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03/02/2023 | FRANCE | N°20/03729

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 03 février 2023, 20/03729


MINUTE N° 61/2023

























Copie exécutoire à



- Me Valérie SPIESER



- Me Claus WIESEL





Le 03/02/2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 3 FEVRIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03729 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HONA



Décision déférée à

la cour : 17 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE.





APPELANTS :



Monsieur [J] [U]

Madame [C] [W] épouse [U]

demeurant [Adresse 2] à [Localité 7]



représentés par Me Valérie SPIESER, avocat à la cour.

plaidant : Me BRUNNER, avocat à...

MINUTE N° 61/2023

Copie exécutoire à

- Me Valérie SPIESER

- Me Claus WIESEL

Le 03/02/2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 3 FEVRIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03729 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HONA

Décision déférée à la cour : 17 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE.

APPELANTS :

Monsieur [J] [U]

Madame [C] [W] épouse [U]

demeurant [Adresse 2] à [Localité 7]

représentés par Me Valérie SPIESER, avocat à la cour.

plaidant : Me BRUNNER, avocat à Mulhouse

INTIMEES :

La S.A. MAAF ASSURANCES Prise en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 9] à [Localité 8]

représentée par Me Claus WIESEL, avocat à la cour.

La S.E.L.A.R.L. MJM - [X] ET ASSOCIES prise en la personne de son représentant légal, agissant par Maître [X] es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « SARL CMI BATIMENT »

ayant son siège social [Adresse 5] à [Localité 6]

désistement partiel du 7 avril 2021.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Septembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre, et Madame Myriam DENORT, conseiller, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre,

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN.

ARRET avant dire droit et contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 16 décembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [C] [W], épouse [U] et M. [J] [U], propriétaires d'un immeuble d'habitation sis à [Localité 10] (Haut-Rhin), ont déposé par l'intermédiaire de M. [H] [R], architecte, une demande de permis de construire le 25 juin 2009, pour un agrandissement de leur maison consistant en la création d'une pièce supplémentaire.

Selon devis accepté en date du 18 juillet 2009, les travaux de gros oeuvre et de maçonnerie ont été confiés à la SARL CMI bâtiment. Cette société était assurée pour ce qui est de la responsabilité encourue au titre des articles 1792 et suivants du code civil auprès de la SA MAAF assurances.

Les travaux ont été facturés le 7 octobre 2009, pour un montant TTC de 21 533,55 euros, et n'ont pas fait l'objet d'une réception formelle, la prise de possession des lieux datant de 2010.

M. [U] a réalisé la pose des cloisons et les finitions intérieures.

Début 2012, les époux [U] ayant constaté divers désordres (affaissement des dalle du rez-de-chaussée et fissures), ont assigné, le 14 décembre 2015, la société MAAF Assurances et la société CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, représentée par Me [Z] [X], liquidateur judiciaire, en référé aux fins d'expertise.

Par ordonnance du 5 janvier 2016, le juge des référés a ordonné l'expertise sollicitée dont les opérations ont été étendues à l'architecte, M. [R] par une seconde ordonnance rendue le 14 février 2017.

L'expert judiciaire, M. [T], a déposé son rapport définitif le 1er décembre 2017, après un pré-rapport et six notes aux parties.

Contestant les conclusions du rapport d'expertise judiciaire, les époux [U] ont saisi le tribunal de grande instance de Mulhouse, par acte introductif d'instance déposé au greffe le 4 avril 2019, signifié le 2 mai 2019, d'une demande dirigée contre la société CMI bâtiment représentée par son liquidateur, et la société MAAF assurances aux fins de contre-expertise, et de condamnation de cette dernière à supporter le coût de travaux de remise en état.

Par jugement réputé contradictoire du 17 novembre 2020, la société CMI bâtiment représentée par Me [X] n'ayant pas constitué avocat, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :

- rejeté la demande de contre-expertise judiciaire de M. [U] et Mme [W] épouse [U],

- homologué purement et simplement le rapport d'expertise judiciaire de M. [T] du 1er décembre 2017,

- dit que la SARL CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, est responsable du non-respect des règles parasismiques,

- en ce qui concerne les déformations et fissurations des cloisons, dit qu'il y a lieu de partager la responsabilité, par parts égales, entre M. [U], maître d'ouvrage, maître d'oeuvre et exécutant des cloisons, d'une part, et la SARL CMI Bâtiment, entreprise de gros (sic), d'autre part.

- condamné la SA MAAF Assurances à payer aux époux [U] les sommes de 3 000 euros au titre du non-respect des règles parasismiques et de 22 500 euros au titre des fissures des cloisons,

- rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens y compris, ceux des deux procédures de référé expertise,

- dit que les frais d'expertise seraient partagés par parts égales entre les parties,

- rejeté toutes autres demandes des parties.

Pour rejeter la demande de contre-expertise, le tribunal a constaté que les travaux avaient été réalisés en 2009, soit depuis plus de dix ans, que plusieurs techniciens et experts étaient intervenus et avaient rédigé des rapports lesquels avaient été soumis à l'expert judiciaire, qui les avait discutés, tout comme les parties, contradictoirement.

Le tribunal a également relevé que les désordres avaient été constatés par l'expert en 2016, alors qu'ils étaient apparus en 2012, qu'il avait été nécessaire pour l'expert judiciaire de faire durer les opérations d'expertise aux fins de constater si les fissures s'aggravaient ou parvenaient à se stabiliser, ce qui avait conduit au dépôt de six notes, et qu'aucune aggravation des désordres ne s'était produite depuis le dépôt du rapport d'expertise, ce qui confirmait les affirmations de l'expert judiciaire selon lesquelles le processus de déformation des dalles était stabilisé.

Sur les responsabilités, le tribunal a relevé que la société MAAF Assurances ne contestait pas la responsabilité de son assurée la société CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, dans le non-respect des règles parasismiques. En ce qui concerne, les déformations et les fissurations des cloisons, le tribunal a procédé à un partage de responsabilité, par parts égales, entre M. [U], maître d'ouvrage, maître d'oeuvre, et exécutant des cloisons, d'une part, et la société CMI Bâtiment, entreprise de gros-oeuvre, d'autre part.

Le tribunal a considéré, nonobstant le fait que M. [U] n'ait pas chiffré son préjudice, se réservant le droit de conclure après le dépôt du rapport de contre-expertise, que les époux [U] demandant cependant le débouté des chiffres retenus tant par la société MAAF Assurances que par l'expert judiciaire, il convenait de statuer et de condamner la société MAAF Assurances au paiement de la somme de 3 000 euros telle que chiffrée par l'expert pour le renforcement parasismique, outre la somme 22 500 euros au titre des fissures, compte tenu du partage de responsabilité.

M. [J] [U] et son épouse Mme [C] [W], ont interjeté appel de ce jugement le 7 décembre 2020, en toutes ses dispositions, intimant la société MAAF et la SELARL MMJ [X] et associés, en qualité de mandataire liquidateur de la société CMI Bâtiment.

Par ordonnance du 7 avril 2021, le magistrat chargé de la mise en état a donné acte du désistement d'appel partiel des appelants à l'égard de la SELARL MJM - [X] et associés, ès-qualités.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 5 avril 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 octobre 2021, les époux [U] demandent à la cour de :

- déclarer recevable et fondé leur appel,

- écarter les conclusions d'irrecevabilité déposées par la MAAF le 25 mai 2021 et la débouter de toutes ses fins, et conclusions,

- infirmer le jugement rendu le 17 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse,

Statuant à nouveau et avant dire droit,

- ordonner une contre-expertise confiée à tel expert qu'il plaira, avec la mission qu'ils précisent,

- réserver aux appelants la faculté de conclure après dépôt du rapport d'expertise,

Sur le fond,

- dire et juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [T] dans son rapport du 1er décembre 2017,

- dire et juger que M. [U] n'a jamais joué le rôle de maître d'oeuvre et qu'il n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,

- dire et juger par ailleurs que le défaut de respect des normes antisismiques s'étend au défaut de pose des épingles tel que constaté par le rapport de l'Apave daté du 30 août 2018,

- condamner la MAAF, ès qualité, à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages, à savoir selon le rapport [E], le démontage complet du plancher bas du rez de chaussée et le remplacement des poutrelles, ainsi que la réfection du plancher suivant les normes parasismiques en reprenant le chaînage périphérique et en faisant de même sur la partie haute du rez-de-chaussée, la reprise des poutraisons,

- dire et juger que la société MAAF devra supporter l'intégralité du coût des travaux détaillés pages 9 et 10 du rapport de M. [E] du 1er octobre 2017,

- réserver aux appelants la faculté de chiffrer le coût de l'ensemble des ouvrages,

- débouter la MAAF de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, y compris son appel incident,

- condamner la MAAF au règlement des frais d'expertise, aux dépens de l'instance et à un montant de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [U] font valoir que l'irrecevabilité alléguée par l'intimé des conclusions des appelants n'est pas sérieuse en ce sens qu'ils n'ont pas renoncé à toute action contre l'entreprise, mais simplement effectué un désistement en raison du fait que Me [X], liquidateur judiciaire, n'était plus habilité à représenter la société CMI Bâtiment dont la liquidation judiciaire a été clôturée, le 9 novembre 2016, pour insuffisance d'actif, ce qui a mis fin au mandat du liquidateur. Ils soulignent que la signification des conclusions d'appel au liquidateur ne régulariserait pas pour autant la procédure, qu'ils ne disposent d'aucune adresse de la société CMI Bâtiment, pour lui faire signifier leurs conclusions, et précisent qu'ils ne renoncent donc en rien à solliciter une décision modificative de celle dont ils ont interjeté appel.

Au soutien de leur demande de contre-expertise, les appelants critiquent l'appréciation de l'expert en ce qu'il retient que les mesures prises sur place se situeraient dans des ordres de grandeur ne présentant pas de risque majeur, et estiment qu'il conviendrait de préciser la portée de ces termes, car ils n'excluent pas qu'un risque n'existe. Ils critiquent également le fait que l'expert, se soit référé aux mesures prises par le bureau d'études ICAT mandaté par l'assureur, alors qu'il devait personnellement procéder aux mesures qui s'imposaient, ainsi que le fait qu'il ait mentionné que les déformations des deux dalles haute et basse étaient stabilisées, ce qui n'est pas le cas, et ce qui est au surplus en contradiction avec sa propre affirmation selon laquelle la troisième flèche qui correspond à la somme de la flèche instantanée provoquée par le propre poids de la dalle et de la flèche instantanée de surcharge permanente résultant des éléments posés sur la dalle (chape, cloisons, faux-plafonds...) se développerait surtout pendant les premières années mais ne prendrait théoriquement jamais fin. Ils critiquent également le rapport en ce qu'il n'évoque que la seule dalle basse, et ne prend pas en considération la résistance des poutrelles dont la section est de toute évidence trop faible.

Les appelants soulèvent diverses contradictions du rapport, notamment en ce qu'il ne tirerait pas les conséquences du dépassement de la tolérance réglementaire de 1,06 cm et soutiennent que les déformations constatées dépassent les normes de 14 %, et surtout que le moment effectif est supérieur au moment résistant, ce qu'ils estiment inacceptable pour une construction neuve. Ils soulignent qu'en considérant les charges permanentes, ainsi que celles d'exploitation, de mobiliers et de personnes, un risque de rupture serait encouru, ajoutant que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, l'expert n'a pas été mis en possession du rapport de l'Apave qui est postérieur à celui de l'expert judiciaire.

Ils reprochent également au tribunal d'avoir retenu la responsabilité de M. [U], qui n'est ni ingénieur béton, ni ingénieur structure, et ne peut se voir reprocher une acceptation du support, n'ayant pu concevoir que la flèche maximale dépasserait les normes, et considèrent que les désordres trouvent leur origine dans une insuffisance de section des poutrelles mises en oeuvre par la société CMI Bâtiment dont la responsabilité est patente et exclusive.

S'agissant du non-respect des règles parasismiques, les appelants reprochent à l'expert judiciaire de ne pas avoir tenu compte du fait qu'aucune entreprise ne veut procéder aux réparations, en raison de poutrelles discontinues présentant un cintrage important, ce qui empêcherait l'intervention qui réclame une certaine planéité.

Ils font grief au premier juge d'avoir homologué le rapport d'expertise judiciaire et retenu que le processus était stabilisé, alors qu'un rapport d'inspection de l'Apave, postérieur au dépôt du rapport d'expertise, démontre au contraire que les désordres continuent de s'aggraver, alors que les appelants n'ont pas modifié leur mode de vie, et de ne pas avoir pris en considération les remarques de M. [P] [E], ingénieur génie civil, ce qui justifie une contre-expertise.

Ils estiment que les préconisations de l'expert judiciaire sont inadaptées quant au remède à apporter au défaut de respect des normes parasismiques, et que les réparations des dommages doivent être chiffrés selon les solutions préconisées de M. [E] qui sont seules de nature à mettre un terme définitif aux désordres.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 10 décembre 2021, la société MAAF Assurances demande à la cour de :

- déclarer mal fondés les époux [U], respectivement irrecevables, en ce qu'ils contestent le partage de responsabilité retenu en première instance,

- déclarer mal fondés les époux [U] concernant leur demande avant dire droit d'une contre-expertise,

- confirmer en conséquence le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse, relativement à ces deux points,

- condamner les époux [U] aux entiers dépens de la procédure ainsi qu'au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société MAAF fait valoir qu'il a été donné acte par la présidente de chambre, chargée de la mise en état, du désistement d'appel partiel des époux [U] à l'encontre de la SARL MJM [X] et associés, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL CMI Bâtiment. Elle considère que les conclusions des époux [U], visant à voir condamner la société MAAF, seule, à supporter l'intégralité du coût des travaux de reprise en raison de la couverture en responsabilité décennale, sont irrecevables compte tenu du désistement partiel, le jugement de première instance étant en effet définitif s'agissant du partage de responsabilité par suite du désistement, sans réserves, des époux [U] de leur appel dirigé à l'encontre de la société CMI bâtiment, respectivement de son liquidateur, qui vaut acquiescement de leur part au partage de responsabilité, de sorte qu'en sa qualité d'assureur de la société CMI Bâtiment, elle ne peut être tenue à indemniser le préjudice au-delà de la part de responsabilité incombant à son assurée.

En tout état de cause, elle approuve les motifs du premier juge en ce qu'il a entériné le rapport de l'expert judiciaire M. [T] préconisant qu'il fallait procéder à un partage de responsabilité entre la société en charge du gros-oeuvre et les époux [U], pour le second oeuvre.

S'agissant du rapport judiciaire, la société MAAF souligne que M. [T] a discuté les divers rapports qui lui avaient été remis par les techniciens, y compris le rapport de M. [E], et ce de manière contradictoire.

L'intimée rappelle que les travaux ont été réalisés en 2009, que l'expert a constaté, en 2016, des désordres survenus en 2012, mais que depuis le rapport d'expertise judiciaire aucune aggravation ne s'est produite ce qui confirme l'analyse de l'expert et du tribunal quant à la stabilisation du processus de déformation des dalles, de sorte qu'une contre-expertise n'est pas justifiée et qu'il y a lieu et de confirmer le jugement entrepris.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes des époux [U] tendant à remettre en cause le partage de responsabilité

Les époux [U] ont dirigé leur appel d'une part contre la société MAAF et d'autre part contre 'la SELARL MJM [X] et associés, prise en la personne de Maître [X], es qualité de mandataire liquidateur de la SARL CMI Bâtiment'.

Le 6 avril 2021, ils se sont désistés de leur appel en tant que dirigé à l'encontre de 'la SELARL MJM [X] et associés, 'es-qualité de mandataire liquidateur de la SARL CMI Bâtiment', sans formuler la moindre réserve relative au fait allégué que la liquidation judiciaire de la société serait clôturée.

Conformément à l'article 403 du code de procédure civile, le désistement d'appel emporte acquiescement au jugement. En l'absence de réserves formulées par les appelants dans leur acte de désistement d'appel, le jugement entrepris est donc entré en force de chose jugée s'agissant de ses dispositions concernant la société CMI Bâtiment, et ce quand bien même le désistement serait-il motivé par la cessation des fonctions du mandataire judiciaire du fait de la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société CMI Bâtiment, ce dont il n'est au demeurant pas justifié, les époux [U] n'ayant en effet pas usé de la possibilité dont ils disposaient, le cas échéant, d'agir contre cette société après avoir fait procéder à la désignation d'un mandataire ad hoc pour la représenter.

La société MAAF soulève donc à juste titre l'irrecevabilité des demandes des époux [U] en tant qu'elles tendent à remettre en cause le jugement s'agissant du partage de responsabilité et à obtenir la condamnation de la société MAAF à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages, l'assureur ne pouvant être tenu à indemnisation au-delà de la part de responsabilité définitivement mise à la charge de son assurée.

Sur la demande de contre-expertise

Aux termes de son rapport du 1er décembre 2017, l'expert judiciaire, M. [T] a relevé que :

- les déformations et fissurations de la cloison sont dues à la déformation de la dalle basse qui a entraîné la cloison,

- la dalle haute n'a généré aucun désordre, cette dalle étant correctement dimensionnée au point de vue de la résistance et de la déformation, la dalle basse étant par contre correctement dimensionnée au point de vue de la résistance mais sous dimensionnée du point de vue de la déformation,

- la flèche (c'est-à-dire la valeur maximale de déplacement d'une poutre) admissible de 1,06 cm est dépassée selon les endroits par une flèche nuisible de 1,28 - 1,19 - 1,57 cm,

- les responsabilités en incombent, pour partie, au gros oeuvre - CMI Bâtiment -, qui n'a pas respecté la limite de flèche admissible de 1,06 cm, et pour autre partie, au second oeuvre - réalisé par M. [U] -, car il n'a pas pris de précautions particulières en pied de cloison pour absorber la déformation,

- la stabilité constatée dans le processus des déformations autorise la reprise de la cloison et des finitions attenantes,

- il n'y a pas lieu de renforcer les dalles.

Concernant l'aspect parasismique, l'expert souligne qu'un chaînage est manquant au dessus de la poutre le long de l'existant, mais qu'il est possible de coller une bande TFC sur le flanc de la poutre, sans pour autant qu'il soit en mesure de produire d'études techniques.

Les appelants contestent ces conclusions s'agissant des modalités de la réparation ils se fondent sur un rapport technique de M. [E], ingénieur bâtiment génie civil, en date du 1er octobre 2017 dont il n'est pas établi qu'il ait été soumis à l'expert qui n'en fait pas mention dans son rapport. M. [E] préconise des réparations consistant à bloquer l'évolution de la flèche des poutrelles en plancher bas de rez de chaussée, la reprise totale de la cloison entre la chambre et la salle de bains, la remise aux normes parasismiques de l'extension. Après avoir envisagé plusieurs solutions, il préconise comme étant seuls envisageables : le démontage complet du plancher bas du rez de chaussée, le remplacement des poutrelles, la réfection du plancher en respectant les normes parasismiques et en reprenant le chaînage périphérique ainsi que la partie haute du rez de chaussée.

Les appelants produisent également un rapport d'examen de l'Apave en date du 30 août 2018, postérieur au rapport d'expertise judiciaire, qui indique que les déformations ne semblent pas stabilisées, la flèche mesurée par le technicien de cet organisme étant de 2,55 pour la dalle basse, alors que la flèche maximale mesurée par M. [T] était de 2,1 et celle mesurée par M. [E] de 2,5.

En l'état de ces constatations qui sont en faveur d'une aggravation des désordres, la demande de nouvelle expertise apparaît justifiée aux fins de vérifier l'existence d'une aggravation et de déterminer la solution réparatoire la plus adaptée, celle proposée par M. [T] étant jugée insuffisante par M. [E], la question des responsabilités étant par contre définitivement tranchée.

Il y a donc lieu de surseoir à statuer et d'ordonner une mesure d'expertise aux frais avancés des époux [U] qui en font la demande.

Les dépens et frais irrépétibles seront réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONSTATE que le désistement d'appel partiel des époux [U] vaut acquiescement aux dispositions du jugement concernant la société CMI Bâtiment, représentée par son liquidateur, à savoir en ce qu'il a dit que la SARL CMI Bâtiment, en liquidation judiciaire, est responsable du non-respect des règles parasismiques et pour moitié en ce qui concerne les déformations et fissurations des cloisons ;

DECLARE en conséquence irrecevables les demandes des époux [U] tendant à voir :

- dire et juger que la société CMI Bâtiment, couverte en responsabilité décennale par la société MAAF Assurances, est seule et entièrement responsable de l'ensemble des désordres constatés par M. [T] dans son rapport du 1er décembre 2017,

- dire et juger que M. [U] n'a à supporter aucune responsabilité quant aux conséquences des dommages constatés sur le second oeuvre,

- condamner la MAAF à supporter l'intégralité du coût de réfection des ouvrages,

INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse en date du 17 novembre 2020 en ce qu'il a rejeté la demande de contre-expertise ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

ORDONNE une mesure d'expertise ;

COMMET pour y procéder M. [Y] [B]

[Adresse 4]

Portable : [XXXXXXXX01] Mèl : [Courriel 11] ;

avec faculté de s'adjoindre, en cas de besoin, tout spécialiste de son choix, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne, et avec mission de se faire communiquer, par les parties ou les tiers, tous documents utiles, de recueillir des informations écrites ou orales de toutes personnes, sauf à ce que soient précisés leurs nom, prénoms, demeure et profession ainsi que, s'il y a lieu, leur lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles, à l'effet de :

1 - prendre connaissance du rapport de M. [T] du 1er décembre 2017, du rapport de M. [E] du 1er octobre 2017 et du rapport d'examen de l'Apave du 30 août 2018 ;

2 - se rendre sur les lieux [Adresse 3] à [Localité 10] ;

3 - dire si les désordres constatés par M. [T] - déformation de la cloison de séparation de la chambre à coucher et de la salle de bains, et non-respect des règles parasismiques - se sont aggravés depuis le dépôt de son rapport d'expertise et se prononcer sur leur évolution prévisible ;

4 - préconiser les travaux de nature à y remédier, en chiffrer le coût et en préciser la durée prévisible ;

5 - fournir toute indication utile sur d'éventuels préjudices annexes liés à l'exécution de ces travaux ;

6 - s'expliquer techniquement, dans le cadre des chefs de mission ci-dessus, sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillis après leur avoir communiqué son avis définitif lors d'une dernière réunion ou par simple note ;

DIT qu'il sera procédé aux opérations d'expertise en présence des parties ou celles-ci convoquées par lettres recommandées avec demandes d'avis de réception, et leurs conseils avisés par lettres simples ;

DIT que l'expert devra entendre les parties en leurs observations, ainsi que, le cas échéant, consigner leurs dires et y répondre dans son rapport ;

DIT que l'expert devra déposer son rapport 3 exemplaires au greffe dans le délai de 8 mois à compter de la date à laquelle il aura été avisé du versement de la consignation, date de rigueur, sauf prorogation qui serait accordée sur rapport de l'expert à cet effet ;

DIT qu'en cas de refus de sa mission par l'expert, d'empêchement ou de retard injustifié, il sera pourvu d'office à son remplacement ;

FIXE à 2 000 € (deux mille euros) le montant à valoir sur la rémunération de l'expert que les époux [J] [U] et [C] [W] devront consigner sur la plate-forme numérique de la Caisse des dépôts et consignations accessible au lien suivant : www.consignations.fr, avant le 15 avril 2023, sous peine de caducité de la désignation de l'expert ;

DIT les époux [J] [U] et [C] [W] devront transmettre au greffe, dès sa réception, le récépissé de consignation ;

DIT qu'à l'issue de la première réunion d'expertise, l'expert devra communiquer aux parties et au magistrat chargé du contrôle de l'expertise un état prévisionnel de ses frais et honoraires, et devra, en cas d'insuffisance de la provision consignée, demander la consignation d'une provision supplémentaire ;

DIT qu'à l'issue de sa mission l'expert adressera aux parties sa demande de rémunération par lettre recommandée avec accusé de réception ;

DIT que les parties pourront adresser à l'expert et à la juridiction leurs observations écrites sur la demande de rémunération dans un délai de quinze jours à compter de sa réception ;

SURSOIT à statuer pour le surplus ;

RENVOIE l'affaire à l'audience de mise en état du 6 juin 2023 pour vérification du paiement de l'avance sur les frais d'expertise.

RESERVE les dépens et les frais exclus des dépens.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/03729
Date de la décision : 03/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-03;20.03729 ?
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