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20/01/2023 | FRANCE | N°21/01124

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 20 janvier 2023, 21/01124


MINUTE N° 24/2023





























Copie exécutoire à



- Me Julie HOHMATTER



- Me Claus WIESEL





Le 20/01/2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 20 Janvier 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/01124 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HQOQ


>Décision déférée à la cour : 11 Février 2021 par le juge de la mise en état de STRASBOURG





APPELANT :



Monsieur [G] [I]

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Julie HOHMATTER, avocat à la cour.





INTIMÉE :



L'Association CAUTIONNEMENT MUTUEL DE L'HABITAT -...

MINUTE N° 24/2023

Copie exécutoire à

- Me Julie HOHMATTER

- Me Claus WIESEL

Le 20/01/2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 20 Janvier 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/01124 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HQOQ

Décision déférée à la cour : 11 Février 2021 par le juge de la mise en état de STRASBOURG

APPELANT :

Monsieur [G] [I]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Julie HOHMATTER, avocat à la cour.

INTIMÉE :

L'Association CAUTIONNEMENT MUTUEL DE L'HABITAT - CMH prise en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 2]

représentée par Me Claus WIESEL, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 octobre 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Mme Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 12 décembre 1994, la Banque populaire de la région économique de [Localité 3] a consenti a M. [G] [I] un prêt immobilier d'un montant en principal de 76 126,55 euros pour le financement de l'acquisition en l'état futur d'achèvement de deux studios à Strasbourg. Cet emprunt était garanti par un engagement de caution de l'association coopérative le Cautionnement Mutuel de l'Habitat.

M. [I] n'ayant pas honoré les échéances du prêt, la Banque populaire a prononcé la déchéance du terme, le 15 novembre 2002, et a fait jouer la garantie consentie par le Cautionnement Mutuel de l'Habitat qui lui a réglé un montant total de 45 753,63 euros.

Par jugement du 18 novembre 2002, le tribunal de grande instance Strasbourg a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de M. [I]. Le Cautionnement Mutuel de l'Habitat a déclaré sa créance, le 10 décembre 2002, à hauteur du montant précité.

Par jugement du 20 janvier 2003, le tribunal a prononcé la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire. La procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif le 26 mars 2012.

Le Cautionnement Mutuel de l'Habitat a repris les poursuites contre M. [I] et par jugement du 17 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Strasbourg a fait droit à sa demande condamnant M. [I] à lui payer la somme de 45 753,63 euros, outre intérêts. Cette décision est entrée en force de chose jugée.

Le 8 janvier 2018 M. [I] a été admis au bénéfice d'une procédure de liquidation judiciaire simplifiée. Le Cautionnement Mutuel de l'Habitat a déclaré sa créance à hauteur de 82 266,23 euros, le 14 février 2018. La procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif le 25 juin 2018. La créance du Cautionnement Mutuel de l'Habitat n'ayant pas été apurée, un certificat d'irrecouvrabilité a été établi le 10 juillet 2018 par le liquidateur judiciaire.

Selon exploit du 31 octobre 2019, le Cautionnement Mutuel de l'Habitat a assigné M. [I] devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 45 753,63 euros, outre intérêts au taux de 12 % l'an à compter du 26 mars 2012 avec capitalisation.

M. [I] a saisi le juge de la mise en état, le 6 février 2020, d'une demande tendant à voir dire et juger que le tribunal de grande instance de Strasbourg était incompétent pour connaître de la demande qui relevait de la compétence du président du tribunal ayant ouvert la procédure collective, et à voir déclarer la demande irrecevable.

Par ordonnance du 11 février 2021, le juge de la mise en état a rejeté la demande d'irrecevabilité.

Il a rappelé que selon les articles L.643-11 et R. 643-20 du code de commerce en cas de clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, les co-obligés qui ont payé à la place du débiteur recouvrent, par exception, leur droit de poursuite individuelle, sous certaines conditions.

Il a considéré qu'en application de ces textes le créancier qui dispose d'un titre exécutoire devait saisir le président du tribunal qui a ouvert la procédure collective, sur requête, lorsque sa créance a été admise, et que par contre les créanciers qui recouvraient l'exercice individuel de leurs actions dont les créances n'avaient pas été vérifiées pouvaient les mettre en oeuvre conformément au droit commun.

Le juge de la mise en état a relevé que la créance du Cautionnement Mutuel de l'Habitat n'avait pas été vérifiée dans le cadre de la liquidation judiciaire simplifiée et en a déduit, que la créance n'ayant pas été admise, la reprise de la procédure devait se faire selon les règles de droit commun par voie d'assignation.

M. [I] a interjeté appel de cette décision le 22 février 2021.

Par arrêt avant dire droit du 29 octobre 2021, la cour a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à s'expliquer sur la fin de non-recevoir soulevée d'office du défaut de pouvoir juridictionnel du juge de la mise en état pour connaître de la demande s'analysant en des fins de non-recevoir.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 6 septembre 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par conclusions transmises par voie électronique le 31 janvier 2022, M. [I] demande à la cour de constater, dire et juger qu'il relève des pouvoirs du juge de la mise en état et de la cour d'appel exerçant ces pouvoirs de connaître de la fin de non-recevoir soulevée tirée de l'autorité de chose jugée, d'infirmer l'ordonnance entreprise et de :

- constater, dire et juger que la demande formée par le Cautionnement Mutuel de l'Habitat a été portée devant une juridiction incompétente pour en connaître,

- constater, dire et juger que la demande formée par le Cautionnement Mutuel de l'Habitat se heurte à l'autorité de chose jugée,

par conséquent,

- déclarer le tribunal judiciaire de Strasbourg incompétent pour connaître du litige et inviter le Cautionnement Mutuel de l'Habitat à saisir le président de la chambre des procédures collectives non commerciales du tribunal judiciaire de Strasbourg,

- déclarer irrecevable la demande du Cautionnement Mutuel de l'Habitat,

- le condamner au paiement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que l'article 55, I du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile prévoit que le décret entrera en vigueur le 1er janvier 2020 et qu'il est applicable aux procédures en cours, sous réserve de certaines exceptions dont ne fait pas partie l'article 4 du décret ayant modifié l'article 771, de sorte c'est bien l'article 789 dans sa version issue du décret qui est applicable, et qu'en vertu du 6° de ce texte, la fin de non-recevoir soulevée par M. [I] relève bien des pouvoirs du juge de la mise en état et donc de la cour.

Il soutient par ailleurs que, selon l'article L.643-11 du code de commerce, le Cautionnement Mutuel de l'Habitat qui disposait d'un titre exécutoire à son encontre devait, pour reprendre les poursuites individuelles, saisir le président du tribunal de la procédure collective aux fins d'obtenir une ordonnance constatant son droit. Il se prévaut à cet égard de la jurisprudence de la Cour de cassation qui a déjà

jugé, dans une hypothèse similaire, que l'assignation devant le juge de droit commun était irrecevable comme se heurtant à l'autorité de chose jugée de la décision ayant condamné le débiteur au paiement.

Il ajoute que, lorsque le créancier dispose d'un titre, aucune condition relative à la vérification des créances n'est posée pour permettre la reprise des poursuites individuelles et que la juridiction de droit commun ne peut en autoriser la reprise, seul le président du tribunal de la procédure collective pouvant vérifier que les conditions de la reprise sont réunies. Il considère que l'article L.643-11 V du code de commerce ne concerne que les créanciers dont la créance n'a pas été admise qui ne disposent pas déjà d'un titre exécutoire.

Par conclusions transmises le 11 mai 2021, le Cautionnement Mutuel de l'Habitat demande la confirmation de l'ordonnance querellée, le rejet des demandes de M. [I] ainsi que sa condamnation au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir qu'il ne peut rapporter la preuve d'un fait négatif, à savoir l'absence de vérification de sa créance, laquelle découle en tout état de cause de la nature de la procédure, s'agissant d'une liquidation judiciaire simplifiée, dans le cadre de laquelle seules les créances venant en rang utile sont vérifiées, or sa créance est de nature chirographaire.

Il fait siens les motifs du premier juge et considère qu'en l'absence de vérification de sa créance, la reprise des poursuites doit se faire conformément au droit commun par assignation.

Il n'a pas conclu à nouveau suite à l'arrêt avant dire droit.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.

MOTIFS

Ainsi que l'a relevé la cour dans son arrêt avant dire droit, les demandes dont était saisi le juge de la mise en état, qui sont reprises devant la cour, tendaient d'une part à voir dire et juger que le tribunal de grande instance (désormais tribunal judiciaire) était 'incompétent', en réalité dépourvu du pouvoir juridictionnel pour connaître de la demande qui relèverait de la compétence du président du tribunal ayant ouvert la procédure collective, d'autre part à constater l'autorité de chose jugée du jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg du 17 décembre 2015.

L'un et l'autre de ces moyens tendant à voir déclarer les demandes du Cautionnement Mutuel de l'Habitat irrecevables, la cour qui exerce les pouvoirs du juge de la mise en état n'est pas saisie d'exceptions de procédure mais de fins de non-recevoir.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, conformément à l'article 55 II du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, l'article 789 6° du code de procédure civile, qui dans sa rédaction issue de ce décret donne compétence au juge de la mise en état pour connaître des fins de non-recevoir, n'est applicable qu'aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020.

Par voie de conséquence, la procédure ayant été introduite en première instance par assignation du 31 octobre 2019, les fins de non-recevoir soulevées ne relevaient pas, en application de l'article 771 ancien du code de procédure civile applicable au litige, des pouvoirs du juge de la mise en état, seul le tribunal étant compétent pour en connaître.

Il convient donc d'infirmer l'ordonnance entreprise de déclarer la demande de M. [I] irrecevable pour défaut de pouvoir juridictionnel du juge de la mise en état pour en connaître.

En considération de la solution du litige, chacune des parties conservera la charge des dépens qu'elle a exposés en cause d'appel et les demandes réciproques sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

INFIRME l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 11 février 2021 ;

Statuant à nouveau et ajoutant à l'ordonnance entreprise,

DECLARE irrecevable la demande de M. [I] pour défaut de pouvoir juridictionnel du juge de la mise en état pour en connaître ;

REJETTE les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE chacune des parties à supporter ses propres dépens d'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/01124
Date de la décision : 20/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-20;21.01124 ?
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