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16/12/2022 | FRANCE | N°20/03120

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 16 décembre 2022, 20/03120


MINUTE N° 573/2022





























Copie exécutoire à



- Me Thierry CAHN



- Me Patricia CHEVALLIER

-GASCHY





Le 16/12/2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 16 décembre 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03120 - N° Portalis DBVW-V-

B7E-HNMU



Décision déférée à la cour : 06 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE





APPELANTE et intimée sur incident :



La S.A.S. [...] [W], prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 3]



représentée par Me Th...

MINUTE N° 573/2022

Copie exécutoire à

- Me Thierry CAHN

- Me Patricia CHEVALLIER

-GASCHY

Le 16/12/2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 16 décembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03120 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HNMU

Décision déférée à la cour : 06 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE et intimée sur incident :

La S.A.S. [...] [W], prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social [Adresse 3]

représentée par Me Thierry CAHN, avocat à la cour.

INTIMÉ et appelant sur incident :

Monsieur [J] [C]

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Septembre 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Mme Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN.

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 25 novembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Selon devis accepté du 15 mai 2013, M. [J] [C] a commandé à la SAS [...] [W], des travaux d'aménagements extérieurs d'une maison sise à [Adresse 5], pour un montant de 42 298,18 euros. Les travaux ont été exécutés et payés pour un montant de 41 726,73 euros TTC.

Le 21 février 2014, M. [C] a adressé un courrier à la société [...] [W] aux termes duquel il faisait état de l'absence de réalisation de certains travaux ainsi que de la nécessité de prévoir une indemnisation du fait de dégradations en lien avec l'exécution des travaux.

Le 6 mars 2014, la société [...] [W] a adressé à M. [C] une facture du 28 février 2014 valant décompte général définitif faisant état d'un montant encore dû de 5 118,61 euros.

M. [C] y a répondu le 12 mars 2014 en faisant état d'une liste de travaux toujours non terminés et rappelant la nécessité d'un dédommagement pour des dégradations.

L'entreprise y a, à son tour, répondu en faisant état de ce qu'elle avait effectué des travaux non prévus au devis initial et qu'elle attendait le règlement du solde de sa facture.

Suite à la saisine de la MACIF par M. [C], une expertise a été diligentée mettant en exergue l'existence de désordres.

Parallèlement, la SAS [...] [W] a fait une déclaration de sinistre à son assureur responsabilité décennale, la CAMACTE. Une expertise a fait ressortir la nécessité de reprendre des travaux.

Le juge des référés de Mulhouse, dans une décision du 2 janvier 2015, a ordonné une expertise.

L'expert a dressé un rapport le 17 novembre 2016 en faisant état de l'existence de désordres.

A la suite des nouveaux désordres invoqués par M. [C], un rapport d'expertise de la MACIF a été déposé le 18 avril 2017 évoquant l'existence de dommages chiffrés à la somme hors taxes de 2 312 euros.

Après l'échec des négociations entre assurances, M. [J] [C], le 25 janvier 2018, a fait assigner la SAS [...] [W] devant le tribunal de grande instance de Mulhouse afin de la voir condamner, notamment, à lui payer la somme de 29 000 euros au titre de son préjudice matériel et celle de 10 000 euros au titre de son préjudice moral.

Par jugement du 6 octobre 2020, le tribunal judiciaire remplaçant le tribunal de grande instance a :

- déclaré la SAS « [...] » [W] responsable des désordres affectant l'immeuble de M. [J] [C], sis à [Adresse 5];

- condamné la SAS « [...] » [W] à payer à M. [J] [C] les sommes de :

1) impact sur la boite aux lettres : 50 euros TTC,

2) câble d'alimentation de la sonnette extérieure : 110 euros TTC,

3) zone de pavé affaissé : 350 euros TTC,

4) dalles en granite : 18 961,80 euros TTC et 2 774,40 euros TTC ;

- condamné M. [J] [C] à payer à la SAS « [...] » [W], la somme de 2 342,27 euros TTC, au titre du solde de facture ;

- condamné la SAS « [...] » à payer à M. [C] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SAS « [...] » aux dépens y compris les dépens de la procédure de référés et les frais d'expertise ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- rejeté toute autre demande des parties.

Le tribunal a indiqué qu'il n'y avait pas eu de réception expresse des travaux mais a considéré qu'il y avait eu une réception tacite par l'occupation des lieux et par les règlements effectués.

Il a précisé que cette réception était :

- avec réserves concernant les non-finitions et désordres invoqués initialement par M. [C], de nature à engager la responsabilité contractuelle, la garantie de parfait achèvement n'étant pas invoquée,

- sans réserve, pour le sinistre postérieur au dépôt du rapport d'expertise judiciaire, soit la chute d'une dalle entourant la terrasse, de nature à engager la responsabilité décennale puisque les désordres rendent l'immeuble impropre à sa destination.

Il a fixé le montant dû pour les désordres à savoir l'impact sur la boîte aux lettres, le câble d'alimentation de la sonnette extérieure, la zone de pavé affaissé, les dalles en granite dans le sas du hall d'entrée, les dalles de granit sur la terrasse, les escaliers et le perron.

Pour ces dernières, il a fait état de ce qu'après l'expertise, un des éléments d'habillage s'était décollé et avait chuté au niveau de la terrasse et de l'habillement latéral, que des infiltrations d'eau s'étaient produites dans le sas d'entrée, à l'intérieur de l'habitation et sur les murs extérieurs.

N'étant pas en mesure de dire si les infiltrations et la chute de l'habillage latéral étaient dues exclusivement au non jointement ou, également, à l'absence d'étanchéité, le tribunal, a relevé qu'en tout état de cause, une obligation d'information pesait sur l'entreprise à qui il appartenait d'informer son client-maître d'ouvrage et non professionnel, des risques en cas d'absence d'étanchéité, et de non jointement, ou alors, de refuser de faire les travaux, étant, au surplus observé, que l'étanchéité était prévue au devis initial.

Il a donc décidé qu'il y avait lieu de reprendre totalement l'ensemble des dalles de granit, sur le sas intérieur, sur la terrasse, sur le perron et sur les escaliers pour un montant de 18 961,80 euros TTC.

Il a fixé à 2 774,40 euros TTC le coût de la réfection de la dalle de granit qui a chuté de l'habillage latéral de la terrasse.

Il a rejeté les devis complémentaires correspondant à la dépose et repose de la porte d'entrée et à la dépose et repose du garde-corps sur la terrasse considérant que l'entreprise intervenante devait effectuer ces prestations.

Il a relevé que pour le descellement de la ligne du portillon, il n'y avait pas de demande chiffrée de ce chef.

S'agissant du couvre-joint exécuté par la société [...] [W] d'un montant de 402,53 euros TTC, il a rejeté la demande afférente, cette somme ne figurant pas sur la facture du 28 février 2014 et M. [C] ne rapportant pas la preuve de ce qu'il affirme, soulignant que ce point n'avait pas été abordé dans l'expertise.

Il a rejeté la demande afférente à la gouttière montée à l'envers, ce point n'ayant pas été abordé dans l'expertise.

Le tribunal a également rejeté la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral de M. [C] au motif que les relations conflictuelles entre les parties pouvaient expliquer les refus de l'entreprise de revenir sur le chantier, cette dernière ayant démontré sa bonne volonté en acceptant les indemnisations proposées par les experts.

Il a également rejeté la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de la société [...] [W] pour préjudice moral au motif que la société n'en justifiait pas, les agressions physiques et verbales étant, au demeurant, niées par M. [C], rappelant que la société [...] [W], en tant que professionnel, devait satisfaire à ses obligations professionnelles, ce qui impliquait la gestion de situations conflictuelles.

Le tribunal a condamné M. [C] à payer à l'entreprise [...] [W] le solde de la facture du 28 février 2014, soit 2 342,27 euros et a rejeté les autres demandes, au titre de travaux qui auraient été réalisés, en sus du devis, car non justifiées.

La société [...] [W] a fait appel de ce jugement par voie électronique le 27 octobre 2020 et le 12 novembre 2020, ces deux appels ayant fait l'objet d'un enregistrement distinct et ayant été joints par ordonnance du 6 août 2021.

L'instruction de l'affaire a été clôturée le 5 avril 2022.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 22 juillet 2021, la société [...] [W] demande à la cour de :

- recevoir l'appel et le dire bien fondé ;

- rejeter l'appel incident et le dire infondé ;

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de M. [C] ;

- ordonner la jonction des procédures portant respectivement les numéros RG 20/03120 et 20/03342 ;

y faisant droit :

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déclarée responsable des désordres affectant l'immeuble de M. [C] et l'a condamnée d'avoir à payer la somme totale de 24 588,47 euros se décomposant comme suit :

* impact sur la boite aux lettres (50 euros )

* câble d'alimentation de la sonnette extérieure (350 euros)

* dalle de granite (18 961,80 euros)

* habillage défectueux (2 774,40 euros) ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens, et notamment s'agissant de la procédure de référé expertise ;

- condamner M. [C] à payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 1240 du code civil au titre du préjudice moral qu'elle subit ;

- condamner M. [C] d'avoir à payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 31-1 du code de procédure civile ;

- confirmer le jugement pour le surplus ;

en tout état de cause :

- condamner M. [C] d'avoir à payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

Au soutien de ses demandes, la société [...] [W] expose que le devis a été accepté et signé sans réserve par M. [C], excepté son refus de l'installation de l'étanchéité prévue, ce dernier y ayant délibérément barré ces travaux.

Elle indique que les travaux ont démarré avec retard avec le consentement de M. [C] lequel, au cours de leur exécution, lui a confié des travaux complémentaires qu'elle a intégrés dans le cadre de sa facture datée du 28 février 2014, fixant le montant définitif des travaux à la somme de 46 845,34 euros, la somme de 5 118,61 euros restant due après déduction des sommes et des acomptes d'ores et déjà versés.

Elle précise que M. [C] n'a réglé que 2 776,35 euros après avoir appliqué une retenue de 5% du prix du marché jusqu'à reprise des prétendus désordres.

S'agissant du rapport d'expertise déposé par le Cabinet Equad en date du 24 juin 2014, elle fait valoir qu'y est clairement indiqué que la réclamation au titre d'un dédommagement à hauteur de 5% du marché ne parait pas justifiée.

S'agissant du rapport d'expertise déposé par le cabinet Eurisk mandaté par sa compagnie d'assurance, elle souligne qu'il a également conclu à la retenue injustifiée de la somme de 2 342,27 euros et a constaté quelques désordres mineurs, chiffrant le coût total de la reprise à la somme de 530,43 euros, de sorte qu'en appliquant cette déduction, le reliquat de sa créance s'élève à 1 811,83 euros.

S'agissant du rapport d'expertise judiciaire, elle expose qu'il conclut également à des désordres mineurs et que la retenue de 5 % opérée par M. [C] lui parait injustifiée.

La société [...] [W] soutient que, selon l'expert judiciaire, elle a effectué l'ensemble des travaux sollicités par M. [C] qui ne démontre pas que ses exigences n'ont pas été satisfaites.

Sur la pose de deux dalles dans l'entrée de l'immeuble, elle entend se référer à la jurisprudence qui précise que le non-respect du DTU est caractérisé, en l'absence de désordre constaté, uniquement si le document est expressément visé par le marché, ce qui n'est pas le cas, en l'espèce, puisque le devis signé ne fait aucune référence aux normes prescrites par le DTU.

Elle ajoute que le rapport d'expertise judiciaire indique que, bien que la pose des dalles au sol ait été réalisée sans joints, ce qui caractérise une non-conformité aux règles de l'art, ce défaut n'a pas entrainé de désordre.

Elle souligne que l'expert a fixé la prestation du renforcement de l'étanchéité à une somme de 400 euros TTC, ce qu'elle avait accepté de prendre à sa charge malgré l'absence de faute lui étant imputable.

Sur les défauts d'étanchéité du revêtement en granit de la terrasse, des escaliers et du perron, la société [...] [W] indique que l'expert a considéré que l'entreprise n'avait pas respecté le DTU mais qu'il n'y avait ni défaut dans la pose de ces plaques de granit, ni désordre, les règles de l'art ayant été respectées puisque les plaques en granit ont été collées selon les usages en vigueur et qu'elles ont été fixées mécaniquement par deux vis en laiton, reconnues pour leur solidité et leur forte résistance à la corrosion.

Elle souligne que M. [C] a refusé l'expertise proposée pour vérifier la solidité et l'efficacité des vis en laiton ainsi que de restituer ces dernières afin de les faire expertiser et s'est violemment emporté en expulsant avec force M. [W] de son domicile lorsque celui-ci est venu récupérer le matériel litigieux.

Elle conteste le jugement en ce qu'il a dit qu'il lui appartenait d'informer son client des risques en cas d'absence d'étanchéité, et de non-jointement, ou alors, de refuser de faire les travaux faisant état de ce que, d'une part, aucune des expertises menées n'a relevé que les travaux qu'elle a réalisés encouraient un tel risque à terme, alors même que les experts ont obligation d'attirer l'attention sur tout désordre potentiel ou futur et, d'autre part, il est constant que le devoir de conseil du professionnel de la construction s'étend de la mise en relation des parties jusqu'à la réception des travaux, laquelle s'est faite tacitement comme l'a rappelé le tribunal, étant souligné qu'initialement, elle avait prévu des travaux d'étanchéité, M. [C] ayant considéré de son propre chef qu'une dalle hydrofuge était entièrement suffisante pour l'étanchéité.

Pour le reste des désordres invoqués par M. [C], la société [...] [W] les qualifie de totalement mineurs et indique que certains ne sont ni démontrés, ni chiffrés, ce qui concerne le descellement de la ligne du portillon, un couvre-joint non concerné par l'expertise judiciaire et une gouttière.

S'agissant des désordres mineurs visés par l'expertise judiciaire pour un montant 510 euros TTC, elle ne les conteste pas.

Elle indique que, cependant, au regard d'une part, de l'attitude complètement désinvolte et agressive de M. [C], et d'autre part, du reliquat de plus de 2 000 euros outre intérêts restant à régler par ce dernier, elle refuse tout dédommagement, soulignant qu'elle a réalisé divers travaux correspondant à une valeur totale bien supérieure à 510 euros sur demande expresse de son client, sans exiger la moindre facturation.

La société [...] [W] s'oppose à toute indemnisation du prétendu préjudice moral de M. [C], ses affirmations étant mensongères, soulignant qu'elle a tout tenté pour parvenir à résoudre amiablement ce litige et ce, en dépit de l'invariable mutisme de ce dernier et qu'elle a démontré sa bonne volonté en acceptant les indemnisations proposées par les experts.

Répliquant aux conclusions adverses sur appel incident concernant la banquette béton filante, la société [...] [W] expose que M. [C] ne souhaitait pas cette banquette.

La société [...] [W] entend maintenir ses demandes d'indemnisation au titre de son préjudice moral et pour procédure abusive faisant valoir qu'elle a été de bonne foi et à l'initiative de diverses tentatives amiables, qu'elle a effectué divers travaux à titre gracieux alors que M. [C] a été de mauvaise foi et désinvolte, a fait et fait encore état des déclarations mensongères allant même jusqu'à affirmer que M. [O] [W] n'avait jamais participé à l'exécution du chantier alors même qu'il était l'un de ses interlocuteurs privilégiés.

Elle ajoute que son image a souffert des différentes expertises successives sollicitées par M. [C] alors que celles-ci concluaient toutes à l'absence de sa responsabilité excepté pour des désordres totalement mineurs qui aurait mérité un traitement amiable.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 30 novembre 2021, M. [C] demande à la cour de :

- déclarer l'appel de la société [...] [W] mal fondé ;

- le rejeter ;

- la débouter de l'ensemble de ses fins et conclusions ;

sur l'appel incident :

- infirmer le jugement entrepris en tant que le premier juge a refusé de revaloriser des montants du préjudice matériel et limite les dommages et intérêts pour préjudice de jouissance et moral à 2 500 euros alors que 10 000 euros étaient sollicités ;

statuant à nouveau sur appel incident :

- dire et juger que les condamnations visant le préjudice matériel seront augmentées pour l'ensemble d'entre elles de l'indice du coût de la construction, base décembre 2016 ;

- ajoutant aux condamnations prononcées en première instance, condamner la société [...] [W] à un montant de 3 345,10 euros concernant les travaux de réfection de la façade, selon devis Sondennecker du 15 juin 2021, ainsi qu'à un montant de 1 072 euros TTC au titre des frais de désolidarisation de l'escalier, selon devis Béton-sciage du 7 juin 2021 ;

- condamner la société [...] [W] au paiement d'un montant de 3 146 euros concernant la réparation de la conduite d'eaux pluviales et 247,50 euros au titre du diagnostic réalisé par Ani Sud ;

- lui réserver de conclure plus amplement dès qu'il aura pu recueillir des devis visant l'ensemble des travaux préconisés par Mme [T] ;

- condamner la société [...] [W] à un montant de 10 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance et moral ;

avant dire droit :

- ordonner une contre-expertise judiciaire au regard des conclusions de Mme [T] dont il développe la mission ;

- lui réserver de conclure plus amplement après le dépôt du rapport ;

-débouter la partie adverse de toutes conclusions plus amples ou contraires;

- condamner la société [...] [W] aux entiers frais et dépens ainsi qu'à une indemnité de 5 470 euros au titre des dispositions de 1'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, M. [C] indique que s'agissant des dalles dans le sas d'entrée, des dalles revêtant la terrasse, l'escalier, le perron et le défaut d'étanchéité, l'expert a retenu un non-respect du DTU mais a considéré que la dépose de l'ensemble des dalles serait hors de proportion avec les désordres sans toutefois examiner l'ampleur du non-respect du DTU, ni les conséquences qui en résulteraient.

Concernant la dalle qui a chuté alors qu'elle formait l'habillage du nez de dalle de la terrasse, M. [C] indique qu'il s'agit d'un désordre de nature décennale, de sorte que joue la présomption de responsabilité dont la partie adverse ne s'exonère pas, étant souligné qu'en tout état de cause, même s'il pensait que la dalle hydrofuge était suffisante, la société [...] [W] avait une obligation de conseil à son égard, d'autant plus qu'il ignorait la nécessité de jointement de la dalle dont la partie adverse s'est abstenue.

S'agissant des désordres ayant fait l'objet de réserves, M. [C] considère que la faute est établie par le non-respect du DTU, l'expert judiciaire ayant préconisé le scellement des dalles pour un montant de 400 euros TTC, ce montant ayant été accepté par la société [...] [W] qui est revenue dessus excipant de l'absence de faute manifeste de sa part.

S'agissant du défaut d'étanchéité affectant la dalle recevant le revêtement en granit de la terrasse, des escaliers et du perron, M. [C] expose que l'existence de désordres est avérée par l'expert judiciaire qui a relevé l'existence d'infiltrations d 'eau à l'intérieur du sas en pied de mur et de coulures sur le mur intérieur du sous-sol, la pose des dalles entières ne respectant pas le DTU en l'absence de joint.

Il souligne que l'expert a, cependant, omis de se prononcer sur les conséquences techniques de cette non-conformité, sauf à indiquer qu'elle concerne un ouvrage extérieur, hormis la petite surface du sas et qu'elle n'entraine pas les mêmes risques que pour un sol en pierre qui aurait été posé à l'intérieur sur un plancher chauffant.

Il s'étonne que l'expert n'ait pas conclu à l'existence de désordres estimant que les coulures sur les ouvrages extérieurs (façade, mur de sous-bassement) n'étaient pas considérées comme préjudiciables.

Il produit un rapport d'expertise de Mme [T] qui, selon lui, justifie une contre-expertise, cette dernière listant l'ensemble des travaux nécessaires au regard de la chute des dalles de rive, de l'absence de pente de la dalle de la terrasse, des fissures qui apparaissent sur le crépi du mur de la maison et l'étanchéité du sas d'entrée et faisant état de ce que le projet réalisé par la société [...] [W] ne respecte pas les plans établis par l'architecte qui prévoyaient une banquette béton filante le long de la façade

M. [C] conteste que M. [W] soit venu à son domicile pour récupérer quoi que ce soit et l'avoir expulsé. Il ajoute que lors de l'expertise du 25 janvier 2017, M. [W] a voulu d'autorité s'emparer des vis, ce à quoi il s'est opposé pour qu'elles restent à la disposition des experts, M. [W] s'étant montré extrêmement vindicatif et agressif.

M. [C] avance qu'au regard des conclusions de Mme [T], un nouveau devis est nécessaire et, à défaut, sollicite que le montant du devis qu'il présente pour un montant de 18 961,80 euros daté du 20 décembre 2016 soit augmenté de l'indice du prix de la construction, date de référence décembre 2016, ajoutant qu'il en va de même des autres devis produits dont celui pour la dépose et stockage du garde-corps, daté du 25 février 2015 dont le premier juge n'a pas mesuré la nécessité.

Il conteste que des travaux ont été effectués gracieusement par la société [...] [W].

Il estime qu'il est justifié de lui allouer un montant de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du trouble de jouissance et du préjudice moral subi mais s'oppose à la demande adverse d'indemnisation de son préjudice moral, les accusations portées à son encontre étant fausses. Il souligne que les expertises successives ont toutes conclu à 1'existence de désordres.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

Les deux procédures d'appel ayant d'ores et déjà été jointes, la demande formulée par la société [...] [W] à cette fin est devenue sans objet, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.

L'expert judiciaire, M. [L], a déposé son rapport le 17 novembre 2016.

Il y a relevé l'existence de désordres afférents à la boîte aux lettres, au câble de la sonnette extérieure et à la zone de pavé affaissée et en a fixé l'indemnisation pour les sommes respectives de 50 euros TTC, 110 euros TTC et 350 euros TTC, ces désordres et montant étant admis par les parties, de sorte que la somme totale de 510 euros TTC est due par la société [...] [W].

Par courrier du 28 octobre 2016 adressé à son conseil, M. [C] a évoqué la survenance de la chute d'une dalle de l'habillage latéral de la terrasse. Cet événement n'a pas été traité par l'expert, le délai imparti pour les dires étant dépassé. Cependant, l'existence de cette chute ainsi que son coût sont admis par la société [...] [W] qui est donc redevable de la somme de 2 774,40 euros TTC à ce titre.

La société [...] [W] est donc déclarée responsable des désordres susvisés et condamnée à payer à M. [C] les sommes correspondant aux réparations.

Le jugement entrepris est donc confirmé sur ces chefs de demandes sauf à rectifier l'orthographe de la société [...] [W].

S'agissant des infiltrations d'eau, l'expert, lors d'une nouvelle réunion du 15 juin 2016 a été en mesure de constater l'apparition de légères infiltrations au niveau du sas en pied de mur.

Il a considéré que ces infiltrations étaient dues à l'absence de joint tel que prévu par le DTU et à l'absence d'étanchéité, soulignant que M. [C] avait barré les travaux d'étanchéité sur le devis.

Devant le premier juge, M. [C] a produit des photographies pour justifier de l'évolution des désordres, les infiltrations touchant la maison et les murs extérieurs.

A hauteur de cour, M. [C] produit un rapport privé d'un expert, Mme [T], qui actualise avec précision l'évolution des infiltrations mais évoque également l'existence d'autres désordres.

Considérant que les travaux ont été réalisés en 2014, que, depuis cette date, aucune solution n'a été apportée aux infiltrations et que Mme [T] a procédé à des constatations faisant état de l'évolution des désordres et de nouveaux désordres, il y a lieu d'ordonner, avant dire droit, une nouvelle expertise selon les modalités précisées au présent dispositif afin de déterminer l'ampleur actuelle des désordres en lien avec les infiltrations ainsi que leur indemnisation mais également d'examiner les malfaçons et désordres dont fait état Mme [T] dans son rapport à savoir non-conformité de la pente de terrasse, insuffisance d'épaisseur de la chape, absence de natte de désolidarisation, inefficacité des joints de dilatation, décollement des dalles en rives, microfissurations de l'enduit en pied de façade, traces de présence d'eau, d'infiltrations d'eau et de bio-organismes sous la terrasse, désagrégation des enduisages dans le garage.

Il sera également demandé à l'expert de vérifier si une gouttière a effectivement été montée à l'envers et de déterminer le coût de sa réfection.

Les demandes des parties, les frais et procédure sont réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :

CONFIRME le jugement rendu le 6 octobre 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse en ce qu'il a :

- déclaré la SAS [...] [W], dont l'orthographe de la dénomination est rectifiée, responsable des désordres de la maison de M. [J] [C] située à [Adresse 5] affectant la boite aux lettres, le câble d'alimentation de la sonnette extérieure, la zone de pavé affaissé et l'habillage latéral de la terrasse dont une dalle a chuté;

- condamné la SAS [...] [W], dont l'orthographe de la dénomination est rectifiée à payer à M. [J] [C] les sommes de :

* 50 euros TTC pour impact sur la boîte aux lettres,

* 110 euros TTC pour le câble d'alimentation de la sonnette extérieure,

* 350 euros TTC pour la zone de pavé affaissée,

* 2 774,40 euros TTC pour l'habillage latéral de la terrasse dont une dalle a chuté;

SURSOIT à statuer pour le surplus ;

avant dire droit :

ORDONNE une expertise ;

COMMET pour y procéder :

M. [B] [X]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Port. : [XXXXXXXX01]

Mèl : [Courriel 6]

avec faculté de s'adjoindre, en cas de besoin, tout spécialiste de son choix, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne, et avec mission de se faire communiquer, par les parties ou les tiers, tous documents utiles, de recueillir des informations écrites ou orales de toutes personnes, sauf à ce que soient précisés leurs nom, prénoms, demeure et profession ainsi que, s'il y a lieu, leur lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles, à l'effet de :

- se rendre sur les lieux [Adresse 5],

- prendre connaissance des documents contractuels et de tous autres documents nécessaires, notamment du rapport de Mme [T] ;

- examiner les travaux réalisés par la SAS [...] [W],

- vérifier l'existence des infiltrations et des autres désordres et malfaçons visés dans le rapport de Mme [T]  à savoir la non-conformité de la pente de terrasse, insuffisance d'épaisseur de la chape, absence de natte de désolidarisation, inefficacité des joints de dilatation, décollement des dalles en rives, microfissurations de l'enduit en pied de façade, traces de présence d'eau, d'infiltrations d'eau et de bio-organismes sous la terrasse, désagrégation des enduisages dans le garage ;

- dire si les travaux ont été réalisés dans les règles de l'art et conformément aux prévisions contractuelles ;

- déterminer, le cas échéant, l'origine, les causes et l'évolution des infiltrations et se prononcer sur l'origine des nouveaux désordres visés dans le rapport de Mme [T] ;

- vérifier si une gouttière a été montée à l'envers et déterminer le coût de sa réfection ;

- fournir tous éléments permettant à la cour de se prononcer sur les responsabilités,

- préciser les moyens propres à remédier aux désordres constatés,

- chiffrer le coût des travaux à entreprendre ;

- s'expliquer techniquement, dans le cadre des chefs de mission ci-dessus, sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillis après leur avoir communiqué son avis définitif lors d'une dernière réunion ou par simple note;

FIXE à 2 000 euros (deux mille euros) le montant à valoir sur la rémunération de l'expert que M. [J] [C] devra consigner sur la plate-forme numérique de la Caisse des dépôts et consignations accessible au lien suivant: www.consignations.fr, avant le 16 février 2023, sous peine de caducité de la désignation de l'expert ;

DIT que M. [J] [C] devra transmettre au greffe, dès sa réception, le récépissé de consignation ;

DIT qu'il sera procédé aux opérations d'expertise en présence des parties ou celles-ci convoquées par lettres recommandées avec demandes d'avis de réception, et leurs conseils avisés par lettres simples ;

DIT que l'expert devra entendre les parties en leurs observations, ainsi que, le cas échéant, consigner leurs dires et y répondre dans son rapport ;

DIT que l'expert devra déposer son rapport en trois exemplaires au greffe dans le délai de six mois à compter de la date à laquelle il aura été avisé du versement de la consignation, date de rigueur, sauf prorogation qui serait accordée sur rapport de l'expert à cet effet

DIT qu'en cas de refus de sa mission par l'expert, d'empêchement ou de retard injustifié, il sera pourvu d'office à son remplacement .

DIT qu'à l'issue de la première réunion d'expertise, l'expert devra communiquer aux parties et au magistrat chargé du contrôle de l'expertise un état prévisionnel de ses frais et honoraires, et devra, en cas d'insuffisance de la provision consignée, demander la consignation d'une provision supplémentaire ;

DIT qu'à l'issue de sa mission l'expert adressera aux parties sa demande de rémunération par lettre recommandée avec accusé de réception ;

DIT que les parties pourront adresser à l'expert et à la juridiction leurs observations écrites sur la demande de rémunération dans un délai de quinze jours à compter de sa réception ;

RENVOIE l'affaire à l'audience de mise en état du 7 mars 2023 pour vérification du paiement de l'avance sur les frais d'expertise.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/03120
Date de la décision : 16/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-16;20.03120 ?
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