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08/12/2022 | FRANCE | N°21/018331

France | France, Cour d'appel de colmar, 4s, 08 décembre 2022, 21/018331


MINUTE No 22/927

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 08 Décembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 21/01833 - No Portalis DBVW-V-B7F-HRVQ

Décision déférée à la Cour : 10 Mars 2021 par le Pôle social du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE :

S.A.R.L. [D] PEINTURES
[Adress

e 1]
[Localité 3]

Représentée par Me Joseph WETZEL, avocat au barreau de COLMAR

INTIMEE :

URSSAF D'ALSACE
[Adresse 4]
[Localité 2]

Comparante e...

MINUTE No 22/927

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats
- parties non représentées

Le

Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 08 Décembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB No RG 21/01833 - No Portalis DBVW-V-B7F-HRVQ

Décision déférée à la Cour : 10 Mars 2021 par le Pôle social du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE :

S.A.R.L. [D] PEINTURES
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représentée par Me Joseph WETZEL, avocat au barreau de COLMAR

INTIMEE :

URSSAF D'ALSACE
[Adresse 4]
[Localité 2]

Comparante en la personne de Mme [N] [I], munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Octobre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
Mme GREWEY, Conseiller
M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :

- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme THOMAS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

La société à responsabilité limitée [D] Peintures a fait l'objet d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires portant sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016.

A l'issue du contrôle, l'Urssaf d'Alsace a notifié par lettre recommandée avec accusé de réception du 30 avril 2018 un redressement portant sur la somme de 22 272 euros.

La société ainsi contrôlée n'ayant formulé aucune observation à l'issue du contrôle, l'ensemble des cotisations de sécurité sociale, augmenté des majorations de retard, a été réclamé par une mise en demeure du 20 août 2018 pour un montant total de 20267 euros à titre principal assorti de 2005 euros de majorations de retard.

Par courrier recommandé du 31 août 2018, la SARL [D] Peintures a saisi la commission de recours amiable de l'Urssaf d'Alsace faisant valoir qu'elle n'avait jamais eu connaissance de la lettre d'observations. Ladite lettre a été renvoyée par l'organisme à la société le même jour.

Par courrier du 19 décembre 2018, la Commission de recours amiable de l'Urssaf d'Alsace a notifié à la SARL [D] Peintures sa décision rendue le 3 décembre 2018.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 décembre 2018, la SARL [D] Peintures a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin (devenu aujourd'hui Pôle social du tribunal judiciaire de Strasbourg) afin de contester les redressements opérés à son encontre.

Vu l'appel interjeté par la SARL [D] Peintures le 31 mars 2021 à l'encontre du jugement du 10 mars 2021 rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Strasbourg, auquel le contentieux a été transféré qui, dans l'instance opposant la SARL Peintures [D] à l'Urssaf d'Alsace, a :

- validé les redressements opérés par l'Urssaf d'Alsace à l'encontre de la SARL [D] Peintures ;
- validé la mise en demeure adressée par l'Urssaf d'Alsace à la SARL [D] Peintures le 20 août 2018 pour un montant de 22 272 euros en cotisations et majorations de retard ;
- confirmer la décision de la Commission de recours amiable du 3 décembre 2018 ;
- condamné la SARL [D] Peintures à payer à l'Urssaf d'Alsace la somme de 22 272 euros au titre du solde de la mise en demeure du 20 août 2018 ;
- condamné SARL [D] Peintures aux entiers dépens de l'instance.

Par ordonnance du 2 décembre 2021, l'affaire a été renvoyée à l'audience de plaidoirie collégiale en date du 13 octobre 2022.

Vu les conclusions récapitulatives du 1er décembre 2021 notifiées via le RPVA le 2 décembre 2021, aux termes desquelles la SARL [D] Peintures demande à la cour de :

- déclarer sa requête recevable ;

a) à titre liminaire, sur le respect de la procédure prévue à l'article R.243-59-2 du Code de la Sécurité Sociale :

- dire et juger que la procédure prévue à l'article R. 243-59-2 du Code de la Sécurité Sociale a été méconnue par l'inspectrice de l'Urssaf Alsace et en conséquence, infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG en date du 10 mars 2021 en ce qu'il :

« valide l'ensemble des chefs du redressement opéré par l'Urssaf d'Alsace à l'encontre de la Sarl [D] Peintures ; valide la mise en demeure adressée par l'Urssaf d'Alsace à la Sarl [D] Peintures le 20 août 2018 pour un montant de 22.272 € en cotisations et majorations de retard ; confirme la décision de la Commission de Recours Amiable du 3 décembre 2018 ; condamne la Sarl [D] Peintures à payer à l'Urssaf d'Alsace une somme de 22.272€ au titre du solde de la mise en demeure du 20 août 2018 ; condamne la SARL [D] Peintures aux entiers dépens de la présente instance ; déboute les parties de l'ensemble de leurs autres fins, moyens et prétentions ",

* Et, statuant à nouveau,
- déclarer nulles les opérations de contrôle ;
- annuler l'intégralité des redressements et majorations de retard proposés par l'Urssaf Alsace :

b) à titre principal :
* Sur le redressement au titre de l'avantage en nature véhicule et l'avantage en nature logement :

- constater que Monsieur [X] [D] exerce les fonctions de gérant majoritaire de la SARL [D] Peintures ;
- dire et juger que les dispositions invoquées par l'Urssaf ne s'appliquent pas aux gérants majoritaires et en conséquence infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG en date du 10 mars 2021 ;
- annuler le redressement ainsi que les majorations de retard proposés par l'Urssaf Alsace au titre des avantages en nature logement et véhicule ;

* Sur le redressement effectué au titre de l'assiette minimum des cotisations BTP – Indemnités de trajet :

- constater que l'indemnité de trajet est imposée par la Convention Collective Nationale des ouvriers du Bâtiment ;
- constater que les textes invoqués par l'Urssaf au soutien de sa demande de redressement ne s'appliquent pas aux avantages issus de conventions ou d'accords collectifs, en conséquence, infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 10 mars 2021 ;
- annuler le redressement ainsi que les majorations de retard proposés par l'Urssaf au titre de l'assiette minimum des cotisations BTP- indemnités de trajet ;

c) à titre subsidiaire :
* Sur le redressement effectué au titre de l'avantage en nature logement

- que Monsieur [X] [D] occupe une surface de 40m² au sein de l'immeuble loué ;
- constater que Monsieur [X] [D] s'acquitte du loyer dû au titre de son domicile personnel ;
- constater qu'il ne bénéficie d'aucun avantage en nature au titre de son logement et en conséquence, infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Strasbourg ;

Et, statuant à nouveau
- annuler le redressement ainsi que les majorations de retard proposées par l'Urssaf au titre de l'avantage en nature logement ;

d) à titre infiniment subsidiaire :
* Sur le redressement effectué au titre de l'avantage en nature logement
- constater que Monsieur [X] [D] occupe une surface de 40m² au sein de l'immeuble loué et en conséquence, infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Strasbourg ;
- dire et juger que le redressement proposé par l'Urssaf Alsace au titre de l'avantage en nature logement devra être calculé sur la base de la surface réellement occupée par Monsieur [D] ;

en tout état de cause,
- condamner l'Urssaf Alsace au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers frais et dépens, y compris de première instance ;

Vu les conclusions responsives et récapitulatives du 21 septembre 2022, aux termes desquelles l'Urssaf d'Alsace demande à la cour de :

- déclarer l'appel de la SARL [D] Peintures recevable en la forme, l'en débouter quant au fond ;
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
- rejeter toute autre demande de la société comme mal fondée ;

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le jugement critiqué ayant été notifié à l'appelant le 12 mars 2021, son appel interjeté le 31 mars 2021 est recevable.

***

Au soutien de son appel, la SARL [D] Peintures estime que l'Urssaf d'Alsace a commis des erreurs d'appréciation en opérant son contrôle. Elle indique tout d'abord que concernant les indemnités de trajet, elle est soumise à une convention collective de sorte que l'Urssaf ne pouvait pas considérer que ceux-ci sont inclus dans l'assiette minimum de cotisations. Elle sollicite en conséquence que le redressement à ce titre soit annulé. Concernant l'avantage en nature pour le véhicule, elle fait valoir que l'organisme de contrôle a procédé par échantillonnage ou extrapolation, ce qui lui est interdit de sorte qu'elle soutient que le contrôle est entaché de nullité. Elle explique également que le premier juge ne pouvait affirmer que le véhicule de l'entreprise était mis à disposition de son gérant les week-end sans constater le recours à l'extrapolation.

Concernant Monsieur [D], elle tient à souligner sa qualité de gérant majoritaire et unique de la société qui est d'ailleurs une société à responsabilité limitée unipersonnelle, de sorte que conformément à la législation en vigueur l'avantage en nature que constituerait l'utilisation d'un véhicule professionnel à des fins privées n'a pas à être déclaré contrairement à ce que soutient l'Urssaf, de sorte qu'il y a également lieu d'annuler le contrôle et le redressement opéré de ce chef.

Elle précise également que le redressement effectué par l'Urssaf au titre de l'avantage en nature véhicule et la décision de la commission de recours amiable du 3 décembre 2018 ne reposent sur aucune base légale, aucun décret n'ayant été promulgué le 18 avril 2021.

Concernant le litige relatif à l'avantage en nature logement, elle rappelle que les dispositions des articles L242-1, L136-1 et L136-2 du code de la sécurité sociale ne sont pas applicables aux gérants majoritaires de sociétés à responsabilité limitée et que dès lors l'analyse de l'Urssaf ne saurait prospérer, en l'absence de base légale. Elle fait valoir que le contrat de bail est d'ailleurs parfaitement clair à ce sujet et que le loyer s'élève à 1260 euros. Elle précise à ce titre que la société s'acquitte d'une part de 1000 euros et que la part restante de 260 euros correspond au loyer versé directement par le gérant au propriétaire au titre de son logement personnel. Elle indique que ledit logement est un deux pièces de trente-huit mètres carrés environ. Elle rappelle qu'elle occupe le restant des locaux soit les cent dix mètres carrés restant dans la maison, le hangar, la cave, le garage, le parking ainsi que l'abri de jardin et le grenier. Dans ce contexte, elle indique qu'il ne peut qu'être constaté que le gérant s'acquitte directement auprès de son bailleur du paiement de l'intégralité du loyer dû au titre de son domicile personnel et qu'il ne bénéficie en conséquence d'aucun avantage en nature au titre de son logement. Elle rappelle également que Monsieur [D] n'a pas la jouissance des autres parties du bâtiment ci-dessus décrit. Elle insiste sur le fait qu'il existe deux contrats de bail, et qu'ils permettent aisément de démontrer que la ventilation du loyer était prévue dès la conclusion du bail.

L'Urssaf d'Alsace rappelle tout d'abord les étapes du contrôle opéré par ses soins et confirme que dans un premier temps, l'appelant n'avait pas réceptionné sa lettre d'observations, le pli étant revenu « pli avisé, non réclamé ». Elle indique avoir régularisé immédiatement ce point pour que la SARL [D] Peintures puisse faire valoir ses droits. Elle indique que malgré la condamnation en première instance, l'appelant ne s'est pas exécuté et n'a toujours pas réglé les sommes dues.

Elle précise tout d'abord que lors de son contrôle, l'inspecteur a constaté que la SARL [D] Peintures était soumise à la convention collective « bâtiment : ouvriers ». Pour autant, et malgré les dispositions de ladite convention, elle a relevé que plusieurs salariés n'ont pas bénéficié à tort d'indemnités de trajet alors même qu'ils sont en déplacement chaque jour. Il en résulte selon elle qu'il y a lieu de réintégrer une somme de 1 610 euros d'indemnités de trajet dans l'assiette de cotisations. Elle rappelle que cette indemnité est due indépendamment de la rémunération de l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé. Elle rappelle qu'il est de jurisprudence constante que le simple fait qu'une convention collective impose le paiement d'une indemnité suffit à rendre exigible le versement de cotisations. Elle sollicite en conséquence la confirmation du jugement querellé sur ce point.

Concernant le non recours à la méthode d'échantillonnage et d'extrapolation, l'Urssaf d'Alsace fait valoir qu'elle a opéré son contrôle conformément aux dispositions légales qui lui sont offertes et que seul le gérant était concerné s'agissant de la question de l'utilisation du véhicule personnel les fins de semaine à des fins personnelles. Elle précise que les constats n'ont été extrapolés à aucun autre salarié. Elle indique qu'en conséquence, sa méthode de travail était légale et sollicite que la cour constate qu'elle n'a pas mis en oeuvre la méthode d'échantillonnage et d'extrapolation.

Elle rappelle à ce titre que l'utilisation à titre privé d'un véhicule mis à disposition du salarié de façon permanente constitue un avantage en nature personnel dès lors qu'en l'absence de justificatif établissant que le véhicule à un usage exclusivement professionnel l'économie de frais réalisée par le salarié doit donner lieu à l'intégration d'un avantage en nature. Elle indique que malgré les différents recours formulés par la SARL [D] Peintures, cette dernière n'a jamais produit la carte grise, la facture d'achat et la valeur du véhicule incriminé. Elle rappelle qu'elle a relevé des anomalies concernant des dépenses de carburant opérées le dimanche ou des jours fériés. Elle explique qu'à cette époque, l'appelant n'employait encore aucun salarié de sorte qu'il est évident que Monsieur [D] était à l'origine de ces pleins et qu'il était en possession, toutes les fins de semaine et jours fériés, du véhicule Audi. Elle admet qu'il n'est aucunement interdit de faire le plein un dimanche mais rappelle que par contre, à défaut de démontrer une utilisation strictement professionnelle du véhicule, les frais doivent là aussi, être considérés comme des avantages en nature, soumis à cotisations.

Concernant le statut de Monsieur [X] [D], elle fait valoir qu'elle a consulté le Kbis de la société lors de son contrôle et qu'il en ressort très clairement que chaque associé détient 50 % des parts sociales, confirmant que Monsieur [X] [D] n'a aucunement le statut de gérant majoritaire comme il prétend mais qu'il y est statutairement gérant égalitaire. Elle indique que ce constat rend totalement inopérant l'argumentation de Monsieur [X] [D] visant à remettre en cause les différents griefs exposés dans la lettre d'observations.

Sur la question de l'avantage en nature logement précisé en point 8 de sa lettre d'observations pour un montant de 14 017 euros, elle rappelle les dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 20 décembre 2002 qui prévoit que la mise à disposition d'un logement par l'employeur constitue un avantage en nature soumis à cotisations sociales. Elle fait valoir que les opérations de contrôle ont clairement permis de déterminer le siège social de la société et le domicile de son gérant, soit à la même adresse, s'agissant d'une location à usage mixte. Elle explique qu'elle a sollicité la société pour obtenir de plus amples précisions quant au nombre de pièces de la maison en vain et que devant le premier juge aucune explication supplémentaire n'avait été fournie par la SARL. Elle relève qu'au sein de la comptabilité de l'entreprise, Monsieur [X] [D] ne verse aucun loyer à la société pour l'occupation de la maison à titre privé, de sorte qu'il doit être considéré que ce dernier est hébergé à titre gracieux. En conséquence, elle demande la confirmation du premier jugement sur la question de l'avantage en nature logement eu égard à l'absence de ventilation comptable et de preuve de tout paiement à ce titre par Monsieur [X] [D].

Sur l'assiette minimum des cotisations -BTP- indemnités de trajets (point no3 de la lettre d'observations)

Il est constant que la SARL [D] Peintures est soumise à la convention collective « bâtiment, ouvriers ».

Cette convention prévoit le versement d'une indemnité de trajet dans le but d'indemniser, sous une forme forfaitaire, la sujétion que représente pour le salarié la nécessité de se rendre quotidiennement sur un chantier et d'en revenir.

L'inspecteur de l'Urssaf a relevé que la SARL [D] Peintures ne versait pas cette indemnité aux salariés rémunérés au SMIC.

L'article L242-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable lors des opérations de contrôle prévoit que le montant des rémunérations à prendre pour base de calcul des cotisations ne peut être inférieur en aucun cas au montant du salaire minimum de croissance calculé en fonction de l'horaire effectif de travail du salarié compte tenu le cas échéant des majorations pour heures supplémentaires.

En l'espèce, la convention collective à laquelle est soumise la SARL [D] Peintures prévoit un salaire minimum.

Il en découle que l'assiette des cotisations doit être au moins égale à ce minimum conventionnel et augmenté de tout élément de rémunération prévu, là aussi, par la convention collective.

Force est de constater qu'il n'existe qu'une seule exception qui aurait permis à la SARL [D] Peintures de ne pas verser l'indemnité à savoir lorsque l'ouvrier est logé gratuitement par l'entreprise sur le chantier ou à proximité de son chantier. Or, en l'espèce, tel n'est pas le cas des salariés concernés par le contrôle de l'organisme. Peu importe que la totalité des heures travaillées soit payées et incluant leur temps de trajet comme le soutient la SARL [D] Peintures, il lui appartenait bien de verser cette indemnité à ses salariés.

Ce principe a d'ailleurs été consacré par la Cour de Cassation qui rappelle dans son arrêt du 29 novembre 2006 que « l'indemnité de trajet prévue par la convention collective nationale des ouvriers et employés du bâtiment, qui a un caractère forfaitaire et a pour objet d'indemniser une sujétion pour le salarié obligé chaque jour de se rendre sur le chantier et d'en revenir, est due indépendamment de la rémunération du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé ».

En conséquence, la SARL [D] Peintures se devait de prendre en compte ces indemnités dans le calcul de l'assiette minimum et c'est à bon droit que l'Urssaf a réintégré le montant des indemnités de trajet dus aux salariés [W], [V], [T] et [D] dans l'assiette de cotisations.

Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.

Sur les avantages en nature véhicule (point no7 de la lettre d'observations) et le non recours à la méthode d'échantillonnage et d'extrapolation :

a) sur le prétendu recours à la méthode d'échantillonnage et d'extrapolation :

L'article 242-59-2 du code de la sécurité sociale réglemente en partie les opérations de contrôle et rappelle les droits des cotisants.

La SARL [D] Peintures soutient que l'inspecteur de l'Urssaf aurait utilisé la méthode de l'échantillonnage qui permet de déterminer le montant des redressements à partir de l'examen d'une partie seulement de la population des salariés, le résultat étant ensuite extrapolé à l'ensemble du personnel de l'entreprise.

Or, en l'espèce, il ressort de la lettre d'observations que seul M. [X] [D] a été concerné par le contrôle relatif à l'avantage en nature ci-dessous analysé, de sorte qu'aucune méthode d'échantillonnage n'a été utilisée par l'Urssaf.

En conséquence, la procédure est régulière et aucune nullité ne peut être relevée.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

b) sur l'avantage en nature véhicule :

Il résulte de l'article L242-1 du code de la sécurité sociale que revêtent le caractère d'avantages en nature devant être réintégrés dans l'assiette des cotisations sociales, les avantages constitués par l'économie de frais de transport réalisée par les salariés bénéficiaires de la mise à disposition d'un véhicule dont l'entreprise assume entièrement la charge.

Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale, lorsque l'employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule, l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l'employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel estimé en pourcentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location ou en location avec option d'achat, toutes taxes comprises.
La cour observe qu'en l'espèce, l'inspecteur de l'organisme a constaté lors du contrôle, qu'aucun écrit probant ne réglementait l'utilisation du véhicule Audi A3 utilisé par son gérant selon ses propres déclarations. Il constatait également que des pleins de carburant étaient effectués des dimanches et des jours fériés, ce qui contrevient à une utilisation exclusivement professionnelle du véhicule.

Si la SARL [D] Peintures soutient aujourd'hui que son dirigeant aurait la qualité de gérant « majoritaire » et que les dispositions prévues par les articles L242-1, L136-1 et L136-2 du code de la sécurité sociale ne lui sont aucunement applicables en raison de son statut, il convient de rappeler que la production d'un Kbis à hauteur de cour est sans emport sur ce point, dans la mesure où il appartenait à M. [D] d'apporter la preuve de sa qualité tel qu'il le prétend pendant la période contradictoire. De plus, il est relevé que l'inspecteur a consulté les statuts de l'entreprise (cf liste en page 2 de la lettre d'observations) et qu'il n'a pu que constater que M. [D] était en réalité gérant égalitaire, au moment du contrôle.

Compte tenu de ces éléments, de ce que la SARL [D] Peintures n'apporte à hauteur de cour aucune autre démonstration de l'utilisation du véhicule à des seules fins professionnelles, il y a lieu, en conséquence, de maintenir le redressement opéré à hauteur de 2309 euros et de confirmer le jugement querellé.

Sur les avantages en nature logement (point no8 de la lettre d'observations)

L'article L242-1 du code de la sécurité sociale dispose que tout avantage en nature alloué en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations. Les avantages en nature sont des biens ou services fournis par la société aux salariés ou aux dirigeants pour leur usage privé, gratuitement ou moyennant une participation inférieure à la valeur réelle.

En l'espèce, l'arrêté du 20 décembre 2002 visé en son intégralité supra, prévoit que la mise à disposition d'un logement par l'employeur constitue un avantage en nature soumis à cotisations sociales.

En l'espèce, il ressort du contrôle que M. [D] gérant de SARL [D] Peintures ne verse aucun loyer à la société pour l'occupation de la maison à titre privé de sorte que l'inspecteur a réintégré l'avantage perçu par le gérant dans l'assiette des cotisations.

La SARL [D] Peintures soutient tout comme pour le chef de redressement lié à l'avantage en nature véhicule, qu'en sa qualité de gérant majoritaire, il n'est pas concerné par les dispositions légales sur lesquelles s'est basée l'Urssaf.

Or, la SARL [D] Peintures n'a pas été en mesure de démontrer, comme expliqué supra, que M. [D] dispose d'un statut de gérant majoritaire au jour du contrôle. En conséquence, ce sont bien les dispositions de l'article L311-3 du code de la sécurité sociale qui sont applicables, de sorte que l'évaluation de son avantage en nature doit s'effectuer « au réel » pour le gérant.

Enfin, il sera rappelé une nouvelle fois que la production des pièces 2 et 4 de l'appelant apparaissent comme tardives ; surabondamment, à la lecture du contrat de bail, il est relevé que c'est bien la SARL [D] Peintures qui a conclu celui-ci et qu'il n'est en tout état de cause pas possible d'avancer une quelconque hypothèse de ventilation du loyer entre la société et son gérant, ni par ailleurs, de constater une preuve de paiement d'une quote-part de loyer par M. [X] [D].

Compte tenu de ces éléments, il convient bien de considérer que M. [X] [D] est logé à titre gracieux et de soumettre à cotisations l'avantage en nature ainsi alloué.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur le surplus :

La décision querellée sera confirmée en ce qui concerne la charge des dépens.

La SARL [D] Peintures, qui succombe en son recours, sera condamnée à supporter les dépens d'appel et déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement prononcé par le Pôle social du tribunal judiciaire de Strasbourg le 10 mars 2021 ;

CONDAMNE la SARL [D] Peintures au paiement des dépens d'appel ;

REJETTE les demandes indemnitaires au titre de l'article 700 du code de procédure civile formulées par la SARL [D] Peintures.

Le Greffier Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : 4s
Numéro d'arrêt : 21/018331
Date de la décision : 08/12/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2022-12-08;21.018331 ?
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