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01/12/2022 | FRANCE | N°21/01064

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 01 décembre 2022, 21/01064


MINUTE N° 528/2022





























Copie exécutoire à



- Me Valérie SPIESER



- la SCP CAHN G./CAHN T./

BORGHI





Le 1er décembre 2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 1er Décembre 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/01064 - N° Port

alis DBVW-V-B7F-HQLJ



Décision déférée à la cour : 19 Janvier 2021 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE





APPELANT et intimé sur appel incident :



Monsieur [C] [L]

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Valérie SPIESER, avocat à la cour.





INTIMÉ et app...

MINUTE N° 528/2022

Copie exécutoire à

- Me Valérie SPIESER

- la SCP CAHN G./CAHN T./

BORGHI

Le 1er décembre 2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 1er Décembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/01064 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HQLJ

Décision déférée à la cour : 19 Janvier 2021 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANT et intimé sur appel incident :

Monsieur [C] [L]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Valérie SPIESER, avocat à la cour.

INTIMÉ et appelant sur incident :

Monsieur [U] [M]

demeurant [Adresse 2]

représenté par la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI, avocats à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Octobre 2022, en audience publique, devant la cour composée de

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Dominique DONATH, faisant fonction

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, président et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [N] [M] a fait l'acquisition d'un immeuble situé [Adresse 2]. Il a mandaté l'entreprise de Monsieur [C] [L] à l'enseigne «Modern Fermetures» pour la rénovation de toutes les fenêtres et de la porte de cet immeuble, selon devis signé le 6 mai 2016 portant sur la somme de 9 505,55 €.

Monsieur [M] a versé le 8 avril 2016 un acompte de 4 000 € puis un second de 1 000 € en date du 24 juin 2016. Le 7 juillet 2016, il recevait une facture de 9 570 € TTC avec le descriptif des menuiseries installées.

Le 1er août 2016 Monsieur [M] a adressé une sommation par lettre recommandée à Monsieur [C] [L] dans laquelle il se plaignait de malfaçons affectant les travaux en faisant valoir que les fenêtres n'étaient pas aux bonne dimensions et que la pose n'était pas conforme. Il a adressé dans un deuxième temps le 1er septembre 2016 une sommation à M. [L] par l'intermédiaire de son avocat.

M. [M] a alors saisi le juge des référés de Mulhouse qui, par ordonnance en date du 26 novembre 2016, a accueilli sa demande et a désigné Madame [V] en qualité d'expert. Cette dernière a déposé son rapport le 31 mai 2017.

Sur la base de ce rapport, Monsieur [M] a assigné son co-contractant sur le fondement des articles 1792 et 1231-1 (ancien article 1247) du code civil au fond le 26 août 2019.

Par jugement du 19 Janvier 2021, le tribunal judiciaire de Mulhouse a condamné Monsieur [C] [L] sur le fondement de l'article 1792 du code civil à payer au requérant la somme en principal de 21 144,25 €, outre les montants de 500 € au titre du préjudice de jouissance et de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

C'est la décision contestée suite à l'appel formé par M. [L].

PRETENTIONS DES PARTIES

M. [L] conclut dans ses écritures du 21 octobre 2021 notifiées par RPVA à l'infirmation du jugement entrepris.

Il demande à la cour, statuant à nouveau, de déclarer irrecevable la demande formée par Monsieur [U] [M] à son encontre, en tout état de cause de la déclarer mal fondée, et de condamner l'intimé aux entiers dépens des deux instances et à lui payer la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

D'une part, l'appelant soutient qu'il résulterait de l'annexe de M. [M] n° l que le bon de commande a été passé avec Modern Fermetures (dont le numéro RCS indiqué était le numéro SIRET : 819707373/'000l8) qui correspond à la SAS Modern dont le dirigeant est Monsieur [C] [L]. Par voie de conséquence, il n'existerait aucun lien contractuel entre Monsieur [M] et Monsieur [C] [L] personne physique, et la demande dirigée contre ce dernier devrait être déclarée irrecevable.

D'autre part, quant au fond de l'affaire, M. [L] soutient que c'est à tort que le premier juge a fait application de l'article 1792 du code civil (posant les règles de la garantie décennale) au présent cas d'espèce. Le bon de commande concernerait essentiellement la fourniture de menuiseries PVC en remplacement de menuiserie bois dans le cadre de travaux de rénovation entrepris par Monsieur [M] lui-même dans une bâtisse ancienne. La qualité du matériel commandé et posé n'est pas en cause. Au plus, le cas relèverait du domaine de la responsabilité contractuelle ; mais alors la cour devrait constater qu'aucune faute génératrice d'un préjudice ne pourrait être reprochée à l'appelant.

* * *

Dans ses écritures récapitulatives du 27 janvier 2022 notifiées par RPVA, M. [M] conclut à ce que la cour :

- confirme le jugement entrepris en tant qu'il a condamné Monsieur [C] [L] à payer la somme de 21 144,25 € en principal, outre les frais et dépens de l'instance, les frais et dépens de la procédure de référé, le coût des frais d'expertise.

- infirme le jugement entrepris en ce qui concerne l'évaluation des dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance et des frais irrépétibles,

Et statuant à nouveau,

- condamne Monsieur [C] [L] à payer les sommes de, 6 000 euros à titre de dommages et intérêts et 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de procédure de première instance,

- condamne Monsieur [C] [L] à payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

Il formule les observations suivantes :

Sur la recevabilité de sa demande, dans son esprit, il s'est adressé à un compatriote qu'il connaissait bien et a contracté avec Monsieur [L] en personne, et non pas avec la société «Modern Fermetures» ; il fait remarquer que :

* le bon de commande ou devis signé porte la mention [C] [L] et la signature de ce dernier qui reconnaissant avoir reçu la somme de 4 000 euros ;

* la facture a été émise par Monsieur [L] le 7 Juillet 2016,

* un virement a été réalisé à l'ordre de Monsieur [L] [C] sur un compte ouvert à son nom dont il a fourni les coordonnées bancaires, et non pas à la société «Modern Fermetures»,

* il ressort de l'extrait RCS produit que Monsieur [L] [C] était immatriculé à son nom sous le nom commercial «Modern» à la date de signature du devis le 6 mai 2016.

Sur l'application de l'article 1792 du code civil, l'intimé met en avant le moyen selon lequel le rapport d'expertise mettrait en lumière de nombreux désordres et malfaçons sur chacune des dix fenêtres installées ainsi que sur la porte d'entrée, ce qui nécessiterait la dépose et la remise en place de ladite porte après réalisation de calfeutrements conformes. L'expert aurait estimé que l'immeuble était impropre à sa destination en raison des désordres constatés, de sorte que les articles 1792 et 1792-1 du code civil (prévoyant le régime de la garantie décennale) devraient trouver lieu à s'appliquer

En l'espèce, les travaux de menuiserie réalisés ont eu pour effet de rendre le bien impropre à sa destination de maison d'habitation en raison notamment du défaut d'étanchéité à l'air et à l'eau.

Subsidiairement sur la question de la responsabilité contractuelle, M. [L] avance que, si par extraordinaire la cour ne met pas en 'uvre la responsabilité fondée sur la garantie décennale, elle devrait observer que les conditions afférentes au régime de la responsabilité contractuelle sont réunies, de sorte qu'en application des dispositions de l'article 1231-1 du code civil l'appelant - débiteur d'une obligation contractuelle non-exécutée ou incorrectement exécutée - pourra être condamné au paiement de dommages et intérêts.

Sur l'appel incident, M. [M] critique le premier juge en ce qu'il ne lui a accordé que 500 euros à titre de dommages et intérêts et 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, montants qualifiés de 'dérisoires eu égard au préjudice subi et aux frais de procédure de première instance' (page 10 de ses écritures).

Il soutient ainsi que :

- du fait des malfaçons affectant les fenêtres, sa famille n'a pas pu occuper cette maison de 2016 à novembre 2017,

- ce n'est qu'une fois les conclusions de l'expert déposées, qu'il a pu entreprendre les travaux de remplacement des fenêtres et remédier aux malfaçons comme l'attesteraient ses voisins MM. [F], [H] et [B],

- en conséquence, le préjudice subi ne peut en aucun cas être sous évalué à 500 euros, et le montant sollicité de 6 000 euros ne serait en rien exagéré,

- il a exposé nécessairement des frais pour faire assurer sa défense devant le juge des référés, se faire assister aux opérations d'expertise puis pour assigner au fond, de sorte que la somme allouée au titre des frais irrépétibles de 500 euros serait elle aussi dérisoire ; l'infirmation de cette somme et l'allocation d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile accordée en première instance serait fondée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur la question de la recevabilité de l'action de M. [M]

Le 6 mai 2016, M. [M] signait un bon de commande établi sur papier à en-tête au nom de Modern Fermetures, [C] [L] avec un numéro RCS SIRET 819707373/00018.

Il ne résulte pas de l'étude de cette pièce contractuelle que la relation contractuelle est passée entre M. [M] et une société commerciale.

Lorsque M. [L] a signé ce 'bon de commande', il n'a pas davantage précisé agir en tant que représentant (gérant ou président) d'une société commerciale.

La même analyse et les mêmes remarques doivent être formulées quant à la facture émise le 7 Juillet 2016.

En outre, le virement de 2 500 euros enregistré le 12 juillet 2016 par Mme [M] pour régler les travaux a été fait à l'ordre de Monsieur [L] [C] sur un compte ouvert à son nom.

Dans ces conditions, ces documents démontrent que le lien contractuel unissait M. [M] et M. [L] à titre personnel.

D'autre part, seule la production d'un extrait du Kbis serait susceptible de démontrer qu'à la date de la signature du devis (le 6 mai 2016) M. [L] exerçait déjà une activité sous couvert d'une société commerciale dûment enregistrée et répertoriée.

Or M. [L] s'est abstenu de produire un tel document, en précisant que même s'il avait été établi qu'une telle société existait à cette date, il aurait fallu que l'appelant démontrât que le contrat avait été passé entre M. [M] et ladite société.

La demande de M. [M] est de ce fait recevable. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

2) Sur la demande principale

Les travaux litigieux confiés à M. [L] s'inscrivaient dans le cadre d'une rénovation complète d'un bâtiment acquis par l'intimé avec notamment le renouvellement complet de toutes les menuiseries extérieures.

Il n'est pas contesté par les parties que, par le règlement des factures notamment, M. [L] a réceptionné tacitement les travaux confiés à M. [L].

Dans le rapport d'expertise, les désordres de fenêtres, porte- fenêtres et portes, sont décrits. S'ils ne compromettent pas la solidité de l'ouvrage, en revanche ils le rendent impropre à sa destination, en ce qu'ils empêchent l'étanchéité à l'air et à l'eau du bâti.

M. [L] n'apportent pas d'explications argumentées de nature à permettre d'écarter les constatations techniques faites par l'expert sur la qualité de son travail et les conséquences quant à l'absence d'étanchéité.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le premier juge a fait application des dispositions de l'article 1792 du code civil, retenu la responsabilité de M. [L], et condamné ce dernier à prendre en charge le coût des travaux de reprise de 21 144,25 euros, tel que proposé par l'expert qui a fait référence à un devis établi par l'entreprise Linea.

Le jugement devra être confirmé sur ce point.

3) Sur l'appel incident

Il ressort des pièces du dossier, et notamment des développements de l'expert judiciaire, que M. [M] a acquis la maison située [Adresse 2] pour la rénover et en faire sa résidence principale.

Du fait de la survenue des désordres sur les menuiseries, les travaux de réhabilitation et son entrée dans les lieux ont nécessairement été retardés. Il est à noter que dans ses conclusions du 29 mars 2017, Mme [V] a estimé que la maison était impropre à sa destination depuis le mois de juillet 2016 ; la maison a donc été indisponible au minimum pendant près de 9 mois.

Néanmoins, étant donné que d'autres travaux devaient être réalisés, il est probable que M. [M] ait effectué ou fait réaliser sur cette période d'autres travaux prévus, de sorte que le retard final en lien avec les désordre ne peut être fixé à 9 mois.

Il sera évalué à 4 mois. Aussi y a-t-il lieu d'indemniser le préjudice de jouissance subi par l'intimé par l'allocation d'une somme de 4 000 euros.

D'autre part, au regard de la nature et de la complexité de la procédure, ayant nécessité une première instance en référé pour obtenir la désignation d'un expert, un suivi des opérations d'expertise, puis une nouvelle assignation au fond, le montant alloué au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance, de 500 euros, paraît trop faible.

Il y aura lieu d'infirmer la décision et d'allouer à l'intimé une somme de 3000 euros à ce titre.

4) Sur les demandes annexes

L'appelant, partie succombante, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel. En outre il devra verser une somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens engagés en appel.

En revanche sa demande fondée sur le même article et au même titre sera écartée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Mulhouse le 19 janvier 2021 sauf en ses dispositions qui condamnaient M. [C] [L] à payer à M. [N] [M] deux sommes de 500 euros respectivement à titre de dommages et intérêts et au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure

Et statuant à nouveau dans cette limite,

CONDAMNE M. [C] [L] à payer à M. [N] [M] la somme de 4 000 euros (quatre mille euros) à titre de dommages et intérêts,

CONDAMNE M. [C] [L] à payer à M. [N] [M] la somme de 3 000 euros (trois mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés durant la procédure de première instance

Et y ajoutant

CONDAMNE M. [C] [L] aux dépens de la procédure d'appel,

CONDAMNE M. [C] [L] à payer à M. [N] [M] la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de M. [C] [L] formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 21/01064
Date de la décision : 01/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-01;21.01064 ?
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