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05/01/2023 | FRANCE | N°18/02202

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 05 janvier 2023, 18/02202


MINUTE N° 1/2023





























Copie exécutoire à



- Me Raphaël REINS



- Me Valérie SPIESER





Le 05/01/2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 5 JANVIER 2023





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 18/02202 - N° Portalis DBVW-V-B7C-GYL7


r>Décision déférée à la cour : 05 Avril 2018 par le tribunal de grande instance de Strasbourg





APPELANTS :



Monsieur [G] dit [L] [E]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2020/001008 du 10/03/2020 accordée par le bu...

MINUTE N° 1/2023

Copie exécutoire à

- Me Raphaël REINS

- Me Valérie SPIESER

Le 05/01/2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 5 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 18/02202 - N° Portalis DBVW-V-B7C-GYL7

Décision déférée à la cour : 05 Avril 2018 par le tribunal de grande instance de Strasbourg

APPELANTS :

Monsieur [G] dit [L] [E]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2020/001008 du 10/03/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)

Madame [A] dit [M] [H] épouse [E]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2020/001007 du 10/03/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)

représentés par Me Raphaël REINS, avocat à la cour.

INTIMÉS :

Madame [K] [F]

Monsieur [U] [I]

demeurant tous les deux [Adresse 1]

représentés par Me Valérie SPIESER, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 Juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, conseiller

Mme Nathalie HERY, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 13 octobre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Par acte du 2 décembre 2014, M. [G], dit [L] [E] et Mme [A], dite [M] [H], son épouse, ont vendu à M. [U] [I] et à Mme [K] [F] un appartement dans un immeuble en copropriété qui était une ancienne grange et dans lequel ils avaient réalisé d'importants travaux de rénovation en 2004.

Soutenant que le carrelage du rez-de-chaussée était affecté de vices cachés lors de la vente, M. [I] et Mme [F] ont, en mars 2017, fait assigner les époux [E]-[H] devant le tribunal de grande instance de Strasbourg en remboursement d'une partie du prix de vente.

Par jugement réputé contradictoire du 5 avril 2018, le tribunal a condamné in solidum les époux [E]-[H] à payer aux consorts [I]-[F] la somme de 10 792,29 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2016, au titre de la réduction du prix justifiée par l'existence de vices cachés.

En revanche, le tribunal a débouté M. [I] et Mme [F] de leur demande de dommages intérêts et il a condamné les époux [E]-[H] aux dépens et à payer aux demandeurs la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a considéré qu'il était établi, au vu d'un constat d'huissier produit par les époux [E]-[H], que le carrelage du rez-de-chaussée se décollait, qu'il avait été posé à même la dalle, sans réalisation d'une chape, qu'il présentait un défaut de planéité, que ces vices rendaient le logement impropre à son usage et résultaient des importants travaux de rénovation réalisés par les époux [E]-[H] en 2004.

Le tribunal a fixé la réduction du prix à 10 792,29 euros, au vu d'un devis chiffrant la dépose du carrelage défectueux et la repose d'un carrelage conforme aux règles de l'art.

Il a dispensé les époux [E]-[H] de payer des dommages intérêts, au motif que ces derniers n'étaient pas des professionnels et que les vices n'étaient pas apparents lors de la vente.

Les époux [E]-[H] ont interjeté appel de ce jugement le 17 mai 2018.

Après échanges de conclusions entre les parties, la cour a, par un arrêt avant-dire droit du 6 décembre 2019, ordonné une expertise confiée à Mme [T] [N] et renvoyé l'affaire devant le conseiller de la mise en état. Les dépens ont été réservés.

L'expert a signé son rapport le 26 février 2021.

Par leurs conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 30 mars 2022, les époux [E]-[H] sollicitent que leur appel soit déclaré recevable et bien fondé, que la cour infirme le jugement déféré en toutes les condamnations qu'il a prononcées in solidum à leur encontre et que, statuant à nouveau :

- à titre principal, elle déboute les intimés de l'ensemble de leurs prétentions,

- à titre subsidiaire, qu'elle fixe le coût des travaux au montant du devis de l'entreprise Aydin, soit à la somme de 4 200,90 euros,

- à titre encore plus subsidiaire, qu'elle fixe le montant des travaux de reprise à la somme indiquée par les consorts [I]-[F] en première instance et en appel, soit la somme de 10 792,29 euros,

- à titre infiniment subsidiaire, si la cour estime caractérisée l'existence d'un vice caché et considère fondé le chiffrage avancé par les parties adverses, qu'elle rejette les demandes des intimés et, à titre de réparation, ordonne la résolution de la vente et remette les parties dans l'état avant ladite vente,

- en tout état de cause, qu'elle condamne in solidum M. [I] et à Mme [F] à payer à Maître Raphaël Reins, leur conseil, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700, alinéa 2 du code de procédure civile et qu'elle les condamne aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

A l'appui de leur appel, les époux [E]-[H] soutiennent que :

- lors de la rénovation de 2004, les travaux relatifs à la dalle n'ont pas été effectués par M. [E] mais par une entreprise mandatée à cet effet, et ont été réalisés conformément aux règles de l'art,

- contrairement aux allégations des intimés, le carrelage peut être posé à même le dallage,

- l'épaisseur du dallage est de 8 à 12 cm,

- la tolérance de planéité de 7 mm indiquée dans le DTU a été respectée,

- le ferraillage est présent et ils le démontrent,

- les travaux sont antérieurs à toute réglementation thermique (au DTU 13-3) et, contrairement aux allégations de l'expert, l'isolant n'était pas obligatoire.

Les appelants ajoutent, en premier lieu que, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, la méconnaissance du D.T.U. n'est pas à elle seule de nature à établir que les règles de l'art auraient été violées et, par ailleurs, en l'absence de désordres et a fortiori de désordres rendant l'ouvrage impropre à sa destination, il ne peut y avoir de responsabilité. De plus, les intimés ont, en toute connaissance de cause, acquis un appartement qui avait fait l'objet de travaux de rénovation réalisés 10 ans auparavant.

En deuxième lieu, les conditions de mise en 'uvre de la garantie des vices cachés ne sont pas remplies car il n'y a aucun vice rendant le bien impropre à sa destination ou en diminuant tellement l'usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquis ou en aurait donné un moindre prix s'il les avait connus. Le fait que le carrelage soit impropre à sa destination n'a pas pour effet de rendre l'immeuble lui-même impropre à sa destination, les consorts [I]-[F] ne l'alléguant pas et ayant d'ailleurs pu continuer à habiter leur bien sans interruption.

En troisième lieu, les époux [E]-[H] soulignent qu'ils sont de bonne foi et que le bien est aujourd'hui encore loué à des locataires.

A titre subsidiaire, sur le montant de l'indemnité, les époux [E]-[H] soulignent que les intimés sollicitent désormais 26 302,50 euros pour les travaux de reprise, et 40 000 euros environ au total, dont 5 000 euros au titre d'un préjudice qu'ils n'expliquent même pas, alors qu'ils ont obtenu, en première instance, la somme de 10 792,29 euros qu'ils sollicitaient pour effectuer les travaux de reprise du carrelage.

Ils estiment subir eux-mêmes un préjudice moral face à ce qu'ils considèrent comme un acharnement des consorts [I]-[F].

Ils contestent l'évaluation du coût des travaux par les intimés, basée sur un devis trois fois plus élevé que ceux de trois autres entreprises, lesquels correspondent au coût des travaux alloués en première instance, et ce sans aucune raison valable.

Ils affirment que la solution rejetée par l'expert est viable et validée par trois entreprises, s'agissant de la solution la plus simple et la plus fiable, et lui reprochent de retenir la reprise totale du carrelage, alors que seuls 6 m² sont concernés et qu'ils ont obtenu des devis rectificatifs correspondant en tous points aux éléments qu'il attendait.

Enfin, les époux [E]-[H] soulignent qu'au regard du prix auquel ils ont vendu leur bien, les montants sollicités par les intimés conduiraient à un enrichissement sans cause de ces derniers. Ils ajoutent être disposés à restituer le prix perçu en contrepartie de la restitution de leur bien. Ils invoquent également une situation financière particulièrement difficile.

Par leurs conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 7 juin 2022, M. [I] et Mme [F] sollicitent le rejet de l'appel des époux [E]-[H] et de l'ensemble de leurs prétentions, ainsi que la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné M. [E] à leur payer la somme de 10 792,29 euros au titre du désordre affectant le dallage et le carrelage du rez-de-chaussée de leur logement, tout en jugeant que ce montant est insuffisant pour remédier aux désordres, ainsi qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire.

Au visa des articles 1792 et suivants, 1147 et suivants, 1641 et suivants, 1602 et suivants du code civil, ils sollicitent que la cour, y ajoutant, statuant après l'expertise, infirme le jugement déféré et :

- condamne les époux [E]-[H] à leur payer la somme de 26 302,50 euros au titre du désordre affectant le dallage et le carrelage du rez-de-chaussée de leur logement, cette somme représentant le coût des travaux de reprise estimé par l'expert judiciaire,

- condamne les époux [E]-[H] à leur payer la somme de 880 euros en remboursement des deux factures concernant les techniciens ayant procédé au sondage et carottage (annexe A05 du rapport d'expertise judiciaire),

- réforme le jugement déféré en ce qu'il les a déboutés de leur demande d'indemnisation de leur préjudice résultant des désordres et condamne les époux [E]-[H] à leur payer une somme complémentaire de 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral et de jouissance,

- en tout état de cause, condamne les époux [E]-[H] en tous les frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à leur rembourser les frais d'expertise judiciaire ordonnée par l'arrêt avant-dire droit.

M. [I] et Mme [F] se réfèrent au rapport d'expertise judiciaire (selon lequel le dallage n'était pas armé, vu l'emplacement du treillis, le carreau étant collé directement sur le dallage, sans ragréage ou sur un ragréage trop mince, des défauts de planéité excédant 10 mm), soulignant que l'expert a mis en évidence, après trois réunions sur site et de multiples sondages effectués en raison des contestations de M. [E], que le dallage est très largement hors tolérance d'exécution et non conforme aux règles professionnelles en vigueur en 2003, le vice l'affectant rendant l'ouvrage impropre à sa destination et nécessitant le remplacement de l'ensemble du carrelage du rez-de-chaussée.

Les intimés soulignent que ce sont les travaux de chape et de carrelage qui sont à l'origine du désordre et non pas les travaux de terrassement, peu importe que la dalle litigieuse ait été réalisée ou non par une entreprise ou par M. [E], lequel est de toute façon réputé constructeur en application de l'article 1792-1 du code civil.

De plus, c'est M. [E] qui a collé le carrelage directement sur cette dalle sans réaliser de chape ou même de ragréage afin de rétablir un minimum de planéité. Par ailleurs, les vices affectant la dalle et la pose du carrelage étaient indécelables lors de leur entrée dans les lieux et, le vendeur ayant lui-même fait les travaux, il ne peut prétendre ne pas avoir connaissance de ces désordres. À ce titre, les intimés soulignent que la jurisprudence assimile le vendeur constructeur au vendeur professionnel sur lequel pèse une présomption de connaissance du vice.

De plus, les intimés reprennent les motifs du jugement déféré selon lesquels le défaut n'était pas apparent à la vente et n'est apparu que postérieurement, et qu'il n'est pas démontré qu'ils avaient connaissance de ce vice caché.

Sur le montant de leur indemnisation, les intimés critiquent les devis produits par les appelants, qui, selon eux, manquent de sérieux, et indiquent se référer au chiffrage du coût des travaux opéré par l'expert judiciaire à partir de devis précis, soulignant que c'est la totalité de la surface qui est concernée et que les réparations ne peuvent être limitées à quelques mètres carrés, comme le souhaitent les époux [E]-[H].

Sur la demande de résolution de la vente des époux [E]-[H], les consorts [I]-[F] soulignent qu'elle n'est ouverte qu'à l'acquéreur qui seul dispose d'une option à ce titre.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 7 juin 2022.

MOTIFS

I ' Sur les demandes en indemnisation des consorts [I]-[F]

En application des dispositions des articles 1641 et suivants du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts.

Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix, et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente.

Dans la situation présente, si les consorts [I]-[F] visent différents textes légaux à l'appui de leurs demandes, la lecture de leurs écritures fait apparaître qu'ils fondent leur action sur la garantie des vices cachés.

A ce titre, l'expertise judiciaire ordonnée par l'arrêt avant dire droit a mis en évidence des désordres affectant le carrelage et le dallage de toute la surface du rez-de-chaussée de l'appartement vendu par les appelants aux intimés, celui-ci étant inapte à l'usage auquel il est destiné, qui est de pouvoir supporter la charge de meubles lourds à n'importe quel endroit de sa surface.

L'expert précise que l'épaisseur largement hors tolérance de ce dallage, au regard des normes en vigueur à l'époque où il a été réalisé, est de nature à compromettre sa solidité et rend cet ouvrage impropre à sa destination. De plus, le dallage n'est pas armé, ce qui constitue un défaut d'exécution. Les tolérances de planéité sont dépassées. L'expert mentionne au titre de ces désordres notamment les règles professionnelles n°482 de 1990 et il précise bien que toutes les normes auxquelles il fait référence étaient celles en vigueur en 2003, lors de la réalisation des travaux. S'agissant du DTU 13.3, il relève bien qu'il est entré en vigueur en 2005 et il compare ses normes à celles des règles professionnelles de 1990.

Le ragréage et le mortier se délitant et manquant d'adhérence sur toute la surface du rez-de-chaussée, cela entraîne le décollement de certains carreaux soumis à des charges plus lourdes, tel un buffet. L'expert précise que le vice d'exécution de ces deux éléments sur l'ensemble du carrelage rend l'ouvrage impropre à sa destination. En effet, si, lors de l'expertise, le décollement des carreaux était avéré devant le buffet et le poêle à bois, il précise que tout meuble d'un poids similaire, sur l'ensemble de la surface du rez-de-chaussée, entraînerait les mêmes décollements, et que d'autres meubles plus lourds, sur l'ensemble de cette surface, entraîneraient l'affaissement du dallage.

Il ajoute que M. [E], qui a réalisé lui-même la pose du carrelage, connaissait ses « désaffleurs » ou les défauts de planéité qui, cependant, n'étaient pas détectables lors de la vente sans un examen approfondi avec l'aide d'instruments tels que niveau à eau et réglet. De plus, ayant également réalisé lui-même le dallage, il connaissait son épaisseur.

Si l'expert s'est prononcé sur l'impropriété à destination du dallage et du carrelage, il est indéniable qu'un sol ne pouvant accueillir de meubles lourds, présentant des décollements et des désaffleurements du carrelage susceptibles de causer, ainsi que l'expert l'a expliqué, des accidents domestiques, et ce sur toute la surface du rez-de-chaussée d'un logement, ne peut que rendre ce logement lui-même impropre à l'usage auquel on le destine, qui est de pouvoir installer des meubles à tout endroit choisi et de se mouvoir sans risque de chute, ou diminuer tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquis, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Par ailleurs, il résulte clairement du rapport d'expertise que les acquéreurs ne pouvaient connaître ces vices, antérieurs à la vente de la maison. En effet, l'expert indique : « il n'était pas possible, pour un profane, de détecter de telles malfaçons ».

En revanche, il doit être considéré que les époux [E]-[H], qui ne démontrent nullement que le dallage et le carrelage auraient été réalisés par une entreprise, contrairement à d'autres travaux, lors de la rénovation de la maison, les ont eux-mêmes réalisés, en la personne de M. [E]. De ce fait, ils ne pouvaient ignorer ces vices cachés, ce qui ressort clairement du rapport d'expertise.

Dès lors, les conditions de mise en 'uvre de la garantie des vices cachés sont remplies, ainsi que l'a retenu le tribunal, et les consorts [I]-[F] sont fondés à exercer, comme ils l'ont choisi, non pas une action en résolution de la vente de la maison concernée, mais une action en restitution d'une partie du prix correspondant aux vices cachés affectant cette dernière.

Il doit être précisé que l'action rédhibitoire fondée sur la garantie des vices cachés n'appartient qu'à l'acquéreur, comme le soulignent les intimés et qu'en conséquence, le vendeur n'a pas qualité pour la solliciter. Si cette demande n'est présentée en appel qu'à titre subsidiaire par les appelants, elle ne peut donc qu'être déclarée irrecevable.

S'agissant de la réparation des vices cachés, l'expert judiciaire a expliqué de façon précise et détaillée en quoi les devis qui lui avaient été communiqués par les époux [E]-[H], y compris les quatre devis transmis à quelques heures du dépôt de son rapport, ne pouvaient être retenus, pour des raisons techniques.

Il a préconisé en effet la démolition intégrale du dallage du rez-de-chaussée et la réalisation d'un dallage armé de 120 mm, au-dessus d'un isolant de type TMS de 100 mm, un autre isolant de 60 mm devant être posé sur le dallage, surmonté d'une chape de 50 mm minimum. Un double encollage du carrelage serait nécessaire.

Les devis produits par les appelants ne répondaient pas à ces exigences et la plupart proposaient une réparation sur seulement 6 m² de surface, alors que l'expert avait expliqué que la réfection de l'ensemble de la dalle était nécessaire, ce qui apparaît parfaitement cohérent avec ses constatations relatives aux désordres.

Il y a donc lieu de retenir le chiffrage des travaux de réfection opéré par l'expert à partir du devis de la société Kohler produit par les consorts [I]-[F], qu'il a réduit sur différents points, soit 23 928 euros TTC, auquel il y a lieu, conformément à ses préconisations, d'ajouter le montant de 874,50 euros correspondant à la rehausse du pavage extérieur, également nécessaire, et les sommes de 1 000 euros et de 500 euros, sollicitées par les intimés respectivement pour les dépose et repose du mobilier de cuisine et la démolition du bar maçonné en place, que l'expert a mentionnées, sans les chiffrer. En effet, ces montants n'apparaissent nullement excessifs pour de tels travaux.

C'est pourquoi la demande des consorts [I]-[F] apparaît fondée, s'agissant du coût de réparation des vices cachés affectant la maison acquise auprès des époux [E]-[H], à hauteur de 26 302,50 euros. Il en résulte que le jugement déféré sera infirmé quant au montant alloué à ce titre aux consorts [I]-[F] et les époux [E]-[H] seront condamnés à leur verser cette somme.

Par ailleurs, les acquéreurs ont transmis à l'expert deux factures relatives aux frais de sondage et de carottage qu'ils ont dû engager durant l'expertise judiciaire, à la demande de l'expert, qui a lui-même satisfait à la demande présentée en ce sens par les époux [E]-[H]. Ces factures représentent un montant total de 880 euros et, au vu du déroulement des opérations d'expertise, cette demande est fondée et il y sera fait droit.

Enfin, les consorts [I]-[F] ne fournissent aucune explication à l'appui de leur demande tendant à la réparation de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral, si bien que celle-ci ne peut être accueillie et le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il l'a rejetée.

II - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré n'étant que partiellement infirmé en ses dispositions principales, et seulement pour allouer aux consorts [I]-[F] une indemnisation supérieure à celle retenue par le tribunal, il sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais non compris dans les dépens.

Pour les mêmes motifs, les appelants seront condamnés aux dépens de l'appel et leur demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non compris dans les dépens engagés en appel, sera rejetée.

De plus, il apparaîtrait inéquitable de laisser à la charge des consorts [I]-[F] les frais non compris dans les dépens, engagés en appel. En conséquence, les époux [E]-[H] seront condamnés à leur verser la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement rendu entre les parties par le tribunal de grande instance de Strasbourg le 5 avril 2018, sauf en ce qu'il a condamné M. [G], dit [L] [E] et Mme [A], dite [M] [H], son épouse, à payer à M. [U] [I] et à Mme [K] [F] la somme de 10 792,29 euros au titre du vice caché affectant le dallage et le carrelage du rez-de-chaussée de leur logement, et L'INFIRME sur ce seul chef,

Statuant à nouveau dans cette limite,

CONDAMNE M. [G], dit [L] [E] et Mme [A], dite [M] [H], son épouse, à payer à M. [U] [I] et à Mme [K] [F] la somme de 26 302,50 euros (vingt-six mille trois cent deux euros et cinquante centimes) au titre du vice caché affectant le dallage et le carrelage du rez-de-chaussée de leur logement,

Ajoutant au dit jugement,

DECLARE irrecevable la demande de M. [G], dit [L] [E] et Mme [A], dite [M] [H], son épouse, tendant à la résolution de la vente de l'immeuble en cause,

CONDAMNE M. [G], dit [L] [E] et Mme [A], dite [M] [H], son épouse, à payer à M. [U] [I] et à Mme [K] [F] la somme de 880,00 (huit cent quatre-vingts euros) au titre des frais de sondage et de carottage engagés à l'occasion de l'expertise judiciaire,

CONDAMNE M. [G], dit [L] [E] et Mme [A], dite [M] [H], son épouse, aux dépens d'appel,

CONDAMNE M. [G], dit [L] [E] et Mme [A], dite [M] [H], son épouse, à payer à M. [U] [I] et à Mme [K] [F] la somme de 3 500,00 (trois mille cinq cents) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de M. [G], dit [L] [E] et Mme [A], dite [M] [H], son épouse, présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 18/02202
Date de la décision : 05/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-05;18.02202 ?
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