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26/01/2023 | FRANCE | N°21/01878

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 26 janvier 2023, 21/01878


MINUTE N° 40/2083

























Copie exécutoire à



- Me Céline RICHARD



- la SELARL LEXAVOUE COLMAR





Le 26/01/2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 26 Janvier 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/01878 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HRYJ



Décision dé

férée à la cour : 12 mars 2021 par le tribunal judiciaire de COLMAR



APPELANTS et intimés sur incident :



Madame [Y] [J]

Monsieur [S] [I]

demeurant tous deux [Adresse 3]

[Localité 2]



représentés par Me Céline RICHARD, avocat à la cour.

Avocat pl...

MINUTE N° 40/2083

Copie exécutoire à

- Me Céline RICHARD

- la SELARL LEXAVOUE COLMAR

Le 26/01/2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 26 Janvier 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/01878 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HRYJ

Décision déférée à la cour : 12 mars 2021 par le tribunal judiciaire de COLMAR

APPELANTS et intimés sur incident :

Madame [Y] [J]

Monsieur [S] [I]

demeurant tous deux [Adresse 3]

[Localité 2]

représentés par Me Céline RICHARD, avocat à la cour.

Avocat plaidant : Me DIEUDONNE, avocat au barreau de Colmar

INTIMÉE et appelante sur incident :

Madame [O] [K]

[Adresse 3]

représentée par la SELARL LEXAVOUE COLMAR, avocat à la cour.

Avocat plaidant : Me PRADIGNAC, avocat au barreau de Colmar

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Novembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre, et Madame Myriam DENORT, chargés du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, conseiller

Madame Nathalie HERY, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Dominique DONATH faisant fonction

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, président et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Selon acte passé par-devant Maître Cian, notaire à Mulhouse en date du 12 octobre 2016, Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] ont vendu à Madame [O] [K] une maison de ville datant de 1830 située à [Localité 4] qu'eux-mêmes avaient achetée en 2011 avant de la rénover par leurs propres moyens.

Après cette vente, Mme [K] se plaignant de désordres, elle a saisi le juge des référés du tribunal de Colmar pour que soit ordonnée une expertise ; cependant le juge des référés l'a déboutée.

Mme [K] ayant interjeté appel de cette décision de rejet, la présente cour a infirmé la décision et ordonné une expertise, par un arrêt du 26 janvier 2018, qu'elle a confiée à Monsieur [M], architecte-expert.

L'expert a déposé un pré-rapport puis un rapport définitif le 5 juin 2018.

Le 18 décembre 2018 Madame [K] a saisi le tribunal de grande instance de Colmar, devenu tribunal judiciaire, sollicitant la résolution de la vente de l'immeuble et la condamnation solidaire de Monsieur [I] et de Madame [J] à lui payer un montant principal de 200 000 euros, outre les intérêts légaux à compter du 12 octobre 2016, et des sommes annexes de 18 200 euros au titre des droits d'enregistrement, 50 euros par mois correspondant à l'assurance crédit jusqu'au jour du règlement de la somme de 200 000 euros, 700 euros par mois au titre du trouble de jouissance jusqu'au jour du règlement du montant de 200 000 euros, 779,57 euros correspondant aux impôts fonciers 2016, 2017, 10 000 euros au titre des frais d'aménagement et de déménagement, 2 000 euros pour résistance abusive et mauvaise foi et 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La retranscription du jugement au livre foncier selon certaines conditions était également sollicitée.

Dans sa décision du 12 mars 2021, le tribunal judiciaire de Colmar, a :

- prononcé la résolution de la vente litigieuse sur le fondement de l'action rédhibitoire,

- ordonné la retranscription de la présente décision au service du livre foncier près le tribunal de proximité de Guebwiller,

- condamné solidairement Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] à restituer à Madame [O] [K] le prix de vente, à savoir 200 000 euros,

- condamné Madame [O] [K] à restituer à Monsieur [S] [I] et à Madame [Y] [J] le bien précité libre de toute inscription de son chef,

- dit que la retranscription pourra avoir lieu dès que le présent jugement sera devenu définitif et que les parties auront procédé à leurs obligations réciproques de paiement de prix et restitution des clés du bien immobilier et que cette retranscription se fera aux frais des consorts [F],

- condamné solidairement Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] à payer à Madame [O] [K], à titre de dommages et intérêts les sommes de ;

* 6 876 euros au titre des frais liés à la vente,

* 2 000 euros au titre du préjudice de jouissance ,

* 779,57 euros au titre des taxes foncières 2016, 2017 et 2018,

- condamné solidairement Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] à payer à Madame [O] [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens qui comprennent également les frais des différentes procédures de référé et la procédure préalable à hauteur de cour y compris d'expertise judiciaire.

Pour prononcer la résolution de la vente pour vices cachés, le premier juge a retenu qu'il résultait de l'expertise judiciaire que les consorts [I] et [J] avaient conçu et réalisé des travaux de rénovation intérieure d'importance, sans être professionnels du bâtiment, et en a déduit qu'ils devaient être qualifiés de vendeurs professionnels et de constructeurs au regard de l'article 1792-1 du code civil. Ils ne pouvaient en conséquence invoquer la clause de non-garantie des vices cachés contenue dans l'acte authentique de vente.

Le juge a estimé que les désordres constatés par l'expert judiciaire devaient être considérés comme des vices cachés de nature à permettre à Madame [K] de voir l'action rédhibitoire accueillie par la juridiction de sorte que la résolution de la vente devait être prononcée.

Les consorts [J] et [I] ont interjeté appel contre le jugement du 12 mars 2021.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les consorts [F] sollicitent l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, que Madame [K] soit déboutée de ses fins et conclusions et qu'elle soit condamnée aux frais et dépens des différentes procédures, outre 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les appelants soutiennent que la seule circonstance qu'ils aient réalisé des travaux d'aménagement, même d'ampleur, dans l'immeuble litigieux ne suffit pas à leur conférer la qualité de constructeurs au sens de l'article 1792-1 du code civil, ni a fortiori celle de vendeur professionnel réputé connaître les vices cachés pouvant affecter l'immeuble vendu.

Il résulterait du rapport d'expertise que les travaux d'aménagement qu'ils ont réalisés «ne touchaient pas la structure du bâtiment, ni les fondations, ni la charpente, ni la couverture et la zinguerie », et qu'hormis le remplacement des fenêtres de la cuisine et des combles (étrangères aux désordres litigieux), les autres « fenêtres avaient été conservées » (cf. rapport d'expertise, p. 6).

Ne relèveraient pas davantage du domaine de l'article 1792 du code civil les travaux de peinture de façade, ou encore l'installation d'une chaudière qui n'est qu'un simple élément d'équipement relevant de la garantie biennale de l'article 1792-3, tout comme le système de climatisation.

Les appelant avancent ainsi que la seule réalisation des travaux d'aménagement évoqués par l'expert ne leur conférait pas la qualité de constructeur au sens de l'article 1792-1 du code civil ni celle de vendeur professionnel, pour l'application de la garantie des vices cachés de l'article 1641 du code civil.

Ne pouvant être appréhendés comme des constructeurs ou des vendeurs professionnels, pour retenir leurs responsabilités il conviendrait de démontrer qu'ils ont été de mauvaise foi. Cette preuve ne serait, à leur sens, pas rapportée de sorte que la clause de non garantie devait être appliquée à leur profit.

Concernant les désordres invoqués par Mme [K], les consorts [I] et [J] estiment qu'ils ne sont en tout état de cause pas avérés ; et même si la juridiction estimait que ces désordres existent, il y aurait lieu de constater qu'ils étaient apparents lors de la vente, ou encore non susceptibles de justifier la résolution de la vente.

Ils précisent, s'agissant :

- du soubassement, que les cloques, traces de salpêtres et remontées d'humidité sont anciennes et étaient visibles au moment de la vente,

- de la porte d'entrée, que les caractéristiques de celle-ci étaient apparentes (section du bois, simple feuillure, simple joint),

- de l'ossature bois, que l'expert indique que « l'aspect visuel des éléments de charpente est tout à fait habituel sur ce type de construction» et retient que les attaques d'insectes étaient superficielles ; on ne pourrait alors retenir l'existence d'un vice caché,

- de l'évacuation des fumées des poêles, le non-respect d'une norme qui n'est rendue obligatoire ni par la loi ni par le contrat ne peut donner lieu à une indemnisation au titre d'une mise en conformité,

- de l'implantation du conduit de fumée à côté du tableau électrique, que l'installation a été réalisée par un professionnel et était en tout état de cause visible,

- de l'installation sanitaire, que Monsieur [I] n'a pas modifié la situation de ventilation existante, ayant juste remis en état la plomberie intérieure ; la ventilation étant apparente sur la photographie du rapport, côté cuisine (cf. rapport, page 18/29) elle ne peut être qualifiée de vice caché ; quant à l'absence de fixation des tuyaux au mur, là encore elle était tout à fait visible,

- de l'absence de ventilation mécanique dans la salle de bain, elle était visible lors de l'acquisition,

- de la climatisation, qu'il n'est nullement démontré que le grief de l'expert selon lequel son installation ne permettait pas des prises et des sorties d'air suffisantes à son bon fonctionnement, est avéré.

D'autre part les appelants estiment qu'à ce jour, soit plus de quatre ans après la vente, il n'est pas démontré que les désordres dénoncés ont été évolutifs.

À la connaissance des défendeurs, Madame [K] a cessé, depuis plusieurs mois, d'habiter l'immeuble pour des motifs totalement étrangers à la présente procédure, l'intimée leur faisant ce procès car elle aurait changé d'avis et ne souhaiterait plus rester dans cette maison.

Etant donné que l'acquéreur n'a formulé qu'une demande à titre rédhibitoire, et que celle-ci est vouée à l'échec du fait de l'absence de la preuve de ce que l'ouvrage est affecté de vices le rendant impropre à sa destination (l'expert judiciaire relevant que les désordres relevés ne compromettaient pas la solidité et n'affectaient pas les éléments de clos couvert, le tribunal ayant indiqué en outre que ces désordres pourraient être réparés), le jugement entrepris ne pouvait, sans se contredire, faire droit à la demande de résolution au regard de la seule accumulation de certains vices qui peuvent être repris pour un coût raisonnable.

Enfin, sur la question de l'indemnisation octroyée à Mme [K] en première instance, les consorts [I] et [J] indiquent que :

- Mme [K] ne justifierait pas du prétendu trouble de jouissance, l'immeuble n'étant pas impropre à son usage, l'intimée l'ayant, en tout état de cause, quitté pour des raisons étrangères aux désordres allégués (une mutation professionnelle),

- il n'était pas possible de faire droit aux demandes de Mme [K] relatives aux frais présentés comme accessoires à la vente, car les dommages accessoires qui étaient réclamés (impôts fonciers, assurance-crédit) étaient des montants nécessairement exposés par la propriétaire des lieux, sans lien avec la vente.

* * *

Mme [K], dans ses dernières écritures datées et notifiées par RPVA le 27 septembre 2021 conclut :

a) sur l'appel principal au débouté des consorts [I] et [J] de l'intégralité de leurs fins, moyens et conclusions et à la confirmation du jugement du 12 mars 2021 en ce qu'il a :

- prononcé la résolution de la vente litigieuse sur le fondement de l'action rédhibitoire,

- ordonné la retranscription de la présente décision au service du livre foncier près le tribunal de proximité de Guebwiller,

- condamné solidairement Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] à restituer à Madame [O] [K] le prix de vente, à savoir 200 000 euros,

- condamné Madame [O] [K] à restituer à Monsieur [S] [I] et à Madame [Y] [J] le bien précité situé [Adresse 1], libre de toute inscription de son chef,

- dit que la retranscription pourra avoir lieu dès que le présent jugement sera devenu définitif et que les parties auront procédé à leurs obligations réciproques de paiement de prix et restitution des clés du bien immobilier et que cette retranscription se fera aux frais des consorts [F],

- condamné solidairement Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] à payer à Madame [O] [K], à titre de dommages et intérêts les sommes de ;

* 6 876 euros au titre des frais liés à la vente

* 2 000 euros au titre du préjudice de jouissance

* 779,57 euros au titre des taxes foncières 2016, 2017 et 2018

- condamné solidairement Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] à payer à Madame [O] [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens qui comprennent également les frais des différentes procédures de référé et la procédure préalable à hauteur de cour y compris d'expertise judiciaire.

b) sur appel incident, à l'infirmation du jugement en ce qu'il a limité la condamnation de Monsieur [S] [I] et de Madame [Y] [J] à lui payer, à titre de dommages et intérêts les sommes de 6 876 euros au titre des frais liés à la vente, 2 000 euros au titre du préjudice de jouissance et 779,57 euros au titre des taxes foncières.

Statuant à nouveau dans cette limite elle réclame la condamnation solidaire de Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] à lui payer à titre de dommages et intérêts les sommes de :

* 18 200 euros pour les droits d'enregistrement et émoluments de notaire, outre les intérêts légaux à compter du 12 octobre 2016,

* 10 000 euros au titre des frais d'aménagement et de déménagement, outre les intérêts légaux à compter de la décision à intervenir,

* 2 000 euros pour résistance abusive et mauvaise foi, avec les intérêts légaux à compter de la décision à intervenir,

* au titre des impôts fonciers, 76,57 euros pour l'année 2016, 350 euros pour l'année 2017, 353 euros pour l'année 2018, 356 euros pour l'année 2019, 359 euros pour l'année 2020, 362 euros pour l'année 2021,

* au titre du trouble de jouissance, 700 euros par mois du 12 octobre 2016 au jour du règlement du montant de 200 000 euros, outre les intérêts légaux à compter de la décision à intervenir,

* 50 euros par mois à compter du mois d'octobre 2016 correspondant à l'assurance crédit jusqu'au jour du règlement de la somme de 200 000 euros, outre les intérêts légaux à compter de la décision à intervenir,

* 2000 euros au titre de l'expertise privée [D] et 1 080 euros au titre de l'expertise privée de Monsieur [R], outre les intérêts légaux à compter de la décision à intervenir,

* 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

L'intimée expose que l'expert judiciaire et les deux experts privés qui ont eu à visiter la maison, ont indiqué que celle-ci comportait de nombreux vices qui lui ont été cachés lorsqu'elle a acquis le bien.

Ils résidaient dans un soubassement humide, une porte d'entrée qui était déformée et laissait passer le froid, des problèmes au niveau de l'ossature bois présentant des fissures et un aspect vermoulu dus aux attaques d'insectes xylophages, des tuyaux d'évacuation des fumées des poêles dans la cage d'escalier et aux différents étages qui présentaient des dévoiements multiples contraires au DTU en la matière rendant difficiles, voire impossibles, les opérations de ramonage, des installations sanitaires ne respectant pas les règles de l'art, une absence de bouche de ventilation dans la cuisine, une absence de grille d'air sur les fenêtres ce qui augmenterait le risque d'accumulation d'air au niveau du pare-vapeur de l'isolation des murs extérieurs et la condensation dans l'isolation, une installation du système de climatisation ne permettant pas des prises et des sorties d'air suffisantes au bon fonctionnement du système.

L'intimé indiquait que l'expert avait :

- insisté sur le caractère évolutif de tous ces désordres qui allaient entraîner une présence d'humidité dans les murs, un manque de circulation d'air neuf, une condensation dans l'isolant avec décollement de crépi, des dégradations des éléments en bois en contact avec l'humidité et de manière générale une détérioration de l'ouvrage,

- conseillé de confier une étude approfondie à un homme de l'art pour la reprise totale des désordres pour trouver une solution à la problématique de l'humidité dans sa globalité,

- énuméré tous les travaux qu'il faut envisager dans leur globalité (barrière anti-humidité, mise en place d'un crépi minéral, mise en place d'une VMC, reprise du chauffage, déplacement des poêles, remise aux normes des conduits de fumées, repositionnement de la climatisation, mise en place de chatières pour la ventilation de la toiture, mise en place de ventilation des chutes d'eaux usées, etc').

- noté en page 28 de son rapport, qu'il faut une reprise complète de l'installation électrique, avec passage d'un consuel et la mise en place d'une VMC.

Dans ce contexte, l'intimée estime :

- que les consorts [I] et [J] ayant procédé à d'importants travaux de rénovation de chauffage ' électricité ' sanitaire et autres, ont acquis la qualité de constructeurs au sens des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil, comme le premier juge l'a d'ailleurs dit,

- que l'immense majorité des désordres (chauffage, climatisation, ventilation) était connue des appelants qui ont habité cet immeuble pendant 5 ans,

- être en droit d'obtenir la résolution de la vente et la restitution du prix de vente au terme de l'action rédhibitoire de l'article 1644 du code civil,

- en application des dispositions des articles 1644, 1645 et 1646-1 du code civil, les appelants en tant que constructeurs doivent être considérés comme étant de mauvaise foi au sens des articles 1641 à 1649 du code civil et rembourser à Madame [K] tous les frais qu'elle a engagés dans le cadre de cette opération immobilière soit

* le prix d'acquisition de 200 000,00 euros

* les droits d'enregistrement, les frais et émoluments du notaire (pages 5 à 7 de l'acte de vente) de 18 200,00 euros

* le coût de l'assurance crédit de 50,00 euros jusqu'au remboursement du prix de la maison * les impôts fonciers 2016 (prorata) 76,57 euros

*les impôts fonciers 2017 350,00 euros

*les impôts fonciers 2018 353,00 euros

*les impôts fonciers 2019 356,00 euros

*les impôts fonciers 2020 359,00 euros

*les impôts fonciers 2021 362,00 euros

- subir un important trouble de jouissance pour vivre depuis l'acquisition de la maison en octobre 2016, dans une maison malsaine, humide, difficile à chauffer ou à climatiser, dangereuse, et être en droit d'obtenir indemnisation de son trouble qui peut être chiffré à 700,00 euros par mois,

- pouvoir obtenir le remboursement des frais engagés à l'occasion de la réalisation des expertises privées [D] (coût 2 200,00 euros) et [R] (1 080,00 euros).

Sur ce

1) Sur la question de l'application de la clause de non garantie prévue à l'acte de vente

L'acte authentique de vente du 12 octobre 2016 par lequel Madame [K] se portait acquéreur de la maison litigieuse, comporte une clause d'exclusion de garantie des vices cachés qui précise que cette exonération de garantie ne s'applique pas si le vendeur a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel.

Il résulte des débats et plus particulièrement de l'expertise judiciaire, que les appelants ont conçu et réalisé d'importants travaux de rénovation intérieure, mis à part l'installation électrique.

Même s'il est établi que ces travaux n'ont pas touché la structure du bâtiment, les fondations, la charpente, la couverture et la zinguerie, l'importance de ces travaux menés par eux-mêmes (remplacement des fenêtres de la cuisine et des combles, pose de VELUX, reprise de crépi du soubassement de la façade, isolation et doublage des murs et de la toiture, travaux de plomberie et de sanitaires avec équipement, mise en place d'un climatiseur réversible et de deux poêles à pellets, mise en place d'une VMC dans la salle d'eau, pose de parquet et de menuiserie intérieure, travaux de peinture et revêtements muraux, équipement de la cuisine), est telle que les consorts [F] doivent être considérés comme des constructeurs au sens de l'article 1792'1 du Code civil.

En effet, il y a lieu de rappeler que c'est tout l'aménagement intérieur qui a été refait par leurs soins, et de préciser que la Cour de cassation a estimé qu'une personne posant un poêle simple à bois dans sa propre maison doit d'être considéré comme un maître d''uvre et donc assimilé à un constructeur.

Il s'évince de ces développements que les appelants ne peuvent bénéficier de la clause de non garantie.

2) Sur l'action rédhibitoire menée par Madame [K]

Madame [O] [K], en application de l'article 1644 du code civil, a choisi de recourir à l'action rédhibitoire et sollicite de voir prononcer la résolution de la vente.

L'article 1644 précise que dans le cas des articles 1641 et 1643 du code civil, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

L'article 1641 du même code prévoit que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.

Il est donc nécessaire, pour permettre l'application de cet article, de démontrer d'une part que les vices étaient dissimulés au moment de la vente, et d'autre part qu'ils étaient tels qu'ils rendent la maison impropre à l'usage auquel on la destine ou qui en diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise au prix convenu.

Si le premier juge a repris les désordres constatés par l'expert, en revanche il n'a pas suffisamment étudié leur caractère dissimulé ou non.

La cour constate que la plupart des désordres qui ont été énumérés par l'expert ne présentent pas un caractère dissimulé ; ainsi en est-il :

- des remontées d'humidité présentes au niveau du soubassement, l'expert ayant précisé que tous les immeubles voisins souffraient du même phénomène,

' des caractéristiques défaillantes de la porte d'entrée, en ce sens que la simple feuillure de la fenêtre, son jointement insuffisant, et sa conception, étaient apparents,

' de l'ossature bois présentant des attaques d'insectes, en ce sens qu'il s'agit là des poutres apparentes dans des pièces de vie,

' des conduits d'évacuation des fumées des poêles et de l'implantation de ces derniers notamment à proximité d'un tableau électrique,

' de l'absence d'une ventilation mécanique dans la salle de bain et du défaut de tenue des tuyaux non fixés au mur.

Seuls les désordres concernant la non ventilation de la toiture découlant du fait que l'isolation a été posée sans prévoir de circulation d'air, la climatisation installée au sous-sol qui ne disposait pas d'une entrée et sortie d'air suffisantes, ou l'absence de ventilation de la cuisine, peuvent être considérés comme des vices cachés.

Or ces seuls vices ne sont pas de nature à rendre impropre la maison à l'usage auquel on la destine.

L'expert avait noté que ces désordres pouvaient avoir un effet évolutif négatif sur la maison, comme étant de nature à favoriser l'installation d'une certaine humidité. Cependant, l'expert a utilisé le conditionnel, ce qui veut dire qu'il a émis simplement une hypothèse.

En revanche l'expert judiciaire a relevé que les désordres ne compromettent pas la solidité du bâti et n'affectent pas les éléments de clos couvert. Il ressort de ces propos que tous les désordres peuvent être réparés aisément, par la solidarisation au mur des tuyaux d'évacuation d'eau dans la salle de bain, la mise en place d'une VMC, le déplacement des poêles à pellets avec rectification du chemin des tuyaux d'évacuation des fumées, la mise en place de chatières sur la toiture pour permettre une ventilation entre celle-ci et l'isolation, et le déplacement du climatiseur.

Il est rappelé que les observations de l'expert portant sur les questions électriques ne concernent pas la responsabilité des appelants.

L'intimée ne démontre pas que les désordres invoqués sont suffisants pour caractériser une atteinte à l'usage normal de sa maison, celle-ci ne produisant aucun élément de preuve de nature à démontrer que le risque « d'installation d'une certaine humidité » évoqué par l'expert se soit réalisé, en sachant que depuis l'assignation en justice des appelants en décembre 2018 près de quatre années se sont écoulées.

Dans ces conditions, son action rédhibitoire fondée sur les articles 1641 et 1644 du code civil ne peut qu'être rejetée.

Le jugement de première instance sera corrélativement infirmé en son intégralité. L'appel incident formé par Madame [K] étant corrélativement rejeté, puisqu'il ne

peut y avoir d'indemnisation sur le fondement de l'article 1644 du code civil si l'action de base prévue par l'article 1641 du code civil a été rejetée, ce qui est le cas en l'espèce.

3) sur les demandes annexes

Madame [K], partie succombante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel comprenant notamment des coûts de l'expertise judiciaire.

Elle sera en outre condamnée à verser une somme de 2 500 € au profit des consorts [I] - [J] au titre des frais irrépétibles que ces derniers ont engagés à l'occasion de la première instance et de la procédure d'appel. Corrélativement la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile émanant de Madame [K], sera écartée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :

INFIRME le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Colmar le 12 mars 2021, en toutes ses dispositions,

Statuant de nouveau et y ajoutant :

DEBOUTE Madame [O] [K] de ses demandes ;

CONDAMNE Madame [O] [K] aux dépens des deux instances comprenant notamment les frais d'expertise,

CONDAMNE Madame [O] [K] a payer à Monsieur [S] [I] et Madame [Y] [J] une somme de 2500 € (deux mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de Mme [K] fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/01878
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;21.01878 ?
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