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21/10/2022 | FRANCE | N°20/02851

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 2 a, 21 octobre 2022, 20/02851


MINUTE N° 455/2022





























Copie exécutoire à



- Me Guillaume HARTER



- Me Raphaël REINS



- Me Christine BOUDET



- Me Marion BORGHI





Le 21 octobre 2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 21 Octobre 2022





Numéro d'inscription au répertoir

e général : 2 A N° RG 20/02851 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HM5U



Décision déférée à la cour : 21 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE



APPELANTS sous le n° 20/2851 et INTIMÉS sous le n° 2A 20/3039 :



1) Madame [N] [H] [G] [P] épouse [T],

demeurant [Adresse 11]
...

MINUTE N° 455/2022

Copie exécutoire à

- Me Guillaume HARTER

- Me Raphaël REINS

- Me Christine BOUDET

- Me Marion BORGHI

Le 21 octobre 2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 21 Octobre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 20/02851 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HM5U

Décision déférée à la cour : 21 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANTS sous le n° 20/2851 et INTIMÉS sous le n° 2A 20/3039 :

1) Madame [N] [H] [G] [P] épouse [T],

demeurant [Adresse 11]

2) Madame [B] [E] [G] [P] épouse [A],

demeurant [Adresse 2]

3) Monsieur [R] [I] [G] [P],

demeurant [Adresse 6]

4) Madame [B] [R] [X] [G] veuve [P],

demeurant [Adresse 12]

5) Monsieur [V] [T],

demeurant [Adresse 4]

6) Monsieur [F] [T]

demeurant [Adresse 5]

7) Monsieur [M] [T],

demeurant [Adresse 11]

8) Monsieur [J] [A]

demeurant [Adresse 9]

9) Monsieur [S] [A],

10) Madame [U] [A],

demeurant tous deux [Adresse 2]

représentés par Me Guillaume HARTER, avocat à la cour.

avocat plaidant ; Me PETER, avocat au barreau de Mulhouse

INTIMÉS sous les n° 20/2851 et 2A 20/3039 et appelants sur incident :

Monsieur [Z] [L],

demeurant [Adresse 10]

représenté par Me Raphaël REINS, avocat à la cour.

avocat plaidant ; Me OEUVRARD (cabinet BELLOC), avocat au barreau de LYON

Madame [O] [D],

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Christine BOUDET, avocat à la cour

avocat plaidant ; Me YAKOVLEV (cabinet LACOEUILHE) avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE sous les n° 20/2851 et 2A 20/3039 :

La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT RHIN

ayant son siège social [Adresse 7].

assignée le 23 décembre 2021 à personne morale, n'ayant pas constitué avocat.

INTIMEE sous le n° 20/2851 et APPELANTE sous 2A 20/3039 :

La FONDATION DE LA MAISON DU DIACONAT prise en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 1]

représentée par la SCP CAHN G./ CAHN T./ BORGHI, avocat à la cour

avocat plaidant : Me PRADIGNAC, avocat au barreau de Colmar

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Mai 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseiller

Madame Nathalie HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Dominique DONATH faisant fonction

ARRET réputé contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 1er juillet 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Mme Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES

Le 22 octobre 2011, M. [R] [B] [P] a subi une appendicectomie pour une péritonite appendiculaire, opération réalisée par le docteur [L] au sein de la clinique [15], à [Localité 14], rachetée par la Fondation de la Maison du Diaconat.

Suite à des douleurs abdominales, il a été hospitalisé le 31 août 2015 à la clinique du Diaconat Fonderie puis est rentré à son domicile avant d'être hospitalisé à nouveau le 4 septembre 2015, puis encore le 17 septembre 2015 et enfin le 22 septembre 2015. Au cours de cette quatrième hospitalisation, une échographie abdominale et un scanner abdominal ont été réalisés. Ils ont fait apparaître « une volumineuse collection bien limitée contenant du fil métallique, en faveur d'un textilome en fosse iliaque droite de 12,6 cm », autrement dit une compresse.

M. [R] [B] [P] a été transféré au service de chirurgie digestive pour une intervention portant sur le retrait de la compresse, qui devait être pratiquée par le docteur [D]. Il est cependant décédé le [Date décès 8] 2015, avant l'opération prévue, après transfert à l'hôpital [13] de [Localité 14].

Au cours du dernier trimestre 2016, Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], son épouse, ainsi que M. [R] [I] [G] [P], Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], et Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], ses enfants, ont saisi le tribunal de grande instance de Mulhouse d'une action en responsabilité dirigée contre les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat.

Ils ont également saisi le juge des référés du même tribunal qui, par décision du 3 janvier 2017, a ordonné une expertise médicale aux fins de recherche des causes de la mort de [R] [B] [P]. L'expert finalement désigné, le docteur [C] [Y], a signé son rapport le 8 janvier 2018.

Alors que, par ordonnance du 2 mai 2017, le juge de la mise en état avait ordonné le sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise judiciaire, les demandeurs ont repris l'instance par acte du 19 juin 2018, par lequel MM. [F] [T], [V] [T], [S] [A] et Mme [W] [A] sont intervenus volontairement. MM. [M] [T] et [J] [A] sont intervenus volontairement par des écritures du 2 juillet 2019.

Par jugement réputé contradictoire du 21 juillet 2020, le tribunal, devenu le tribunal judiciaire de Mulhouse, a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- dit que [R] [B] [P] avait subi une perte de chance de ne pas décéder, due aux fautes des docteurs [L] et [D] et de la Fondation de la Maison du Diaconat, fixée à 50 % et dit que ces derniers étaient tenus, in solidum, à l'égard des victimes,

- condamné les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat, in solidum, à payer à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], M. [R] [I] [G] [P], Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], et Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], en leur qualité d'ayants droits de M. [R] [B] [P], les sommes de :

* 10 000 euros au titre de la perte de chance de survie par M. [R] [B] [P],

* 25 000 euros au titre des souffrances endurées par M. [R] [B] [P],

le tout augmenté des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020,

- rejeté les demandes d'indemnisation, au titre des préjudices précités, de MM. [F] [T], [V] [T], [S] [A], [M] [T], [J] [A] et de Mme [U] [A],

- condamné les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat, in solidum, à payer à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], les sommes de :

* 10 000 euros au titre du préjudice d'affection,

* 15 009,80 euros au titre de la perte de revenus,

* 1 500 euros au titre du préjudice d'accompagnement,

le tout augmenté des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020,

- condamné les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat, in solidum, à payer à Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], à M. [R] [I] [G] [P] et à Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], la somme de 6 000 euros chacun au titre du préjudice d'affection, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020,

- rejeté la demande d'indemnisation de Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], de M. [R] [I] [G] [P] et de Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], au titre d'un préjudice d'accompagnement,

- condamné les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat, in solidum, à payer à MM. [F] [T], [V] [T], [S] [A] et à Mme [U] [A] la somme de 1 500 euros chacun au titre du préjudice d'affection, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020,

- rejeté la demande d'indemnisation de MM. [J] [A] et [M] [T] au titre d'un préjudice d'affection,

- dit qu'entre les défendeurs, dans les préjudices subis par M. [R] [B] [P] et les personnes précitées :

* le docteur [L] avait une part de responsabilité fixée à 45 %,

* le docteur [D] avait une part de responsabilité fixée à 10 %,

* la Fondation de la Maison du Diaconat avait une part de responsabilité fixée à 45 %,

- condamné les docteurs [L] et [D] à garantir la Fondation de la Maison du Diaconat de toute somme versée, à quelque titre que ce soit, suite au jugement, aux consorts [X] [G] - [G] [P] ' [T] - [A], et ce dans la limite de 45 % pour le docteur [L] et 10 % pour le docteur [D], de l'ensemble des condamnations en principal, intérêts et frais au profit desdits consorts,

- rejeté le surplus de la demande de garantie de la Fondation de la Maison du Diaconat,

- condamné les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat, in solidum, à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

* à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], la somme de 1 500 euros,

* à Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], M. [R] [I] [G] [P] et Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], la somme de 500 euros chacun,

- rejeté les demandes de MM. [F] [T], [V] [T], [S] [A], [J] [A], [M] [T] et de Mme [U] [A] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat, in solidum, aux dépens, y compris ceux de la procédure de référé RG 16/333, dont les frais d'expertise, à l'exception de ceux exposés par MM. [J] [A] et [M] [T],

- condamné MM. [J] [A] et [M] [T], les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat à supporter, chacun, leurs propres charges.

Le tribunal a rappelé les dispositions de l'article L.1142-1 du code de la santé publique énonçant notamment la responsabilité des professionnels de santé et de tout établissement, service ou organisme dans lequel sont réalisés des actes de soins, vis-à-vis des conséquences dommageables d'actes de diagnostic ou de soins en cas de faute.

Il a rappelé les termes du rapport d'expertise judiciaire selon lesquels une compresse a été laissée en fosse iliaque droite du patient et constitue un dysfonctionnement dans l'acte chirurgical, car il appartient au chirurgien responsable de l'intervention, assisté de l'infirmière circulante de bloc opératoire, de vérifier notamment le compte des compresses.

Cet oubli est la cause probable d'un abcès profond dont les conséquences peuvent être une infection sévère, avec endocardite infectieuse responsable d'une décompensation cardiaque chez un patient initialement fragile d'un point de vue cardio-vasculaire, le diagnostic d'endocardite infectieuse étant ici confirmé par les hémocultures. Si la preuve de la porte d'entrée n'est pas absolue, les plaintes et signes fonctionnels orientés vers l'appareil digestif, associés au textilome et aux signes d'infection profonde orientent le diagnostic de sepsis profond sur corps étranger digestif avec une quasi-certitude.

L'état cardiaque altéré est la conséquence de l'état antérieur mais aussi de la décompensation liée à l'infection profonde dont il est impossible de venir à bout sans pratiquer l'ablation du corps étranger vraisemblablement infecté.

Le docteur [D], qui a vu le patient le 30 septembre 2015 et qui a posé l'indication opératoire de reprise chirurgicale pour extraire le corps étranger, a tardé à intervenir. Mais rien ne permet d'affirmer qu'en cas de chirurgie effectuée plus précocement, le décès ne serait pas survenu, puisque le risque per-opératoire était évalué par l'équipe du chirurgien anesthésiste à 50 %.

En conséquence, le tribunal a retenu une négligence fautive du docteur [L], en laissant un textilome dans l'abdomen du patient, celui-ci ayant contresigné avec l'infirmière le compte de compresses, suite à l'intervention chirurgicale du 22 octobre 2011.

Cependant, il incombait à l'infirmière panseuse de s'assurer de l'exactitude du nombre de compresses données et retirées, cette tâche s'inscrivant dans le cadre des actes et soins hospitaliers courants, effectués sous l'autorité de l'établissement de soins. Cela justifiait de retenir la responsabilité de la Fondation de la Maison du Diaconat, in solidum avec le docteur [L], aucun transfert du lien de subordination ou de préposition ne pouvant être retenu, de l'établissement vers le médecin libéral auquel le tribunal n'a pas retenu la qualité de commettant occasionnel, s'agissant de la faute de l'infirmière panseuse.

Enfin, s'agissant de la responsabilité du docteur [D], le tribunal, se référant aux conclusions de l'expert, a retenu un manquement de ce chirurgien à des soins consciencieux, conformes aux données acquises de la science, dès lors que, le médecin anesthésiste réanimateur ayant donné un avis favorable pour une chirurgie sous anesthésie générale à partir du 8 octobre à 17 heures, le docteur [D] avait elle-même retenu l'hypothèse d'une collection surinfectée entretenant le sepsis, avec risque de valvulopathie par endocardite infectieuse sur valve pathologique, risque de décompensation cardiaque brutale chez un patient ayant présenté deux arrêts cardiaques et risquant, à tout moment, de décompenser, en raison de son état cardio-vasculaire précaire, entretenu par le sepsis profond.

Dans le cadre de l'appel en garantie formé par la Fondation de la Maison du Diaconat, pour retenir les parts de responsabilité respectives des chirurgiens et de cette dernière, le tribunal a tenu compte des conclusions de l'expertise judiciaire, précisant que, si le défaut de réaction du docteur [D] avait contribué à l'aggravation des souffrances endurées, celle-ci apparaissait très limitée dans le temps, au vu de la date à laquelle son intervention aurait dû être pratiquée et de la date du décès, survenu le [Date décès 8] 2015. De plus, la faute de l'infirmière, salariée de la clinique, était de même importance que celle du docteur [L], compte tenu de sa mission lors de l'opération chirurgicale.

Concernant les préjudices de M. [R] [B] [P], victime directe, le tribunal a retenu une perte de chance de survie de 50 % au regard de l'état de santé antérieur de la victime, âgée de 79 ans et présentant de lourdes comorbidités, et enfin des risques de décès per-opératoire évalués à 50 %.

Les autres motifs du jugement déféré concernant la réparation des divers préjudices de la victime directe et des victimes par ricochet seront rappelés dans les motifs du présent arrêt.

Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], M. [R] [I] [G] [P], M. [V] [T], M. [F] [T], M. [M] [T], M. [J] [A], M. [S] [A], Mme [U] [A] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration datée du 6 octobre 2010.

Par leurs dernières conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 19 avril 2021, ils sollicitent au visa des articles 1217, 1231-1 nouveau, et 1242 al.5 nouveau du code civil, l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et que la cour, statuant à nouveau :

- déclare les docteurs [L] et [D] ainsi que la Fondation de la Maison du Diaconat solidairement et entièrement responsables du préjudice qu'ils ont subi,

- condamne solidairement les docteurs [L] et [D], ainsi que la Fondation de la Maison du Diaconat, à leur payer, eux-mêmes venant aux droits de M. [R] [B] [P], les sommes suivantes à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la demande :

* 50 000 euros au titre du pretium doloris,

* 20 000 euros au titre de la perte de chance de survie,

- condamne solidairement les docteurs [L] et [D], ainsi que la Fondation de la Maison du Diaconat, à payer à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], les sommes suivantes à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la demande :

* 40 000 euros au titre du préjudice d'affection,

* 62 582,85 euros au titre des pertes de revenus,

* 5 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et le même montant pour la procédure d'appel,

- condamne solidairement les docteurs [L] et [D], ainsi que la Fondation de la Maison du Diaconat, à payer à Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], à M. [R] [I] [G] [P] et à Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A] les sommes suivantes à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la demande, soit pour chacun d'eux :

* 30 000 euros au titre du préjudice d'affection,

* 5 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et le même montant pour la procédure d'appel,

- condamne solidairement les docteurs [L] et [D], ainsi que la Fondation de la Maison du Diaconat, à payer à M. [F] [T], M. [V] [T], M. [S] [A] et Mme [U] [A] les sommes suivantes à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la demande, soit pour chacun d'eux :

* 15 000 euros au titre du préjudice d'affection,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et le même montant pour la procédure d'appel,

- condamne solidairement les docteurs [L] et [D], ainsi que la Fondation de la Maison du Diaconat, à payer à M. [J] [A] et M. [M] [T] les sommes suivantes à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la demande, soit pour chacun d'eux 10 000 euros au titre du préjudice d'affection.

Les appelants demandent également que la cour déboute les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat de l'ensemble de leurs conclusions au titre des appels incidents et, en tout état de cause :

- déclare l'arrêt à intervenir commun et opposable à la CPAM du Haut-Rhin,

- condamne solidairement les docteurs [L] et [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, y compris ceux de la procédure de référé expertise.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 14 juin 2021, le docteur [L] sollicite le rejet des appels principaux et de l'ensemble des demandes des autres parties, ainsi que la confirmation du jugement déféré, sauf en ce qu'il a condamné in solidum le docteur [D], la Fondation de la Maison du Diaconat et lui-même, à payer à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], à M. [R] [I] [G] [P], à Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], et à Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], en leur qualité d'ayants droits de M. [R] [B] [P], les sommes de 10 000 euros au titre de la perte de chance de survie de M. [R] [B] [P] et 25 000 euros au titre des souffrances endurées par ce dernier.

Il demande à la cour d'infirmer le jugement déféré dans la limite de son appel incident et de :

- retenir que M. [R] [B] [P] présentait un état antérieur et que la perte de chance d'éviter le décès ne saurait excéder 50 % ;

- limiter sa part de responsabilité à 45 % de cette perte de chance,

- débouter la clinique du Diaconat de sa demande de mise hors de cause, s'agissant de l'oubli de compresse et de sa demande de garantie, en ce qu'elle est dirigée à son encontre,

- réduire la réparation des préjudices sollicités par les consorts [P], M. [A] et M. [T] comme établis au sein de ses écritures,

- dire que la liquidation des préjudices des requérants agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité d'ayant droits, strictement imputables à son manquement, sera établie comme suit :

* les souffrances endurées : 5 625 euros,

* le préjudice d'affection du conjoint survivant : 4 500 euros,

* le préjudice économique du conjoint survivant : 6 754,41 euros,

* le préjudice d'accompagnement du conjoint survivant : 675 euros,

* le préjudice d'affection pour chacun des enfants : 2 700 euros,

* le préjudice d'affection pour chacun des petits-enfants : 675 euros,

- débouter les consorts [P], M. [A] et M. [T] du surplus de leurs demandes,

En tout état de cause :

- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la CPAM du Haut-Rhin,

- rejeter toute demande de condamnation dirigée à son encontre, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, s'agissant des frais irrépétibles à hauteur d'appel,

- condamner toute partie succombante à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens des deux procédures d'appel.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 11 juin 2021, le docteur [D] sollicite la réformation du jugement déféré en ce qu'il a :

- retenu une perte de chance de ne pas décéder, pour M. [R] [B] [P], due à la faute du docteur [L] et de la sienne et de celle de la Fondation de la Maison du Diaconat, évaluée à 50 %,

- en ce qu'il les a condamnés tous trois à indemniser les préjudices des consorts [P],

- en ce qu'il l'a condamnée à garantir la Fondation de la Maison du Diaconat de toute somme versée à hauteur de 10 %,

- en ce qu'il a condamné, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile le docteur [L], elle-même et la Fondation de la Maison du Diaconat, aux sommes de 1 500 euros au profit de Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], et de 500 euros au profit des consorts [A] et [T] ainsi qu'aux dépens.

Elle demande que la cour, statuant à nouveau :

À titre principal :

- déboute les consorts [P], M. [A] et M. [T] de l'intégralité des demandes dirigées à son encontre,

- déboute la Fondation de la Maison du Diaconat de son appel en garantie formulé à son encontre,

- rejette toute demande de condamnation dirigée à son encontre au titre de l'article 700 du code de procédure civile, que ce soit pour la procédure de première instance ou pour la procédure d'appel,

- condamne les consorts [P], M. [A] et M. [T] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la procédure, en ce compris les frais d'expertise,

À titre subsidiaire, elle demande que la cour dise que sa responsabilité est limitée à une fraction des souffrances endurées.

À titre infiniment subsidiaire, elle demande que la cour :

- dise que sa responsabilité ne saurait excéder 10 %,

- réduise les prétentions indemnitaires des consorts [P], de M. [A] et de M. [T] à de plus justes proportions.

Par ses conclusions récapitulatives transmises par voie électronique le 11 juin 2021, la Fondation de la Maison du Diaconat sollicite le rejet de l'appel principal et de l'ensemble des conclusions des consorts [P], ainsi que leur condamnation aux entiers frais et dépens et au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Formant appel incident, elle sollicite, à titre principal, l'infirmation du jugement déféré et que la cour, statuant à nouveau, déboute les consorts [P] de leurs conclusions et les condamne aux entiers frais et dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, si la cour retenait sa responsabilité, elle sollicite :

- l'infirmation du jugement déféré sur la question de la solidarité et que la cour, statuant à nouveau sur ce point, dise n'y avoir lieu à condamnation solidaire entre les parties.

- l'infirmation du jugement déféré concernant les souffrances endurées et que la cour, statuant à nouveau sur ce point, la condamne à prendre en charge 25 % des montants alloués à ce titre et à indemniser Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], venant aux droits de son mari décédé, au versement d'une somme maximale de 6 250 euros au titre des souffrances endurées,

- l'infirmation du jugement déféré concernant la perte de chance de survie sollicitée et que la cour, statuant à nouveau sur ce point, déboute Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], venant aux droits de son mari décédé, de toute demande à ce titre,

- l'infirmation du jugement déféré concernant le préjudice d'accompagnement de Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], et que la cour, statuant à nouveau sur ce point, la déboute de toute demande à ce titre,

- l'infirmation du jugement déféré concernant les appels en garantie et que la cour, statuant à nouveau sur ce point, condamne les docteurs [L] et [D] à la garantir de toutes condamnations pouvant intervenir à son encontre, et ce sur un fondement « contractuel quasi délictuel » et qu'elle rejette tout éventuel appel en garantie à son encontre,

Elle demande que la cour, en tout état de cause :

- déboute les consorts [P], [A] et [T] de leur appel incident et qu'elle diminue leurs demandes à de plus justes montants,

- confirme le jugement déféré en ce qu'il a considéré qu'il existe une perte de chance de 50 % concernant les conséquences du décès de M. [R] [B] [P] et en ce qu'il a fait application de ce taux de perte de chance, s'agissant des postes de préjudice en lien direct avec le décès,

- confirme le jugement déféré concernant le préjudice d'affection des ayants droits de M. [R] [B] [P], concernant le préjudice d'accompagnement des ayants droits de M. [R] [B] [P] autres que Mme [P] et concernant le préjudice économique,

- condamne les docteurs [L] et [D] à la garantir de toutes condamnations pouvant intervenir à son encontre, sur un fondement quasi délictuel,

- déboute les docteurs [L] et [D] de l'ensemble de leurs demandes en tant qu'elles sont dirigées contre elle,

- rejette tout éventuel appel en garantie à son encontre,

- partage les frais et dépens dans la limite de la succombance.

Bien que régulièrement assignée par acte signifié le 23 décembre 2020 par acte remis à personne morale, la CPAM de [Localité 14] n'a pas constitué avocat en appel. Le présent arrêt sera donc réputé contradictoire.

*

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties ayant constitué avocat, la cour se réfère à leurs conclusions notifiées et transmises aux dates susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 07 décembre 2021.

MOTIFS

I ' Sur les responsabilités

Les appelants sollicitent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité solidaire du docteur [L], de la Fondation de la Maison du Diaconat et du docteur [D], dont les manquements respectifs ont concouru au préjudice.

Ils soulignent que, mise à part la collection infectieuse issue de la compresse oubliée, aucune autre cause de l'infection sévère qui a provoqué un arrêt cardiaque n'est envisagée par l'expert, qui relève un second manquement aux règles de l'art dans le cadre de la prise en charge de M. [R] [B] [P], à travers le retard de l'intervention de reprise chirurgicale par le docteur [D]. Sur ce point, ils ajoutent que l'expert établit que le retard thérapeutique a participé, même partiellement, à la survenue du dommage, évaluant que la prise en charge tardive a préjudicié à M. [R] [B] [P], dans la mesure d'une perte de chance de 50 %. De plus, le docteur [D] avait elle-même considéré que le textilome infecté était à l'origine de l'infection présentée par M. [R] [B] [P] et décidé qu'il convenait de retirer la collection infectieuse, pour le bénéfice du patient.

Ils s'associent aux conclusions du docteur [L] selon lesquelles la responsabilité de la Fondation de la Maison du Diaconat est engagée solidairement avec lui et considèrent que l'éventuel partage de responsabilité entre les docteurs [L] et [D] ne leur est pas opposable, tous ayant concouru à la réalisation du dommage, à savoir le décès de M. [R] [B] [P].

Le docteur [L] ne conteste pas la décision du tribunal en ce qu'elle a retenu une perte de chance d'éviter le décès de 50 %, en l'absence de lien de causalité direct, certain et exclusif entre l'oubli de compresses en 2011 et le décès de M. [R] [B] [P] en 2015, et en ce qu'elle a fixé sa part de responsabilité à 45 % de cette perte de chance.

L'oubli de compresses ne peut selon lui être considéré comme le seul événement ayant concouru au décès. Il invoque également l'état antérieur, qui ne peut être inférieur à 20 % au regard des pathologies cardiaques et facteurs de comorbidité dont souffrait M. [R] [B] [P] avant l'intervention du 22 novembre 2011, ainsi que le retard de prise en charge du docteur [D].

L'expert ayant évalué à 50 % le taux de perte de chance d'éviter le décès si le docteur [D] était intervenu plus tôt, et l'oubli de compresses ne pouvant lui-même être à l'origine que d'une perte de chance, le docteur [L] propose de retenir une responsabilité partagée par moitié entre, d'une part les co-responsables de l'oubli de compresses, lui-même et la clinique du Diaconat, et d'autre part le docteur [D], d'où une perte de chance maximale de 50 % en lien avec l'oubli de la compresse, après déduction de la part imputable à l'état antérieur.

Il s'oppose aux moyens soulevés par la Fondation de la Maison du Diaconat, qui conteste le partage de responsabilité par moitié entre eux, et soutient que l'oubli de compresse, lors d'une intervention chirurgicale, implique un partage de responsabilité entre le chirurgien et la clinique qui emploie l'aide opératoire, le comptage des compresses étant assuré par l'infirmière de bloc opératoire et la « check-list » prévue étant cosignée par eux deux.

Contestant ainsi la qualité de commettant occasionnel vis-à-vis de l'infirmière, il invoque les dispositions des articles L.6113-1 et R.4311-3 du code de la santé publique, reprend les motifs du jugement déféré et fait valoir que :

- seule la clinique a qualité de commettant et est tenue à ce titre de répondre des manquements de son personnel salarié dans l'exercice de ses fonctions, l'infirmière du bloc opératoire étant effectivement sa salariée,

- il n'existe des liens de subordination juridique entre chirurgien et infirmières que s'ils ont été prévus contractuellement,

- l'expert a lui-même retenu un partage de responsabilité pour moitié entre le chirurgien en charge de l'intervention et la clinique dont l'aide opératoire est salariée.

La Fondation de la Maison du Diaconat soutient que les conditions juridiques de la mise en 'uvre de sa responsabilité ne sont pas remplies au motif que l'expert conclut à l'absence de lien de causalité entre l'oubli de la compresse et le sepsis profond présenté par M. [R] [B] [P], avec hospitalisation, ayant conduit à son décès.

Elle conteste le partage de responsabilité relevé par l'expert judiciaire et retenu par le tribunal, critiquant sur ce point le rapport d'expertise, au motif que l'expert ne doit pas porter d'appréciation juridique, la juridiction n'étant, en tout état de cause, pas tenue par son avis.

Elle soutient qu'en cas d'oubli de compresse, la jurisprudence retient constamment la seule responsabilité du praticien libéral et non celle de l'infirmière qui se trouve sous l'autorité du chirurgien lors de l'intervention chirurgicale, le comptage des compresses constituant la suite immédiate de celle-ci, dont elle n'est pas dissociable.

La qualité de commettant et celle de préposé n'impliquent pas nécessairement une relation contractuelle, le critère étant celui du lien d'autorité et la jurisprudence retenant, pour le médecin, la qualité de commettant occasionnel à l'égard des personnes l'assistant lors d'un acte d'investigation ou de soins, qui sont temporairement soumises à son pouvoir de direction, même si elles sont salariées de l'établissement de santé où il exerce.

Par ailleurs, le contrat d'exercice libéral conclu avec le docteur [L] exclut tout lien de subordination de ce dernier à son égard donc toute responsabilité de sa part pour les fautes éventuellement commises par ce médecin. Elle n'est pas non plus responsable des décisions prises par le docteur [D], également praticien libéral, et d'un retard de diagnostic dans le cadre de la prise en charge du patient.

A titre subsidiaire, la Fondation de la Maison du Diaconat s'oppose à toute condamnation solidaire au motif que la solidarité ne se présume pas et que l'ensemble des défendeurs n'a pas concouru à l'entièreté du dommage.

La Fondation de la Maison du Diaconat conclut en revanche à la confirmation du jugement déféré concernant la perte de chance de 50 % d'éviter le dommage, au motif qu'il n'y a pas de lien direct et exclusif entre l'oubli de la compresse et l'endocardite et en raison de l'important état antérieur présenté par M. [R] [B] [P].

Le docteur [D] conteste toute responsabilité de sa part, en l'absence de lien de causalité entre le dommage et sa prise en charge.

Elle fait valoir que l'abcès profond sur textilome et l'endocardite infectieuse dont M. [R] [B] [P] a souffert préexistaient à sa prise en charge et que leurs conséquences ne peuvent donc lui être imputées. De plus, l'expert n'a pas retenu que son sursis à intervenir ait concouru au décès de M. [R] [B] [P] et il n'est pas établi qu'une chirurgie réalisée plus précocement aurait permis d'éviter le décès.

En outre, M. [R] [B] [P] n'est pas décédé des suites de l'infection, laquelle était jugulée, mais dans un contexte d'insuffisance cardiaque et de candidose systémique qui confirme le rôle partiel de l'infection dans son décès. Or, l'origine de la candidose n'est pas connue.

Le docteur [D] conteste également toute faute de sa part, rappelant qu'elle n'était tenue qu'à une obligation de moyens et que, malgré les observations de l'expert, elle n'avait aucun argument justifiant une intervention en urgence, dès le 9 octobre 2015, dans un contexte lourd et compliqué sur le plan cardio-vasculaire.

En effet, M. [R] [B] [P], qui souffrait d'insuffisance cardiaque, avait eu un arrêt cardio-respiratoire le 6 octobre et il était logique d'attendre sa stabilisation sur le plan cardiologique, l'expert observant lui-même que ses problèmes cardiaques n'incitaient pas à faire des gestes invasifs. De plus, le risque de mortalité peropératoire était très élevé, de 50 %, ce dont elle avait informé la famille, de même que le médecin anesthésiste. Elle souligne que l'expert a lui-même reconnu que, dans le contexte, il fallait prendre le temps de poser l'indication opératoire avec la famille et de peser les risques opératoires à mettre en balance avec le risque de décès, en cas de non-intervention.

De plus, le syndrome infectieux était stabilisé sous antibiothérapie, sans signe d'alarme particulier, l'expert ayant lui-même admis, dans sa réponse à son dire, que les signes cliniques et biologiques infectieux n'étaient pas alarmants.

Le docteur [D] conteste également toute condamnation solidaire dans la mesure où les mis en cause ne sont ni coauteurs ni coresponsables d'un même dommage, l'expert, qui avait initialement retenu une perte de chance de survie à sa charge, l'ayant finalement écartée dans sa réponse à son dire, pour ne retenir qu'une majoration des souffrances endurées correspondant aux quatre jours qui ont suivi sa décision et l'annonce à sa famille.

A titre subsidiaire, elle sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a fixé sa part de responsabilité à 10 %, soulignant que l'aggravation des souffrances endurées à laquelle elle aurait contribué est très limitée dans le temps.

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Selon l'article L.1142-1, I, alinéa 1er, du code de la santé publique, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins, ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

Selon l'alinéa 2 de ce même article, ces établissements, services et organismes sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère.

Dans la situation présente, il est établi qu'une compresse a été découverte dans l'abdomen de M. [R] [B] [P], précisément en fosse illiaque droite, lors d'examens réalisés fin septembre 2015, lors d'une quatrième hospitalisation depuis le 31 août 2015, suite au déclenchement de violents maux de ventre persistants, d'une asthénie et de troubles de la tension artérielle, notamment, chez une personne souffrant de troubles cardiaques préexistants. Il est également établi que cette compresse ne pouvait qu'avoir été oubliée lors d'une appendicectomie réalisée par le docteur [L] le 22 octobre 2011.

L'expert judiciaire a relevé que cet oubli est un dysfonctionnement dans l'acte chirurgical, car il appartient au chirurgien responsable de l'intervention, assisté de l'infirmière circulante de bloc opératoire, de vérifier le compte des compresses et de tout corps étranger utilisés pendant la procédure. L'infirmière doit en effet compter les compresses qu'elle donne au chirurgien et, à la fin de la procédure, elle doit vérifier que le compte de compresses que ce dernier lui rend correspond au compte de compresses données.

S'il est de la responsabilité du chirurgien de vérifier l'absence de compresses laissées en place dans la cavité abdominale, l'expert observe que celui-ci peut être induit en erreur par des difficultés opératoires, mais aussi par la fausse information de l'infirmière circulante qui lui signale que le compte de compresses est correct. En effet, l'expert souligne que, même s'il a autorité sur l'infirmière de bloc opératoire mise à sa disposition par la clinique, le chirurgien ne peut sortir de la zone stérile dans la mesure où il doit attendre le résultat de ce décompte pour refermer la plaie opératoire.

L'expert mentionne à ce titre la feuille de « check-list » du bloc opératoire préconisée par la Haute autorité de santé, laquelle, dans la situation présente, a été complétée par la mention « nombre de compresses : OK ».

Il en résulte que, selon l'expert, l'oubli de cette compresse est imputable à la fois au chirurgien, le docteur [L], praticien libéral, et à l'infirmière aide opératoire, salariée, dont doit répondre son commettant.

L'expert relève que cet oubli est la cause la plus probable d'un abcès profond, dont les conséquences peuvent être une infection sévère, avec endocardite infectieuse responsable d'une décompensation cardiaque, chez un patient initialement fragile d'un point de vue cardio-vasculaire. Le diagnostic d'endocardite infectieuse a précisément été confirmé par le résultat des hémocultures, positives à « streptococcus sanguinis » multi sensible avec atteinte cardiaque des valves et syndrome fébrile.

S'il n'a pas été possible de confirmer que le germe à l'origine de l'infection était le même que celui du textilome en cause, faute de prélèvement et d'examen bactériologique de la collection autour de la compresse, l'expert relève que le tableau clinique est « avec une quasi-certitude » en faveur d'un sepsis profond sur corps étranger digestif, qui a d'ailleurs orienté l'équipe soignante, et en particulier le docteur [D], en faveur d'une intervention à bref délai afin d'extraire le textilome, et ce malgré l'état cardiaque antérieur fragile.

Il en résulte que cet oubli de compresse dans la fosse iliaque du patient, lors de l'intervention chirurgicale du 22 octobre 2011, est directement à l'origine de l'infection qui a rendu nécessaire une nouvelle intervention risquée du fait de la majoration des troubles cardiaques provoquée par l'infection, et que les fautes conjuguées du chirurgien et de l'infirmière circulante du bloc opératoire, lors de l'appendicectomie de 2011, sont toutes deux à l'origine des différents préjudices invoqués par les appelants, et notamment d'une perte de chance de survie de M. [R] [B] [P] que la cour évalue à 50 %, comme l'a fait le tribunal.

De plus, si l'état cardiaque du patient était très fragile et si ce dernier avait subi un arrêt cardio-circulatoire lors d'une échographie transoesophagienne pratiquée sous anesthésie générale le 5 octobre 2015, l'expert relève que le médecin anesthésiste réanimateur avait, le 8 octobre à 17 heures, donné un avis favorable pour une chirurgie sous anesthésie générale qui aurait dû être réalisée idéalement le matin du 9 octobre, au vu du diagnostic posé par le chirurgien et du risque de décompensation cardiaque brutale.

En effet, l'expert a souligné que l'état cardiaque altéré était la conséquence de l'état antérieur, mais aussi de l'infection profonde qui ne pouvait être résorbée que par l'ablation du corps étranger vraisemblablement infecté.

Or, le patient était à tout moment susceptible de décompenser, ayant présenté deux arrêts cardiaques et la précarité de son état cardio-vasculaire étant entretenue par le sepsis profond.

Effectivement, la nuit du 13 au 14 octobre 2015, qui précédait la date de l'intervention finalement prévue par le docteur [D], l'intensité des douleurs de M. [R] [B] [P] s'est accentuée, au point de justifier la prescription de morphine, et un arrêt cardiaque a suivi, entraînant son transfert en unité de soins intensifs et, suite à une réanimation réalisée avec succès, son transport au Centre hospitalier de [Localité 14], en réanimation chirurgicale, où il est décédé le [Date décès 8] 2015, sans qu'ait eu lieu l'intervention prévue.

Ainsi, si, comme l'a souligné l'expert, la part prédominante de l'oubli initial du textilome doit être retenue, et s'il retient comme imputable au docteur [D] une majoration des souffrances endurées entre la décision d'opérer et l'annonce à la famille et la survenue du dernier arrêt cardiaque du 14 octobre 2015, admettant la difficulté de la décision incombant au docteur [D], il apparaît cependant que le retard dans la mise en 'uvre de l'intervention chirurgicale décidée par ce chirurgien est constitutif d'une faute qui a manifestement contribué à l'ensemble des préjudices subis par le patient.

En effet, l'expert a bien relevé que l'infection profonde aggravait les troubles cardiaques de M. [R] [B] [P] et qu'elle ne pouvait être résorbée que par l'extraction de la compresse, et il maintient au final la perte de chance de survie du patient de 50 %.

Au vu de tous les éléments relevés ci-dessus, les fautes respectives du docteur [L], de l'infirmière circulante du bloc opératoire intervenue le 22 octobre 2011 et du docteur [D] ont toutes directement contribué à l'ensemble des préjudices subis par M. [R] [B] [P], celles liées à l'oubli de la compresse étant directement à l'origine de l'infection et de la nécessité d'une nouvelle intervention à risque, compte tenu des troubles cardiaques constituant l'état antérieur du patient et de la majoration de ces mêmes troubles cardiaques. Mais celle liée au retard de l'intervention destinée à l'extraction de cette compresse y a également contribué, même dans une bien moindre mesure et seulement à compter de la date à laquelle l'intervention aurait dû avoir lieu.

S'agissant du commettant de l'infirmière de bloc opératoire intervenue le 22 octobre 2011, qui seul doit encourir la responsabilité résultant de la faute de cette dernière dans l'exercice de sa mission, il doit être rappelé que celle-ci était salariée de la Fondation de la Maison du Diaconat, qui l'avait mise à disposition du docteur [L], chirurgien libéral, pour l'intervention réalisée par ce dernier à cette date sur la personne de M. [R] [B] [P]. Le comptage des compresses utilisées lors de cette intervention, ainsi que l'a expliqué l'expert et que l'a souligné le tribunal, relève des attributions de l'infirmier ou de l'infirmière titulaire du diplôme d'État en bloc opératoire, qui consistent en priorité, d'après l'article R.4311-11 du code de la santé publique, notamment en la gestion des risques liés à l'activité et à l'environnement opératoire.

De plus, la « check-list Sécurité du patient au bloc opératoire » remplie le 22 octobre 2011, bien que non signée, mentionne, concernant la phase « Après intervention », qu'un « oui » a été coché, s'agissant de la « Confirmation orale par le personnel, auprès de l'équipe, du compte final correct des compresses, aiguilles, instruments, etc... », ce qui tend à établir une compétence autonome du pouvoir du chirurgien, à ses côtés, dans les opérations de vérification relatives aux compresses utilisées, ce qui n'est guère compatible avec la qualité de commettant occasionnel du chirurgien, le temps de l'intervention, concernant cette tâche particulière. C'est pourquoi la responsabilité de la Fondation de la Maison du Diaconat est engagée, en sa qualité de commettant de l'infirmière en cause, qu'elle n'a pas cessé d'être concernant cette tâche spécifique.

Si l'ensemble de ces fautes qui ont concouru à l'entier dommage de M. [R] [B] [P] et de sa famille entraîne l'obligation à indemnisation in solidum des docteurs [L] et [D] et de la Fondation de la Maison du Diaconat, la répartition entre eux de la responsabilité des dommages causés doit s'effectuer, au vu de leurs fautes respectives, à hauteur de 45 % pour le docteur [L], de 45 % pour la Fondation de la Maison du Diaconat et de 10 % pour le docteur [D], comme l'a retenu le tribunal.

II ' Sur la réparation des préjudices

A - Sur les préjudices de M. [R] [B] [P], victime directe

Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], et ses enfants, M. [R] [I] [G] [P], Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], et Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], en leur qualité d'ayants droit de M. [R] [B] [P], reprochent au tribunal d'avoir divisé par deux l'ensemble des postes de préjudices, au motif que la perte de chance de survie de M. [R] [B] [P] n'aurait été que de 50 %, compte tenu de son état antérieur et de son âge. Ils déplorent une interprétation erronée, à ce titre, du rapport d'expertise qui a seulement indiqué que, si le docteur [D] n'avait pas tardé à intervenir pour extraire la collection infectieuse, M. [R] [B] [P] aurait eu une chance sur deux de survivre à cette opération, ce qui ne concerne que la responsabilité de ce chirurgien dont la faute d'avoir tardé à opérer a fait perdre une chance de survie à M. [R] [B] [P] estimée à 50 %.

Ils soutiennent que les fautes imputables au docteur [L] et à la Fondation de la Maison du Diaconat sont à l'origine de 100 % du préjudice, dans la mesure où, sans l'oubli de compresses, il n'y aurait pas eu d'infection. L'expert n'a jamais entendu les exonérer de 50 % de leur responsabilité et diviser par deux l'ensemble des préjudices du défunt et des ayants droit.

Par ailleurs, l'état antérieur de M. [R] [B] [P] n'a aucune incidence en l'espèce, n'étant pas à l'origine du décès.

Le docteur [L] soutient que le taux de perte de chance de 50 % doit bien s'appliquer à l'ensemble des préjudices en lien avec le décès de M. [R] [B] [P], dans la mesure où, selon l'expert, aucune preuve matérielle ne permet d'objectiver de façon certaine le lien de causalité entre l'oubli d'une compresse, le 22 octobre 2011, lors de l'appendicectomie réalisée en urgence, et le sepsis profond présenté par M. [R] [B] [P] en 2015.

La Fondation de la Maison du Diaconat et le docteur [D] adoptent la même position.

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S'il y a lieu de retenir un taux de perte de chance de survie, au sens d'une perte de chance de ne pas décéder, de 50 %, au vu du rapport d'expertise judiciaire, cette perte de chance n'a pas lieu de s'appliquer à tous les postes de préjudice en cause, qu'il convient d'examiner l'un après l'autre.

1°) Sur la « perte de chance de survie »

Le tribunal a retenu une « perte de chance de ne pas décéder » de 50 % qu'il a indemnisée à hauteur de 10 000 euros, au regard de l'état de santé antérieur de la victime, âgée de 79 ans et présentant de lourdes comorbidités, à savoir un tabagisme actif, une hypertension artérielle, une insuffisance cardiaque globale, une surcharge pondérale, un syndrome du sommeil sévère appareillé et enfin des risques de décès per-opératoire évalués à 50 %.

Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], M. [R] [I] [G] [P], Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], et Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], invoquent une souffrance morale de M. [R] [B] [P] corrélative à la conscience de sa prochaine et inéluctable disparition et ils soutiennent que c'est à juste titre que le tribunal a admis une évaluation de ce préjudice à 20 000 euros, mais que c'est à tort qu'il n'a finalement fixé qu'une somme de 10 000 euros à ce titre, en appliquant une décote de 50 %, qui ne pourrait être invoquée tout au plus que par le docteur [D].

Ils ajoutent que, contrairement à ce que soutient la Fondation de la Maison du Diaconat, M. [R] [B] [P] a souffert pendant plusieurs jours avant son décès, dont il avait pressenti et craint la venue.

Sur le préjudice moral lié à la conscience de la mort imminente, le docteur [L] soutient que la jurisprudence refuse de l'indemniser de manière séparée des souffrances endurées et qu'il a été pris en compte au titre de l'indemnisation de ce poste de préjudice. De plus, il ajoute que, très récemment, par un arrêt du 23 novembre 2017, la Cour de cassation a rejeté l'indemnisation du préjudice relatif à la perte de chance de survie.

La Fondation de la Maison du Diaconat soutient que la perte de chance de survie ne peut être analysée comme un préjudice distinct des souffrances endurées, qui incluent le préjudice d'angoisse de mort imminente. De plus, dans la situation de M. [R] [B] [P], il ne s'agissait pas d'une personne consciente de sa disparition prochaine inéluctable.

Le docteur [D] soutient que la perte de chance de survie ne peut être analysée comme un préjudice distinct, mais comme une notion permettant de retenir le principe de la responsabilité des trois défendeurs, qui doit s'appliquer sur l'ensemble des postes de préjudices. À titre subsidiaire, si la cour retenait l'existence d'un préjudice lié à la conscience d'une mort imminente, elle fait valoir qu'il s'agit d'un préjudice d'angoisse intégré dans le pretium doloris.

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Il résulte des écritures des ayants droits de M. [R] [B] [P] que le préjudice relatif à la « perte de chance de survie » dont ils sollicitent réparation recouvre en réalité le préjudice d'angoisse de mort imminente, et qu'il ne s'agit pas de la perte de chance de ne pas décéder retenue par le tribunal. Il s'agit d'un préjudice résultant directement des fautes retenues plus haut et, contrairement aux explications de la Fondation de la Maison du Diaconat, la Cour de cassation, depuis un arrêt de la chambre mixte du 25 mars 2022, admet désormais sa réparation de façon autonome au regard du préjudice relatif aux souffrances endurées.

Concernant M. [R] [B] [P], l'expert a retenu un tel préjudice, qu'il a qualifié de « peur de mourir » et intégré dans les souffrances endurées.

Il convient donc, au vu de la jurisprudence la plus récente de la Cour de cassation, de l'examiner distinctement des souffrances endurées, étant souligné à ce titre que, durant sa dernière hospitalisation, du 26 septembre jusqu'à son décès survenu le [Date décès 8] 2015, M. [R] [B] [P] a subi deux arrêts cardiaques, le 5 octobre puis le 14 octobre à la suite duquel il a été transféré à l'hôpital [13] pour une éventuelle intervention chirurgicale, en raison des risques élevés liés à celle-ci.

Le 10 octobre 2015, sa famille a été reçue par le docteur [D] qui l'a informée d'une chance de survie post-opératoire de 50 % seulement, ce dont il a lui-même pu être informé. En tout état de cause, il a pu lui-même mesurer le risque de mourir, compte tenu de la dégradation de son état et des arrêts cardiaques subis, puis en voyant l'intervention chirurgicale qu'il souhaitait sans cesse reportée, étant rappelé que, selon l'expert, il avait signé l'autorisation d'opérer le 27 septembre 2015 et exprimé le 6 octobre 2015, à la suite de son arrêt cardiaque, son souhait d'un « traitement radical du textilome intra-abdominal ». Puis il n'a pu que prendre conscience de l'approche de sa mort durant la détérioration de son état jusqu'à son décès, survenu 17 jours après son transfert au centre hospitalier [13].

Un tel préjudice, lié à la nécessité d'une nouvelle intervention qui n'a finalement pas eu lieu, justifie une indemnisation à hauteur de 10 000 euros qui doit être versée aux ayants droit du patient, sans qu'il y ait lieu d'appliquer une quelconque perte de chance de ne pas décéder. En effet, il s'agit là d'un préjudice autonome, distinct de celui résultant de cette perte de chance. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a alloué un tel montant au titre de « la perte de chance de survie », mais il sera précisé qu'il s'agit en réalité de la réparation du préjudice d'angoisse de mort imminente.

2°) Sur les souffrances endurées

S'agissant des souffrances endurées, le tribunal a tenu compte de leur évaluation par l'expert, à savoir 6/7 au regard de quatre hospitalisations, de ce que M. [R] [B] [P] avait présenté une grande fatigue, une fièvre, des douleurs abdominales prolongées, une peur de mourir avec des problèmes cardiaques importants et deux arrêts cardiaques au cours de l'hospitalisation. Auparavant, de 2011 à 2015, il a évoqué des douleurs abdominales chroniques dont le lien avec la compresse n'était pas certain, en raison de la présence d'une diverticulose sigmoïdienne chronique.

Seule la demande des héritiers directs, soit l'épouse et les enfants, pouvait être accueillie.

Les ayants droits de M. [R] [B] [P], qui sollicitent un montant de 50 000 euros au titre de ce poste de préjudice, reprochent au tribunal d'avoir, sans appliquer la décote de 50 % au titre de la perte de chance, divisé par deux la demande, alors que les conclusions de l'expert précisent bien que les souffrances endurées retenues sont celles directement en lien avec les fautes reprochées aux défendeurs.

Le docteur [L] sollicite la confirmation du jugement déféré sur le montant de 25 000 euros retenu, avec cependant une infirmation en ce qu'il n'a pas pris en compte le taux de perte de chance de 50 %, alors qu'il a admis, s'agissant des douleurs abdominales chroniques, que le lien avec la compresse était possible mais pas certain car le patient avait aussi une diverticulose sigmoïdienne chronique.

La Fondation de la Maison du Diaconat fait valoir qu'elle n'est pas responsable de la majoration des souffrances endurées retenues par l'expert, résultant de la décision du docteur [D] et correspondant aux quatre jours entre cette décision annoncée à la famille le 10 octobre 2015 et la survenue du dernier arrêt cardiaque, le 14 octobre 2015. Elle fait valoir que l'expert retient une responsabilité prépondérante du docteur [D] sur ce point et estime ne devoir prendre en charge que 25 % des montants qui seront attribués au titre de ce poste de préjudice, le tribunal ayant commis une erreur en retenant 50 % à sa charge.

Par ailleurs, elle soutient que le taux des souffrances endurées retenu par l'expert est surévalué, de même que la somme allouée à ce titre par le premier juge, un montant de 25 000 euros étant satisfactoire, y compris pour des souffrances endurées de 6/7, ainsi que l'ont retenu différentes juridictions. Elle estime ne pas devoir assumer une somme supérieure à 6 250 euros à ce titre.

Le docteur [D] soutient qu'à le supposer démontré, le retard thérapeutique de quatre jours que lui impute l'expert n'a pas été la cause déterminante des souffrances endurées et que la fraction de ce préjudice mise à sa charge ne pourrait excéder un tiers de l'estimation retenue par l'expert, soit 2/7, l'indemnisation ne pouvant excéder la somme de 4 000 euros au regard des barèmes habituels.

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L'expert judiciaire a effectivement évoqué, au titre des séquelles de l'oubli de la compresse dans le corps de M. [R] [B] [P], des douleurs abdominales chroniques de 2011 à 2015, dont la cause ne peut cependant être rattachée à 100 % à ladite compresse, car le patient était porteur d'une sigmoïdite chronique.

Cependant, il a clairement retenu, au titre des souffrances endurées consécutives à cet oubli de la compresse, les différents éléments retenus par le tribunal, évoqués plus haut.

Il est à noter que les souffrances ont été telles qu'elles ont entraîné l'injection de morphine, notamment la nuit du 14 octobre 2015. Cependant, pour évaluer ces souffrances endurées au taux de 6/7, l'expert a également retenu la peur de mourir, alors qu'un montant est alloué séparément à ce titre aux ayants droit du patient. C'est pourquoi il ne peut être tenu compte de ce taux. Cependant, l'intensité des souffrances endurées par M. [R] [B] [P] au cours de l'été 2015 puis au cours des mois de septembre et octobre 2015, jusqu'à son décès, le [Date décès 8] 2015, justifie l'octroi d'un montant de 40 000 euros à ce titre, qui devra être versé à ses ayants droits sans application d'un taux de perte de chance. En effet, il s'agit là d'un préjudice découlant de l'infection et de ses conséquences et de l'absence de mise en oeuvre de l'intervention décidée par le docteur [D]. Le jugement déféré sera donc infirmé quant au montant alloué au titre de ce poste de préjudice, au profit du montant de 40 000 euros.

B - Sur les préjudices des victimes par ricochet

1°) Sur les préjudices de l'épouse, Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P],

* Sur le préjudice d'affection

Le tribunal a retenu le montant de 10 000 euros proposé par la Fondation de la Maison du Diaconat, au regard de la perte de chance de 50 %.

Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], sollicite un montant de 40 000 euros en réparation de ce préjudice, reprochant au tribunal d'avoir appliqué l'abattement de 50 % au titre d'une perte de chance. De plus, le montant alloué habituellement au conjoint, en réparation de son préjudice d'affection, en cas de décès de l'autre conjoint, est sensiblement supérieur à 20 000 euros.

Le docteur [L] et la Fondation de la Maison du Diaconat sollicitent la confirmation du jugement déféré sur ce chef.

Le docteur [D] fait valoir que les barèmes habituels prévoient une indemnisation du préjudice d'affection à hauteur de 15 000 euros, montant auquel il convient d'appliquer, outre la perte de chance de 50 %, le taux de responsabilité de 10 %, comme l'a fait à juste titre le tribunal.

*

Le préjudice d'affection est le préjudice moral dû à la souffrance causée par le décès d'un proche. Comme l'a relevé le tribunal, Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], a été mariée avec M. [R] [B] [P] durant plus de 54 ans et, au vu de la durée de leur vie commune, il y a lieu de fixer ce poste de préjudice au montant de 30 000 euros, soit 15 000 euros à allouer à l'appelante, après application du taux de perte de chance de ne pas décéder de 50 %. Le jugement déféré sera donc infirmé quant au montant alloué au titre de ce poste de préjudice, au profit du montant de 15 000 euros.

Sur le préjudice d'accompagnement

Le tribunal a tenu compte de la date d'apparition des problèmes de santé, des hospitalisations, de la date de décès et du taux de perte de chance retenu.

Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], qui sollicite un montant de 5 000 euros, reproche au tribunal l'application du taux de perte de chance, soulignant qu'elle est d'autant moins pertinente qu'il s'agit d'un préjudice subi avant le décès, comme le pretium doloris, auquel le tribunal n'a pas appliqué ce taux.

Le docteur [L] sollicite la confirmation du jugement déféré sur ce chef.

La Fondation de la Maison du Diaconat soutient que la demande de Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], n'est pas fondée et que le tribunal a omis de prendre en compte le critère des troubles dans les conditions d'existence, alors que ce poste de préjudice traduit précisément les troubles dans les conditions d'existence d'un proche qui apporte à la victime le réconfort d'une présence affectueuse.

Le docteur [D] sollicite que soit retenu le montant de 1 500 euros auquel doit être appliqué le taux de responsabilité de 10 %.

*

Ainsi que l'observe la Fondation de la Maison du Diaconat, le préjudice d'accompagnement indemnise le préjudice moral subi par les proches de la victime pendant la maladie traumatique jusqu'à son décès, s'agissant du préjudice résultant des troubles dans les conditions d'existence pour les proches qui partageaient habituellement une communauté de vie affective et effective avec le défunt, pendant cette période.

Le préjudice subi à ce titre par Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P] n'est pas contestable. Il justifie l'octroi d'un montant de 5 000 euros, sans application d'un taux de perte de chance de ne pas décéder. En effet, il s'agit là d'un préjudice subi antérieurement au décès, découlant de l'infection et de ses conséquences ainsi que de l'absence de mise en oeuvre de l'intervention décidée par le docteur [D]. Le jugement déféré sera donc infirmé quant au montant alloué à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P] au titre de ce poste de préjudice, au profit du montant de 5 000 euros.

Sur le préjudice relatif à la perte de revenus

Le tribunal a retenu des revenus du couple d'un montant total de 18 320 euros en 2014, dont 7 121 euros pour Madame, une part d'autoconsommation de M. [R] [B] [P] de 40 %, soit 7 328 euros à déduire, de même que les revenus du conjoint survivant, soit un solde de perte annuelle de 3 871 euros, auquel il a appliqué l'euro de rente du conjoint ayant l'espérance de vie la plus faible, puis le taux de perte de chance retenu.

Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], critique l'application du taux de perte de chance, ainsi que la part d'autoconsommation de M. [R] [B] [P], qu'elle évalue à 20 %, sollicitant un montant de 62 582,85 euros.

Le docteur [L] sollicite la confirmation du jugement déféré sur ce chef.

La Fondation de la Maison du Diaconat sollicite la confirmation du jugement sur ce chef, soulignant que la part d'autoconsommation du défunt de 40 % est conforme à la jurisprudence habituelle. Elle précise qu'il y aura lieu de déduire du montant accordé à ce titre l'éventuel capital décès servi par la CPAM et que le montant retenu sera pris en compte par le biais de la table de capitalisation ONIAM INSEE 2006-2008.

Le docteur [D] observe qu'il n'est pas communiqué d'information sur le versement d'un éventuel capital décès par la CPAM, qui devrait être déduit de la somme attribuée à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], à ce titre. Par ailleurs, la part d'autoconsommation retenue par les consorts [P] est particulièrement basse et elle suggère de retenir 40 %, l'indemnisation totale ne devant excéder 29 249,67 euros à laquelle doit être appliqué le taux de perte de chance de 50 % ainsi que le taux de responsabilité de 10 %.

*

Il n'est pas démontré qu'un capital ait été versé par la CPAM, un tel capital n'ayant, en tout état de cause, pas lieu d'être pris en compte au titre des ressources de la veuve de M. [R] [B] [P]. Par ailleurs, la part d'autoconsommation de ce dernier retenue par le tribunal apparaît justifiée, dans la mesure où les époux [P] n'avaient pas d'enfant à charge et où il n'est pas évoqué de charge de loyer du couple. Enfin, il n'y a pas lieu d'appliquer une autre table de capitalisation que celle utilisée par le tribunal.

C'est pourquoi il convient de confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives à la perte de revenus subie par Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], du fait du décès de son époux.

2°) Sur le préjudice des enfants de M. [R] [B] [P], Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], M. [R] [I] [G] [P] et Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A]

Sur le préjudice d'affection des enfants de M. [R] [B] [P], le tribunal a, pour leur allouer la somme de 6 000 euros chacun, après application du taux de perte de chance, tenu compte de ce que, majeurs, ils ne justifiaient pas avoir toujours eu leur résidence au domicile de leur père.

Sur leur demande au titre du préjudice d'accompagnement, le tribunal a relevé que les enfants ne justifiaient pas d'un préjudice moral, dû au bouleversement de leurs conditions d'existence en raison de l'état de la victime directe jusqu'à son décès.

Les trois enfants de M. [R] [B] [P], qui sollicitent un montant de 30 000 euros chacun au titre du préjudice d'affection, soutiennent qu'il n'y avait pas lieu d'appliquer une réfaction de 50 % et qu'on ne souffre pas moins de la disparition de son père parce qu'on ne vit pas sous son toit.

Par ailleurs, ils sollicitent un montant de 5 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement, soutenant avoir accompagné leur père dans ses derniers jours, s'étant rendus à son chevet à l'hôpital où il a longtemps séjourné avant son décès, et y ayant parfois dormi pour être à ses côtés.

Le docteur [L] sollicite la confirmation du jugement déféré sur ce chef, de même que la Fondation de la Maison du Diaconat et le docteur [D], qui demande également, la concernant, l'application d'un taux de responsabilité de 10 % pour le préjudice d'affection.

Sur le préjudice d'accompagnement, le docteur [D] sollicite la confirmation du jugement dont elle reprend les motifs, demandant subsidiairement que soit retenu un montant de 3 000 euros avec application du taux de responsabilité de 10 %.

*

Concernant le préjudice d'affection des enfants de M. [R] [B] [P], il convient d'observer que le docteur [D], dans son compte-rendu d'hospitalisation daté du 14 octobre 2105, a évoqué notamment une longue discussion avec les enfants et gendres de M. [R] [B] [P]. De plus, diverses attestations de témoignage sont désormais versées aux débats, de nature à démontrer la grande proximité affective de Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], et de la famille de cette dernière avec son père, étant évoquées une aide administrative apportée par elle à ses parents, les vacances partagées la plupart du temps avec eux, la présence de M. [R] [B] [P] et de son épouse aux différentes fêtes de famille, anniversaires, de fréquentes visites réciproques ainsi qu'un investissement très important de Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], auprès de lui jusqu'à son décès.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de fixer le préjudice d'affection de Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], au montant de 16 000 euros, ce qui justifie de lui allouer 8 000 euros après application du taux de perte de chance de ne pas décéder de 50 %, et de fixer au montant de 12 000 euros celui de son frère et de sa s'ur, ce qui justifie de leur allouer la somme de 6 000 euros chacun, après application du même taux de perte de chance, comme l'a fait le tribunal. Le jugement déféré sera donc infirmé uniquement quant au montant alloué à Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], au titre de ce poste de préjudice, au profit du montant de 8 000 euros.

S'agissant du préjudice d'accompagnement, en l'absence de communauté de vie effective entre M. [R] [B] [P] et ses enfants, qui est une condition nécessaire à la réparation de ce poste de préjudice, il ne peut être fait droit à la demande de ces derniers et le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

3°) Sur le préjudice des petits-enfants de M. [R] [B] [P], [F] et [V] [T], [S] et [U] [A]

S'agissant de leur préjudice d'affection, le tribunal a retenu qu'aucune pièce justificative n'était produite sur la régularité des relations entre chacun des petits-enfants et la victime directe, pour allouer la somme de 1 500 euros à chacun d'eux.

Les petits-enfants de M. [R] [B] [P], qui sollicitent un montant de 15 000 euros chacun, soutiennent qu'ils entretenaient des relations fréquentes avec leur grand-père, que le montant alloué par le tribunal est très en deçà de la jurisprudence habituelle en la matière et qu'il a appliqué à tort une décote de 50 %.

Le docteur [L] et la Fondation de la Maison du Diaconat sollicitent la confirmation du jugement sur ce point, de même que le docteur [D], qui demande l'application du taux de responsabilité de 10 %.

*

Les éléments du dossier font apparaître la famille [P] comme une famille unie. De plus, des amis de M. [S] [A] témoignent, par des attestations circonstanciées, de liens d'affection particuliers entre ce dernier et son grand-père maternel, qui l'emmenait aux entraînements et matches de football, venait le voir jouer, son petit-fils allant lui-même lui rendre visite à bicyclette. Ils évoquent l'importance de son grand-père pour leur ami qui parlait beaucoup de lui et le rend encore très présent, son décès demeurant encore difficile à surmonter pour lui.

Au vu de ces éléments, le préjudice d'affection de M. [S] [A] doit être fixé au montant de 10 000 euros, ce qui conduit à lui allouer la somme de 5 000 euros après application du taux de perte de chance de ne pas décéder de 50 %. Celui des autres petits-enfants, [F] et [V] [T] et [U] [A] sera fixé au montant de 6 000 euros, ce qui conduit à allouer à chacun d'eux la somme de 3 000 euros après application du même taux de perte de chance. Le jugement déféré sera donc infirmé quant au montant alloué à chacun des petits-enfants au titre de ce poste de préjudice, au profit de ces montants.

4°) Sur le préjudice des gendres, MM. [M] [T] et [J] [A]

Le tribunal a rejeté la demande des gendres au titre d'un préjudice d'affection, au motif que ces parents, plus éloignés que les précédents, devaient, pour obtenir réparation, justifier de ce qu'ils entretenaient des liens affectifs réguliers avec la victime directe.

Les gendres de M. [R] [B] [P], qui sollicitent un montant de 10 000 euros chacun au titre de leur préjudice d'affection, suite à son décès, soutiennent qu'ils l'ont côtoyé pendant de nombreuses années et qu'ils entretenaient avec lui des liens affectifs réguliers.

En l'absence de preuve d'un tel lien, le docteur [L] sollicite la confirmation du jugement déféré sur ce point, tout comme la Fondation de la Maison du Diaconat, de même que le docteur [D], qui souligne que les gendres de M. [R] [B] [P] ne justifient toujours pas de liens affectifs réguliers avec ce dernier.

Subsidiairement, s'ils en justifiaient, cette dernière demande une réduction du montant sollicité avec application du taux de perte de chance de 50 % et du taux de responsabilité de 10 %.

*

Le compte-rendu d'hospitalisation du docteur [D] mentionné plus haut rapportait la participation des gendres de M. [R] [B] [P] dans la longue discussion qu'il évoquait, ce qui traduit un investissement affectif certain de ces derniers auprès de leur beau-père.

De plus, M. [J] [A] produit des attestations décrivant sa grande proximité avec M. [R] [B] [P], qu'il fréquentait très régulièrement et qu'il a accompagné jusqu'à son décès.

Il résulte de ces éléments qu'il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande des deux gendres du patient au titre de ce poste de préjudice, ainsi que de fixer le préjudice d'affection de M. [J] [A] au montant de 4 000 euros et celui de M. [M] [T] au montant de 3 000 euros et de leur allouer respectivement les sommes de 2 000 euros et de 1 500 euros après application du taux de perte de chance de 50 %.

III ' Sur le point de départ des intérêts légaux

Toutes les condamnations à des dommages et intérêts prononcées par le présent arrêt seront assorties des intérêts au taux légal. S'agissant de créances indemnitaires, ces intérêts ne peuvent courir à compter de la demande, en application de l'article 1231-7 du code civil. Mais, en considération de la nature et de l'ancienneté du litige, ils seront dus à compter du jugement déféré.

IV - Sur l'appel en garantie de la Fondation de la Maison du Diaconat

Compte tenu des responsabilités respectives retenues, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a accueilli la demande de la Fondation de la Maison du Diaconat au titre de ses appels en garantie dirigés à l'encontre des docteurs [L] et [D] à hauteur de 45 % pour le premier et de 10 % pour la seconde.

V ' Sur l'opposabilité du présent arrêt à la CPAM du Haut-Rhin

Le présent arrêt sera déclaré commun et opposable à la CPAM du Haut-Rhin, régulièrement citée à hauteur de cour, comme elle l'avait été en première instance.

VI ' Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement déféré étant confirmé pour une grande part en ses dispositions principales, il le sera également en celles relatives aux dépens et aux frais exclus des dépens de première instance.

Pour les mêmes motifs, les condamnations des intimés étant confirmées en leur principe, voire aggravées, ces derniers seront condamnés in solidum aux dépens d'appel qui incluront ceux de l'appel en garantie, lequel n'est accueilli que partiellement au vu du partage de responsabilité.

Par ailleurs, les intimés seront condamnés à verser, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes de 1 500 euros à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], et de 500 euros à chacun des autres appelants, au titre des frais non compris dans les dépens engagés en appel, leurs propres demandes sur ce fondement étant rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,

CONFIRME, dans les limites des appels principaux et incidents, le jugement rendu entre les parties par le tribunal judiciaire de Mulhouse le 21 juillet 2020, sauf en ses dispositions relatives aux sommes allouées au titre des souffrances endurées par M. [R] [B] [P], du préjudice d'accompagnement de Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], ainsi que du préjudice d'affection de Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], M. [V] [T], M. [F] [T], M. [S] [A] et de Mme [U] [A], et en ce qu'il a rejeté les demandes de M. [J] [A] et de M. [M] [T] au titre de leur préjudice d'affection,

INFIRME le jugement entrepris de ces chefs,

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

DIT que le montant alloué au titre de la perte de chance de survie de M. [R] [B] [P] par le jugement déféré recouvre en réalité le préjudice d'angoisse de mort imminente,

CONDAMNE in solidum le docteur [Z] [L], le docteur [O] [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat à payer :

- à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], M. [R] [I] [G] [P], Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], et Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], en leur qualité d'ayants droit de M. [R] [B] [P], la somme de 40 000 (quarante mille) euros au titre des souffrances endurées par M. [R] [B] [P], augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020,

- à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], les sommes de :

* 15 000 (quinze mille) euros au titre de son préjudice d'affection,

* 5 000 (cinq mille) euros au titre de son préjudice d'accompagnement,

le tout augmenté des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020,

- à Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], la somme de 8 000 (huit mille) euros au titre de son préjudice d'affection, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020,

- à M. [F] [T], M. [V] [T] et Mme [U] [A] la somme de 3 000 (trois mille) euros, chacun, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020, au titre de leur préjudice d'affection,

- à M. [S] [A] la somme de 5 000 (cinq mille) euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020, au titre de son préjudice d'affection,

- à M. [J] [A] la somme de 2 000 (deux mille) euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020, au titre de son préjudice d'affection,

- à M. [M] [T] la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2020, au titre de son préjudice d'affection,

DECLARE le présent arrêt commun et opposable à la CPAM du Haut-Rhin,

CONDAMNE in solidum le docteur [Z] [L], le docteur [O] [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat aux dépens d'appel, qui incluent ceux des appels en garantie de la Fondation de la Maison du Diaconat,

CONDAMNE in solidum le docteur [Z] [L], le docteur [O] [D] et la Fondation de la Maison du Diaconat à régler à Mme [B] [R] [X] [G], veuve [P], la somme de 1 500,00 (mille cinq cents) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et la somme de 500,00 (cinq cents) euros, chacun, à Mme [N] [H] [G] [P], épouse [T], Mme [B] [E] [G] [P], épouse [A], M. [R] [I] [G] [P], M. [V] [T], M. [F] [T], M. [M] [T], M. [J] [A], M. [S] [A], Mme [U] [A] sur le même fondement,

REJETTE les demandes du docteur [Z] [L], du docteur [O] [D] et de la Fondation de la Maison du Diaconat présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 2 a
Numéro d'arrêt : 20/02851
Date de la décision : 21/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-21;20.02851 ?
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