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06/01/2023 | FRANCE | N°20/03655

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 06 janvier 2023, 20/03655


MINUTE N° 7/2023





























Copie exécutoire à



- la SELARL LEXAVOUE

COLMAR



- Me Patricia CHEVALLIER

-GASCHY





Le 06/01/2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 6 JANVIER 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03655 - N° Porta

lis DBVW-V-B7E-HOIX



Décision déférée à la cour : 26 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG





APPELANT :



Monsieur [P] [M]

demeurant [Adresse 2]



représenté par la SELARL LEXAVOUE COLMAR, avocat à la cour.





INTIMÉES :



La S.A. GENERALI ASSUR...

MINUTE N° 7/2023

Copie exécutoire à

- la SELARL LEXAVOUE

COLMAR

- Me Patricia CHEVALLIER

-GASCHY

Le 06/01/2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 6 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03655 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HOIX

Décision déférée à la cour : 26 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANT :

Monsieur [P] [M]

demeurant [Adresse 2]

représenté par la SELARL LEXAVOUE COLMAR, avocat à la cour.

INTIMÉES :

La S.A. GENERALI ASSURANCES IARD, représentée par son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1]

La S.A. GENERALI VIE, représentée par son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 1]

représentées par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

Madame Myriam DENORT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 7 octobre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Dominique DONATH faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Par acte signifié le 24 décembre 2018, M. [P] [M] a fait assigner la SA Generali IARD devant le tribunal de grande instance, devenu depuis le tribunal judiciaire de Strasbourg.

La SA Generali Vie est intervenue volontairement à la procédure et M. [M] a sollicité la condamnation solidaire des deux compagnies d'assurances au paiement de cotisations qu'il estimait lui être dues au titre du régime de retraite et, à défaut de régularisation, au paiement de la somme de 100 000 euros à titre de dommages intérêts, outre un arriéré de rente, ainsi que le remboursement d'un trop-perçu de cotisations.

Par jugement du 26 octobre 2020, le tribunal, après avoir déclaré irrecevables les pièces 10 à 17 figurant dans le dossier de plaidoirie déposé par le conseil de M. [M] comme ne figurant pas sur le dernier bordereau de communication de pièces, a débouté M. [M] de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la société Generali IARD, en l'absence de lien contractuel entre les parties, et l'a également débouté de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la société Generali Vie.

Le tribunal a condamné le demandeur aux dépens, dont distraction au profit du conseil des deux compagnies d'assurances, et l'a condamné à régler à ces dernières la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En premier lieu, le tribunal a relevé que M. [M] ne justifiait pas avoir souscrit ou adhéré à un contrat avec la société Generali IARD et était donc mal fondé à solliciter sa condamnation, même solidairement avec la société Generali Vie, auprès de laquelle il avait souscrit un contrat comportant deux volets, prévoyance et retraite.

Suite à une violente agression subie le 25 août 2002, il avait été en arrêt de travail, puis en invalidité, que la société Generali Vie avait prise en charge à compter du 26 août 2004, par le versement d'une rente.

Le contrat incluait aussi la prise en charge des cotisations de prévoyance qui devait intervenir à compter du 26 août 2004 et des cotisations de retraite qui devait intervenir à compter du 1er avril 2005, en parallèle à la rente et jusqu'à l'âge de 65 ans.

Les conditions générales du contrat prévoyaient que, si la garantie exonération du paiement des cotisations était souscrite, ce paiement était suspendu notamment en cas d'invalidité permanente totale, à compter de la reconnaissance de cette invalidité par l'organisme dont l'assuré relevait, cette exonération ne pouvant se poursuivre au-delà de 60 ans en cas d'invalidité permanente totale et en tout état de cause au-delà du jour du départ à la retraite.

Cependant, M. [M] ne prouvait pas être en invalidité permanente totale au sens du contrat, à tout le moins avant 2012 puisque, à compter de 2012, la société Generali Vie ne semblait pas le contester.

Il ne prouvait pas non plus qu'il remplissait les conditions pour bénéficier de la garantie « exonération » à compter du 8 janvier 2009 et de ce que la société Generali Vie aurait manqué à ses obligations contractuelles, ce qui justifiait le rejet de sa demande en paiement des cotisations dues au titre du régime de retraite et de sa demande de remboursement du trop-perçu de cotisations de 2005, en ce qu'il ne justifiait pas qu'elles devaient être réglées par la société Generali Vie.

Sur la demande d'indemnisation au titre du retard de règlement de la rente du quatrième trimestre 2019, le tribunal a relevé, outre des contradictions dans les conclusions de M. [M], sur le trimestre en cause, l'absence de preuve d'une faute imputable à la société Generali Vie dans le retard de versement de la rente. Il ne prouvait pas en effet avoir transmis à cette dernière les documents qu'elle lui avait réclamés par un courrier du 9 juillet 2019. Par ailleurs, il ne justifiait pas de la durée du retard, ce qui ne permettait pas de déterminer son préjudice. De plus, il avait changé d'adresse à cette période et ne justifiait pas en avoir informé la compagnie d'assurance, contrairement à ce qu'il prétendait.

M. [M] a interjeté appel de ce jugement le 26 novembre 2020, cet appel étant dirigé à la fois contre la société Generali IARD et la société Generali Vie.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 9 novembre 2021, il sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de l'intégralité de ses demandes contre la société Generali Vie et en ses dispositions relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux frais et dépens.

Il demande que la cour, statuant à nouveau, sur le fondement des articles 1134, 1147, 1142 et 1184 anciens du code civil et 1104, 1217, 1231-1 du code civil :

- condamne la société Generali Vie à lui verser, à compter du 8 janvier 2009, les cotisations dues au titre du régime de retraite sur le compte épargne retraite GENERALI (LSR 564 801 226) à son profit, et ce dans un strict délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passé le dit délai,

- à défaut de régularisation de la situation, passé le délai de deux mois après la signification de l'arrêt à intervenir, condamne la société Generali Vie à lui payer 100 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des obligations contractuelles,

- condamne en outre la société Generali Vie au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de la procédure.

M. [M] expose que, selon le contrat souscrit, il devait verser une cotisation mensuelle d'une part au titre du contrat prévoyance et d'autre part au titre du contrat retraite, pour se constituer un compte retraite et bénéficier d'une rente à vie lors de la liquidation de ses droits à retraite.

En cas d'arrêt de travail, si la garantie exonération était souscrite, et il n'était pas contesté qu'il l'avait souscrite, le compte retraite était alimenté directement par la société Generali Vie, le paiement des cotisations étant suspendu.

Il soutient que :

- à compter du 8 janvier 2009, il était en état d'invalidité permanente totale au sens du contrat, avec un taux d'invalidité résultant du barème accident du travail au moins égal à 66 %, soit 71 % d'après un expert judiciaire, en application du barème croisé du contrat, ce qu'avait admis la société Generali Vie dans un courrier du 23 août 2012, et il a donc bénéficié du versement de la rente maximale prévue au contrat, avec rappel sur la période du 8 janvier 2009 au 30 septembre 2012, cette rente lui étant toujours versée actuellement,

- la société Generali Vie aurait dû alimenter son compte retraite sur la base de la moyenne des trois dernières cotisations annuelles versées par l'adhérent assuré à compter, à tout le moins, du 8 janvier 2009,

- si la société Generali Vie affirme avoir mis le contrat « en réduction » à compter du 1er juin 2007, du fait qu'il aurait cessé le paiement des cotisations, ce qui signifiait la résiliation de la garantie exonération, elle ne justifie pas lui avoir adressé la lettre recommandée l'informant qu'à l'expiration d'un délai de 40 jours à compter de l'envoi de la lettre, le non-paiement des cotisations échues entraînerait la réduction du contrat, ainsi que celui-ci le prévoyait,

- en outre, en 2010, il n'y avait plus lieu à résiliation de la garantie exonération puisqu'il était déjà affecté d'un taux d'invalidité de 71 % et, surtout, la société Generali Vie a bien réglé ses cotisations retraite de 2005 à 2008 inclus.

Sur l'absence de communication de ses pièces concomitamment à la notification de ses conclusions, contrairement aux dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, M. [M] souligne que ce texte n'est pas assorti de sanction, qu'une régularisation est intervenue suite à un changement de conseil, qu'il n'y a pas eu d'atteinte au principe du contradictoire et qu'enfin, la décision sur l'irrecevabilité de ses pièces relevait du conseiller chargé de la mise en état.

Sur la demande en nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle lors de son adhésion, M. [M], qui observe qu'elle constitue une prétention nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile (sans toutefois en tirer de conséquences dans le dispositif de ses conclusions), soutient que cette demande n'est pas fondée, reprochant à la société Generali Vie de se constituer une preuve à elle-même en se basant sur un courrier imprécis et rédigé pour les besoins de la cause par son propre médecin conseil, faisant état de la lecture, par ce dernier, de sa propre pièce 17 écartée des débats par le tribunal pour absence de communication à l'adversaire, cette pièce n'étant pas produite.

Sur la prescription soulevée par la société Generali Vie en application de l'article 18 du contrat, M. [M] fait valoir qu'aucune prescription ne peut être encourue, s'agissant de l'obligation de l'assureur pour les cinq ans précédant l'introduction de l'instance et que la prescription a été interrompue par des lettres recommandées échangées entre les parties et surtout par la décision du 19 octobre 2010 qui a ordonné une expertise judiciaire.

Par leurs conclusions transmises par voie électronique le 21 décembre 2021, la société Generali IARD et la société Generali Vie sollicitent qu'il soit constaté que la société Generali Vie est l'assureur du contrat souscrit par M. [M], pour venir aux droits et obligations de la société GPA Vie, que soit confirmée la mise hors de cause de la société Generali IARD et que M. [M] soit condamné à régler à cette dernière une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre principal, les intimées sollicitent :

- que soient déclarées irrecevables les pièces visées dans les conclusions d'appelant de M. [M], pour n'avoir pas été communiquées simultanément à la signification des conclusions et pour n'être toujours pas communiquées le 17 avril 2021, nonobstant les demandes qui lui ont été faites,

- qu'il soit relevé que M. [M] a effectué une fausse déclaration à l'assurance et que le contrat d'assurance qu'il a souscrit soit déclaré nul et de nul effet,

- que M. [M] soit débouté de l'intégralité de ses demandes,

Subsidiairement,

- que soit jugée prescrite l'action de M. [M] et que celui-ci soit débouté de ses demandes,

- que M. [M] soit débouté de l'intégralité de ses demandes, ne justifiant pas pouvoir prétendre à la garantie exonération des cotisations, le contrat retraite étant en réduction depuis le 1er juin 2007,

- la condamnation de M. [M] à leur régler la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société Generali IARD, sollicitant la confirmation du jugement déféré qui l'a mise hors de cause comme n'étant pas l'assureur du contrat souscrit par M. [M], souligne que ce contrat a été souscrit avec la société GPA Vie, aux droits de laquelle vient uniquement la société Generali Vie, et qu'elle ne comprend pas les motifs de sa présence maintenue par M. [M] devant la cour, qui la contraint à exposer des frais, alors qu'aucune condamnation n'est plus sollicitée à son égard.

Sur l'irrecevabilité des pièces visées dans les conclusions d'appelant de M. [M], les intimées soulignent que ce n'est que le 23 avril 2021, après plusieurs demandes de leur part, que l'appelant leur a finalement communiqué les pièces visées dans ses écritures devant la cour, ce qui ne leur a pas permis de préparer normalement leur défense, d'autant plus que ces pièces n'étaient pas numérotées, certaines étant identiques, telles que les annexes 3 et 9, d'une part, et 30 et 38 d'autre part. En outre, cela aurait pu entraîner l'irrecevabilité de leurs propres conclusions si elles n'avaient pu conclure dans le délai de trois mois. Elles soulignent qu'un tel incident s'était déjà produit devant le tribunal et que les pièces qu'elles avaient reçues après le délibéré ne correspondaient pas à celles visées dans les écritures devant la cour. Les pièces communiquées en appel ne sont pas identiques à celles communiquées en première instance. Les intimées invoquent les dispositions des articles 15, 135 et 906 du code de procédure civile.

Sur le fond, à titre principal, la société Generali Vie soutient tout d'abord que sa demande en nullité du contrat d'assurance est recevable, en application de l'article 564 du code de procédure civile, tendant à faire écarter les prétentions adverses. De plus, elle résulte de la révélation d'un fait, à savoir la fausse déclaration de M. [M] lors de l'adhésion, apprise par la pièce adverse n°17 communiquée après la décision du tribunal.

Ainsi, lors de l'adhésion au contrat d'assurance, M. [M] a répondu par la négative à toutes les questions et s'est déclaré en excellent état de santé, alors qu'à la lecture de la pièce n°17 qu'il avait remise au tribunal, son médecin conseil a relevé qu'il était atteint d'une maladie remontant à l'année 2001, période antérieure à l'adhésion au contrat, qu'il n'a pas déclarée. Elle ajoute que son médecin conseil est indépendant.

Par cette fausse déclaration intentionnelle, l'assuré n'a donc pas respecté l'article L 113-2, alinéa 2 du code des assurances, dans la mesure où l'absence de déclaration de cette affection a modifié l'opinion qu'elle pouvait avoir sur le risque encouru en l'assurant, ce qui entraîne la nullité du contrat en application de l'article L 113-8 du code des assurances.

Subsidiairement, la société Generali Vie invoque la prescription quinquennale prévue par le contrat souscrit par M. [M] pour toute action dérivant du contrat, courant à compter de l'événement qui lui donne naissance. Or, l'assuré ne s'est pas inquiété de la situation de son contrat entre l'année 2012 et l'année 2017.

Sur le fond, la société Generali Vie invoque une confusion de M. [M] entre l'exonération des cotisations relatives à la garantie prévoyance et celle des cotisations relatives à la garantie retraite, soulignant que, d'après un courrier du conseil de l'appelant du 12 octobre 2009 relatif au contrat de prévoyance, ce dernier était en invalidité permanente partielle, ce qui a justifié la mise en 'uvre de l'exonération des cotisations relatives au contrat de prévoyance mais ne pouvait permettre celle de l'exonération des cotisations de la garantie retraite. Celle-ci nécessitait qu'il se trouve en invalidité permanente totale, ce qui ne résultait ni du courrier de son conseil du 12 octobre 2009 ni du rapport d'expertise judiciaire selon lequel le taux d'invalidité fonctionnelle était de 60 %.

Elle rappelle les conclusions de l'expert judiciaire qui, en 2012, avait attribué à M. [M], à compter du 8 juillet 2009, un taux d'incapacité fonctionnelle de 60 %, un taux d'invalidité professionnelle de 100 %, soit un taux global de 71 % « en application du barème croisé inclus dans (son) contrat ». L'expert ajoutait que le taux d'invalidité de M. [M] ayant dépassé les 66 % depuis le 8 juillet 2009, son taux d'indemnisation s'élevait donc depuis cette date à 100 %. La société Generali Vie affirme que M. [M] ne pouvait donc bénéficier de la garantie exonération des cotisations d'assurance retraite. Or, dans la mesure où il a cessé de verser les cotisations retraite alors qu'il ne pouvait en être exonéré, le contrat avait été mis en réduction avec effet au 1er juin 2007, en application de l'article 8 des conditions générales, si bien qu'elle n'avait pas à prendre en charge le paiement des cotisations de retraite.

La société Generali Vie ajoute avoir appris que M. [M] avait été président de la société Magnetite Diffusion du 3 mai 2016 au 7 juin 2019, ce qui lui interdisait également de prétendre aux garanties du contrat pendant cette période.

Enfin, sur la demande de dommages-intérêts présentée par l'appelant à hauteur de 100 000 euros, elle souligne que ce dernier ne justifie nullement du préjudice qui lui permettrait l'allocation d'une telle somme.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 1er février 2022.

MOTIFS

I ' Sur les demandes à l'encontre de la société Generali Iard

Rien ne permet de contredire les explications des intimées selon lesquelles, le contrat d'assurance litigieux ayant été souscrit par M. [M] auprès de la société GPA Vie, ainsi qu'il résulte des pièces produites, c'est uniquement la société Generali Vie qui vient aux droits de cette dernière, et non pas la société Generali IARD. D'ailleurs, l'appelant ne le conteste pas, ne présentant des demandes qu'à l'encontre de la société Generali Vie.

En conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a débouté M. [M] de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la société Generali IARD, en l'absence de lien contractuel avec cette dernière, et le jugement déféré doit être confirmé sur ce chef.

II ' Sur les demandes dirigées contre la société Generali Vie

A) Sur l'irrecevabilité des pièces produites par M. [M]

Si l'article 906 du code de procédure civile relatif à la procédure d'appel énonce que les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l'avocat de chacune des parties à celui de l'autre partie, le non-respect de ces dispositions n'impose pas à la cour d'écarter des débats les pièces concernées, s'il est démontré que le destinataire de cette communication a été mis, en temps utile, en mesure de les examiner, de les discuter et d'y répondre.

Dans la situation présente, si M. [M] ne conteste pas avoir communiqué le 23 avril 2021 les annexes visées dans son bordereau de communication de pièces du 9 février 2021, alors que ses conclusions et son bordereau avaient été notifiés par voie électronique dès le 9 février 2021. Cependant, il apparaît que les intimées ont été en mesure d'examiner ces pièces et de les prendre en compte dans leurs écritures notifiées par voie électronique le 7 mai 2021, dans le délai qui leur était imparti, étant observé qu'elles ont conclu à nouveau le 21 décembre 2021 et ont donc pu, entre temps, procéder à un nouvel examen de ces pièces afin de compléter leur réponse, s'il y avait lieu.

De plus, les pièces communiquées par M. [M] apparaissent en l'état conformes au bordereau transmis et, à supposer que des erreurs aient été commises initialement dans cette communication, elles ont été régularisées.

Dès lors, le principe du débat contradictoire ayant été respecté, il n'y a pas lieu de déclarer irrecevables les pièces communiquées par M. [M] en appel et cette demande des intimées sera par conséquent rejetée.

B) Sur la demande d'annulation du contrat pour fausse déclaration

Ainsi qu'il a été souligné plus haut, si M. [M] soutient, dans les motifs de ses écritures, que la demande d'annulation du contrat d'assurance en cause présentée par les intimées constitue une prétention nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile, il n'en tire aucune conclusion dans le dispositif de ses écritures, ce dont il résulte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce point. Au surplus, il peut être observé, ainsi que le souligne la société Generali Vie, qu'il s'agit à la fois d'une demande tendant à faire écarter les prétentions adverses, recevable en appel en application du même article, et d'une demande reconventionnelle, recevable en application de l'article 567 du même code.

Pour établir la preuve d'une fausse déclaration de M. [M] lors de la souscription du contrat d'assurance, par l'omission d'une pathologie dont il aurait souffert, les intimées produisent un courrier du 14 juin 2021 censé émaner de leur médecin conseil, le docteur [V], mais qui n'est pas signé, ce qui lui ôte toute force probante, ne permettant pas de vérifier son authenticité.

Au surplus, cet écrit indique que « si M. [M] avait déclaré (comme il aurait dû le faire en réponse aux questions du questionnaire de santé rempli par ses soins le 6 juin 2002) la maladie qu'il a présentée un an plus tôt en 2001, les garanties qu'il sollicitait lui auraient été refusées », cette maladie le rendant « inassurable pour une période de 5 à 10 ans ». Or, la maladie en cause n'est nullement précisée et les sociétés Generali Iard et Generali Vie ne rapportent donc pas la preuve de telles allégations.

Il en résulte que cette demande n'est pas fondée et qu'elle doit donc être rejetée.

C) Sur la prescription de la demande de M. [M]

L'article 18 des conditions générales du contrat souscrit par M. [M] stipule que, pour les trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, toute action dérivant du contrat, ce qui est le cas dans la situation présente, se prescrit par 5 ans à compter de l'événement qui y a donné naissance, ce qu'aucune des parties ne conteste.

Il y est ajouté que toute prescription peut être interrompue par l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception par l'assureur ou par l'adhérent-assuré, et également que la prescription est interrompue par une des causes ordinaires d'interruption de la prescription et par la désignation d'experts à la suite d'un sinistre, outre, pour le règlement des prestations, par une lettre recommandée avec avis de réception de l'assuré.

Dans la situation présente, l'événement ayant donné naissance à l'action de M. [M] dérivant du contrat apparaît comme étant l'invalidité permanente qu'il allègue à compter du 8 janvier 2009.

Or, un courrier de la société Generali Vie du 23 août 2012 évoque un rapport du docteur [G], expert judiciaire, qui a été désigné à cette fin, et ce, d'après les écritures de M. [M], non contestées sur ce point, par une ordonnance de référé du 19 octobre 2010. Celle-ci a donc interrompu la prescription, conformément aux stipulations contractuelles évoquées ci-dessus, et un nouveau délai a couru à compter de cette désignation, lequel a été suspendu, conformément aux dispositions de l'article 2239 du code civil, jusqu'au dépôt de son rapport, nécessairement antérieur, et de peu, au courrier du 23 août 2012 qui l'évoque.

De plus, le nouveau délai de prescription qui avait ainsi commencé à courir a été à nouveau interrompu par la lettre de M. [M] datée du 20 avril 2017, reçue par la société Generali Vie le 28 avril 2017, sollicitant des explications concernant l'exécution des prestations relatives à son compte retraite. En effet, les intimées ne contestent pas que cette lettre leur a bien été adressée en recommandé avec avis de réception, comme indiqué par M. [M] sur le courrier lui-même. Or, il n'est pas démontré qu'un délai de 5 ans se soit écoulé entre le dépôt du rapport de l'expert judiciaire et cette lettre recommandée.

Dès lors, étant rappelé que M. [M] a introduit l'instance devant le tribunal par assignation délivrée le 24 décembre 2018, il ressort de ces éléments que son action n'est pas couverte par la prescription et qu'elle doit donc être déclarée recevable à ce titre.

D) Sur le fond

En premier lieu, l'extrait Kbis de la SAS à associé unique Magnetite Diffusion produit par les intimées démontre uniquement que M. [M] a été liquidateur de cette société, laquelle a fait l'objet d'une dissolution amiable à compter du 30 novembre 2018, les opérations de liquidation ayant été clôturées et la société radiée le 7 juin 2019.

Cependant, il n'est nullement démontré en quoi cette qualité de liquidateur amiable de la société Magnetite Diffusion serait susceptible de faire perdre à M. [M] le bénéfice des garanties du contrat souscrit par lui auprès de la société GPA-Vie, aux droits de laquelle est venue la société Generali Vie. Elle ne remet nullement en cause son invalidité et il n'en résulte donc aucun motif de rejet de ses demandes.

En second lieu, les conditions générales de ce contrat stipulent, en leur article 9, que, « conformément au code des assurances, lorsqu'une cotisation n'est pas payée dans les dix jours de son échéance, le GPA-Vie adresse à l'adhérent-assuré une lettre recommandée l'informant qu'à l'expiration d'un délai de quarante jours à dater de l'envoi de cette lettre, le non-paiement des cotisations échues entraîne la réduction du contrat, dans les conditions énoncées au chapitre « 12. Réduction du contrat ». 

Celui-ci précise que « cela signifie que le compte retraite reste acquis au niveau atteint, qu'il sera revalorisé jusqu'à la date d'échéance dans les conditions énoncées au chapitre « 10. Participation aux bénéfices ».

La garantie « Exonération », si elle est souscrite, est résiliée. »

Si la société Generali Vie se prévaut d'une résiliation de la garantie « exonération » des cotisations de la garantie incapacité du contrat « Supplément retraite 564 801 226 », du fait que le contrat était mis en « réduction » suite au non-paiement des cotisations, elle ne produit qu'un courrier du 24 juin 2010 indiquant que, dès lors qu'il y a cessation des cotisations, pour quelque raison que ce soit, le contrat est alors mis en réduction et la garantie « exonération » est résiliée, et un autre du 5 octobre 2010 indiquant « votre contrat est réduit à effet du 1er juin 2007 ». Il n'apparaît pas que l'un de ces courriers ait été adressé à M. [M] par lettre recommandée.

De plus et surtout, la société Generali Vie ne justifie nullement de ce qu'elle a adressé à son assuré la lettre recommandée exigée par les stipulations contractuelles évoquées ci-dessus, l'informant préalablement de la réduction du contrat. Dès lors, elle ne peut se prévaloir d'une telle réduction du contrat et de la résiliation de la garantie invoquées, étant observé au surplus qu'il résulte des pièces versées aux débats par les parties qu'elle a enregistré le paiement de cotisations après le 1er juin 2007 et au moins jusqu'en 2008 inclus, au titre de ce contrat.

Par ailleurs, il est exact qu'elle avait écrit le 23 août 2012 à l'assuré, évoquant les conclusions du rapport d'expertise judiciaire du docteur [G], que ce dernier lui avait attribué un taux d'invalidité de 71 %. Elle ajoutait alors « Votre taux d'invalidité ayant dépassé les 66 % depuis le 8 janvier 2009, votre taux d'indemnisation s'élève donc à 100 % depuis cette date ». Cependant, il s'agissait de l'invalidité telle que définie par le contrat de prévoyance, en application du barème croisé prévu par ce contrat de prévoyance, l'expert ayant retenu un taux d'incapacité fonctionnelle de 60 % et un taux d'incapacité professionnelle de 100 %.

Or, la définition de l'invalidité dans le contrat « Supplément retraite » est, ainsi que le soulignent les intimées, différente de celle figurant au contrat de prévoyance.

En effet, l'adhérent-assuré est en invalidité permanente totale, au sens du contrat « Supplément retraite », s'il est classé en 2ème ou 3ème catégorie de la Sécurité Sociale ou si son taux d'invalidité résultant du barème Accident du travail est au moins égal à 66 %.

De plus, l'invalidité permanente totale est appréciée en dehors de toute considération professionnelle.

Il en résulte que seule doit être prise en compte à ce titre l'invalidité fonctionnelle, calculée en fonction du barème Accident du travail, que le docteur [G] a évaluée au taux de 60 %, inférieur à 66 %, et non pas l'invalidité professionnelle.

Cependant, ainsi qu'il a été précisé ci-dessus, l'invalidité permanente telle que définie au contrat peut aussi résulter du classement en 2ème ou 3ème catégorie de la Sécurité Sociale, et l'article 3 des conditions générales de ce contrat stipule que, si la garantie « exonération » est souscrite, le paiement des cotisations est suspendu, en cas d'invalidité permanente totale, à compter de la reconnaissance de l'invalidité par l'organisme dont il relève.

Précisément, il résulte des pièces produites par M. [M] qu'à compter du 1er avril 2005, il a bénéficié de la reconnaissance d'une incapacité à l'exercice de son métier et une attestation du RSI du 8 novembre 2019 établit que cet organisme de sécurité sociale lui a alloué « une pension d'invalidité totale et définitive » à compter de cette même date du 1er avril 2005.

Or, la société Generali Vie ne conteste pas que cette incapacité au métier reconnue à M. [M], qui a ouvert droit à l'attribution, à ce dernier, d'une pension d'invalidité totale et définitive dès le 1er avril 2005, correspond à une invalidité de 2ème catégorie reconnue par le RSI, organisme dont relevait l'intéressé. En conséquence, l'assuré se trouvait donc bien, durant la période correspondant à sa demande, en état d'invalidité permanente totale au sens du contrat « Supplément retraite » et, à défaut de réduction régulièrement notifiée, la garantie exonération doit être mise en 'uvre pour cette période. Il y a donc lieu d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de M. [M] présentée à ce titre et de condamner l'intimée à lui régler les cotisations réclamées dans le délai de deux mois sollicité à compter de la signification du présent arrêt.

Cependant, l'astreinte sollicitée n'apparaît pas nécessaire en l'état pour assurer l'exécution de cette condamnation, de même que la condamnation de la société Generali Vie à lui verser 100 000 euros de dommages et intérêts à défaut de régularisation de la situation dans le délai imparti. Il ne sera donc pas fait droit aux demandes de M. [M] tendant à la mise en 'uvre de telles mesures, étant observé qu'une astreinte serait susceptible d'être prononcée ultérieurement, par le juge de l'exécution, en cas de carence de l'intimée dans l'exécution de sa condamnation.

III - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré étant infirmé en ses dispositions principales, il le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais non compris dans les dépens.

La demande principale de M. [M] dirigée contre la société Generali Vie étant accueillie et les demandes de cette dernière étant rejetée, l'intimée sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Pour les mêmes motifs, il ne serait pas équitable de laisser à la charge de M. [M] les frais non compris dans les dépens, engagés par ce dernier en appel. En conséquence, il sera fait droit à sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 3 000 euros.

La société Generali Vie sera déboutée des demandes formulées sur le même fondement, de même que la société Generali IARD, quand bien même M. [M] est débouté des demandes dirigées contre cette dernière.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

INFIRME, dans les limites de l'appel, le jugement rendu entre les parties par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 26 octobre 2020, sauf en ce qu'il a débouté M. [P] [M] de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la SA Generali IARD,

CONFIRME le jugement entrepris de ce seul chef,

Statuant à nouveau pour le surplus et ajoutant au jugement,

REJETTE la demande de la SA Generali Vie et de la SA Generali IARD tendant à ce que soient déclarées irrecevables les pièces visées dans les conclusions d'appelant de M. [P] [M],

REJETTE la demande de la SA Generali Vie et de la SA Generali IARD tendant à ce que le contrat d'assurance souscrit par M. [P] [M] soit déclaré nul,

REJETTE la demande de la SA Generali Vie et de la SA Generali IARD tendant à ce que l'action de M. [P] [M] soit jugée prescrite et DECLARE cette action recevable,

CONDAMNE la SA Generali Vie à verser à M. [P] [M], à compter du 8 janvier 2009, les cotisations dues au titre du régime de retraite sur le compte épargne retraite GENERALI (LSR 564 801 226) à son profit, et ce dans un strict délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

REJETTE les demandes de M. [M] tendant à ce que cette condamnation soit assortie d'une astreinte et tendant à la condamnation de la SA Generali Vie à lui payer 100 000 euros à titre de dommages-intérêts à défaut de régularisation de la situation, passé le délai de deux mois après la signification de l'arrêt à intervenir,

CONDAMNE la SA Generali Vie aux dépens de première instance et d'appel,

CONDAMNE la SA Generali Vie à payer à M. [P] [M] la somme de 3 000,00 (trois mille) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE les demandes de la SA Generali Vie et de la SA Generali IARD présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/03655
Date de la décision : 06/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-06;20.03655 ?
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