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10/11/2022 | FRANCE | N°20/03405

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 10 novembre 2022, 20/03405


MINUTE N° 490/2022





























Copie exécutoire à



- Me Anne CROVISIER



- Me Noémie BRUNNER





Le 10 novembre 2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 10 novembre 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03405 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HN3W
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Décision déférée à la cour : 17 Septembre 2020 par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG





APPELANT et intimé sur incident :



Monsieur [V] [W],

demeurant [Adresse 2] à [Localité 3]



représenté par Me Anne CROVISIER, avocat à la cour.





INTIMÉE et appela...

MINUTE N° 490/2022

Copie exécutoire à

- Me Anne CROVISIER

- Me Noémie BRUNNER

Le 10 novembre 2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 10 novembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/03405 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HN3W

Décision déférée à la cour : 17 Septembre 2020 par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANT et intimé sur incident :

Monsieur [V] [W],

demeurant [Adresse 2] à [Localité 3]

représenté par Me Anne CROVISIER, avocat à la cour.

INTIMÉE et appelante sur incident :

La S.A.S. DE LAGE LANDEN LEASING, prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège social : [Adresse 1] à [Localité 4].

représentée par Me Noémie BRUNNER, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Catherine GARCZYNSKI, Conseiller

Madame Myriam DENORT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRET contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 15 septembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Par actes sous-seing privés n°91140009750 du 15 juin 2018 et n°91140010376 du 1er octobre 2018, M. [W], chirurgien-dentiste, a souscrit auprès de la société De Lage Landen Leasing deux contrats de prêt successifs pour financer l'acquisition d'équipements médicaux, d'un montant respectif de 9 338,12 euros et de 13 590,05 euros, tous deux remboursables en 10 mensualités.

Des échéances étant restées impayées à compter du 15 décembre 2018 et après une mise en demeure restée infructueuse, la société De Lage Landen Leasing a saisi le président du tribunal de grande instance de Strasbourg d'une requête en injonction de payer à laquelle il a été fait droit par une ordonnance du 10 septembre 2019, signifiée le 19 septembre 2019, par laquelle M. [W] s'est vu enjoindre de payer à la requérante la somme de 17 205,90 euros, outre les intérêts, frais et dépens.

M. [W] a formé opposition à cette ordonnance, sans toutefois constituer avocat devant le tribunal, devenu le tribunal judiciaire de Strasbourg, qui, par jugement réputé contradictoire du 17 septembre 2020, l'a condamné à payer à la société De Lage Landen Leasing la somme de 17 205,90 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 7,26 % l'an à compter du 26 mars 2019, ainsi que la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens incluant ceux de la procédure d'injonction de payer.

Il a rejeté les autres demandes et assorti ce jugement de l'exécution provisoire.

M. [W] a interjeté appel de ce jugement par déclaration datée du 16 novembre 2020.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 26 juillet 2021, il sollicite l'infirmation du jugement déféré et que la cour, statuant à nouveau, déboute la société De Lage Landen Leasing de l'intégralité de ses demandes, en jugeant que les deux contrats de prêt litigieux ont été conclus en violation des obligations légales, et qu'elle condamne l'intimée aux entiers frais et dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ailleurs, M. [W] sollicite le rejet de l'appel incident de la société De Lage Landen Leasing ainsi que la condamnation de cette dernière aux entiers frais et dépens nés de l'appel incident.

À l'appui de son appel, M. [W] soutient que :

- même si le matériel acquis et financé par les contrats signés avec la société De Lage Landen Leasing est un matériel professionnel, lui-même, dentiste de profession, est profane s'agissant des modalités de financement, les particularités du contrat ne relevant pas de sa sphère professionnelle,

- les contrats de prêt ne comportent pas l'ensemble des informations obligatoires, en violation des obligations légales,

- il n'a disposé ni d'informations complètes sur les modalités de financement, ni d'un délai de rétractation.

Sur l'appel incident de la société De Lage Landen Leasing, M. [W] déplore l'absence d'information reçue et soutient que l'article 4 des conditions générales relatives à l'intérêt de retard au taux de 1 % par mois s'analyse en une clause pénale, manifestement excessive et devant être réduite.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 30 septembre 2021, la société De Lage Landen Leasing sollicite le rejet de l'appel principal de M. [W] et la confirmation du jugement déféré dans la limite de son appel incident, par lequel elle sollicite l'infirmation de ce jugement en ce qu'il a appliqué des intérêts au taux de 7,26 % par an, au lieu de 12 % par an (1 % par mois).

Elle demande que la cour, statuant à nouveau, condamne M. [W] à lui payer la somme de 17 205,90 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 1 % par mois à compter du 26 mars 2019.

En tout état de cause, elle sollicite que M. [W] soit débouté de l'ensemble de ses demandes et qu'il soit condamné aux entiers dépens d'appel ainsi qu'au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société De Lage Landen Leasing souligne que, si M. [W] invoque un manque d'information lors de la souscription des contrats, et en particulier concernant le taux d'intérêt, il ne se fonde sur aucun texte légal, aucune convention, et ses demandes doivent donc être rejetées pour défaut de fondement juridique.

En tout état de cause, il ne prouve pas ne pas avoir bénéficié d'informations préalables lors de la souscription des prêts et ne précise pas les obligations légales faisant défaut sur ces contrats.

Elle ajoute :

- qu'elle devait seulement s'assurer que le financement n'était pas abusif par rapport au matériel ; or, le montant des deux prêts correspond au prix des équipements ;

- que M. [W] ne prouve pas que, lors de la souscription du crédit litigieux, sa situation financière imposait l'accomplissement de son devoir de mise en garde par la banque ; de plus, celui-ci ne pèse qu'à l'égard d'un emprunteur profane, alors que lui-même était un professionnel averti, expérimenté ;

- que, les contrats ayant été conclus pour les besoins de son activité professionnelle, l'appelant disposait, lors de leur souscription, de toutes les informations utiles pour lui permettre d'apprécier l'opportunité des engagements souscrits, pour connaître sa solvabilité et savoir si le prêt était excessif au regard de ses capacités de remboursement.

De plus, les contrats de prêt indiquent les modalités de paiement et notamment les taux d'intérêts. M. [W] a déclaré avoir pris connaissance des conditions générales et particulières du contrat et les accepter. Un échéancier lui a été transmis.

Enfin, les dispositions de l'article L. 121-20 du code de la consommation relatives au délai de rétractation ne sont pas applicables « lorsqu'elles ont un rapport direct avec les activités exercées dans le cadre d'une profession », ce qui était le cas en l'espèce.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 5 octobre 2021.

MOTIFS

En premier lieu, il convient de souligner que, si M. [W] dénonce, à l'encontre de la société De Lage Landen Leasing, organisme prêteur au titre des deux contrats litigieux, l'absence de mention des informations obligatoires en violation des obligations légales, il ne précise pas quelles sont ces informations obligatoires qui n'ont pas été portées à sa connaissance et quelles sont les obligations légales qui auraient été ainsi violées par l'intimée.

De plus, il ne sollicite pas l'annulation de ces contrats de prêts, qui seule pourrait justifier à ce titre le rejet de la demande de la société De Lage Landen Leasing en paiement de sa créance relative à ces prêts.

Par ailleurs, s'agissant du manquement de l'organisme prêteur à son devoir d'information sur les modalités de financement invoqué par M. [W], ainsi qu'à son devoir de mise en garde, de tels manquements, à supposer qu'ils soient démontrés, seraient susceptibles d'engager la responsabilité de la société De Lage Landen Leasing et, en conséquence, d'entraîner sa condamnation au versement de dommages et intérêts, mais non pas le rejet de sa demande en paiement de sa créance résultant de ce prêt. Or, M. [W] ne présente non plus aucune demande en réparation d'un quelconque préjudice causé par un tel manquement de l'intimée à ces devoirs d'information et de mise en garde.

Enfin, sur le non-respect du délai de rétractation de l'emprunteur, il ressort des dispositions de l'article L 311-1 du code de la consommation, telles qu'en vigueur à la date de conclusions des deux contrats de prêt litigieux, qu'était considérée comme emprunteur ou consommateur, au sens de ces dispositions, toute personne physique qui était en relation avec un prêteur ou un établissement de crédit, dans le cadre d'une opération de crédit réalisée ou envisagée dans un but étranger à son activité commerciale ou professionnelle.

Or, les prêts litigieux ont été souscrits par M. [W] afin d'acquérir du matériel destiné à son activité professionnelle de chirurgien-dentiste. Il ne s'agissait donc pas d'une opération de crédit réalisée dans un but étranger à son activité professionnelle, si bien que les dispositions du code de la consommation alors en vigueur, relatives aux opérations de crédit et notamment au délai de rétractation découlant des articles L.312-19 et suivants du code de la consommation, ne sont applicables à aucun des deux contrats de prêt en cause.

Dès lors, aucun motif de rejet de la demande de la société De Lage Landen Leasing invoqué par M. [W] ne peut être accueilli et la réalité de la créance de cette dernière au titre des deux prêts litigieux, de 17 205,90 euros au total, étant démontrée, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a condamné l'emprunteur au remboursement de ce montant.

S'agissant des intérêts au taux majoré de 12 % l'an réclamés par la société De Lage Landen Leasing sur le montant de sa créance, prévus par chacun des deux contrats de prêts comme étant applicables aux sommes restées impayées, il s'agit bien d'une clause pénale dont l'emprunteur a été informé dans la mesure où elle figure dans les deux contrats, et que le juge peut modérer si elle est manifestement excessive, en application de l'article 1231-5 du code civil.

Or, d'une part les sommes dues au titre du premier contrat de prêt n°91140009750 du 15 juin 2018 ne consistent qu'en 4 mensualités impayées, et une autre indemnité a déjà été mise en compte au titre du prêt n°91140010376 du 1er octobre 2018, représentant 10 % de la totalité des échéances restant à échoir, soit 280,64 euros. Au vu de cette situation, des frais de recouvrement mis en compte et du taux d'intérêt contractuel, cette clause pénale apparaît manifestement excessive, et le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a affecté les sommes dues par M. [W] du seul taux d'intérêt contractuel de 7,26 % l'an à compter du 26 mars 2019, date de réception de la mise en demeure.

III - Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions principales, il le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais non compris dans les dépens.

L'appel de M. [W] étant rejeté, ce dernier assumera les dépens de l'appel et sera débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a engagés en appel. En revanche, à ce même titre et sur le même fondement, il sera condamné à verser la somme de 1 500 euros à la société De Lage Landen Leasing, au titre des frais exclus des dépens que celle-ci a engagés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu entre les parties par le tribunal de grande instance de Strasbourg le 17 septembre 2020,

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [V] [W] aux dépens de l'appel,

CONDAMNE M. [V] [W] à payer à la SAS De Lage Landen Leasing la somme de 1 500,00 (mille cinq cents) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de M.[V] [W] présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/03405
Date de la décision : 10/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-10;20.03405 ?
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