MINUTE N° 23/145
Copie exécutoire à :
- Me Sacha CAHN
- Me Laurence FRICK
Le
Le greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
TROISIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRET DU 27 Février 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/01932 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H22L
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 décembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de [Localité 6]
APPELANT :
Monsieur [X] [U]
[Adresse 7]
[Localité 5] (SUISSE)
Représenté par Me Sacha CAHN, avocat au barreau de COLMAR
INTIMÉ :
Monsieur [Y] [I]
[Adresse 1]
[Localité 4]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2022/2356 du 30/08/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)
Représenté par Me Laurence FRICK, avocat au barreau de COLMAR
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 décembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme MARTINO, Présidente de chambre, et Madame DAYRE, Conseiller, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme MARTINO, Présidente de chambre
Madame DAYRE, Conseiller
Mme ISSENLOR, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme HOUSER
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE
Selon contrat du 3 octobre 2020, Monsieur [Y] [I] a donné à bail à Monsieur [X] [U] un studio meublé situé [Adresse 2], moyennant paiement d'un loyer mensuel initial de 350 € et d'une provision sur charges de 50 €.
Par acte du 1er avril 2021, Monsieur [Y] [I] a fait signifier à Monsieur [X] [U] un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail, le sommant de payer dans un délai de deux mois un arriéré locatif de 1 200 € au titre des loyers et charges de janvier, février et mars 2021.
Par acte du 6 septembre 2021, Monsieur [Y] [I] a assigné Monsieur [X] [U] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Mulhouse, aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail et constater en conséquence, à défaut prononcer, la résiliation du bail, ordonner l'expulsion du défendeur et de celle de tous occupants de son chef et de le voir condamner à lui payer la somme de 2 000 € au titre des loyers et charges impayés au 2 juin 2021, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer du 1er avril 2021, de le voir condamner, si la résiliation du bail devait être prononcée, au paiement de la somme de 3 200 € au titre de l'arriéré locatif au 31 août 2021, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer du 1er avril 2021, ainsi qu'aux loyers à échoir à partir du 1er septembre 2021 jusqu'à la date du jugement à intervenir, et de le voir condamner au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer courant et des charges, avec indexation annuelle, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à libération des lieux, de la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que des dépens de l'instance, comprenant le coût du commandement de payer au 1er avril 2021.
Par jugement réputé contradictoire du 24 décembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Mulhouse a :
-déclaré recevable la demande en résiliation de bail formé par Monsieur [Y] [I],
-constaté que le bail s'est trouvé résilié par l'effet du jeu de la clause résolutoire depuis le 2 juin 2021,
-ordonné en conséquence à Monsieur [X] [U] de libérer les lieux loués de tous occupants et de tout bien de son chef,
-dit qu'à défaut d'avoir libéré les lieux deux mois après la signification du commandement d'avoir à quitter les lieux, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef, si besoin avec l'assistance de la force publique,
-fixé au montant du loyer et des charges en cours, soit 400 €, avec indexation annuelle dans les conditions prévues par le contrat de location résilié, le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation due par Monsieur [X] [U] à Monsieur [Y] [I], au paiement de laquelle il sera condamné à partir du 2 juin 2021 et jusqu'à la libération des lieux,
-condamné Monsieur [X] [U] à payer à Monsieur [Y] [I] la somme de 2 000 € au titre de l'arriéré de loyer et charges arrêtée au 2 juin 2021 (terme de juin 2021 inclus) avec intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2021 sur la somme de 1 200 € et à compter du 6 septembre 2021 sur la somme de 2 000 € pour le surplus,
-condamné Monsieur [X] [U] à payer à Monsieur [Y] [I] la somme de 700 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné Monsieur [X] [U] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer au 1er avril 2021 (88,04 €),
-rappelé que le jugement est de droit exécutoire à titre provisoire.
Monsieur [X] [U] a interjeté appel de cette décision 17 mai 2022.
Par ordonnance du 31 mai 2022, l'affaire a été fixée d'office à une audience à bref délai, par application de l'article 905 modifié du code de procédure civile.
Par écritures notifiées le 15 juin 2022, Monsieur [X] [U] conclut ainsi qu'il suit :
-recevoir l'appel et le dire bien fondé,
-rejeter l'intégralité des demandes, fins et conclusions de Monsieur [Y] [I],
-infirmer l'entier jugement,
Statuant à nouveau,
-constater que Monsieur [X] [U] n'a pas été assigné à l'adresse effective de son domicile principal,
-déclarer que Monsieur [X] [U] a quitté les lieux avant l'expiration du délai de deux mois suivant la délivrance du commandement de payer, de telle sorte qu'aucune indemnité d'occupation ne puisse être mise à sa charge,
-déclarer que les sommes mises à la charge de Monsieur [X] [U] sont disproportionnées et subsidiairement, en réduire le montant dans les plus larges mesures,
-condamner Monsieur [Y] [I] aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir qu'il a rencontré d'importantes difficultés financières ne lui ayant pas permis de régler la dette locative dans le délai imparti par le commandement de payer ; qu'il avait entre-temps quitté les lieux et déménagé en Suisse, de sorte qu'il n'est pas débiteur de l'indemnité d'occupation et qu'il n'a pas été régulièrement destinataire du commandement de payer ; qu'il n'a de même pas été en mesure de comparaître à l'audience, n'ayant pas été assigné à sa bonne adresse ; qu'en raison de son déménagement, le maintien des termes du bail est dénué d'intérêt ; que cependant, les sommes mises en compte au titre de l'arriéré locatif sont totalement contestées.
Par écritures notifiées le 1er décembre 2022, Monsieur [Y] [I] a conclu à l'irrecevabilité de l'appel tardif formé par Monsieur [X] [U] le 17 mai 2022.
À titre subsidiaire, il a conclu au rejet de l'appel et a formé une demande additionnelle pour voir :
-condamner Monsieur [X] [U] à payer à Monsieur [Y] [I] une somme de 8 800 € au titre de l'arriéré locatif arrêté au 31 juillet 2022, avec intérêts au taux légal à compter du
1er juillet 2021 sur la somme de 1 200 €, à compter du 6 septembre 2021 sur la somme de 2 000 euros, à compter du 1er juillet 2022 sur la somme de 7 600 € et à compter du 1er décembre 2022 sur la somme de 8 800 €,
En tout état de cause,
-condamner Monsieur [X] [U] aux entiers frais et dépens de la procédure d'appel,
-condamner Monsieur [X] [U] à payer à Monsieur [Y] [I] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir que le jugement déféré a été signifié à Monsieur [X] [U] par acte du 17 février 2022 ; que ce dernier en a interjeté appel une première fois sans l'assistance d'un avocat, appel déclaré irrecevable par ordonnance du 25 avril 2022 ; qu'il a par ailleurs formé opposition contre le jugement, procédure pendante devant le tribunal judiciaire puis a, à nouveau, interjeté appel par l'intermédiaire d'un avocat en date du 17 mai 2022 ; que cet appel est tardif car Monsieur [U] s'est fallacieusement domicilié à l'étranger dans le cadre de cet appel, alors qu'il n'a pas quitté les locaux objets du bail avant l'expiration du délai de deux mois imparti dans le commandement de payer et y était toujours domicilié lors de l'appel formé le 17 mai 2022.
Sur le fond, il fait valoir que Monsieur [X] [U] n'a rendu les clés du logement que le 11 octobre 2022 ; que le loyer demeure impayé depuis janvier 2021, de sorte que les sommes mises en compte au titre des loyers et de l'indemnité d'occupation sont justifiées.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l'appel :
Conformément aux dispositions des articles 528 et 538 du code de procédure civile, le jugement rendu le 24 décembre 2021 par le premier juge était susceptible d'appel dans le délai d'un mois ayant commencé à courir à compter de sa signification effectuée par acte du 17 février 2022 remis par dépôt en l'étude d'huissier, après vérification de ce que Monsieur [X] [U] était absent de son domicile situé [Adresse 2] ; que son nom
figurait sur la boîte aux lettres et que le domicile a été confirmé par le gardien.
Monsieur [X] [U] soutient qu'il avait quitté les lieux dès après la signification du commandement de payer visant la clause résolutoire du bail et qu'il était domicilié en Suisse.
La déclaration d'appel qu'il a effectuée par le biais de son conseil le 17 mai 2022 mentionne effectivement un domicile [Adresse 3] en Suisse.
Pour autant, l'appelant n'a produit aucune pièce au soutien de ses écritures d'appel, permettant de justifier la réalité de ce domicile à l'étranger et la date de son départ effectif en Suisse.
Au contraire, il a été constaté que lors de la signification du jugement, le domicile de Monsieur [X] [U] à [Localité 6] avait été confirmé par le gardien de l'immeuble et que son nom figurait sur la boîte aux lettres.
Monsieur [Y] [I] verse par ailleurs aux débats copie d'une ordonnance rendue le 25 avril 2022 par le magistrat chargé de la mise en état de la troisième chambre de la cour d'appel de céans, qui a déclaré irrecevable l'appel interjeté directement par Monsieur [X] [U], qui se domiciliait alors dans l'appartement objet du bail [Adresse 2].
De même, l'appelant a, par acte passé le 3 mai 2022 devant le greffier principal du tribunal judiciaire de Mulhouse, déclaré former opposition contre le jugement rendu le 24 décembre 2021, indiquant qu'il demeurait [Adresse 2].
Enfin, il résulte des mentions énoncées par Maître [F] [M], huissier de justice à [Localité 6], sur le procès-verbal de tentative d'expulsion dressé le 3 mai 2022 que, le 2 mai 2022, l'huissier s'est rendu sur place mais n'a pu accéder aux parties communes et par voie de conséquence au logement concerné ; que le 3 mai 2022, il a contacté Monsieur [X] [U] sur son numéro de portable et que ce dernier lui a alors déclaré toujours occuper les lieux et ne pas avoir l'intention de les quitter ou encore de rendre les clés.
À défaut de production de documents de nature à justifier de ce qu'il avait quitté les lieux et de ce qu'il résidait à l'étranger à la date de signification du jugement, il sera constaté que la prorogation de délai de deux mois pour former recours, prévue à l'article 643 du code de procédure civile, n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce.
Il en résulte que l'appel, formé plus d'un mois après la signification du jugement, est irrecevable car tardif.
Du fait de l'irrecevabilité de l'appel, il n'y a pas lieu d'examiner la demande additionnelle formée par Monsieur [Y] [I].
Sur les frais et dépens :
Partie perdante, Monsieur [X] [U] sera condamné aux dépens de l'instance d'appel, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile et sera débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du même code.
Il sera en revanche fait droit à la demande de l'intimé au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a dû exposer pour défendre ses droits en appel, à hauteur de la somme de 1 000 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
DECLARE irrecevable l'appel formé le 17 mai 2022 par Monsieur [X] [U],
CONDAMNE Monsieur [X] [U] à payer à Monsieur [Y] [I] la somme de 1 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Monsieur [X] [U] aux dépens de l'instance d'appel.
La Greffière La Présidente