision déférée à la cour : 17 Décembre 2020 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANT :

Monsieur [L] [W]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Marion POLIDORI, avocat à la cour.

INTIMEE :

La S.A.R.L. GREINER ELECTRICITE ET ENERGIES NOUVELLES, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2]

représentée par Me Noémie BRUNNER, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Septembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre et Madame Myriam DENORT, conseiller, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire, avant dire droit

- prononcé publiquement après prorogation du 16 décembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Selon devis du 28 octobre 2015 accepté le 26 janvier 2018, M. [W] a commandé auprès de la SARL Greiner Electricité et Energies nouvelles la fourniture et l'installation d'une chaudière gaz à condensation de marque Viessmann avec eau chaude sanitaire, ainsi qu'un plancher chauffant, pour un montant de 20 000,82 euros.

Se plaignant de ce que la plus grande partie du coût des travaux, soit 15 900,82 euros selon facture du 13 septembre 2018, n'avait pas été réglée, la société Greiner Electricité et Energies nouvelles a saisi le président du tribunal de grande instance de Strasbourg d'une requête en injonction de payer, à laquelle il a été fait droit par une ordonnance du 15 janvier 2019, signifiée à M. [W] le 22 janvier 2019.

Ce dernier a formé opposition à cette ordonnance par lettre reçue au greffe le 15 février 2019 et, statuant sur cette opposition, le tribunal judiciaire de Strasbourg, par jugement du 17 décembre 2020, a notamment condamné M. [W] à régler à la société Greiner Electricité et Energies nouvelles :

- la somme de 15 534,82 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2019,

- la somme de 248 euros TTC, au titre des frais d'huissier qu'elle avait dû engager au titre de la sommation de payer (196,53 euros) et de la requête (51,48 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2019,

- la somme de 2 000 euros à titre de dommages intérêts,

- la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens comprenant les frais de l'ordonnance d'injonction de payer.

Le tribunal a également rejeté les autres demandes et dit que cette décision était exécutoire par provision.

En premier lieu, le tribunal a relevé que, contrairement à ce que soutenait M. [W], ce dernier avait accepté le devis de 20 000,82 euros, qu'il avait daté et signé, y ayant inscrit la mention « bon pour commande ». Il ne pouvait donc prétendre avoir accepté un autre devis d'un montant moins élevé.

De plus, M. [W], qui soutenait que les travaux n'avaient pas été achevés et que l'installation n'était pas en état de marche, ne produisait aucun élément démontrant l'existence d'un défaut de cette installation, ce qui justifiait le rejet de ses demandes reconventionnelles tendant à contraindre la société Greiner Electricité et Energies nouvelles à venir achever les travaux et à sa condamnation à des dommages-intérêts.

Par ailleurs, sur le montant à payer par M. [W], si la société Greiner Electricité et Energies nouvelles soutenait que le devis avait dû être réactualisé, du fait du retard du client dans son acceptation et de l'augmentation des coûts, le tribunal a retenu qu'à défaut d'un nouveau devis comportant un prix différent, il y avait lieu de se référer uniquement au devis signé et accepté, de 20 000,82 euros. En revanche, ce devis prévoyant notamment l'installation d'un coffret gaz intermédiaire qui n'avait finalement

pas été effectuée, M. [W] était fondé à réclamer la déduction du coût de son installation. Les deux parties étant en désaccord sur ce coût, la juridiction la fixait à la moyenne des montants avancés par chacune d'elles.

Enfin, le tribunal a déduit des acomptes d'un montant total de 4 100 euros, le montant restant à la charge de M. [W] s'élevant à 15 534,82 euros TTC.

Le coût de la sommation de payer et de la requête ont également été mis à la charge du défendeur.

Enfin, le tribunal a retenu que M. [W], à la lecture des pièces, avait adopté une position particulièrement abusive en refusant de régler l'installation, n'ayant notamment formulé, avant l'introduction de l'action en justice, aucune critique relative au fonctionnement de la chaudière pour s'opposer au règlement du solde de son prix, qui représentait près des trois quarts de celui-ci, cette résistance abusive étant à l'origine d'un préjudice particulier pour la société Greiner Electricité et Energies nouvelles.

M. [W] a interjeté appel de ce jugement le 22 janvier 2021.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 7 juin 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 30 mars 2022, M. [W] sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté ses demandes et en l'ensemble des condamnations qu'il a prononcées à son encontre. Il demande que la cour, statuant à nouveau :

- enjoigne et, en cas de besoin, condamne la société Greiner Electricité et Energies nouvelles à remédier aux malfaçons et inachèvements dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

- dise et juge que l'achèvement des travaux sera formalisé par un procès-verbal de réception contresigné par les deux parties en présence d'un huissier de justice, aux frais de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles,

- constate et au besoin dise et juge que le paiement du solde du marché est d'ores et déjà entre les mains de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles, laquelle a procédé par voie d'exécution forcée en ce sens à son encontre,

- dise et juge que le montant du solde du marché d'ores et déjà entre les mains de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles ne restera acquis définitivement à cette dernière qu'après achèvement des travaux dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, formalisé par un procès-verbal de réception contresigné par les deux parties en présence d'un huissier de justice, aux frais de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles,

- dise et juge qu'à défaut d'achèvement des travaux dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, formalisé par un procès-verbal de réception contresigné par les deux parties en présence d'un huissier de justice aux frais de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles, celle-ci devra restituer, le premier jour suivant ledit mois écoulé et en intégralité, le montant du solde du marché d'ores et déjà entre ses mains, augmenté des intérêts au taux légal au jour de son règlement et, au besoin, l'y condamne,

- condamne la société Greiner Electricité et Energies nouvelles à lui payer les montants suivants, augmentés des intérêts légaux au jour de la décision à intervenir :

* 19 320 euros au titre du préjudice de jouissance pour la période du 1er octobre 2018 au 31 mars 2022 inclus,

* 714 euros au titre du préjudice matériel,

* 2 000 euros au titre du préjudice moral,

* 909 euros au titre des remboursements des frais d'expertise privée, des frais de constat d'huissier et de frais de banque,

- condamne la société Greiner Electricité et Energies nouvelles à lui régler un préjudice de jouissance à hauteur de 460 euros par mois à compter du 1er avril 2022 jusqu'au jour de l'achèvement effectif des travaux non réalisés par la société Greiner Electricité et Energies nouvelles,

A titre subsidiaire, M. [W] sollicite une expertise, proposant la mission qui pourrait être donnée à l'expert et de supporter lui-même, provisoirement, les frais de l'expertise. Il demande qu'il soit jugé que l'expert pourra, si nécessaire, recueillir l'avis des techniciens de son choix et que, par ailleurs, il tiendra le magistrat chargé du contrôle de l'expertise régulièrement informé du déroulement des opérations et de toute difficulté qu'il rencontrerait.

En tout état de cause, M. [W] sollicite de la cour qu'elle rejette l'ensemble des prétentions de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles et la condamne à lui payer la somme de 7 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des procédures de première instance et d'appel, ainsi qu'aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'injonction de payer ainsi que les éventuels frais d'exécution forcée et d'article 10, en cas d'exécution forcée.

En préalable, M. [W] confirme que le solde du coût des travaux dû à la société Greiner Electricité et Energies nouvelles s'élève bien à 15 534,82 euros, tout en s'opposant au paiement de ce montant, invoquant l'inachèvement des travaux ainsi que des malfaçons qui justifient qu'il retienne le paiement de la facture, se prévalant d'une exception d'inexécution telle que prévue à l'article 1217 al.1er du code civil.

Il soutient avoir, contrairement aux allégations de l'intimée, dénoncé un certain nombre de défauts apparents dont cette dernière a reconnu l'existence et auxquels elle s'est engagée à remédier.

Il invoque un rapport d'expertise privée du 12 mars 2021, l'expert s'étant rendu sur les lieux le 4 mars 2021 en compagnie d'un huissier de justice. Il fait valoir que tous deux ont constaté les malfaçons et inachèvements affectant les travaux litigieux et que leurs constatations se recoupent avec les malfaçons qu'il avait dénoncées, ce qui établit l'antériorité de ces dernières au jugement déféré.

M. [W] souligne que l'expert a constaté la non-conformité des travaux effectués « aux normes techniques et de sécurité applicables aux installations de gaz combustible des bâtiments d'habitation » et qu'il a conclu que les travaux ne sont pas terminés et ne sont pas conformes aux règles relatives des DTU 65.14 et de l'arrêté du 23 février 2018, ayant également émis des réserves sur le fonctionnement de la chaudière, qui n'a jamais été mise en service depuis son installation en 2018, et sur l'étanchéité des circuits qui n'ont jamais été remplis d'eau.

M. [W] conteste également la validité du certificat de conformité produit par la société Greiner Electricité et Energies nouvelles, qui ne permet pas selon lui de démontrer l'achèvement des travaux contractuels, d'autant plus qu'il ne comporte aucune signature de l'organisme de contrôle.

Il souligne que les travaux n'ont fait l'objet d'aucune réception et il conteste avoir refusé l'accès de sa maison au personnel de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles, contestant l'authenticité de la copie de la main courante effectuée auprès des services de gendarmerie, produite par l'intimée, tout en observant que cette main courante démontre que l'intimée a conservé les clés du chantier litigieux, donc un accès au chantier.

La société Greiner Electricité et Energies nouvelles soutenant qu'il a pu modifier les installations, notamment après avoir pris connaissance du jugement déféré, M. [W] fait valoir que l'inachèvement des travaux et les malfaçons ont été constatées en présence de l'intimée elle-même.

Il précise que l'abonnement au gaz souscrit était destiné à permettre à la société Greiner Electricité et Energies nouvelles de réaliser la mise en route de la chaudière, ce qui n'a toujours pas été fait à ce jour, aucune consommation de gaz n'ayant été facturée.

Sur son préjudice de jouissance, M. [W] fait valoir qu'en raison de l'inachèvement des travaux par la société Greiner Electricité et Energies nouvelles, le projet de construction de sa maison d'habitation est interrompu depuis septembre 2018, alors qu'il continue à régler les mensualités de son prêt immobilier. Il précise que toutes les entreprises contactées ont refusé d'effectuer les travaux restant, ne voulant pas engager leur responsabilité en cas d'éventuelles difficultés de fonctionnement du système, du fait de l'impossibilité de vérifier l'état des tuyaux qui sont noyés dans la chape. Il continue donc à vivre dans un appartement dont il paie le loyer, lequel s'élève à 460 euros par mois.

S'agissant de son préjudice matériel, il explique avoir dû résilier son contrat de gaz pour éviter des frais de compteur et avoir dû acheter des bouteilles de gaz pour éviter le gel et la détérioration de certains matériaux et appareils stockés dans la maison. Par ailleurs, la société Greiner Electricité et Energies nouvelles ayant refusé de lui restituer les clés de la maison, il a dû faire changer la serrure, mettant en compte l'ensemble de ses frais.

S'agissant de son préjudice moral, M. [W] fait valoir qu'il a dû investir beaucoup de temps, d'énergie et d'argent pour faire valoir ses droits et obtenir l'achèvement des travaux commandés.

À l'appui de sa demande d'expertise judiciaire présentée à titre subsidiaire, il observe notamment qu'une telle mesure pourrait être d'autant plus utile que l'expert qu'il a mandaté à titre privé n'a pas pu chiffrer intégralement le montant des travaux de remise en état, ayant dû émettre des réserves sur le fonctionnement de la chaudière et l'étanchéité des circuits.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 31 janvier 2022, la société Greiner Electricité et Energies nouvelles sollicite la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et le rejet de l'ensemble des demandes de M. [W], et notamment de sa demande subsidiaire d'expertise, ainsi que la condamnation de ce dernier aux dépens d'appel et à la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Soulignant l'acquiescement de M. [W] sur le montant de sa créance, soit 15 534,82 euros, la société Greiner Electricité et Energies nouvelles nie par ailleurs tout inachèvement des travaux, se référant à un certificat de conformité dont elle précise qu'il ne peut être délivré que si les travaux sont terminés, soulignant que ce certificat a été signé électroniquement par son représentant.

Elle conteste également l'existence de désordres, admettant tout au plus une discussion sur d'éventuelles modifications de certaines finitions de ces travaux achevés et niant toute reconnaissance de sa part relativement à des malfaçons ou à des inachèvements des travaux. Elle reproche à M. [W] d'avoir interdit à son personnel de se rendre sur place pour effectuer les dernières vérifications, invoquant à ce titre une main courante.

Affirmant que l'installation est conforme et opérationnelle, la société Greiner Electricité et Energies nouvelles soutient que le rapport d'expertise privée postérieur au jugement attaqué, non contradictoire, ne lui est pas opposable, se prévalant à ce titre de la jurisprudence de la Cour de cassation. Elle ajoute que cette expertise, effectuée par un intervenant dont les compétences sont ignorées, n'est pas sérieuse, d'autant plus qu'en raison du temps écoulé, les installations ont pu être modifiées par l'appelant.

De plus, la liste des finitions présentées par M. [W] n'est pas sérieuse et, en tout état de cause, ces dernières n'empêchent pas la mise en route de l'installation.

Elle conteste également les préjudices invoqués par M. [W], au motif que, si le chauffage ne fonctionnait pas, l'appelant pouvait faire intervenir une autre entreprise pour procéder à la mise en route, à laquelle il n'existe aucun obstacle. Elle qualifie de fantaisistes les allégations de M. [W] relatives à l'achat de bouteilles de gaz et à la non restitution des clefs, ainsi que le préjudice moral allégué. De plus, M. [W] n'a pas pris l'initiative de la procédure pour obtenir réparation du préjudice qu'il allègue et elle n'est pas responsable de sa défaillance totale.

L'intimée soutient enfin que l'expertise judiciaire sollicitée par M. [W] est inutile, en raison du délai écoulé, ce dernier ayant eu toute possibilité d'intervenir sur l'installation.

À l'appui de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, la société Greiner Electricité et Energies nouvelles reprend les motifs du jugement déféré et fait valoir que M. [W] n'a produit aucun élément sérieux justifiant une éventuelle exception d'inexécution, sa carence lui ayant causé un préjudice consistant en un manque de trésorerie.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

MOTIFS

En préalable, il convient d'observer, que, M. [W] sollicitant notamment de la cour qu'elle juge que le paiement de la facture de l'intimée, effectué en exécution du jugement déféré, ne sera définitivement acquis à cette dernière qu'après achèvement des travaux qu'il lui avait confiés et réparation des malfaçons qu'il invoque, et contestant la totalité des demandes de cette dernière au motif de l'inachèvement de ces travaux et de l'existence de malfaçons, il y a lieu d'examiner en premier lieu ses demandes reconventionnelles.

I ' Sur les demandes reconventionnelles de M. [W]

A) Sur la demande relative à l'intervention de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles

Le rapport d'expertise privé réalisé à l'initiative de M. [W] en mars 2021, non contradictoire, n'a pas la valeur d'un rapport d'expertise judiciaire ; il peut toutefois être pris en compte à titre d'élément de preuve, dans la mesure où il est corroboré par un constat d'huissier effectué concomitamment à cette expertise, produit également par l'appelant.

Il peut être souligné qu'aucun élément ne permet d'établir, voire même de supposer une impossibilité de mise en route de la chaudière, qui justifierait des investigations techniques. De plus, le rapport d'expertise privée et le constat d'huissier confirment l'absence de fourreau de protection au départ et au retour de l'eau de chauffe du plancher chauffant traversant un mur porteur en béton, ainsi que les défauts d'achèvements invoqués par le maître de l'ouvrage et reconnus par la société Greiner Electricité et Energies nouvelles dans un courriel du 20 janvier 2019 versé aux débats, de même que l'absence de vanne de coupure individuelle de gaz prévue au devis, l'existence d'une fuite sur le disconnecteur des deux côtés des robinets d'arrêt et le fait que la chaudière penche vers la gauche, présentant un « hors niveau » de 11 mm.

La société Greiner Electricité et Energies nouvelles soutient que les travaux ont été achevés et qu'elle en justifie par la production du certificat de conformité qui lui a été délivré, signé par l'organisme de contrôle, Qualigaz,

le 10 septembre 2018, et par l'Agence Réseau Gaz Alsace le 22 novembre 2018. Cependant, ce certificat est antérieur à son courriel du 20 janvier 2019, dans lequel elle admettait que la mise en route de la chaudière n'avait pas eu lieu et, avec elle, les différents achèvements qui devaient l'accompagner.

C'est pourquoi il doit être retenu que, si M. [W] est redevable du montant des prestations effectuées par l'intimée, celle-ci est également redevable auprès de lui de leur achèvement, par la mise en route de la chaudière et les dernières finitions, vérifications, réparations de défauts et mises au point devant accompagner cette mise en route.

Cependant, si l'appelant sollicite l'intervention de l'intimée elle-même pour achever les travaux et remédier aux quelques désordres constatés, cette dernière n'exprime nullement son accord pour y procéder et les tensions survenues en septembre 2018, qui ont d'ailleurs donné lieu à une main-courante de son représentant auprès des services de gendarmerie, ne lui ont plus permis d'intervenir à nouveau sur le chantier.

De telles relations conflictuelles et la situation de blocage perdurant entre les parties depuis plus de quatre ans ne permettent pas en l'état d'envisager que l'achèvement des travaux puisse être effectué en nature par la société Greiner Electricité et Energies nouvelles. Il devra donc être réalisé par équivalent et, dès lors, une réouverture des débats s'impose afin que soit chiffré le coût de l'achèvement des travaux et de la mise en route de l'installation en cause. Une réouverture des débats sera ordonnée à cette fin, l'appelant étant invité à produire tous justificatifs relatifs à ce coût.

B) - Sur la demande subsidiaire d'expertise judiciaire

Il convient de souligner que la chaudière à gaz avec eau chaude sanitaire et plancher chauffant en cause a été installée courant 2018 par la société Greiner Electricité et Energies nouvelles, ayant donné lieu à une facture du 13 septembre 2018. Dans ce contexte, une expertise apparaît inutile au vu du délai de plus de quatre ans écoulé depuis cette pose et des modifications qui, en conséquence, ont pu être apportées à cette installation.

Elle apparaît également inutile dans la mesure où, si la société Greiner Electricité et Energies nouvelles conteste désormais tout défaut d'achèvement des travaux, se prévalant d'un certificat de conformité dont la délivrance était, d'après elle, subordonnée à leur accomplissement total, son représentant avait cependant admis, dans son courriel postérieur, daté du 20 janvier 2019, différents défauts et inachèvements dénoncés par M. [W], dont il avait précisé qu'ils correspondaient à des tâches relevant de la mise en route de la chaudière. Celle-ci n'avait pu avoir lieu en raison des tensions survenues entre les parties et, selon lui, du refus du maître de l'ouvrage de laisser son personnel accéder au chantier. L'entrepreneur s'était alors montré prêt à corriger également certains manquements dénoncés, après vérification sur place de leur réalité, tels que l'absence de rectitude d'une conduite de gaz en cuivre, l'absence de protection fourreau dans les passages de canalisation au travers des murs du sous-sol. Il avait également indiqué que la bande périphérique de désolidarisation chape/murs, non satisfaisante à certains endroits, qu'il imputait au chapiste, pourrait être rectifiée par la mise en place de mortier liquide.

Or, la société Greiner Electricité et Energies nouvelles ne justifie pas être intervenue depuis cette date pour effectuer la mise en route de la chaudière, alors que n'est nullement établie l'impossibilité technique d'y procéder.

De plus, ainsi qu'il a été retenu plus haut, si le rapport d'expertise privé réalisé à l'initiative de M. [W], non contradictoire, n'a pas la valeur d'un rapport d'expertise judiciaire, il peut toutefois être pris en compte à titre d'élément de preuve, dans la mesure où il est corroboré par un constat d'huissier effectué concomitamment à cette expertise.

Ce rapport et ce constat confirment pour l'essentiel ces inachèvements et aucun élément ne permettant d'établir, voire même de supposer une impossibilité de mise en route de la chaudière, qui justifierait des investigations techniques, une expertise judiciaire n'est pas non plus nécessaire à ce titre. Enfin, elle ne l'est pas non plus pour chiffrer le coût des travaux, ce chiffrage pouvant être effectué par simples devis produits par le maître de l'ouvrage.

Au vu de tout ce qui précède, il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande subsidiaire d'expertise judiciaire présentée par M. [W] en appel.

C) Sur les demandes de dommages et intérêts de M. [W]

1°) Sur la demande relative au préjudice de jouissance

Si M. [W] sollicite la réparation de son préjudice de jouissance depuis le 1er octobre 2018, invoquant une interruption de son projet de construction entraînant pour lui la poursuite du règlement d'un loyer, parallèle au remboursement de son prêt immobilier, il ne produit qu'un contrat de bail du 16 mars 2012 à l'appui de ces allégations. De plus et surtout, alors que l'impossibilité de mettre en route la chaudière n'est nullement démontrée, comme il a déjà été relevé plus haut, il ne prouve pas non plus le refus des entreprises qu'il aurait contactées à cette fin d'achever les travaux de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles et d'assurer la mise en route de ladite chaudière. Enfin, il ne démontre pas non plus en quoi l'absence de cette mise en route et d'achèvement de l'installation de chauffage et d'eau chaude sanitaire aurait empêché et empêcherait encore la poursuite des travaux de construction de sa maison d'habitation relatifs aux autres lots.

C'est pourquoi le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande en réparation de son préjudice de jouissance présentée par M. [W].

2°) Sur la demande relative au préjudice matériel

Les mêmes motifs relatifs à l'absence de preuve de l'impossibilité d'obtenir d'une autre entreprise la mise en route de la chaudière et l'achèvement de cette installation conduisent au rejet de la demande présentée devant la cour par M. [W], relative aux frais d'abonnement temporaire au gaz naturel souscrit en 2019 pour cette maison et aux frais d'achats de bouteilles de gaz, étant souligné qu'aucun justificatif n'est produit concernant ces derniers.

En revanche, la société Greiner Electricité et Energies nouvelles ne conteste pas les SMS retranscrits par M. [W], échangés avec ce dernier jusqu'au 24 novembre 2018, dans lesquels son représentant reconnaissait détenir la clé de la maison, ainsi que les termes de son courriel du 20 janvier 2019 selon lesquels il l'a également admis. Dans la mesure où il ne rapporte la preuve d'aucune restitution de cette clé, il y a lieu de faire droit à la demande de l'appelant tendant au remboursement du changement de serrure de sa maison, qu'il justifie par un devis d'un montant de 350 euros.

Le jugement déféré sera donc partiellement infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de M. [W] tendant à la réparation de son préjudice matériel et il sera fait droit à cette demande dans la limite de la somme de 350 euros.

3°) Sur la demande relative au préjudice moral

Dans la mesure où l'instance d'appel n'est pas terminée et que, concernant son préjudice moral, M. [W] invoque un lourd investissement en temps, en énergie et en argent pour faire valoir ses droits et obtenir l'achèvement des travaux commandés, il y a lieu de réserver à statuer en l'état sur l'appel relatif au rejet de cette demande.

4°) Sur la demande relative aux frais d'expertise privée, de constat d'huissier et aux frais de banque

Les frais d'expertise privée et de constat d'huissier constituent des frais irrépétibles relevant de l'article 700 du code de procédure civile et il y a donc lieu de réserver à statuer sur la demande de M. [W] présentée en appel, tendant à la condamnation de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles à les lui régler. Il en sera de même des frais bancaires qui auraient été exposés dans le cadre de l'instance, étant observé à ce titre que M. [W] ne fournit aucune précision sur la cause et la nature de ces frais.

II ' Sur les demandes principales de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles

Dans la mesure où l'inachèvement des travaux confiés à la société Greiner Electricité et Energies nouvelles est établi, ainsi qu'il a été relevé précédemment, et qu'il reste à statuer sur leur achèvement sollicité par M. [W], il apparaît opportun de réserver à statuer sur l'appel portant sur la condamnation de ce dernier au paiement de sa facture relative au coût des dits travaux présentée par l'intimée.

Il en sera de même de l'appel sur sa condamnation aux frais de sommation de payer, qui constituent des frais irrépétibles relevant de l'article 700 du code de procédure civile, aux frais de requête en injonction de payer, qui sont inclus dans les dépens, ainsi que sur sa condamnation au paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive.

III ' Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Au vu de la réouverture des débats ordonnée, le dossier sera renvoyé devant le magistrat chargé de la mise en état afin de permettre à M. [W] de communiquer les différents justificatifs qui lui sont demandés par la cour et aux parties de présenter leurs observations sur ces justificatifs ainsi que sur l'ensemble des points sur lesquels il est réservé à statuer.

Les dépens seront également réservés, de même que l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de M. [L] [W] en réparation de son préjudice de jouissance et L'INFIRME partiellement en ce qu'il a rejeté sa demande en réparation de son préjudice matériel,

Statuant à nouveau dans cette limite et ajoutant au dit jugement,

CONDAMNE la société Greiner Electricité et Energies nouvelles à régler à M. [W] la somme de 350,00 euros (trois cent cinquante euros) en réparation de son préjudice matériel,

REJETTE la demande d'expertise judiciaire présentée par M. [L] [W],

RESERVE à STATUER sur l'appel relatif aux condamnations de l'appelant au paiement de la facture de la société Greiner Electricité et Energies nouvelles et à sa condamnation à régler cette dernière les frais de sommation de payer et de requête en injonction de payer, ainsi que des dommages et intérêts pour procédure abusive,

RESERVE à STATUER sur l'appel de M. [L] [W] relatif au rejet de ses demandes portant sur l'achèvement des travaux et la réparation des malfaçons relatifs à la chaudière avec eau chaude sanitaire et plancher chauffant installée par l'intimée et en réparation de son préjudice moral, ainsi que sur sa demande tendant au remboursement des frais d'expertise privée, de constat d'huissier et de frais de banque,

ORDONNE la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture,

INVITE M. [L] [W] à produire tout justificatif du coût de la mise en route et de l'achèvement des travaux relatifs à l'installation de chaudière à gaz avec eau chaude sanitaire et plancher chauffant en cause,

RENVOIE l'affaire à l'audience de mise en état du 6 juin 2023 ;

RESERVE les dépens et l'application éventuelle de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/00640
Date de la décision : 10/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-10;21.00640 ?
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