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09/02/2023 | FRANCE | N°21/00357

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 09 février 2023, 21/00357


MINUTE N° 68/2023

























Copie exécutoire à



- Me Guillaume HARTER



- Me Claus WIESEL





Le 09/02/2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 09 Février 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00357 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPEL



Décision déférée

à la cour : 19 Octobre 2020 par le Tribunal judiciaire à compétence commerciale de MULHOUSE





APPELANTE :



La S.À.R.L. FONCIÈRE DU BASSIN POTASSIQUE, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2]



représentée par Me ...

MINUTE N° 68/2023

Copie exécutoire à

- Me Guillaume HARTER

- Me Claus WIESEL

Le 09/02/2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 09 Février 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/00357 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPEL

Décision déférée à la cour : 19 Octobre 2020 par le Tribunal judiciaire à compétence commerciale de MULHOUSE

APPELANTE :

La S.À.R.L. FONCIÈRE DU BASSIN POTASSIQUE, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 2]

représentée par Me Guillaume HARTER, avocat à la cour.

INTIMÉE :

La S.A.S. MENUISERIE ALUMINIUM [D], prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1]

représentée par Me Claus WIESEL, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Décembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Franck WALGENWITZ, et Madame Nathalie HERY, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, président et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

La SARL Foncière du Bassin Potassique a fait procéder à des travaux d'aménagement de deux cellules artisanales à [Localité 3]. La maîtrise d''uvre a été confiée à l'agence d'architecture Ringenbach et le CCAP et le CCTP ont été établis en août 2015. La SAS [P] [D] Aluminium devenue la SAS Menuiserie Aluminium [D], a été chargée des lots n°5a « Menuiseries extérieures Aluminium », et n°5b « fermetures », pour un marché d'un montant de 57 000 euros HT, soit 68 400 euros TTC pour le lot 5a, et 7 585 euros HT soit 9 102 euros TTC pour le lot 5b.

La société [D] Aluminium a établi le 26 octobre 2015 une situation n°1 pour le lot 5a de 49 768,86 euros TTC qui a été réglée à hauteur de 47 280,42 euros, compte tenu d'une retenue de garantie de 2888,44 euros puis elle a adressé le 30 novembre 2015 une situation n°2 pour le lot 5a d'un montant TTC de 15 211,14 euros.

L'architecte lui a alors adressé une correspondance du 4 octobre 2015 pour lui indiquer que compte tenu du retard conséquent constaté lors des réunions de chantier et conformément à l'article 5.9.1 du C.C.A.P. le maître d'ouvrage lui a demandé de calculer et d'appliquer des pénalités provisoires de retard, de sorte qu'il émettait une proposition de paiement n°2 pour un montant TTC de 2 480,58 euros après prise en compte de 11 970 euros de pénalités.

Un procès-verbal de réception des travaux a été signé avec réserves le 23 décembre 2015. Le maître d''uvre a adressé un procès-verbal de levée de réserves à la société [D] le 14 mai 2016.

A la suite d'une mise en demeure émanant de la société Menuiserie Aluminium [D] en vue d'obtenir le paiement de sa facture, la société Foncière du Bassin Potassique a contesté cette facture en soutenant que certains travaux n'étaient pas terminés.

Estimant que les réserves ne pouvaient être levées, la société foncière assignait devant le tribunal de grande instance de Mulhouse le 21 décembre 2016 la société Menuiserie Aluminium [D], et par jugement du 2 mai 2017, la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Mulhouse a condamné cette dernière à procéder à la levée des réserves dans un délai de 15 jours.

Considérant que l'ensemble de ses factures devaient être réglées, la SAS Menuiserie Aluminium [D] a saisi le tribunal de grande instance de Mulhouse par acte introductif d'instance du 25 septembre 2017, aux fins de voir condamner la SARL Foncière du Bassin Potassique à lui verser un reliquat de 33 398,44 euros TTC au motif qu'elle avait exécuté le jugement du 2 mai 2017 du tribunal de grande instance de Mulhouse l'ayant condamnée à procéder à la levée des réserves et qu'elle était légitime et bien fondée à se prévaloir de l'exception d'inexécution compte tenu de l'absence de paiement du solde de son marché.

Dans sa décision du 19 octobre 2020, la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Mulhouse a condamné la société foncière du Bassin Potassique à payer à la SAS Menuiserie Aluminium [D] une somme de 27 926,44 euros avec intérêts de retard au taux légal égal au taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points à compter du 30 janvier 2016. La capitalisation des intérêts était également ordonnée ainsi que la condamnation de la société Foncière du Bassin Potassique à payer, outre les dépens, une somme de 800 euros au profit de la requérante.

Pour fonder sa décision le premier juge a rappelé que la SARL Foncière du Bassin Potassique avait confié à la société Menuiserie Aluminium [D] les lots « Menuiseries extérieures Aluminium » et « fermetures » dans le cadre du marché conclu le 7 août 2015, un avenant ayant été établi pour le lot « fermetures » le 24 novembre 2015. Le juge a estimé que la société Menuiserie Aluminium [D] a exécuté le jugement du 2 mai 2017 qui l'avait condamnée à lever les dernières réserves.

Le premier juge, relevant qu'aucune des parties n'avait produit aux débats le planning détaillé d'exécution visée contractuellement ni l'ordre de service qui aurait été imposé, a considéré que le délai d'exécution des travaux dont avait la charge la société Menuiserie Aluminium [D] devait être appréciée à la lumière du délai global tel que rappelé dans l'article 5.1 du CCAP soit quatre mois à compter du 7 août 2015. Il estimait que la société Menuiserie Aluminium [D] devait achever les lots le 7 décembre 2015 ; or en l'absence de pièces justificatives permettant d'établir la date certaine de l'achèvement des travaux, le juge a estimé qu'ils ont été achevés le 23 décembre 2015 soit avec 16 jours de retard.

Le juge a ajouté que la société Foncière du Bassin Potassique n'apporte aucun élément permettant d'apprécier les conséquences du retard imputable à la société chargée des lots « Menuiseries extérieures Aluminium » et « fermetures » de sorte qu'il a uniquement tenu compte des pénalités de retard calculés sur 16 jours, soit une somme de 5472 euros.

Le juge a alors déduit ce montant de la créance de la société Menuiserie Aluminium [D] de sorte que la société Foncière du Bassin Potassique était condamnée à régler la somme de 27 926,44 euros.

La société Foncière du Bassin Potassique faisait appel de la décision le 28 décembre 2020.

Elle saisissait en référé la première présidence de la cour d'appel de Colmar en vue d'être dispensée de l'obligation d'exécuter le jugement entrepris ; sa demande était rejetée par ordonnance du 24 mars 2021.

PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 28 avril 2022, la SARL Foncière du Bassin Potassique demande à la cour de bien vouloir:

- Déclarer son appel formé à l'encontre du jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 19 octobre 2020 recevable et bien fondé ;

En conséquence :

- Infirmer ledit jugement en ce qu'il a condamné la SARL Foncière du Bassin Potassique à payer à la SAS Menuiserie Aluminium [D] la somme de 27 926,44 euros avec intérêts, ordonné la capitalisation des intérêts, condamné la SARL Foncière du Bassin Potassique au titre de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande de la SARL Foncière du Bassin Potassique au titre de l'article 700 et l'a condamnée aux dépens.

Statuant à nouveau :

- Débouter la SAS Menuiserie Aluminium [D] de l'intégralité de ses fins et conclusions.

Subsidiairement,

- Dire que les condamnations prononcées à l'encontre de la SARL Foncière du Bassin Potassique seront assorties des intérêts au taux légal, subsidiairement au taux légal majoré de 4 %.

- Débouter la SAS Menuiserie Aluminium [D] de toutes demandes formées au titre d'un appel incident.

En tout état de cause :

- La condamner en tous les frais et dépens des deux instances ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Concernant la demande en paiement de la société Menuiserie Aluminium [D], la SARL Foncière du Bassin Potassique soutient que sa cocontractante était soumise à un planning prévisionnel de travaux qu'elle a signé, dont il résultait que le lot 5a devait être achevé la dernière semaine d'octobre 2015, le lot 5b devant l'être la première semaine de novembre 2015. La réception ayant été prononcée le 23 décembre 2015, le chantier a donc accusé un retard de 54 jours, et non de 16 jours comme retenu par le premier juge. Il conviendrait de se référer aux articles 5. 9. 1 et 5.9.2 du CCAP qui stipulent des pénalités provisoires puis définitives. Le montant des pénalités de retard pour 54 jours serait de 18 468 euros (54 X 68 400 X 5/1000 = 18 468 euros).

L'appelante précise en outre être en mesure de se prévaloir d'une inexécution fautive imputable à l'intimée de ses obligations contractuelles au regard du retard pris par les travaux, mais aussi au regard du défaut de levée des réserves.

Cette absence de levée empêcherait la SAS Menuiserie Aluminium [D] de pouvoir réclamer le paiement du solde de sa facture. Nonobstant les considérations du premier juge, à défaut d'une levée des réserves avec le maître d'ouvrage ou son maître d''uvre, les montants réclamés par l'intimée ne sont pas dus et ce en application de l'article 4.6.11 du CCAP prévoyant le versement du solde des sommes dues à l'entreprise uniquement à la levée des réserves formulées à la réception. Or au cas d'espèce ces réserves n'auraient jamais été levées.

L'intimée ne pourrait, selon l'appelante, pouvoir prétendre que la signature de l'avenant du 24 novembre 2015 - soit à une date à laquelle les travaux des lots 5 a et 5 b auraient dû être terminés - serait de nature à effacer le retard pris dans l'exécution des lots. Cet avenant du 24 novembre 2015 consistait en la réalisation de deux portes sectionnelles intérieures, sans aucun lien avec les deux autres lots.

En outre le document produit par l'intimée, présenté comme l'avenant, ne comporterait aucune modification du contrat initial.

La société Foncière du Bassin Potassique affirme également être en mesure de justifier les conséquences financières du retard imputable à la société Menuiserie Aluminium [D] tant pour l'exécution des travaux que pour la reprise des réserves.

Ils consisteraient en :

- la nécessité de mettre en place une prestation de gardiennage pour 1285,56 euros,

- la nécessité de mettre en place des souffleurs pour chauffer le bâtiment pour éviter que le froid n'empêche le séchage de la colle des carrelages, des enduits, du placoplâtre, pour un prix de 1236 euros TTC,

- un retard pris dans le déménagement des machines - initialement prévu entre Noël et nouvel an 2015 - qui n'a pu avoir lieu qu'à la mi-janvier 2016 de sorte que la SARL Foncière du Bassin Potassique a dû accorder un avoir de 37 202,33 euros (soit le loyer du premier trimestre) à la société Kubler titulaire d'un bail commercial passé avec l'appelante.

À titre subsidiaire, en cas de confirmation du principe de la condamnation de la société Foncière du Bassin Potassique, cette dernière sollicite l'application du taux d'intérêt légal, et très subsidiairement encore du taux d'intérêts légal ou à défaut majoré de 4 points.

Après avoir rappelé que le juge de première instance a augmenté le taux d'intérêt légal de 10 points, la société Foncière du Bassin Potassique évoque sa situation de devoir faire face à une réclamation formulée dans son courrier du 30 octobre 2020 par la SAS Menuiserie Aluminium [D] portant sur le paiement des intérêts de 44 575,57 euros alors que le principal n'était que de 27 926,44 euros.

Le premier juge ne pouvait appliquer un tel taux augmenté de 10 points alors que les conditions contractuelles de la société Menuiserie Aluminium [D] figurant sur ses factures ne sont pas opposables à l'appelante qui ne les a jamais acceptées et qu'en outre ce taux de retard prévu n'est que de 4 % au-dessus de celui pratiqué par la Banque de France.

* * *

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 28 septembre 2021, la SAS Menuiserie Aluminium [D] conclut à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et à la condamnation de la société Foncière du Bassin Potassique aux entiers dépens de la procédure et au paiement de la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société estime que le premier juge a justement rappelé que la société Menuiserie Aluminium [D] a exécuté le jugement du 2 mai 2017 et que la partie adverse s'est refusée à solder le marché alors qu'il restait près de 37 % du montant total à payer.

La société adverse ne saurait invoquer la possibilité d'une compensation entre des pénalités de retard dues par la société Menuiserie Aluminium [D] et des préjudices subis par la Foncière du Bassin Potassique, alors que cette dernière ne sollicite aucun montant à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi. Elle estime que les prétendus frais de chauffage et les ristournes accordées à d'autres sociétés, sont hors débats dans la mesure où aucune demande de dommages-intérêts n'a été formulée.

Aussi, à son sens, le seul débat soumis au premier juge et donc à la cour concerne le solde de la facture de la société Menuiserie [D] et le cas échéant la créance de la SARL Foncière du Bassin Potassique au titre d'éventuelles pénalités de retard.

Contrairement aux indications de la société Foncière du Bassin Potassique qui réclame 54 jours d'indemnités de retard, il conviendrait de se référer à la décision du premier juge qui a considéré que le retard imputable à la société [D] est au maximum de 16 jours, étant rappelé qu'un avenant non contesté portant sur deux portes sectionnelles a été signé à une date où les travaux devaient être déjà achevés ; la signature de cet avenant démontrerait qu'aucun reproche quant à un éventuel retard ne pouvait être formulé à l'encontre de la société Menuiserie [D].

Celle-ci termine ses écritures en expliquant ne pas régulariser d'appel incident à l'encontre du jugement entrepris, se contentant de mettre en compte les intérêts dus compte tenu du retard extrêmement important pris dans l'exécution de la condamnation prononcée par le premier juge.

MOTIVATION

1) Sur la question de la levée des réserves

L'article 4.6.11 du CCAP stipule que le solde des sommes dues à une entreprise intervenant sur le chantier ne peut intervenir qu'en cas, notamment, de la « levée des réserves formulées à la réception ».

Le procès-verbal de réception dressé le 23 décembre 2015 signé par le maître d''uvre ainsi que par la société [D] Aluminium, mentionnait des réserves qui portaient notamment sur la porte d'entrée du hall 4 qui fermait « très mal », « l'issue de secours double » sur laquelle manquait la butée basse, l'absence de pose de deux « portes rapides » ou encore l'absence de poignée sur l'issue de secours présente dans le hall 6.

La société foncière du Bassin Potassique soutient qu'en tout état de cause, elle ne serait pas dans l'obligation d'honorer la facture présentée par la société Menuiserie Aluminium [D] en ce sens que ces réserves énumérées dans le procès-verbal de réception des travaux du 23 décembre 2015 n'ont pas été levées.

Or la SARL foncière du Bassin Potassique a obtenu par jugement du 2 mai 2017, la condamnation de la société Menuiserie Aluminium [D] à procéder à la levée de ces réserves dans un délai de 15 jours. Ce jugement (annexe 5 de l'intimée) précisait qu'en cas d'inexécution par la société Menuiserie Aluminium [D] de la levée des réserves dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement, la société Foncière du Bassin Potassique pourra faire exécuter les travaux aux frais et risques de la société Menuiserie Aluminium [D].

Le premier juge a noté à juste titre, que si la société foncière du Bassin Potassique affirme que ces réserves n'ont pas été levées par la société intimée, elle n'explique pas pourquoi elle n'aurait alors pas fait exécuter - comme le jugement du 2 mai 2017 le lui permettait - les travaux listés le 23 décembre 2015 par une société tierce.

D'autre part, la société intimée ' sur laquelle pèse la charge de la preuve de la levée des réserves - produit dans ses annexes la pièce 7 intitulée « liste réserves » datée du 28 juillet 2017. Il s'agit d'un document rédigé sur un papier à son entête qui reprend la liste des réserves présentes au procès-verbal du 23 décembre 2015, qui est signée par la société Kubler, preneur des lieux.

Il est évident que si cette dernière a signé ce document, à la demande de la société Meniserie Aluminium [D], c'est bien pour objectiver la levée des réserves suite aux travaux de reprise ordonnés par le jugement du 2 mai 2017.

En tout état de cause, on ne saurait imaginer la SCI louer les cellules commerciales qui ont fait l'objet des travaux d'aménagement durant l'année 2015 - notamment à la société Kubler - sans que les réserves n'aient été levées, sachant que celles-ci portaient sur des éléments de sécurité tels que la porte d'entrée du hall 4, l'issue de secours double, l'absence de poignée sur l'issue de secours présente dans le hall 6.

Il s'évince de ces développements que les réserves ont été levées, de sorte que le maître d'ouvrage ne peut fonder son refus de verser le solde de la facture sur les stipulations du CCAP évoquées plus haut.

2) Sur la question des pénalités de retard

Le cahier des clauses administratives particulières signés par les parties le 7 août 2015 prévoit notamment sous le point 5. 7 intitulé « planning détaillé d'exécution » que le maître d''uvre établira un planning détaillé d'exécution des travaux qui doit être approuvé par le maître d''uvre, le maître d'ouvrage et signé par les entreprises, et que si le planning n'est pas établi en détail à la fin de la période de préparation celui-ci peut être rédigé unilatéralement par le maître d''uvre.

L'appelante produit à hauteur d'appel, en annexe 10, un planning provisionnel des travaux établi le 21 août 2015 (dont l'absence était soulignée par le juge de première instance) et comportant la signature de [P] [D], pour le compte de la société Menuiserie Aluminium [D].

Ce document prévoit que les lots 5 a et 5 b confiés à ladite société doivent être réalisés respectivement sur les semaines 43, 44 et 45, la semaine 45 correspondant à la première semaine de novembre 2015.

L'intimée soutient que ce délai aurait été reporté du fait de la signature le 24 novembre 2015 d'un avenant numéro 1 au marché du 7 août 2015 dont l'objet portait sur le lot 5 b « fermetures », prévoyant la pose de 2 « portes rapides » pour un montant hors taxes de 9 450 euros de sorte que le montant total du marché, initialement de 7585 euros hors-taxes, passait à la somme de 17 035 euros hors-taxes (annexe 3 de la partie appelante).

Cet avenant du 24 novembre 2015 précise en son article 3 que « le délai initial de réalisation est maintenu » ; bien qu'il a étendu la mission de la société [D], il n'a prévu aucun délai d'exécution de la nouvelle prestation confiée à la société intimée. De plus, aucun nouveau planning n'a été rédigé.

Il s'en déduit que le délai initial de réalisation a été maintenu, et que les nouvelles prestations n'ont pas été considérées comme ayant une incidence sur les délais impartis à la société Menuiserie Aluminium [D] pour réaliser les travaux initiaux.

Le juge de première instance ne pouvait alors estimer que la société Aluminium [D] devait achever l'intégralité des lots confiés ' avenant compris - pour le 7 décembre 2015, soit à l'issue du délai de quatre mois prévu par l'article 5.1 du CCAP au titre du « délai global » contractuellement prévu débutant le 7 août 2015, et corrélativement que les travaux confiés à la société Menuiserie Aluminium [D] avaient été réceptionnés avec réserve avec un retard de 16 jours (soit le 23 décembre 2015).

Les travaux initialement confiés à la société intimée auraient dû être achevés pour la fin de la première semaine de novembre 2015 ; le retard débutait donc à compter du lundi de la deuxième semaine de novembre, soit le 9 novembre. Il y a donc eu 44 jours de retard entre le 9 novembre et le 23 décembre 2015, ce qui génère des pénalités de retard de l'ordre de 15 048 euros (44 X 68 400 x5/1000).

3) Sur la créance de la SA S Menuiserie Aluminium [D]

L'appelante demande compensation entre la facture et les pénalités de retard et des frais qu'il a dû engager du fait du retard pris.

Au titre des pénalités de retard c'est une somme de 15 048 euros qui doit être prise en compte, cette somme correspondant aux 44 jours de retard.

En revanche, l'appelante ne peut demander compensation entre sa dette et des frais qu'elles auraient dû engager ' au titre d'une facture de 2285,56 euros TTC datée du 31 décembre 2015 émanant de la société Axcelis Sécurité correspondant à des heures de gardiennage « d'une centrale solaire » à Staffefelden, d'une facture de la société Heliobat en date du 15 janvier 2016 d'un montant de 1236 euros pour la location de « souffleurs gaz professionnels » et de bouteilles de gaz propane, ou encore suite à un avoir consenti au preneur au titre du loyer du premier trimestre 2016 d'un montant de 37 202,30 trois euros - du fait du retard pris dans la livraison des travaux.

Le remboursement de ses ces frais ne peut ressortir que d'une demande de dommages-intérêts qui n'a pas été formulée en l'espèce, la compensation ne pouvant s'opérer que entre deux créances réciproques répondant aux conditions de l'article 1347'1 du code civil.

Dans ces conditions, le jugement de première instance qui a condamné la société foncière du Bassin Potassique à verser à la société Menuiserie Aluminium [D] la somme de 27 926,44 euros - soit le montant de la facture définitive de la société intimée du 30 janvier 2016 après déduction de l'indemnité de retard de 16 jours - doit être infirmé.

La société foncière du bassin potassique sera condamnée à verser à la société menuiserie aluminium [D] la somme de 18 350,44 euros (soit 33 398,44 euros -15 048 euros).

4) Sur la question des intérêts

Le premier juge a assorti cette condamnation des intérêts de retard au taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points à compter du 30 janvier 2016, date de la facture définitive.

Le magistrat de première instance n'a pas expliqué pourquoi il retenait une telle majoration alors que la facture numéro 16/01 du 30 janvier 2016 (annexe 8 de l'intimée) établie par l'établissement Menuiserie Aluminium [D] ne prévoit aucune disposition concernant les intérêts de retard.

Dans ces conditions, à défaut d'existence d'une convention entre les parties ayant stipulé les intérêts de retard à la charge du maître d'ouvrage, seuls les intérêts au taux légal doivent s'appliquer à la somme mise à la charge de la société foncière du Bassin Potassique.

Le jugement sera infirmé sur ce seul point.

5) sur les demandes annexes

La partie appelante, partie succombante principale, sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 500 euros au profit de la société Menuiserie Aluminium [D] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La demande émanant de la société foncière du Bassin Potassique en vue d'obtenir une indemnisation sur ce même fondement serait écartée.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré ;

CONFIRME le jugement rendu le 19 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse sauf en ce qu'il a condamné la société foncière du Bassin Potassique à verser à la société Menuiserie Aluminium [D] une somme de 27 926,44 euros augmentée des intérêts de retard au taux légal égal taux d'intérêt appliqué par la

banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points à compter du 30 janvier 2016,

Y substituant

CONDAMNE la SARL foncière du Bassin Potassique à payer à la SAS Menuiserie Aluminium [D] une somme de 18 350,44 euros (dix huit mille trois cent cinquante euros et quarante-quatre centimes) augmentée des intérêts de retard au taux légal à compter du 30 janvier 2016,

Et Y ajoutant

CONDAMNE la société foncière du Bassin Potassique aux dépens de la procédure d'appel,

CONDAMNE la société foncière du Bassin Potassique à verser à la SAS Menuiserie Aluminium [D] une somme de 1500 euros (mille cinq cents euros) au titre des frais irrépétibles qu'elle a engagés à hauteur d'appel,

REJETTE la demande de la société foncière du Bassin Potassique fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/00357
Date de la décision : 09/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-09;21.00357 ?
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