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11/01/2023 | FRANCE | N°22/00078

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 20, 11 janvier 2023, 22/00078


n° minute : 6/2023









































Copie exécutoire à :







- Me Noémie BRUNNER





- Me Loïc RENAUD







Le 11 janvier 2023







La Greffière,



RÉPUBLIQUE FRANCAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE COLMAR



CHAMBRE DES URGENCES





ORDONNANCE DE RÉ

FÉRÉ







N° RG 22/00078 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H5CC



mise à disposition le 11 Janvier 2023









Dans l'affaire opposant :





M. [X] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représenté par Me Noémie BRUNNER, Avocate à la cour





- partie demanderesse au référé -









S.A.S. OVALIE

prise en la personne de son représentant légal

[...

n° minute : 6/2023

Copie exécutoire à :

- Me Noémie BRUNNER

- Me Loïc RENAUD

Le 11 janvier 2023

La Greffière,

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE DES URGENCES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

N° RG 22/00078 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H5CC

mise à disposition le 11 Janvier 2023

Dans l'affaire opposant :

M. [X] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Noémie BRUNNER, Avocate à la cour

- partie demanderesse au référé -

S.A.S. OVALIE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Loïc RENAUD, Avocat à la cour

- partie défenderesse au référé -

Nous, Pascale BLIND, présidente de chambre à la cour d'appel de Colmar, agissant sur délégation de Madame la première présidente, assistée lors des débats et de la mise à disposition de la décision de Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffière, après avoir entendu, en notre audience publique de référé du 23 Novembre 2022, les avocats des parties en leurs conclusions et observations et avoir indiqué qu'une décision serait rendue ce jour, statuons publiquement, par mise à disposition d'une ordonnance contradictoire, comme suit :

Par jugement réputé contradictoire du 5 avril 2022, le tribunal judiciaire de Strasbourg a condamné Monsieur [X] [Y] à verser à la SAS Ovalie une somme en principal de 24 951,70 euros, augmentée d'un intérêt égal au taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne majoré de 10 points, avec capitalisation des intérêts, ainsi qu'une somme de 3 742,75 euros, à titre de pénalité contractuelle, et une indemnité de 1 909 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile. Par ailleurs, le tribunal a rappelé que la décision est de droit exécutoire par provision.

Monsieur [Y] a interjeté appel de ce jugement, par déclaration du 12 mai 2022.

Par acte délivré le 19 août 2022, suivi de conclusions du 25 octobre 2022 et du 15 novembre 2022, il a fait assigner en référé devant le premier président de la cour d'appel de Colmar la SAS Ovalie, sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile, aux fins d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire, le rejet de la demande de consignation de la société Ovalie, la condamnation de cette dernière aux dépens ainsi qu'à lui verser la somme de 3 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de son assignation et des conclusions susvisées, soutenues à l'audience, Monsieur [Y] expose qu'il dirigeait une société par actions simplifiée unipersonnelle ayant pour activité le nettoyage des bâtiments et nettoyage industriel, dénommée Monsieur Nettoie Tout, qui avait conclu avec la société Ovalie, agence de travail temporaire, divers contrats de mise à disposition de salariés. Il explique que l'activité de la société Monsieur Nettoie Tout, qui reposait pour l'essentiel sur l'industrie de son dirigeant, avait cessé en raison de ses problèmes de santé survenus durant l'année 2021.

Il fait valoir qu'il dispose de moyens sérieux d'annulation ou de réformation du jugement qui le condamne au paiement de différentes factures émises par la société Ovalie dès lors qu'il n'était pas le cocontractant de cette dernière, seule la société Monsieur Nettoie Tout étant engagée par les contrats.

Il relève que le nouvel argument de la société Ovalie selon lequel il serait engagé en tant que liquidateur amiable de la société Monsieur Nettoie Tout est inopérant puisqu'au moment de l'assignation en première instance, la défenderesse n'avait aucunement connaissance de la dissolution amiable et n'avait d'ailleurs aucunement invoqué ce fondement. Il ajoute que la reconnaissance de sa responsabilité, ès-qualités de liquidateur amiable, suppose la mise en 'uvre préalable d'une action en responsabilité conforme à la réalité juridique et au fondement d'une telle action et rappelle qu'elle n'aurait pu aboutir qu'à la réparation du préjudice résultant des fautes du liquidateur, s'analysant en une perte de chance de voir les créances réglées.

Subsidiairement, Monsieur [Y] soutient que les montants mis en compte par la société Ovalie sont injustifiés et que la défenderesse ne rapporte nullement la preuve de la transmission de ses factures à la société Monsieur Nettoie Tout.

Sur les conséquences manifestement excessives, le demandeur invoque la modicité de ses revenus et l'importance de ses charges. Il s'oppose à la demande de consignation.

Aux termes de ses écritures en date des 17 octobre 2022, 14 novembre 2022 et 21 novembre 2022, reprises à l'audience, la société Ovalie conclut à l'irrecevabilité de la demande, à son rejet, et à titre reconventionnel sollicite la consignation du montant des condamnations prononcées à l'encontre de Monsieur [X] [Y] auprès de la CARPA de Colmar, avec désignation du président de la CARPA de Colmar en qualité de séquestre jusqu'à ce que la cour d'appel de Colmar se prononce sur l'appel formalisé par Monsieur [Y]. Elle réclame par ailleurs la condamnation de Monsieur [Y] aux dépens ainsi qu'au paiement d'un montant de 2 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La défenderesse explique qu'elle a mis à la disposition de la SASU Monsieur Nettoie Tout, dont Monsieur [X] [Y] était le gérant, 34 salariés intérimaires et qu'elle a été amenée à établir différentes factures sur la base des décomptes des heures de travail, restées impayées.

Elle expose que la SASU Monsieur Nettoie Tout a fait l'objet d'une dissolution amiable avec effet au 30 juin 2021 et que l'assemblée générale extraordinaire des associés a décidé dès le 16 juin 2021 de prononcer la clôture de la liquidation et de donner quitus de sa gestion à Monsieur [Y] à cette date.

Elle rappelle que le fait d'avoir procédé à la dissolution de la société sans que le passif social n'ait été apuré constitue un comportement fautif du liquidateur, de nature à engager sa responsabilité.

Elle assure que les demandes en première instance ont bien été dirigées contre Monsieur [X] [Y] au titre de ses manquements en sa qualité de liquidateur amiable de la société Monsieur Nettoie Tout et précise avoir indiqué devant le juge de première instance que Monsieur [Y] avait commis une faute en sa qualité de liquidateur amiable.

Par ailleurs, la société Ovalie fait valoir que les contrats de mise à disposition litigieux ont été signés par Monsieur [Y] pour la société Monsieur Nettoie Tout, de même que les relevés d'heure des 34 salariés mis à disposition et que de plus Monsieur [Y] avait émis quatre chèques non provisionnés, en vue de régler les créances de la société Ovalie de sorte qu'il est malvenu de contester à présent leur existence.

Sur les conséquences manifestement excessives, la SAS Ovalie relève que Monsieur [Y] ne justifie pas suffisamment de sa situation patrimoniale et financière alors qu'il lui revient d'établir qu'il est dans l'impossibilité de régler en une seule fois la somme due en vertu de l'exécution provisoire. Elle souligne que l'intéressé est propriétaire de son immeuble d'habitation, de sorte qu'il dispose, ce seul fait, de moyens financiers suffisants pour s'acquitter de sa dette.

Reconventionnellement, elle sollicite que Monsieur [Y] procède à la consignation des montants dus au motif que si le premier président venait à prononcer l'arrêt de l'exécution provisoire, il serait grandement probable qu'elle ne puisse pas recouvrer les montants devant lui revenir.

SUR CE

L'instance devant le tribunal judiciaire de Strasbourg ayant été introduite postérieurement au 1er janvier 2020, il convient d'une part de constater que la décision de première instance est de droit exécutoire à titre provisoire et d'autre part de faire application de l'article 514-3 du code de procédure civile, tel qu'issu du décret n° 2019 -1333 du 11 décembre 2019.

Aux termes de cet article, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de droit de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Ces deux conditions sont cumulatives.

Il résulte du jugement du 5 avril 2022 que l'assignation délivrée à la requête de la SAS Ovalie a été dirigée à l'encontre de Monsieur [X] [Y], sans que ne soit visée sa qualité de liquidateur de la société Monsieur Nettoie Tout, qu'elle tendait à titre principal, à faire constater « que le défendeur n'a pas procédé au versement, à leur date d'exigibilité, du montant des factures dont il est redevable envers elle », et que le tribunal a fait droit à cette demande en considérant qu'il résultait des pièces produites par la demanderesse, notamment les contrats de mise à disposition, les bons de relevés d'heures et factures, que le défendeur restait lui devoir un montant en principal de 24 951,70 euros, outre intérêts, et 3 742,75 euros, à titre de pénalité contractuellement prévue.

Le cocontractant de la SAS Ovalie étant la société Monsieur Nettoie Tout et non Monsieur [X] [Y] à titre personnel, le moyen d'infirmation selon lequel ce dernier ne pouvait être condamné, à titre personnel, au paiement des factures et pénalités résultant des contrats de mise à disposition, alors que seule la SASU Monsieur Nettoie Tout était engagée par ces contrats, apparaît suffisamment sérieux.

Sur les conséquences manifestement excessives liées à l'exécution provisoire, Monsieur [Y] fait valoir que sa modique rémunération ne lui permet pas de s'acquitter des montants dus, qu'il a la charge de trois enfants et rencontre des problèmes de santé, et que s'il est propriétaire avec son épouse d'un appartement, le bien est en cours de financement, et la vente non réalisable actuellement entraînerait en tout état de cause des conséquences manifestement excessives, s'agissant de sa résidence principale.

Selon le commandement aux fins de saisie-vente délivré le 27 avril 2022 à l'encontre de Monsieur [Y], et l'avis d'ouverture forcée des portes de son domicile du 7 juillet 2022, les montants dus en vertu de la condamnation s'élèvent à 34 000 euros.

Il résulte des pièces produites que Monsieur [Y] occupe depuis le 1er juin 2021 un emploi salarié et que sa rémunération avoisine 1 200 euros.

Les documents médicaux versés aux débats confirment que sa situation est fragile compte tenu de ses problèmes de santé récurrents, aboutissant régulièrement à des hospitalisations.

Les revenus professionnels de son épouse sont équivalents ainsi qu'il résulte de l'avis d'impôt établi en 2022.

D'autre part, au vu des parts retenues dans les avis d'imposition, le couple a la charge de deux enfants.

Quant au patrimoine immobilier, il y a lieu de relever que selon l'extrait de la copie du livre foncier, l'appartement dont Monsieur [Y] est propriétaire avec son épouse, abritant la résidence de la famille, est grevé d'une hypothèque au titre d'un prêt, pour un montant total de 151 752 euros.

Par conséquent, il est suffisamment démontré que les facultés de paiement de Monsieur [Y] ne lui permettent pas d'exécuter le jugement sans encourir de graves conséquences, susceptibles de rompre de manière irréversible son équilibre financier.

Dès lors, il convient d'admettre que l'exécution provisoire du jugement réputé contradictoire du 5 avril 2022 entraîne pour Monsieur [Y] un risque de conséquences manifestement excessives.

Les deux conditions d'application de l'article 514-3 étant remplies, il sera fait droit à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire et il n'y a pas lieu d'ordonner la consignation des fonds, ainsi que le réclame le créancier.

Les dépens afférents à la présente instance seront mis à la charge de la SAS Ovalie, partie succombante, ce qui entraîne nécessairement le rejet de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Par ailleurs, l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Monsieur [Y].

PAR CES MOTIFS

Ordonnons l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 5 avril 2022 par le tribunal judiciaire de Strasbourg ;

Rejetons la demande de consignation de la SAS Ovalie ;

Rejetons les demandes respectives des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamons la SAS Ovalie aux dépens de la présente procédure.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 20
Numéro d'arrêt : 22/00078
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;22.00078 ?
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