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25/11/2022 | FRANCE | N°22/00621

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 25 novembre 2022, 22/00621


MINUTE N° 517/2022





























Copie exécutoire à



- Me Guillaume HARTER



- Me Anne CROVISIER





Le 25/11/2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 25 novembre 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/00621 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HYR3

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Décision déférée à la cour : 24 décembre 2021 par le présidente du tribunal judiciaire de COLMAR





APPELANTS et intimés incident :



Madame [V] [H]

Monsieur [D] [X]

demeurant tous deux [Adresse 1]

[Adresse 1]



représentés par Me Guillaume HARTER, avocat à ...

MINUTE N° 517/2022

Copie exécutoire à

- Me Guillaume HARTER

- Me Anne CROVISIER

Le 25/11/2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 25 novembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/00621 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HYR3

Décision déférée à la cour : 24 décembre 2021 par le présidente du tribunal judiciaire de COLMAR

APPELANTS et intimés incident :

Madame [V] [H]

Monsieur [D] [X]

demeurant tous deux [Adresse 1]

[Adresse 1]

représentés par Me Guillaume HARTER, avocat à la cour.

INTIMÉS et appelants incidents :

Madame [N] [K]

Monsieur [O] [Y]

demeurant tous deux [Adresse 1]

[Adresse 1]

représentés par la SELARL ARTHUS, Société d'Avocats

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Septembre 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Franck WALGENWITZ, Président de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Dominique DONATH faisant fonction

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 10 novembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Franck WALGENWITZ, président et Madame Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Après que le 17 mai 2021, la mairie de [Localité 2] leur ait accordé le permis de construire qu'ils avaient sollicité le 29 mars 2021, Mme [N] [K] et M. [O] [Y] ont débuté des travaux de construction, [Adresse 1], à la fin du mois de juillet 2021.

Sur le fondement des dispositions de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile, le 27 août 2021, M. [D] [X] et Mme [V] [H] ont fait assigner Mme [N] [K] et M. [O] [Y] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Colmar aux fins de voir ordonner la cessation des travaux de construction initiés sous peine d'une astreinte.

Par ordonnance du 24 décembre 2021, le juge des référés a :

- rejeté la demande de M. [D] [X] et Mme [V] [H] ;

- condamné solidairement M. [D] [X] et Mme [V] [H] à payer à Mme [N] [K] et M. [O] [Y] une provision de 4 400 euros ;

- condamné in solidum M. [D] [X] et Mme [V] [H] à supporter les entiers dépens ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [D] [X] et Mme [V] [H] ;

- condamné in solidum M. [D] [X] et Mme [V] [H] à payer à Mme [N] [K] et M. [O] [Y] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le juge a considéré que Mme [X] et M. [H] ne justifiaient pas de la réalité d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite.

Il a fait état de ce qu'il n'était pas contesté que les quatre ouvertures pratiquées dans le mur de la maison de M. [D] [X] et Mme [V] [H] situé en limite de propriété étaient garnies d'un châssis fixe sur lequel était monté un matériau translucide mais opaque, de sorte qu'elles constituaient de simples jours, indépendamment du défaut de respect de la hauteur prescrite à l'article 677 du code civil.

Il a rappelé que si la présence d'un jour dans un mur joignant immédiatement l'héritage d'autrui ne faisait pas naître à la charge de cet héritage une servitude et n'entraînait pour son propriétaire aucune restriction à son droit de propriété, la suppression même d'un simple jour de souffrance était susceptible de constituer un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage.

Il a alors indiqué que l'ensemble des pièces produites dont les différents procès-verbaux de constat, les plans et les photographies, permettaient de constater que la construction de Mme [K] et M. [Y], en limite de leur propre propriété, n'allait obturer le passage de la lumière qu'au niveau de la salle de bain du rez-de-chaussée et très partiellement au niveau de la chaufferie et de la salle de bain de l'étage, la suppression quasi totale de l'apport de la lumière naturelle dans la seule salle de bain du rez-de-chaussée, pièce non principale, et au surplus exposée est, ne constituant pas un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage.

Retenant qu'à la suite de l'assignation, Mme [K] et M. [Y] avaient temporairement cessé les travaux d'édification de leur maison d'habitation et que l'arrêt du chantier générait, d'une part, des frais supplémentaires de montage et démontage d'une grue, et, d'autre part, un retard dans la prise de jouissance de leur logement d'au moins quatre mois, le juge a condamné solidairement M. [X] et Mme [H] à payer à Mme [K] et M. [Y] une provision de 4 400 euros à valoir sur leur indemnisation.

Le 8 février 2022, Mme [H] et M. [X] ont formé appel à l'encontre de cette ordonnance par voie électronique.

Selon ordonnance du 28 février 2022, la présidente de la chambre, en application de l'article 905 du code de procédure civile, a fixé d'office l'affaire à l'audience du 2 septembre 2022.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de leurs conclusions transmises par voie électronique le 24 mai 2022, Mme [H] et M. [X] demandent à la cour de :

- déclarer leur appel recevable et bien fondé ;

y faire droit ;

en conséquence :

- infirmer l'ordonnance de référé civil du tribunal judiciaire de Colmar du 24 décembre 2021 en ce qu'elle a rejeté leur demande, en ce qu'elle les a condamnés solidairement au paiement d'une provision de 4 400 euros ainsi qu'aux dépens et au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle a rejeté leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

statuant a nouveau :

- déclarer leur demande recevable et bien fondée ;

- ordonner la cessation des travaux de construction initiés par Mme [K] et M. [Y] [Adresse 1] sous peine d'une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de l'ordonnance de référé aux fins d'éviter un dommage imminent et de mettre un terme à un trouble manifestement illicite ;

- se réserver compétence pour la liquidation de l'astreinte ;

- débouter Mme [K] et M. [Y] de l'intégralité de leurs demandes, notamment au titre des dommages et intérêts ;

en tout état de cause :

- condamner Mme [K] et M. [Y] aux entiers frais et dépens des deux instances ainsi qu'au paiement de la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouter Mme [K] et M. [Y] de leur demande formée au titre d'un appel incident.

Mme [H] et M. [X] rappellent qu'ils ont saisi le juge des référés pour obtenir sous astreinte la cessation des travaux de construction entrepris par leurs voisins au titre d'un trouble manifestement illicite ou d'un dommage imminent.

Ils exposent que :

- les ouvertures avec châssis fixes translucides contestées qualifiées de jours de souffrance, sont :

- pour les deux premières du rez-de -chaussée, la seule source de lumière de la salle de bain du rez-de-chaussée et de la chaufferie et pour la troisième en rez-de-chaussée, la seule source de lumière côté est du séjour,

- pour l'étage, s'agissant du jour de souffrance triangulaire, la seule source d'éclairage de la salle de bain de l'étage,

- il résulte du procès-verbal de constat, du dossier de demande de permis de construire et des photographies produites que la maison des consorts [K] et [Y] construite à quelques centimètres de la leur, va totalement obstruer le jour de souffrance de la salle de bain du rez-de-chaussée et partiellement obstruer le jour de souffrance de la chaufferie du rez-de-chaussée et de la salle de bain de l'étage.

Ils font valoir que l'obturation de ces jours de souffrance constitue un trouble anormal de voisinage puisque, aucune des deux seules salles de bain de la maison ne bénéficiera plus d'une luminosité normale, ces salles de bain étant orientées à l'est, et donc particulièrement lumineuses et ensoleillées le matin, étant précisé que les jours de souffrance, pour ces deux salles de bain, sont leurs seules sources de luminosité.

Ils s'opposent à l'octroi de dommages et intérêts à M. [Y] et Mme [K] considérant que rien ne commandait la prudence dont ont cru devoir faire preuve les intimés qui ont cessé leurs travaux.

Aux termes de leurs conclusions transmises par voie électronique le 5 juillet 2022, Mme [K] et M. [Y] demandent à la cour de :

sur appel principal :

- déclarer Mme [H] et M. [X] mal fondés en leur appel ;

- les en débouter ainsi que de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

en conséquence :

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle les a déboutés de leurs demandes, sous réserve de l'appel incident ;

sur appel incident et demande additionnelle au titre de l'actualisation des préjudices qu'ils subissent du fait de la procédure menée par les appelants :

- les déclarer recevables en leur appel incident et demande additionnelle ;

- les y dire bien fondés ;

en conséquence :

- infirmer l'ordonnance entreprise du chef du montant des dommages et intérêts alloués ;

et statuant à nouveau :

- condamner solidairement M. [X] et Mme [H] à leur payer une provision de 10 000 euros à titre indemnitaire, dont à déduire les sommes versées au titre de l'exécution provisoire de la décision de première instance ;

en tout état de cause :

- condamner solidairement M. [X] et Mme [H] aux entiers frais et dépens de la procédure, outre un montant de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [K] et M. [Y] font valoir que le mur des appelants, construit en limite de propriété, comporte quatre ouvertures définies comme des jours de souffrance, constituant, dès lors, des ouvertures soumises au régime des dispositions des articles 676 et 677 du code civil, étant précisé que la hauteur des jours de souffrance invoqués n'est pas conforme aux dispositions de ce dernier article puisque les deux jours de souffrance invoqués correspondent à des ouvertures pratiquées à environ 1,60 mètres au-dessus du niveau du sol, soit un mètre plus bas que la hauteur minimale prévue par les dispositions de l'article 677 du code civil.

Ils ajoutent que ce n'est qu'en raison d'une hauteur insuffisante des jours sur le mur de leur immeuble que les appelants pourraient subir, si tel est le cas, une légère diminution d'éclairage d'une pièce accessoire de leur immeuble, la question d'une diminution de l'apport de lumière ne pouvant concerner que la salle de bain située au rez-de-chaussée de la propriété des requérants laquelle ne résulterait que de la hauteur illégale du jour de souffrance donnant sur cette pièce.

Ils en déduisent qu'il n'existe aucun trouble anormal de voisinage, la perte de valeur ou de jouissance invoquée par les consorts [H] ' [X] ne relevant que d'une déclaration d'intention et n'étant nullement démontrée par des éléments probants.

Ils contestent le rapport d'expertise privée produit par les appelants, soulignant que l'expert a pénétré sur leur propriété sans aucune autorisation.

Ils relèvent que si la salle de bain du rez-de-chaussée devait perdre une partie de sa lumière naturelle, il apparaît nécessaire de constater qu'il ne s'agit pas d'une pièce de vie, ce qui est également le cas de la chaufferie-buanderie, simple pièce technique et de la salle de bain située à l'étage comportant un triangle-fenêtre.

Mme [K] et M. [Y] exposent que du fait du retard du chantier de construction de leur maison, le préjudice n'a fait qu'augmenter.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de cessation des travaux

Aux termes des dispositions de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Considération prise de la pertinence des motifs retenus par l'ordonnance entreprise, il y a lieu de la confirmer étant souligné, d'une part, que les pièces de l'immeuble des appelants, concernées par l'obstruction partielle ou totale de leurs jours de souffrances sont deux salles de bain et la chaufferie, lesquelles ne sont pas des pièces principales de vie et, d'autre part, que la suppression de la lumière naturelle dans ces pièces procurée par ces seuls jours de souffrance ne caractérise effectivement pas un trouble anormal du voisinage.

Sur la demande de provision

L'article 835 susvisé prévoit que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge peut accorder une provision au créancier.

Considérant que M. [Y] et Mme [K], suite à leur assignation en référés, ont pris la décision de stopper les travaux de construction en cours et que le trouble manifestement illicite n'a pas été reconnu, leur demande de provision à titre de dommages et intérêts apparaît tout à fait légitime dès lors que le retard qu'ils invoquent a pour origine incontestable l'action diligentée par M. [X] et Mme [H] pour laquelle ces derniers ont été déboutés.

Au regard des frais supplémentaires de montage et de démontage d'une grue qui sont justifiés pour 2400 euros et du retard dans la prise de jouissance qui s'est encore accru du fait de l'appel, il y a lieu de condamner solidairement M. [X] et Mme [H] à payer à M. [Y] et Mme [K] une provision totale de 8000 euros à valoir sur leur indemnisation.

L'ordonnance entreprise est donc infirmée de ce chef.

Sur les dépens et les frais de procédure

L'ordonnance entreprise est confirmée de ces chefs.

A hauteur d'appel, M. [X] et Mme [H] sont condamnés in solidum aux dépens ainsi qu'à payer à M. [Y] et Mme [K] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour leurs frais de procédure exposés à hauteur d'appel ; ils sont déboutés de leur demande d'indemnité sur le fondement de ce même article.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :

INFIRME l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Colmar du 24 décembre 2021 en ce qu'elle a condamné solidairement M. [D] [X] et Mme [V] [H] à payer à Mme [N] [K] et M. [O] [Y] une provision de 4 400 euros ;

Statuant de nouveau, sur ce seul point :

- CONDAMNE solidairement M. [D] [X] et Mme [V] [H] à payer à Mme [N] [K] et M. [O] [Y] une provision de 8000 euros (huit mille euros) ;

CONFIRME pour le surplus, dans les limites de l'appel, l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Colmar du 24 décembre 2021 ;

Y ajoutant :

CONDAMNE in solidum M. [D] [X] et Mme [V] [H] aux dépens de la procédure d'appel ;

CONDAMNE in solidum M. [D] [X] et Mme [V] [H] à payer à M. [O] [Y] et Mme [N] [K] la somme de 1500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour leurs frais de procédure exposés à hauteur d'appel ;

DEBOUTE M. [D] [X] et Mme [V] [H] de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le présidente de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 22/00621
Date de la décision : 25/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-25;22.00621 ?
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